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Tabaski 2020 : Que de déceptions et des regrets chez les vendeurs de bétail

Publié le dimanche 26 juillet 2020 à 22h26min

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Tabaski 2020 : Que de déceptions et des regrets chez les vendeurs de bétail

A moins d’une semaine de la célébration de la fête de l’Aïd El Kébir, couramment appelée fête de Tabaski, les vendeurs de bétail se retrouvent dans l’impossibilité d’écouler les animaux. Contrairement aux années précédentes avec les bonnes affaires et la bonne ambiance, c’est la déception et le regret qui se lient sur le visage des vendeurs de Ouagadougou. Une situation due notamment à la fermeture des frontières à cause de la survenance de la maladie à coronavirus et son lot d’inconvénients socio-économiques. Manque de la clientèle, difficultés d’écoulements des animaux, la concurrence déloyale de vendeurs occasionnels, etc. sont les principaux problèmes soulignés par les vendeurs professionnels de bétail de quelques marchés à bétail de la capitale burkinabè.

La fête de Tabaski sera célébrée le vendredi 31 juillet 2020 au Burkina Faso, selon un communiqué de la communauté musulmane au Burkina. Et à l’orée de cette célébration, c’est la déception chez les vendeurs de bétail (des moutons notamment) qui, d’habitude se frottent les mains à cette période de l’année. Et tous sont unanimes sur le manque à gagner par rapport à leurs investissements et aux gains des autres années.

Vue du marché à bétail de Tanghin

Pour eux, la véritable cause, c’est la maladie à coronavirus qui a entrainé la fermeture des frontières, empêchant ainsi la venue de clients internationaux, et les répercussions du Covid-19 sur les portefeuilles des Burkinabè mais aussi le terrorisme qui empêche la mobilité dans certaines zones d’élevage du pays. De plus, selon des vendeurs de bétail, il est difficile de déterminer le prix des animaux car il varie en fonction de la taille et de la corpulence de l’animal mais aussi et surtout du contexte socio-économique.

Au marché à bétail de Kilwin

Seydou Sawadogo est vendeur au marché à bétail de Kilwin et dit ne rien comprendre à moins d’une semaine de la célébration de la fête de Tabaski. Pour lui, il n’y a pas assez de clients comme les autres années. Une situation qui, selon lui, est due à la survenance de la pandémie du coronavirus qui a entrainé la fermeture des frontières mais aussi des attaques terroristes. « Les autres années, nous avions des acheteurs Ivoiriens, Ghanéens, et autres qui venaient se ravitailler chez nous à l’approche de la fête de Tabaski et aussi des particuliers qui achètent pour leurs amis dans les autres pays. Mais cette année ce n’est pas le cas. Pas d’achat à l’avance, pas de clients et nous sommes très inquiets », regrette-t-il.

Seydou Sawadogo, vendeur de bétail au marché à bétail de Kilwin

Seydou Sawadogo dit être prudent pour ne pas se retrouver avec des dettes, refusant ainsi d’acheter davantage dans les provinces car la prise en charge des animaux coûte chère s’il n’y a pas d’écoulement. « Souvent à l’approche de la Tabaski, nous approchons des opérateurs économiques pour emprunter de l’argent pour les achats des animaux. Mais cette année, ils refusent car disent-ils, les affaires ne marchent également pas pour eux à cause de la maladie à coronavirus », précise-t-il.

Même son de cloche chez Moussa Compaoré, vendeur de bétail depuis une dizaine d’années au marché à bétail de Kilwin et reconverti en chauffeur de taxi moto pour le transport des animaux. La casquette dressée et le regard sombre, il décrit avec amertume la galère qu’il vit au quotidien depuis la survenance du Covid-19. Il explique qu’à cause du coronavirus, du terrorisme et de la fermeture des frontières, « cette année est complètement différente des autres ». Dans les années précédentes ajoute-t-il, Ivoiriens, Ghanéens, Sénégalais, Nigériens venaient acheter ici mais cette année Il n’y a pas de clients étrangers et le pouvoir d’achat intérieur est faible à cause des conséquences du coronavirus. « L’autre gros problème, ce sont les vendeurs occasionnels qui empruntent de l’argent pour acheter et revendre et finalement se retrouvent sans clients, d’autant plus que le foin pour nourrir les animaux coûte cher ».

Moussa Compaoré, ancien vendeur de bétail et transporteur de bétail à Kilwin

Des propos confirmés par Adama Guiré, également vendeur de bétail au marché de Kilwin, qui assis au milieu de ses moutons, refuse de parler à notre micro, car dit-il, il n’y a vraiment pas de marché et son souhait est que cette situation puisse s’améliorer dans les prochains jours.

D’un marché de bétail à l’autre, ce sont les mêmes problèmes et les mêmes expressions de tristesse et de sentiment d’impuissance qui s’observent sur les visages des vendeurs de bétail. Au marché à bétail de Tanghin, c’est une ambiance morose qui nous accueille et des clients frustrés qui refusent de répondre à nos questions. La déception se lie aussi bien chez les vendeurs résidents que chez les vendeurs venus des provinces pour écouler leur bétail à l’approche de la fête de Tabaski.

Pour Adama Bikienga, vendeur de bétail depuis vingt ans au marché à bétail de Tanghin, la vente des animaux est devenue presque le travail de tout le monde. « Dans les quatre coins de Ouagadougou, vous allez voir des vendeurs de bétail, au moindre carrefour, vous verrez des vendeurs occasionnels de bétail. Et ce n’est pas normal, car cela joue sur nos chiffres d’affaires du fait que les vendeurs venus de la province ne cherchent plus à vendre dans les marchés à bétail. Il suffit de sortir juste devant sa cour et c’est un lieu de vente alors qu’ici nous payons des taxes sur chaque animal et à la fin du mois également », se plaint-il.

Adama Bikienga, vendeur de bétail au marché à bétail de Tanghin

Malgré la décision de la mairie de Ouagadougou d’interdire la vente du bétail en dehors des marchés construits à cet effet, Adama Bikienga regrette que cette mesure ne soit suivie d’aucune action de contrôle sur le terrain. « Chaque année c’est la même chose, les autorités communales prennent de mesures mais pas de suivi sur le terrain. Pour preuve, vous croiserez des vendeurs de bétail un peu partout dans la ville de Ouagadougou et ce, en dehors des marchés à bétail ». Il appelle par ailleurs, les autorités à les aider en régulant véritablement la vente du bétail car dit-il, ils payent des taxes contrairement aux vendeurs occasionnels qui empiètent sur leur business.

vue d’ensemble des vendeurs de bétail venus des provinces au marché à bétail de Tanghin

Du côté des vendeurs provinciaux, c’est également la déception et les regrets des bonnes affaires des années précédentes.

Boukari Boly a quitté Sabcé, une commune rurale située dans la province du Bam pour venir vendre ses moutons au marché à bétail de Tanghin. Mais très vite, il va se rendre à l’évidence de l’état du marché à quelques jours de la fête de Tabaski. Habitué aux bonnes affaires à cette période surtout avec les clients étrangers, Boukari Boly se retrouve avec une clientèle nationale avec des prix en deçà de ses attentes. « Nous essayons d’écouler le plus d’animaux possible pour ne pas subir de grosses pertes. Le marché est timide parce qu’il n’y pas d’acheteurs étrangers à cause de la fermeture des frontières », confie-t-il, en pleine négociation de prix avec un client.

Boukari Boly, vendeur de bétail venu de Sabcé dans la province du Bam

En attendant une éventuelle amélioration de leur situation, les vendeurs de bétail, tous unanimes dans leurs propos espèrent une fin très prochaine de la pandémie du Covid-19 et appellent les autorités burkinabè à œuvrer pour une véritable cohésion sociale et un retour effectif de la paix au Burkina Faso pour que les affaires puissent reprendre normalement.

Mamadou ZONGO (stagiaire)
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 26 juillet 2020 à 18:06, par triste En réponse à : Tabaski 2020 : Que de déceptions et des regrets chez les vendeurs de bétail

    Des mesures sont prises comme effet d’annonce mais sans lendemain. Il suffit de voir les moutons aux abords des voies ! Un seul lieu est indiqué, c’est les marchés à bétail réglementé. Mais, dans ce pays et, dans la capitale, en particulier, nous souffrons beaucoup de notre mal gouvernance. A propose de bétail, il en est de même avec les animaux en divagation. Pas un seul 6 mètres sans croiser au moins un mouton, chèvre, et autres ! Est-ce sérieux, Monsieur le maire de Ouagadougou du MPP ? La gestion des affaires de la cité passe par un minimum de rigueur et de sérieux et ne se résume pas à se pavaner devant les caméras avec vos effets d’annonce ou pour telle ou telle cérémonie pour inaugurer un chantier de ceci ou de cela ç

  • Le 26 juillet 2020 à 19:45, par Amadoum En réponse à : Tabaski 2020 : Que de déceptions et des regrets chez les vendeurs de bétail

    Chaque annee c est la meme chanson.Les annees passees vous avez eu les meme propos.Il n y a pas marché mais vos prix sont prohibitifs.Ce serait mieux de garder le meme reportage pour l annee prochaine.

