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Situation au Mali : La CEDEAO risque de ramener le pays au point de départ

Publié le dimanche 30 août 2020 à 21h25min

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Situation au Mali : La CEDEAO risque de ramener le pays au point de départ

Après plusieurs rencontres sur la situation au Mali, les chefs d’Etat de la CEDEAO ont décidé de se focaliser sur la durée de la transition au Mali. N’y a-t-il pas lieu d’accompagner les nouvelles autorités maliennes à faire le ménage avec des remèdes adaptés pour sortir le pays de cette crise ? Ce qui va permettre de mettre en place un arsenal juridique mettant hors-jeu cette race de politiciens qui ont failli, et permettre à ceux qui répondent aux aspirations du peuple Malien de venir au pouvoir. Mais la CEDEAO dans cette crise risque d’empirer la situation.

Comment un coup d’État a-t-il encore été possible dans ce pays qui était déjà en situation difficile avec ce phénomène de terrorisme ? Et pourquoi ce coup de force est-il perçu par les populations comme un soulagement et salué par le peuple malien ? Voilà autant de questions que beaucoup de personnes se posent.

La CEDEAO semble vouloir ramener le problème sur d’autres pistes et parle de plus en plus de la durée de transition. Or, la crise malienne va au-delà d’une durée de transition. La CEDEAO a d’ailleurs un problème de crédibilité et certains chefs d’État qui la compose n’ont plus rien de commun avec les peuples de l’espace, au regard de leurs agissements. L’autorité morale et politique de cette institution a été toujours absente lorsqu’il s’agit de défendre les peuples et non quand il s’agit de défendre un membre du « syndicat ».

Si aujourd’hui, dans la crise malienne, il y a eu une évolution, c’est grâce au peuple qui a enfin décidé d’agir. Et le mieux serait d’accompagner le peuple malien pour remettre le pays sur pied. Ce qui va apporter des réponses auxquelles le peuple attend. Ce sont les Maliens, qui ont donné le deuxième quitus à Ibrahim Boubacar Keita (IBK), de trouver des solutions à leurs problèmes.

Pour le citoyen malien, le président est élu pour soulager sa peine. Mais si avec lui les conditions de vie des Maliens empirent, il doit laisser la place à d’autres personnes plus valeureuses que lui. Et le Mali n’est pas en manque de ces personnes. Le griot de l’Almamy Samori Touré disait : « Si tu n’es pas capable d’organiser, de développer et de défendre le pays de tes pères, cède le trône aux hommes plus justes et valeureux… ».

L’enjeu aujourd’hui au Mali est de croire que le départ d’IBK va permettre de régler la situation alors que le pays est à son quatrième coup d’État. Et de la manière dont la CEDEAO est en train de vouloir procéder pour résoudre la crise, on risque de repartir à la case départ. Tant que les vrais enjeux de cette crise ne sont pas mis sur la table, il sera difficile pour le Mali de sortir de cette crise. L’ancien président Modibo Keita l’avait bien compris lorsqu’il disait, devant l’Assemblée nationale du Mali, le 30 juin 1960 : « Le pouvoir politique s’accompagne toujours et nécessairement du droit régalien ».

Quand le peuple souffrait, la CEDEAO et l’Union africaine n’ont prêté aucune oreille à sa situation. C’est ce qui a amené les Maliens dans la rue pour demander plus de liberté et de souveraineté. Est-ce que cette volonté des Maliens cadre avec le désir de ces grandes puissances qui représentent la grande communauté internationale ?
Non, le problème de la communauté internationale, dans sa version tropicale en Afrique, c’est d’avoir créé cette rupture entre le peuple et l’expression politique. C’est tout le drame de l’Afrique et en particulier du Mali.

Cependant, le peuple malien doit rester vigilant, le mouvement populaire au Mali doit créer une classe politique qui corresponde aux exigences des politiques du mouvement populaire. Si la nouvelle classe ne s’inscrit pas dans cette démarche, rien ne va marcher.

