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Sécurité sociale du travailleur migrant : Ce qu’il faut savoir sur les dispositions prévues par la CNSS

Publié le samedi 25 avril 2020 à 22h35min

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Sécurité sociale du travailleur migrant : Ce qu’il faut savoir sur les dispositions prévues par la CNSS

Entre accords et conventions, la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) du Burkina permet au travailleur migrant de jouir de ses droits en matière de sécurité sociale. Quelles sont les prestations offertes au travailleur migrant ? Comment peut-il en bénéficier ? Dans cet entretien, le directeur central des prestations de la CNSS, Dieudonné Kaboré, apporte des précisons.

Lefaso.net : Que faut-il entendre par travailleur migrant ?

Dieudonné Kaboré : Selon la convention 143 de l’Organisation internationale du travail (OIT), le travailleur migrant désigne une personne qui émigre d’un pays à un autre en vue d’être occupée autrement qu’à son propre compte.
En termes simples, il s’agit d’une personne qui quitte son pays pour aller travailler dans un autre pays pour le compte d’une autre personne physique ou morale.

Des conventions et accords ont été signés avec d’autres Etats en vue de permettre aux travailleurs migrants de jouir de leurs droits en matière de sécurité sociale. En quoi consiste ces accords et conventions ? Combien de pays sont-ils concernés ?

Une convention de coordination est soit multilatérale, soit bilatérale. La convention multilatérale est établie entre plusieurs Etats et permet d’assurer aux travailleurs migrants une protection continue en coordonnant les législations nationales. Le Burkina Faso a signé plusieurs conventions de coordination. A titre d’exemples de convention multilatérale, nous pouvons citer la convention CIPRES (Conférence interafricaine de prévoyance sociale qui regroupe quatorze pays) et la convention de l’IPRAO (Institut de prévoyance retraite de l’Afrique occidentale) qui est une vieille convention qui regroupe cinq pays.

La convention de la coordination bilatérale coordonne les législations de sécurité sociale de deux Etats en vue de la conservation des droits acquis et des droits en cours d’acquisition. Nous pouvons citer quelques conventions de coordination signées par le Burkina Faso avec d’autres Etats comme la Côte d’Ivoire avec la CGRAE (Caisse générale de retraite des agents de l’Etat de Côte d’Ivoire) et la Convention bilatérale entre le Burkina et le Mali.

Des accords de paiement ont été signés avec huit pays en vue de faciliter le paiement des droits des travailleurs migrants qui y ont accompli toute leur période d’activités. Il s’agit du Bénin (CNSS), de la Côte d’Ivoire (CNPS et CGRAE), du Mali (INPS), du Sénégal (IPRES), du Togo (CNSS), du Niger (CNSS) et du Gabon (CNSS).

Avez-vous d’autres conventions/accords en perspective ?

En termes de perspective, nous avons des pays à forte concentration de travailleurs burkinabè avec lesquels il n’y a pas encore de conventions ou d’accords de paiement avec le Burkina Faso et dont il serait nécessaire d’en négocier. Par exemple, nous pouvons citer la France, l’Italie, le Ghana.

Pour un Burkinabè ayant travaillé dans un pays où il n’existe pas de convention entre la CNSS et ledit pays, quelles sont les possibilités qui lui sont offertes pour percevoir sa pension ?

Les possibilités offertes à un Burkinabè ayant travaillé dans un pays où il n’existe pas de convention entre la CNSS et l’organisme de sécurité sociale de ce pays sont limitées. Les services de la CNSS peuvent assister l’assuré dans la constitution et la transmission de son dossier de pension. Le travailleur est tenu d’accompagner son dossier avec un relevé d’identité bancaire pour recevoir ses paiements au niveau de sa banque. Il en est de même lorsqu’il est déjà retraité et qu’il veut rentrer définitivement au Burkina, il est obligé de recevoir sa pension par l’intermédiaire d’une banque.

Au titre des prestations de sécurité sociale offertes aux travailleurs, figure la retraite. Dans la pratique, comment le travailleur migrant peut-il en bénéficier ? Comment se fait le paiement de la pension ?

Les prestations payées aux travailleurs migrants par la CNSS-BF pour le compte d’autres Caisses de sécurité sociale sont la pension et la rente.
Au titre des prestations relevant des accords de paiement, la Caisse d’affiliation de l’assuré transmet à chaque échéance de paiement (trimestrielle ou mensuelle selon l’institution émettrice) un bordereau de paiement contenant la liste des assurés et des montants à payer.

Selon les accords, les fonds y relatifs doivent suivre les bordereaux ; mais dans la réalité, dès la réception des listings des assurés, la CNSS procède au paiement en attendant le virement de fonds.