    • Le 27 juillet 2020 à 08:34, par kwiliga En réponse à : Tabaski 2020 : Que de déceptions et des regrets chez les vendeurs de bétail

      "il est difficile de déterminer le prix des animaux car il varie en fonction de la taille et de la corpulence de l’animal mais aussi et surtout du contexte socio-économique"
      Ham bon, "et surtout du contexte socio-économique", mais qui pourrait vous prendre en pitié ? Foutus néo-capitalistes !

  • Le 26 juillet 2020 à 20:05, par Moussa Gamsore En réponse à : Tabaski 2020 : Que de déceptions et des regrets chez les vendeurs de bétail

    La vraie raison toutes ses fêtes dites religieuses sont des arnaques et la population a compris. Depuis des années de sacrifice de mouton pour rien sinon enrichir des profiteurs.

  • Le 26 juillet 2020 à 23:34, par welore En réponse à : Tabaski 2020 : Que de déceptions et des regrets chez les vendeurs de bétail

    merci beaucoup au journaliste pour le reportage.
    je constate que vous donner simplement les raisons de mévente sans donner de fourchette ou bien c’était pas dans votre programme. je vous propose de donner des prix indicatifs. salut monsieur le journaliste

  • Le 27 juillet 2020 à 06:13, par Ousmane En réponse à : Tabaski 2020 : Que de déceptions et des regrets chez les vendeurs de bétail

    C’est bien de donner la parole aux vendeurs de bétails, mais pour un reportage équilibré il aurait fallu donner aussi la parole aux acheteurs pour avoir leur points de vue sur le prix des moutons. Ce recoupage aurait permis de savoir si ce que les vendeurs disent est vrai ou faux. Là vous nous servez des états d’âmes de vendeurs et des chansons que nous entendons chaque année. Encore beaucoup travail pendant le stage...

  • Le 27 juillet 2020 à 07:11, par Gangobloh En réponse à : Tabaski 2020 : Que de déceptions et des regrets chez les vendeurs de bétail

    Quand les affaires ne marchent pas on baisse les prix . Demandez le prix d’un mouton et comparez ce prix au prix de 2019.

  • Le 27 juillet 2020 à 08:09, par Le justicier En réponse à : Tabaski 2020 : Que de déceptions et des regrets chez les vendeurs de bétail

    C’est normal qu’il n’y ait pas de la clientèle puisque certains d’entre eux vendent des moutons au prix de bœuf ! On en a marre maintenant !

  • Le 27 juillet 2020 à 12:46, par LOS En réponse à : Tabaski 2020 : Que de déceptions et des regrets chez les vendeurs de bétail

    Chers commerçants, vendez vos moutons au pays en revoyant vos prix qui sont hors de portée pour les fonctionnaires. Et comprenez surtout que dans deux ans, ces étrangers ne viendront plus au Faso car leurs dirigeants sont en train de mettre sur chantier dans leurs différents pays, de grands projets d’élévege car libérés des épizooties. Donc attention car je sais de quoi je parle !

  • Le 27 juillet 2020 à 14:09, par jeunedame seret En réponse à : Tabaski 2020 : Que de déceptions et des regrets chez les vendeurs de bétail

    Tout cela parce que la fête elle-même se limite à celle du mouton et de son propriétaire. Où est la foi ? Si les religieux pouvaient limiter cette tuerie de moutons, en faire un petit rituel symbolique, pour récupérer l’aspect religieux et sauver la foi, cela arrangerait tout le monde. Sinon, on risque un jour d’acheter mouton avec permis ou autorisation. Et Dieu va regretter.

  • Le 28 juillet 2020 à 10:45, par ZONGO En réponse à : Tabaski 2020 : Que de déceptions et des regrets chez les vendeurs de bétail

    Quand un mouton coûte plus cher qu’un taureau, les gens préféreront aller ailleurs. Le mouton le moins cher moins cher du marché coûte 45 000 qui ne dépasse pas 03 bons coqs.
    Revoyez les prix et le problème sera résolu.

  • Le 28 juillet 2020 à 14:24, par CCCC En réponse à : Tabaski 2020 : Que de déceptions et des regrets chez les vendeurs de bétail

    Tabaski est devenue une période de forte pression et de stress pour beaucoup de pères de familles musulmans : Combien de personnes s’endetteront pour acheter ce fameux mouton ? Combien ignorent toute la symbolique qui suit la fête pour ne retenir que la taille du mouton, sa couleur, sa beauté par rapport au mouton du voisin ? Un mouton quelque soit sa race, ne saurait être vendu à 300 000 F, 400 000 F. Vous commerçants, si le marché est morose, alors revoyez vos prix et les clients viendront.

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