LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Nous sommes lents à croire ce qui fait mаl à сrοirе. ” Ovide

Les bonnes pratiques civiques et citoyennes pour la réussite en milieu éducatif : Quels rôles pour les chefs d’établissement dans un système de gestion axe sur les résultats

Publié le mardi 18 août 2020 à 13h12min

PARTAGER :                          
Les bonnes pratiques civiques et citoyennes pour la réussite en milieu éducatif : Quels rôles pour les chefs d’établissement dans un système de gestion axe sur les résultats

Cet article est une réflexion liée à une étude en cours qui se donne l’objectif d’identifier de bonnes pratiques civiques et citoyennes dont la mise en œuvre dans les enseignements post primaire et secondaire au Burkina Faso aiderait à contrer l’incivisme en faveur de la réussite. Cette réflexion interpelle principalement sur les rôles que doit jouer le chef d’établissement dans le système de gestion axé sur les résultats par rapport à la mise en œuvre des bonnes pratiques civiques et citoyennes en milieu scolaire.

INTRODUCTION

De nos jours, tant dans la société en général que pour les personnes impliquées dans le domaine de l’éducation, tout le monde s’accorde pour dire que la réussite est un thème des plus complexes et possiblement le thème le plus central dans tout projet éducatif, qu’il soit formel ou informel. Ce concept de réussite que chacun peut définir à sa façon selon ses visées, repose, on est tous d’accord au moins, sur plusieurs déterminants.

Parmi ces derniers, il y a l’engagement au civisme défini comme « l’art de vivre ensemble sur un territoire donné, dans le respect de règles communes librement établies » (Section du Rhône/Comité du 5ème arrondissement (2007). Cet engagement en milieu éducatif, pour mobiliser les acteurs autour d’un même objectif, suggère de bonnes pratiques civiques et citoyennes dont le succès de leur mise en œuvre exige des règles de fonctionnement pouvant être basées sur le système de gestion axés sur les résultats.

Le système de gestion axée sur les résultats sans aller trop dans les détails, est un système qui privilégie la stratégie de gestion basée sur une approche intégrée de la planification, du suivi et de l’évaluation des projets/ programmes (UNODC, 2019 ; Gogoua, 2012). Le Burkina Faso a adhéré au processus depuis 2013.

L’atelier tenu à Ouagadougou du 29 au 31 mai 2017 a eu pour objectif de sensibiliser les acteurs sur la nécessité d’intégrer la pratique de cette gestion dans les interventions. Dans ce système, l’implantation des bonnes pratiques civiques et citoyennes, engage plusieurs responsabilités dont celles du chef d’établissement. La présente analyse permet de réfléchir sur les responsabilités de ce dernier dans l’espoir qu’elle apporte de la lumière sur le sujet.

1. LES BONNES PRATIQUES DANS LE SYSTEME DE GESTION AXE SUR LES RESULTATS

Nous ne reviendrons pas sur une longue revue de littérature qui risque d’allonger ce document pour définir les bonnes pratiques mais nous allons nous contenter d’une définition que nous avons adoptée dans un de nos documents, que nous avons élaboré à la première année du projet intitulé : « Etude sur les bonnes pratiques civiques et citoyennes dans les enseignements post-primaire et secondaire au Burkina Faso : contenus et stratégies pour la formation des acteurs ».

Dans ce document, nous résumons la définition d’une bonne pratique civique en ces termes :
« Une intervention directe auprès des acteurs, une méthodologie décrite ou un modèle d’intervention proposé pour acquérir des connaissances, des comportements et des attitudes responsables qui respectent les valeurs civiques et citoyennes…. Elle transforme les comportements par le biais d’acquisition d’habiletés sociales et de caractéristiques personnelles.

Elle est reproductible, adaptable et elle réduit les comportements à risques tout en renforçant la résilience. Elle est d’une pertinence stratégique et d’un impact positif sur les individus et/ou les communautés. Elle est sensible au genre et techniquement réalisable (faisabilité technique/simple à apprendre et à mettre en œuvre). Elle résulte d’un processus participatif, elle est durable aux niveaux environnemental, économique et social. »

Voici une définition qui dit tout : elle donne les objectifs poursuivis dans l’implantation des bonnes pratiques, elle résume les défis à relever ainsi que les enjeux que comporte ce type d’intervention en milieu scolaire en faveur de la réussite en éducation. Dans un système de gestion axée sur les résultats, l’implantation ou la mise en œuvre des bonnes pratiques en faveur de la réussite visent les changements de comportements et d’attitudes en termes de résultats souhaités. Elles exigent que chaque acteur connaisse, comprenne et maîtrise différentes stratégies afin d’être en mesure de les déployer correctement, de les utiliser et sans cesse les améliorer afin de répondre davantage aux multiples besoins des apprenants.

Aussi, chaque acteur devrait-il s’assurer que ses interventions (processus produits et services) contribuent aux résultats dont l’atteinte ne pourra se réaliser qu’à travers l’implication de tous. Les bonnes pratiques, leur compréhension, ce qu’elles signifient pour chaque acteur dont l’apprenant lui-même, s’avèrent importantes pour favoriser une vision commune et une meilleure communication dans le système de gestion axé sur les résultats.