Au Mali, quand on fait le reprofilage des événements, il faut être prudent. Excepté l’imam Dicko qui n’est pas un homme politique, les autres membres du M5 sont issus de la classe politique malienne. Et parmi eux, personne n’a été capable de porter ce mouvement. C’est de là, une nouvelle classe politique doit émerger pour éviter au pays de retourner à la case départ.

Il est temps de faire savoir à la CEDEAO que l’avenir du Mali ne passera certainement pas par ses faux remèdes et mauvais conseils. Il ne passera sans doute non plus par la copie de modèles de gouvernance non-adaptés aux réalités du pays. En termes clairs, l’avenir du Mali ne passera sûrement que par les braves et honnêtes Maliennes et Maliens. Ça suffit maintenant, et les Maliens doivent mettre fin à cette recréation.

Issoufou Ouédraogo
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 31 août 2020 à 00:21, par Vérité indiscutable En réponse à : Situation au Mali : La CEDEAO risque de ramener le pays au point de départ

    Merci bien Issoufou pour cet article.
    La CEDEAO démontre clairement que les peuples ne l’intéressent pas et que ce sont les princes qui l’intéressent. Quelle dommage pour un cadre qui se veut le phare de la stabilité et de la prospérité de l’Afrique. Des intellectuels incapables d’étudier chaque situation et concéder les faveurs indispensables, aveuglés par le désir d’appliquer sans réflexion des principes existants.
    On a beaucoup à faire encore tant qu’il y a toujours des présidents de la génération des indépendances dans la clique. Du vrai n’importe quoi !

  • Le 31 août 2020 à 08:15, par Oh que non ! En réponse à : Situation au Mali : La CEDEAO risque de ramener le pays au point de départ

    Oh, que non ! La CEDEAO n’a jamais eu vocation à résoudre les problèmes politiques dans les Etats membres. La CEDEAO n’est qu’une communauté économique et non pas une union d’Etats comme le sont l’Union Européenne ou les États-unis. Voilà pourquoi, dès qu’un problème se pose, ce sont des sanctions économiques susceptibles d’ébranler tout un pays qui sont brandies, en lieu et place de sanctions ciblées. Comme si, à chaque fois qu’un problème politique se pose, il faut asphyxier économiquement un pays tout entier pour montrer la puissance de la CEDEAO. Imaginez-vous l’UE ou les États-Unis tentant d’étouffer un état membre pour des raisons politiques ? Même le Royaume unique qui quitte l’Union Européenne n’en a pas été victime.

    Et pourquoi est-ce ainsi en Afrique de l’ouest ? Parce que la CEDEAO n’a aucun ancrage réel dans les pays la composant. Aucune décision de la CEDEAO n’a jamais été soumise à l’approbation populaire. Aucune décision de la CEDEAO n’a jamais fait l’objet d’un référendum. Toutes les décisions dela CEDEAO ont été prises dans des bureaux feutrés, a l’abri du regard de ceux qui vont en bénéficier ou en subir les conséquences. La CEDEAO n’est pas une communauté des peuples, même si c’est cela sa mission première.

    Dans nos contrées, Est-il rare d’entendre : "l’État doit faire ceci", "l’État doit faire cela" ? C’est parce que dans notre inconscient collectif, l’État se confond aux dirigeants, l’État s’entend le gouvernement, avec à sa tête le chef de l’état. Or la CEDEAO, c’est une communauté des Etats, donc celle des dirigeants. Donc dans sa conception actuelle, la CEDEAO n’est pas la communauté des peuples ou même des pays d’Afrique de l’Ouest, c’est celle des États (selon la version tropicale de cette déclinaison), donc en premier lieu, celle des Chefs d’Etats.