Pour ce qui concerne les prestations sous convention de coordination, elles sont payées en même temps que les pensions propres à la CNSS, c’est-à-dire que dès que la pension est liquidée ou calculée par la Caisse concernée, le dossier accompagné d’une lettre de prise en charge dans laquelle figurent notamment le montant de la pension et la date d’effet est transmis à la CNSS qui procède alors au paiement de sa part et de celle de l’autre caisse.

Y-a-t-il un système de compensation de retraite pour un travailleur migrant burkinabè ayant travaillé dans d’autres pays en plus de son pays d’origine ?

Nous comprenons par système de compensation de retraite, le système de coordination qui est prévu par la convention de coordination et qui permet à l’assuré travailleur migrant burkinabè ayant accompli ses périodes d’activités dans d’autres pays de cumuler ces différentes périodes de cotisation pour bénéficier d’une pension. Prenons l’exemple d’un travailleur burkinabè ayant effectué dix ans de service en Côte d’Ivoire et ayant cotisé à la CNPS, et de retour au Burkina, il a travaillé pendant cinq ans avec des cotisations versées à la CNSS.

En tenant compte des régimes de la CNSS et de la CNPS, qui prévoient qu’il faut 15 années de cotisations pour bénéficier d’une pension et de la convention qui existe entre les deux institutions, l’assuré peut, grâce au cumul des deux périodes de cotisation effectuées dans les deux pays, bénéficier d’une pension de retraite calculée au prorata par chaque Caisse.

Quelles sont les difficultés rencontrées dans l’exécution des différentes prestations offertes aux travailleurs migrants ?

Des difficultés sont rencontrées tant dans la gestion que dans le paiement des prestations des travailleurs migrants.
Au niveau de la gestion des dossiers, il y a la lenteur dans le traitement des dossiers de pension qui sont reçus par les services de la CNSS et transmis à la Caisse concernée pour liquidation.

L’appréciation des pièces contenues dans les dossiers incombe à la Caisse d’affiliation de l’assuré et des dossiers sont souvent rejetés pour non-conformité de pièces. Certaines lenteurs dans le traitement sont souvent dues à des reconstitutions des périodes de cotisations effectuées par la Caisse de l’assuré, et cela peut souvent prendre énormément de temps.

Pour ce qui concerne les paiements, il est constaté régulièrement des suspensions de prestations liées au non-dépôt des pièces de maintien des droits (certificat de vie, certificat de non-remariage, certificat de scolarité) ; ces pièces doivent impérativement être établies par les assurés et déposées aux guichets de la CNSS entre le 1er septembre au 30 novembre de chaque année pour transmission à la Caisse de l’assuré.

Des communiqués sont diffusés à cet effet mais il arrive effectivement que des assurés ne déposent pas lesdites pièces et font l’objet de suspension par leur Caisse d’affiliation. Dans ces cas, le rétablissement de la pension est conditionné par la transmission à la Caisse de l’assuré, d’une réclamation accompagnée des pièces de maintien des droits.

Pour les cas où les bordereaux de paiement de prestations sont transmis trimestriellement à la CNSS, vous conviendrez avec nous que d’énormes difficultés sont rencontrées par ces assurés qui sont contraints d’attendre plusieurs mois pour percevoir leurs prestations.

L’autre grande difficulté est celle liée aux opérations de contrôle physique (billetage) effectuées par les Caisses de sécurité sociale tous les cinq ans. Les assurés absents à ces contrôles voient leurs prestations suspendues jusqu’à ce qu’ils soient reçus et contrôlés par les équipes de leur Caisse d’affiliation qui, malheureusement, ne viennent en mission qu’une ou deux semaines pour ces opérations. Cela constitue une grosse difficulté tant pour la CNSS chargée de jouer le rôle d’interface entre l’assuré et sa Caisse mais surtout pour l’assuré qui est obligé de rester durant de longues périodes sans prestations.

Des retards sont souvent constatés dans le paiement des pensions des travailleurs migrants. Qu’est-ce qui explique cette situation ?

Ces retards de paiement qui peuvent être assimilés à des suspensions de prestations sont liés aux difficultés soulevées plus haut. En parlant des paiements proprement dits, les retards sont liés à la transmission des bordereaux de paiement par les Caisses extérieures. Sinon dès que la CNSS dispose de ces documents, elle procède au paiement.

Y-a-t-il un aspect sur lequel vous voudriez revenir dans cet entretien ?