En général, dans les milieux d’apprentissage, les bonnes pratiques sont considérées plutôt large, elles concernent tout ce que l’on prévoit comme organisation et dispositions incluant les règlements et/ou le code de vie à l’école et bien évidemment la sanction des études et le respect de l’autorité. Dans une moindre mesure, elles sont souvent contenues dans le projet éducatif mais leur application n’est pas toujours prise en compte dans des actions concrètes, pratiques, harmonieuses et synergiques. La synergie d’action tient compte de deux aspects : le contexte de mise en œuvre et les acteurs impliqués.

1.1. LE CONTEXTE DE MISE EN ŒUVRE DES BONNES PRATIQUES

Le cadre de mise en œuvre des bonnes pratiques peut prendre différentes formes, même informelles (à l’intérieur des classes et en dehors des classes c’est-à-dire dans l’enceinte de la structure, et hors des murs de la structure, en famille et dans la communauté et dans la vie au quotidien).

Ce cadre sert de lieu aux interventions de tous les jours ; il oriente les choix pédagogiques de tous les acteurs. Dans les normes et dans la logique des faits, ce cadre forme un tout holistique avec les valeurs mises en avant et dont on fait la promotion dans le milieu.

1.2. LES ACTEURS IMPLIQUÉS DANS LA MISE EN OEUVRE DES BONNES PRATIQUES

Les acteurs impliqués dans l’implantation des bonnes pratiques dans le système éducatif sont nombreux et il faut tous les considérer importants mais pas au même niveau :

• L’apprenant pour lequel l’implantation a vu le jour reste bien évidemment le premier bénéficiaire malgré le fait que tous les autres acteurs bénéficient eux aussi, de quelque chose en s’impliquant dans l’action. Il reste l’acteur au cœur de l’intervention c’est-à-dire la cible voire l’objectif vers lequel convergent toutes les actions. C’est à lui que revient l’engagement fort et cette volonté dans l’application de ces pratiques.

Il doit montrer son intérêt vis-à-vis de l’intervention, ce qui permet d’encourager les autres acteurs à le soutenir. Les bonnes pratiques, il faut le dire est un concept un peu plus axé directement sur la personne de l’élève bien que leur mise en œuvre engage les autres acteurs. Par rapport au système de gestion axé sur les résultats, des raisons justifient cette focalisation sur l’apprenant. Toute intervention exige de se fixer des objectifs à atteindre et ceci est une évidence dans le système de gestion axé sur les résultats.

Dans le cas de l’implantation des bonnes pratiques par exemple, l’apprenant étant la cible privilégiée de l’intervention, tout concourt en sa faveur, tous les engagements des autres acteurs sont tournés vers lui de même que le plan stratégique de mise en œuvre des bonnes pratiques. Alors, c’est signifier que, dans ce système, tous restent redevables vis-à-vis de l’atteinte des résultats. Le changement qui sera opéré au sein des élèves dans leur comportement en faveur de leur réussite fera la fierté de tous.

• Ensuite, il y a la communauté et la société civile, les parents d’élèves, les enseignants, les chefs d’établissements et bien évidemment l’État. Chaque acteur a ses responsabilités dans la mise en œuvre des bonnes pratiques.
Nous allons nous focaliser davantage sur les responsabilités du chef d’établissement qui est le chef d’orchestre parce que c’est de lui que devrait venir cette énergie nécessaire pour galvaniser les autres acteurs.

2. ROLES DES CHEFS D’ETABLISSEMENT

Lorsqu’on vise la réussite chez les apprenants, cette dernière est si importante et si ardemment souhaitée, que certains décideurs de l’éducation vont même jusqu’à implanter dans leur milieu des systèmes de gestion axés sur les résultats visant à augmenter cette réussite et priant les enseignants de faire mieux et de faire plus.

Dans ce système, les objectifs vers lesquels convergent les actions d’implantation des bonnes pratiques consistent à créer au bout du compte, un cadre de travail favorable à la réussite des apprenants. Ce cadre repose essentiellement sur un climat de travail dans lequel règnent, la sérénité la cohésion sociale, l’entraide entre les apprenants, le respect entre pairs, le respect de l’autorité administratif.

Au sein de ce cadre vont se développer des comportements et des attitudes responsables dont l’engagement au travail et la bonne conduite vis-à-vis de soi-même et des autres. La mise en œuvre de bonnes pratiques visant les changements de comportement dans un système de gestion axé sur les résultats, suppose que les pratiques à l’œuvre soient suivies.
D’abord, le chef d’établissement étant le premier responsable de la structure, cela lui exige des concertations afin de créer un climat favorable à la mise en œuvre des bonnes pratiques.

Il s’agira de se donner un langage commun pour nommer les diverses réalités du contexte, pour définir les rôles de chaque acteur (notamment le rôle des parents d’élèves, le rôle des enseignants, celui de la communauté), pour permettre l’organisation des axes d’intervention qu’ils soient à l’intérieur de la pratique enseignante ou à l’extérieur de la classe, comme dans la cour de l’établissement. Rappelons qu’en matière d’implantation de bonnes pratiques, il convient à chaque milieu éducatif d’en préciser le cadre, les termes, les modes et les actions.