  • Le 31 août 2020 à 08:43, par Sisiphe En réponse à : Situation au Mali : La CEDEAO risque de ramener le pays au point de départ

    Je crois qu’il faut être conséquent en toutes choses. IBK n’était pas à son troisième mandat, mais au deuxième seulement, mandat constitutionnel qu’il a obtenu au terme d’une élection démocratique. Si sa gestion du pouvoir ne rencontre plus l’assentiment du plus grand nombre, vous l’affrontez dans les urnes et c’est tout ! Si IBK était dans un processus de coup de force pour s’octroyer un 3ème mandat, j’aurais validé, dans une certaine mesure, cette intervention des militaires. Là, il en est est tout autre. La CEDEAO est ce qu’elle est, et le mali a choisit librement de l’adhérer. En sus, on a déjà vu les militaires au pouvoir au mali, sans succès réel. Aujourd’hui, l’armée malienne est bien plus équipée que celle burkinabè. Qu’on arrête d’accuser IBK pour les débâcles rencontrées sur le terrain. Ce n’est pas IBK qui délaisse les blindés aux rebelles sur le terrain. Légitimer cette façon de prendre le pouvoir est bien dangereux, à mon avis, et ce n’est pas ça, la démocratie...du moins celle qu’on connait ! Vous voulez inventer une démocratie à la sauce Africaine, libre à vous de le faire. Pour le moment, on n’y est pas, et la CEDEAO doit rester stoïque

    • Le 31 août 2020 à 11:03, par Esprit et vérité En réponse à : Situation au Mali : La CEDEAO risque de ramener le pays au point de départ

      Où était donc la CEDEAO quand les enfants maliens faisaient la moitié de l’année scolaire à domicile ? On ne peut pas attendre qu’un président finisse tranquillement son mandat . On doit pouvoir retirer le pouvoir quand ça ne va pas.

  • Le 31 août 2020 à 14:09, par TANGA En réponse à : Situation au Mali : La CEDEAO risque de ramener le pays au point de départ

    La CEDEAO doit laisser le Mali tranquille.
    On n’a pas été capable d’envoyer une force contre le terrorisme mais on a voulu envoyer une force pour rétablir IBK au pouvoir. Par chance pour la CEDEAO, IBK lui même a vu clair et a dit ne plus vouloir de ce pouvoir.
    Maintenant vous voulez mener le Mali dans la merde, ce n’est pas un petit groupe de personnes mais toute une population, un pays. C’est quoi ça ?
    Il faut que ASSANA pardon Alassane et sa suite soit lâchée par les autres présidents. La CEDEAO ce n’est pas une chose privée.
    En rappel, le Mali n’était pas dans le CFA mais il vivait.
    C’est nous populations des pays qui allons chasser Alassane de nos pays maintenant vue ce qu’il démontre comme intérêt pour les pays.
    A BAS LES VALETS LOCAUX DE L’IMPERIALISME !!!

  • Le 1er septembre 2020 à 13:08, par Honorable Souleymane seydou Ouattara Sikasso En réponse à : Situation au Mali : La CEDEAO risque de ramener le pays au point de départ

    Bonjour nous avons lu tous les commentaires et voilà qu tous sont d’accord que cette organisation sous régionale ne répond pas aux aspirations des peuples, elle doit disparaître, sa survie dépendra de la gestion de la crise malienne.
    Celui qui parle de mandat de lexpresident cest dommage avant la fin du mandat le Mali aurait pu disparaître...
    Le Mali a son destin entre les mains des maliens et des seuls maliens, les maliens vont se mettre ensemble pour conduire la transition et avec un malien à la présidence et pendant le temps qu’il faudra n’en déplaise à la CEDEAO...

  • Le 1er septembre 2020 à 17:23, par Pros En réponse à : Situation au Mali : La CEDEAO risque de ramener le pays au point de départ

    Très bonne analyse, le Mal de l’Afrique d’aujourd’hui c’est vraiment le déphasage entre les Peuples et leurs Dirigeants politiques.

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