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Logements sociaux : Issiah Tapsoba dans le bourbier de CEGECI et de l’entreprise Wend Panga

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Publié le mercredi 22 avril 2020 à 12h10min

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Logements sociaux : Issiah Tapsoba dans le bourbier de CEGECI et de l’entreprise Wend Panga

Issiah Tapsoba ne sait plus à quel saint se vouer. Avec le programme « 40 000 logements sociaux », il voyait l’espoir de disposer enfin d’un toit. Ce fonctionnaire s’est donc endetté, et a payé la totalité de la somme requise auprès du centre de gestion des cités (CEGECI). Mieux, depuis le 23 septembre 2019, il est entré en possession de son attestation de réception des clés. Mais sa villa n’est toujours pas livrée. Tout coince depuis sept mois. Le CEGECI et l’entreprise Wend Panga se rejettent la responsablité.

Des correspondances de détresse, il en a adressé au centre de gestion des cités (CEGECI) et à la société immobilière Wend Panga. De multiples appels téléphoniques. Mais rien n’y fit. Le temps passe, mais Issiah Tapsoba attend toujours vainement sa villa.

En effet, dans le cadre du programme des « 40 000 logements sociaux », il a été attributaire de la villa T24 sise à la cité de Bassinko, de type F2 type 1 social, bâtie sur la parcelle N°06 Lot 22 Section 2016 (CV) d’une superficie de 204 m2. Le 23 septembre 2019, il recoit une attestation de réception des clés de sa villa. C’est le précieux sésame quand le client a fini de respecter ses engagements en soldant. 6 500 000 F CFA, c’est ce que Issiah Tapsoba a dû verser.

« Comme vous le savez, la formule des logements sociaux n’est plus la location-vente sur le long terme. Généralement, on donne un délai de six mois. Il faut contracter un prêt avec la banque et dès que vous prenez le prêt, la banque commence à vous couper effectivement (…). Une fois que le client solde, nous lui remettons l’attestation définitive. En plus, nous faisons l’attestation de remise des clés en trois exemplaires. Nous gardons un, nous mettons le client en contact avec le partenaire privé à qui il remet le deuxième exemplaire et lui-même garde le troisième », explique Halidou Lougué, directeur commercial du CEGECI.

Halidou Lougué, directeur commercial de CEGECI

Mais depuis, c’est un véritable chemin de croix pour le client. Las d’attendre trois mois après l’acquittement des frais de cession, il adresse une correspondance à l’entreprise Wend Panga, suite à des démarches auprès de la CEGECI. « En considérant ainsi mon droit à jouir de la propriété après avoir tenu mes obligations et au régard des préjudices que le non-respect de vos engagements me cause, je voudrais vous inviter à une plus grande diligence afin que je puisse effectivement rentrer en possession des clés au plus tard le 15 janvier 2020 », lit-on dans la missive en date du 2 janvier 2020, envoyée au directeur général de la socité immobilière Wend Panga, avec ampliation au directeur général du CEGECI. Pas de réponse. Il décide de faire la même démarche, mais en inversant les rôles.

Le 14 février 2020, sa correspondance est adressée au directeur général de CEGECI, avec ampliation cette fois le directeur général de Wend Panga. « Après avoir contacté plusieurs fois vos deux structures sans qu’aucune reponse rassurante ne me soit fournie, et en considérant ainsi mon droit de jouir de la propriété et des préjudices que le non-respect de vos engagements me cause, je me tourne, en ultime recours et pour une dernière fois, vers vous en espérant trouver satisfaction à ma préoccupation », écrit-il.

Silence radio encore cette fois. Mais, pour la deuxième fois, en mars, il est reçu par les collabrateurs du directeur général du CEGECI, sans véritablement de solutions.
C’est finalement au téléphone qu’on lui confiera que « le logement n’est pas encore finalisé » et qu’il devrait « encore patienter ».

« Nous n’avons pas donné autorisation au CEGECI pour vendre nos logements MDNAC »

Issiah Tapsoba est à bout de souffle. « Cela fait sept mois que j’ai reçu l’attestation de remise des clés sans pouvoir accéder au logement pour lequel j’ai procédé au paiement intégral avec des structures immobilières qui ne remplissent pas leur part de contrat », constate amèrement le client déçu. Des préjudices, ils sont à la pelle. Du temps et de l’énergie perdus. Et surtout un manque à gagner sur le plan financier. « Cela fait également sept mois que je suis obligé de verser 130 000 F CFA à titre de loyer (75 000 pour le prêt contracté en vue d’acquérir le logement dit social + 30 000 pour le loyer qui abrite ma famille à Ouaga + 25 000 pour mon loyer en province où je suis en service) », résume-t-il.

Au Centre de gestion des cités, on dit comprendre le client. « Tapsoba Issiah c’est effectivement un client qui a fait l’effort de solder le logement », reconnaît Halidou Lougué, directeur commercial. La faute de tout ce retard, nous confie le directeur commercial, c’est l’entreprise immobilière Wend Panga.