Ce qui l’on peut ajouter, c’est que malgré les difficultés constatées, il faut noter que les accords et conventions permettent à des milliers de retraités de percevoir sur place au Burkina, leurs prestations sans aucun frais au lieu de faire des déplacements coûteux dans les pays de leur Caisse d’affiliation pour déposer leur dossier de retraite ou pour se faire payer comme cela se faisait de par le passé.

Nous voudrions lancer un appel aux travailleurs migrants bénéficiaires de prestations extérieures de respecter les délais de dépôt des pièces de maintien de droit prévu à partir du 1er septembre jusqu’au 30 novembre de chaque année et inviter tous ceux qui connaissent des difficultés liées à leurs prestations pour diverses raisons à prendre attache avec les services de la CNSS qui leur indiqueront les conduites à tenir.

Au nom de la Direction générale, nous remercions Lefaso.net qui nous permet d’éclairer les assurés bénéficiaires de prestations extérieures.

Entretien réalisé par Nicole Ouédraogo
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 25 avril 2020 à 14:13, par Sorgho desire En réponse à : Sécurité sociale du travailleur migrant : Ce qu’il faut savoir sur les dispositions prévues par la CNSS

    Vraiment c est avec un grand intérêt que j’ai lu cet article vraiment si vous pouvez accélérer les conventions avec des pays comme l italie ça soulagera nombreux travailleur migrant en situation de retraite

  • Le 25 avril 2020 à 20:30, par Un Burkinabê En réponse à : Sécurité sociale du travailleur migrant : Ce qu’il faut savoir sur les dispositions prévues par la CNSS

    La CNSS est "un faux type" comme nous aimons le dire dans notre jargon. Elle devait s’inspirer des pays developpés. Pourquoi vous ne permettez pas aux cotisants d’investir l’argent de leurs retraites dans d’autres activités comme cela se passe dans les pays Anglo-saxons ? Aussi il faut donner l’opportunité aux cotisants de récupérer toutes les sommes cotisées en un coup KO. Pourquoi voulez vous gérer l’argent des cotisants à leur place. Ceux qui ne veulent pas prendre de risque peuvent vous demander de garder leurs sous pour le récupérer chaque mois ou chaque 3 mois. Mais permettez à ceux qui veulent prendre des risques de récupérer tous leurs sous cotisés (deductions faites de vos agios pour avoir gardé l’argent pour des années) et s’en aller. Du moment où vous ne soutenez personne lorsqu’il perd son boulot je ne vois vraiment pas votre utilité à part les gros sous que vous payez à vos employés. Au finish vos employés vivent mieux que les travailleurs qui cotisent. Je pensais que pendant la Transition et que le Prof. Loada était Ministre il avait une vision pour rendre la CNSS plus modernes mais hélas ! Nous pouvons vous aider avec des idées.

    • Le 27 avril 2020 à 09:08, par lapatriote En réponse à : Sécurité sociale du travailleur migrant : Ce qu’il faut savoir sur les dispositions prévues par la CNSS

      merci pour cette intervention. Les travailleurs ont interet a revoir les conditions avec la CNSS. Vous l’avez si bien dit, en cas de perte d’emploi que fait la CNSS ? RIEN.
      Des gens cotisent pendant 15 a 20 ans et en cas de perte d’emploi ils sont laisses a eux-memes. certains meme decedent sans toucher un seul centime de l’argent gagne a la sueur de leur front.
      le systeme de cotisation merite une revision/reorientation afin d’eviter que la securite ne devienne une insecurite.

    • Le 1er mai 2020 à 09:22, par moussa En réponse à : Sécurité sociale du travailleur migrant : Ce qu’il faut savoir sur les dispositions prévues par la CNSS

      La CNSS pratique le système par répartition c’est à dire que les valide cotisent pour les invalides. Pour votre gouverne la CNSS applique la loi votée par nos députés
      donc parler à ces députés de changer la loi pour prendre en compte vos préoccupations. MERCI

  • Le 3 juillet 2020 à 13:13, par Faustin Honoré YAMEOGO En réponse à : Sécurité sociale du travailleur migrant : Ce qu’il faut savoir sur les dispositions prévues par la CNSS

    Bonjour et félicitations pour ces informations qui nous parviennent. Cela évite et de beaucoup les malentendus préjudiciables. La CNSS Burkina a beaucoup évoluée.
    Pour mon cas, j’ai travaillé au Niger et au Burkina. Concernant ma cotisation faite au Niger, la CNSS Burkina a transmis depuis 2019 mon dossier à la CNSS Niger qui jusque-là, n’a pas répondu, ce qui constitue un retard de paiement de ma pension complète au Burkina.
    Je garde cependant un grand espoir de la résolution du problème de ma pension complémentaire Niger.
    Toute ma reconnaissance de vos services rendus

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