Accueil > ... > Forum 2011048

Initiative Covax de vaccination contre le Covid-19 en Afrique : Un cadeau empoisonné !

27 mars 2021, 14:43, par Sidpawalemde Sebgo

Voilà une opinion qui se défend. L’auteur met dans la balance d’une part les coûts et les risques, et d’autre part les "avantages" supposés de la vaccination, arguments tout à fait valables.

Malheureusement, cette démonstration souffre de quelques amalgames et inexactitudes qui peuvent prêter à confusion, notamment sur COVAX.

1°) Vous présentez les choses comme si nous devons "vider les caisses" pour la vaccination anti-Covid. Or, le dispositif COVAX vise à fournir le vaccin de façon "équitable" à tous, car il semble évident que sans cela, certains pays devrons attendre 2022 sinon 2023 pour pouvoir accès à des vaccins. En effet, les pays riches ayant subventionné la recherche et acheté à l’avance des quantités monstrueuses, les nouvelles commandes ne peuvent être honorées avant un bon moment, en supposant même qu’on en ait les moyens.

COVAX fait donc trois choses : Assurer que les pays pauvres aient des vaccins en même temps que les autres ; grouper les achats pour faire baisser les prix ; subventionner des doses pour que les pays les moins nantis en aient une certaine quantité gratuitement, de quoi vacciner 10% de la population au moins, objectif revu à 20% récemment. Par exemple si un pays riche achète un vaccin par COVAX à 15 F, 5 F servent à subventionner une demi-dose pour un pays pauvre (les chiffres sont hasardeux). Ils peuvent aussi donner sans contrepartie.

C’est COVAX, en concertation avec les pays bénéficiaires, qui choisit les vaccins éligibles, et actuellement, c’est le vaccin AstraZeneca, le moins cher et le plus facile à conserver qui constitue le gros des vaccins COVAX, ainsi qu’une petite quantité du vaccin Pfizer-BioNtech. Mais d’autres vaccins sont envisagés comme celui à dose unique "Janssen" de Johnson et Johnson. Les chinois sont en négociation pour fournir également des doses de leurs vaccins par ce système. Mais ils se heurtent à l’hostilité des occidentaux qui remettent en cause leur efficacité, sur fond de rivalité géopolitique. On ne sait pas si le vaccin russe Spoutnik est candidat à COVAX.

L’Union Africaine, en utilisant ce mécanisme, s’est assuré de plus d’une quantité supplémentaire pour les pays africains afin d’atteindre davantage de personnes dans la population. Ils n’ont pas précisé si c’était financé par la commission ou par les pays membres ni la quantité totale.

La distribution se fait progressivement selon un ordre défini, avec des critères connus, comme avoir d’abord soumis un planning de vaccination. Elle s’étale dans le temps en fonction de la production par les laboratoires mais aussi de la disponibilité des financements.

Un pays comme le Burkina, devrait donc recevoir GRATUITEMENT 1.620.000 doses du vaccin AstraZeneca produits en Inde sous licence dans les prochains jours en plusieurs fois dans un premier temps. Soit de quoi vacciner environs 4% de la population. Ce sera à nous de décider qui nous souhaitons vacciner en premier.

Il est clair que si un pays souhaite arriver à 50% ou 70% de sa population vaccinée, c’est à lui de choisir, commander et payer les doses supplémentaire nécessaires.

C’est ainsi que certains pays, de par leurs propres moyens, ont décidé de ne pas attendre les vaccins COVAX et de commencer leur vaccination en achetant eux-mêmes des vaccins sur le marché. C’est le cas de la Côte d’Ivoire, du Maroc, de l’Afrique du Sud, etc... Mais ils recevrons quand même les doses COVAX.

2°) Le coût de la vaccination n’est pas aussi excessif que vous le dites. En effet, les vaccinations actuelles (méningite, rougeole, fièvre jaune, etc) sont aussi chères. Mais comme on ne parle pas du coût et que c’est généralement subventionné par l’OMS, le GAVI, la fondation Gates et autres, on ne le remarque pas.

Le vaccin AstraZeneaca coûte 1,78 euros la dose (prix concédé à l’Union Européenne). Si, en plus des doses pour 20% de la population obtenus gratuitement le Burkina veut aller à 50% de sa population, elle doit acheter 12 millions de vaccins pour vacciner 6 millions de personnes à raison de deux doses chacun. Cela représente 21,36 millions d’euros soit environs 14 milliards de Fcfa.
En oubliant même les doses gratuites, il faudrait 28 milliards pour vacciner 60% des Burkinabè.
Si vous Comparez aux 100 milliards que l’état Burkinabè a débloqué pour soutenir les entreprises impactés par le Covid, (sans compter les autres interventions) ou les 57 milliards qu’on coûté les élections présidentielles et législatives de 2020, vous conviendrez que ce n’est pas si grave.
Et puis, ne rêvons pas : Dès que la pandémie sera contrôlée, l’état va se désengager de ce poids et chacun sera appelé à payer s’il veut être vacciné ! A 2.400 Fcfa les deux doses, c’est encore moins cher que la plupart des vaccins vendus en pharmacie.

3°) Ne vous y trompez pas, le Burkina n’est pas uniforme. Si vous et moi estimons la vaccination peu justifiée pour une maladie qui a peu de chance de nous atteindre et encore moins de nous tuer, ce n’est pas le cas de tout le monde.

Certains Burkinabè ont des maladies qui font craindre une issue fatale en cas de contagion par le coronavirus. Les agents de santé et d’autres professions, de par leurs métiers, ont plus de risques d’entrer en contact avec le virus, et leur protection est nécessaire. D’autres voyagent et seront obligés de s’y soumettre par les pays hôtes ou les compagnies aériennes.

On ne peut donc pas être catégorique et rejeter la vaccination pour le Burkina en général. Par contre, on peut choisir de se limiter à la vaccination des personnes à risques et volontaires. Cela devrait représenter moins des 4 millions de personnes accessibles avec les doses obtenues gratuitement.

Je partage l’opinion de plusieurs que même ainsi, les Burkinabè ne vont pas se bousculer pour se faire vacciner !


LeFaso.net
LeFaso.net © 2003-2023 LeFaso.net ne saurait être tenu responsable des contenus "articles" provenant des sites externes partenaires.
Droits de reproduction et de diffusion réservés