« Le promoteur traîne les pieds. Nous l’avons interpellé plusieurs fois pour dire que nous ne sommes pas à l’aise avec les clients. Je crois qu’il a quelques difficultés financières à pouvoir honorer les sanitaires et les portes isoplanes qui manquent. Ils doivent être trois ou quatre clients dans l’attente de leurs clés. Cela ne devrait malheureusement pas impacter le client qui est dans son bon droit. Comme c’est nous qui sommes en partenariat avec le promoteur, c’est nous qui prenons attache avec lui pour suggérer de diligenter les travaux parce que le client a soldé et il est dans son bon droit de réclamer ses clés », ajoute Halidou Lougué.

A l’entreprise Wend Panga par contre, on s’en lave les mains. Hamadou Ouédraogo responsable du service juridique de la société immobilière ne tourne pas. « Nous n’avons pas donné autorisation au CEGECI pour vendre nos logements MDNAC. Il faut leur demander de vous produire un protocole de convention qui dit de vendre ces logements. Nous construisons nos logements et nous les vendons, et quand c’est fait, c’est nous qui remettons les clés. Si le CEGECI avait l’autorisation pour vendre nos logements, on se serait acquitté de nos obligations », nous a-t-il martelé.

Nous n’avons pas donné autorisation au CEGECI pour vendre nos logements... , clame-t-on du côté de l’entreprise Wend Panga

Il précise que la villa vendue à Issiah Tapsoba avait été construite dans le cadre d’un protocole entre le ministère de la défense nationale et des anciens combattants (MDNAC) et d’autres institutions comme la défunte banque de l’habitat, le ministère chargé de l’urbanisme...

En clair, le CEGECI n’est pas partie au protocole pour les villas MDNAC de Bassinko. Pourquoi vendre des logements pour lesquels nous n’avons pas de convention, se demande alors le responsable du service juridique de Wend Panga. Pour lui, le CEGECI est une société commerciale de promotion immobilière comme Wend Panga. Et au cas où il serait intéressé à vendre les villas d’une autre société, il devrait y avoir une convention au préalable.

Mais Wend Panga aurait-elle des difficultés financières, ce qui l’empêcherait d’honorer ses engagements avec les clients. La réponse est sans appel. « Nous n’avons pas de difficultés financières. La vente de la chose d’autrui est nulle », assène Hamadou Ouédraogo.

Un bourbier étranger au client

Du côté de CEGECI, l’on estime que les logements sociaux sont d’office vendus par son entremise. Et c’est la convention mère de construction de ces logements qui le dit. Elle est tripartite : Le ministère de l’urbanisme, la banque de l’habitat et l’entreprise Wend Panga. La sélection des bénéficiaires se fait par le ministère de l’habitat et les noms des bénéficiaires sont transmis à la banque de l’habitat pour la mise en place des crédits acquéreur.

La banque de l’habitat a changé de statut (devenue une banque privée). En plus, c’est maintenant le CEGECI qui s’occupe de la gestion des bénéficiaires sélectionnés pour les logements sociaux. Ce changement a nécessité des signatures complémentaires avec une dizaine de promoteurs immobiliers. Mais le hic, c’est qu’avec Wend Panga, effectivement rien n’est encore signé.

« Il y avait un problème parce qu’on ne maitrisait pas le nombre exact des logements non attribués. C’était des logements attribués à l’armée. On nous avait transmis une première liste de 102 logements, mais on s’est rendus compte que certains étaient attribués. On a demandé à Wend Panga de nous clarifier la situation exacte pour qu’on signe la convention sur cette base. Si on signe 102 logements alors que ce n’est pas le cas, c’est comme si nous leur devons l’argent de 102 logement alors qu’en réalité ce n’est pas vrai. Cette clarification ne s’est pas faite, donc actuellement, nous avons même leur argent qu’on ne peut encore payer, puisque le protocole n’est pas signé », explique pour sa part Halidou Lougué, le directeur commercial de CEGECI qui ajoute par ailleurs que c’est l’entreprise qui traine les pieds pour la signature de la convention supplémentaire.

Le précieux sésame qui devrait ouvrir les portes de sa villa...


Et Issiah Tapsoba dans tout ça ?

Le CEGECI dit être dans l’embarras. C’est lui qui, en tant que structure de commercialisation de logements, scelle les partenariats avec les sociétés immobilières privées. C’est donc lui qui endosse toutes les responsabilités et doit être l’interlocuteur avec le client. Foi du directeur commercial, une solution est envisagée.

« C’est nous qui encaissons l’argent des clients. Au lieu de remettre tout l’argent au promoteur, nous allons faire une évaluation de tout ce qui manque dans les logements et nous allons les poser, quitte à déduire cela dans son payement », prévoit-il. De commun accord avec Wend Panga, cette éventualité est envisagée pour mettre fin au calvaire de Issiah Tapsoba.

Mais quand ? « Je ne peux vous donner une date exacte. Nous prenons au sérieux cette situation (…) Dans les meilleurs délais », rassure Halidou Lougué, directeur commercial du CEGECI. La société Wend Panga soutient ne même pas connaitre le client. S’il y a un problème c’est auprès de CEGECI qu’elle l’invite à se plaindre. Issiah Tapsoba lui il attend toujours. Mais sa banque non. Elle continue de couper son salaire. Mais point de villa. Affaire à suivre…

Tiga Cheick Sawadogo
Lefaso.net

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