Ce qui implique que les adaptations peuvent être nombreuses et quasi illimitées. Par exemple, l’implémentation de la pratique du bonjour quotidien va exiger que l’on définisse en fonction du contexte les manières, les termes, le cadre et les actions liées à cette pratique, l’important étant de déployer pour un milieu donné une offre sur mesure et vraiment adaptée aux besoins. Mettre en œuvre les bonnes pratiques, c’est toujours se centrer sur l’élève pour l’aider à agir responsable et à être capable d’avoir des pensées réflexives.

Aussi, le chef d’établissement devrait-il voir certains éléments d’ordre organisationnel contribuant à faciliter le transfert des bonnes pratiques. Il est appelé à discuter de comment repenser la tâche de l’enseignant et celle de la direction dans ce projet étant donné que le transfert des pratiques ne se réalise pas par le discours mais par la pratique des bonnes pratiques.

Cela implique que, enseignants et direction soient dans la même logique de pensées et d’actions. L’enseignant est un professionnel autonome, créatif et réflexif. Il est capable de modeler par lui-même son action éducative si besoin est. Mais cela étant entendu, n’empêche toutefois pas d’avoir besoin de soutien pour y parvenir. Ceci pose la question de la formation continue des enseignants et leur besoin de perfectionnement en cours de leur pratique et de celle des gestionnaires également.

Ensuite, dans la gestion du changement, de cette nature, certaines responsabilités incombent davantage à la direction qui peut agir comme leader pédagogique facilitant et soutenant ce changement. Si l’on croit que l’école, c’est l’école du bien, l’école qui fait du bien, donc qui fait réussir, tous les acteurs doivent s’en rendre responsables, plus encore, en être imputables comme une reddition de comptes envers la société, les familles et surtout envers les laissés pour compte.

Ceci étant, pour implanter les bonnes pratiques dans le milieu, le travail doit se faire en collégialité dans une harmonie ou un ensemble de gestes, questionnements et décisions, où chacun joue sa partition en collaboration les uns avec les autres. Par exemple, l’enseignant ou le spécialiste qui apprend à mettre en œuvre la pratique du pardon dans sa tâche au quotidien, le chef d’établissement pourrait se charger de soutenir l’enseignant dans la réalisation de cette tâche en lui apportant d’autres idées fructueuses.

Enfin, le chef d’établissement peut veiller sur les tâches des différents acteurs, tenir des rencontres régulières pour avoir les difficultés liées à l’exercice de chaque acteur et faire en sorte que chaque acteur reste engagé aux côtés des acteurs directs de la structure pour jouer son rôle dans la synergie d’actions.

CONCLUSION

Nous venons de donner notre point de vue sur ce que le chef d’établissement peut faire pour faciliter l’implantation des bonnes pratiques dans un contexte de gestion axé sur les résultats. Dans nos analyses, il est ressorti que, dans le système de gestion axé sur les résultats par rapport à l’implantation des bonnes pratiques, l’apprenant reste la cible de l’intervention, les autres acteurs soutiennent ce dernier tandis que l’acquisition de comportements et d’attitudes responsables demeure l’objectif à atteindre, le tout planifié dans un contexte holistique.

Le rôle du chef d’établissement consisterait à organiser, à encourager, à réunir et à soutenir les autres acteurs que sont les enseignants, les élèves eux-mêmes, les parents d’élèves, la communauté et l’état tout en s’impliquant lui-même dans les actions.

Ceci étant, les bonnes pratiques civiques lorsqu’elles sont bien définies clairement avec leurs objectifs et leur plan d’action au sein de la structure et dans la synergie d’actions, lorsqu’elles sont bien comprises, peuvent ancrer dans les habitudes pour devenir des leviers puissants qui soutiennent la réussite de l’apprenant dans un climat favorable. Dans le contexte actuel ou l’incivisme prend le dessus, ceci devrait être au cœur du projet éducatif et dans les préoccupations des chefs d’établissements qui, pour y parvenir, ne devrait jamais cesser de croire que la réussite d’un plus grand nombre se trouve toujours au bout des efforts consentis.

Zinsonné Félicité Marie Lucile Sorgho, Attachée de recherche à l’INSS, Courriel :zf_sorgho@yahoo.fr, Ouagadougou/BF

BIBLIOGRAPHIE

Gogoua, A. (2012). Gestion axée sur les résultats : concepts et principes.
Cellule d’analyse de politiques économiques du CIRES/ Abidjan/Cote d’ivoire.
Section du Rhône/ Comité du 5ème arrondissement (2007). Remise de la Coupe du Challenge du Civisme au Lycée Edouard BRANLY. Société d’entraide des membres de la légion d’honneur Honneur, Entraide, Patrie.

UNODC (2019). Manuel pour Gestion Axée sur les Résultats et l’Agenda 2030 pour le développement durable. Manuel. https://www.unodc.org/documents/SDGs/RBM_Manual_French_final.pdf

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique