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Mali : « Nous avons fait le choix d’être sincères afin de prendre notre destin en main », déclare Assimi Goïta

12 janvier 2022, 14:12, par Sidpawalemde Sebgo

Non, non, ce n’est pas un subterfuge mais une action bien planifiée.

La CEDEAO voyait venir le moment où la junte malienne n’allait pas tenir parole sur la date des élections. Elle doutait aussi des déclarations du premier ministre Chogel Maiga qui, en Septembre Dernier après son discours choc à l’ONU, parlait d’un glissement du calendrier électoral de "deux semaines, deux mois, des mois".

Ils ont visiblement eu raison d’ailleurs, car le calendrier initial prévoyait des élections couplées présidentielles et législatives en Février 2022, à charge pour les nouvelles autorité d’organiser les autres réformes et élections.
Au lieu de ça, la junte est revenue avec un calendrier étalant toutes les élections possibles séparément jusqu’à la dernière, la présidentielle en fin 2026. En d’autre termes, Goita reste jusqu’en 2026, ce qui lui fera un septennat (6,5 ans) au pouvoir.

Ils ont donc anticipé sur les actions qu’ils pouvaient poser pour faire pression sur la junte. Visiblement, la CEDEAO ne pouvait pas grand chose en dehors de la fermeture des frontières, alors ils ont pensé au précédant ivoirien.

Au motif que Gbagbo, ayant perdu les élections, avait perdu le droit de signer pour des décaissement de la BCEAO, l’accès aux comptes du pays lui avaient été retirés et donné à Alassane Dramane Ouattara. Cela avait précipité sa chute.
Dans la même idée, si on ne reconnait pas la légitimité de Assimi Goita et de son ministre de l’économie et des finances, on peut bloquer leur accès aux comptes. Sauf que comme vous l’avez relevé, la CEDEAO n’a pas ce pouvoir.

Mais l’UEMOA si. Et comme, ça tombe bien, tous les huit pays de l’UEMOA sont aussi membres de la CEDEAO, il a suffit de convoquer un autre sommet, pour prendre ces décisions. Si vous regardez bien, vous verrez que le rapport du sommet de la CEDEAO ne parle pas du tout de la BCEAO mais de la BOAD, la banque de développement de la CEDEAO.

Les apparences sont donc sauves et le droit respecté, avec deux objectifs majeurs :

1°) Comme ça, le candidat putschiste burkinabè, ivoirien ou autre saura qu’il risque de prendre un pays ingouvernable auquel on aura coupé les vivres et fermé les portes.

2°) La junte ayant dramatiquement besoin d’argent et de logistique dans la situation économique et sécuritaire actuelle, elle est obligée de proposer un calendrier réaliste d’élections sans faire dans le dilatoire pendant des mois, ce qui était visiblement son objectif. Sans compter que les difficultés économiques auront vite fit de mécontenter la population qui va demander le départ de la junte pour revenir à la normale.

Il est vrai que le discours populiste du "Mali face à l’adversité" de Goita va créer un sentiment de patriotisme et de souverainisme dans la population malienne et même ailleurs, qui va lui valoir un soutient temporaire.
Mais au final, peu de maliens accepteront de manquer de tout pour que les militaires putschistes puissent régner 5 ans, surtout que ce délai était déjà dénoncé en interne.

La CEDEAO a eu l’intelligence de ne pas imposer une date butoir que la junte aurait présenté comme un "dictat extérieur". Mais je serais étonné qu’elle accepte une date excédant 6 mois après les 18 mois précédemment fixés, soit Août 2022 au plus tard.

S(il s’agit d’éradiquer le terrorisme avant de pouvoir organiser des élections, il semble évident que Goita va régner à vie. Mais s’il s’agit de faire reculer les terroristes, de réformer la commission électorale, de convoquer une constituante et un comité des réformes qui feront des propositions et d’organiser des élections couplées présidentielles et législatives, 6 mois sont amplement suffisants.


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