Fayso Siri : ce geste de solidarité, tant attendu, du président du Faso et de son gouvernement, est certes très salutaire, mais il intervient avec un décalage temporel par rapport au début de la crise. Ce geste aurait pu avoir un écho et impact plus retentissant au sein de la population et du personnel soignant, s’il intervenait 4 semaines plus tôt, en ce sens, qu’il aurait été d’une part le maillon fort de cette chaine de solidarité déjà enclenchée, et d’autre part, le signal fort donné par le premier des burkinabè, de cet engagement commun souhaité, pour vaincre cette pandémie de COVID 19 (SRAS- cov-2) au Burkina Faso.

Mais retenons qu’il n’est jamais trop tard pour bien faire. Au-delà de cette gestion de solidarité, le président de Faso pourrait rendre une visite aux personnels soignants au CHU de Tengandgo, car en période de crise, les encouragements, surtout à travers la présence physique du commandant en chef, auprès de ces soldats de la santé dans leur combat quotidien contre le COVID 19, qu’on pourrait qualifier de « la patrie ou la mort, ils vaincront », permettent toujours de booster le moral de la troupe en mission.

Troupe constituée par ces hommes et femmes, qui malgré le risque permanent d’être infectés, abattent un travail remarquable nuit et jour, avec des moyens limités, pour que les patients recouvrent la santé. Cette décision de généraliser le port obligatoire du masque de protection pour lutter contre le COVID 19 est salutaire, mais, elle aurait pu intervenir également plus tôt, ce qui allait peut-être permettre de rompre rapidement la chaine de transmission de cette maladie, dont l’onde de choc nationale au-delà de l’aspect sanitaire, se fait ressentir sur le plan sociale, économique et académique etc.

Mais, la question est de savoir pourquoi les autorités tardent souvent à prendre certaines décisions qui sont souvent évidentes ? Avec un esprit critique, on devait savoir plus tôt, que si ce sont que des malades avérés du Covid -19 qui doivent porter des masques pour ne pas contaminer leur entourage, c’est que tout le monde devait en porter, en ce sens qu’on peut être porteur sain de la maladie, c’est-à-dire qu’on ne développe pas la maladie, mais on a cette capacité à la transmettre à autrui.

La question principale que pose cette décision est de savoir, comment le gouvernement va s’y prendre pour faire respecter cette décision par les populations qui mettent constamment au défi l’autorité de l’État ? Attendons de voir.

Dama Aboubacar : Je trouve salutaire l’effort consenti par le président du Faso, c’est d’autant plus salutaire qu’il adjoint tout le gouvernement et cela permettrait de mobiliser un fonds non négligeable au financement du plan de riposte contre le COVID-19. Ce geste venant d’en haut pourrait stimuler d’autres hauts responsables de l’État parlant des présidents d’institutions, des directeurs généraux, des secrétaires généraux etc. à faire de même afin que nous nous rapprochions du budget escompté.

Concernant le port du masque obligatoire à partir du 27 Avril cela est également une bonne mesure qui devrait être accompagnée d’une subvention substantielle voire une gratuité de ces masques à l’effet d’atteindre un résultat satisfaisant.

Lassané Guigma : pour moi c’est bien ce que le président a fait en cédant son salaire ainsi que ces ministres car le peuple souffre actuellement. Concernant le port obligatoire de cache-nez, c’est aussi une bonne décision parce qu’elle vise à protéger la population. Et celui qui refuse de porter, on doit l’arrêter.

Ceux qui disent qu’il est difficile pour eux de s’en procurer ne comprennent rien du tout. C’est pour protéger leur vie. Prenons l’exemple des feux tricolores. Pourquoi ceux qui disent ainsi s’arrêtent quand le feu est rouge. C’est la même chose que le port du cache-nez. Il faut que nous travaillions ensemble à bouter cette maladie hors du Burkina.

Loïc Kibora : c’est une très bonne décision de l’exécutif car cela va permettre de lutter contre cette maladie à coronavirus. Et cela est salutaire. Pour le port du cache-nez aussi, c’est très bien parce que cela va aider à stopper la propagation de la maladie.

Olivier Guy Ouédraogo, secrétaire général de la confédération syndicale Burkinabè : pour moi c’est un acte à saluer parce que comme on le dit l’exemple vient du sommet. Et je pense cet acte sera suivi par d’autres citoyens pour nous permettre de mobiliser le maximum de ressources pour lutter le Covid-19. Vous savez nous sommes un pays pauvre mais nous avons deux grandes richesses que sont notre engagement et notre capacité à nous unir quand il y a un grand fléau qui menace notre pays.

Donc je pense que c’est un bon exemple qui doit être suivi d’un appel à tous les citoyens à se mobiliser. Selon moi, aucune ressource n’est négligeable dans cette situation pour nous permettre de vaincre cette pandémie.

Pour le port de cache-nez, je pense que la décision a un peu tardé. Dès le début moi je portais mon cache-nez même si certains spécialistes doutaient de leur efficacité. Son port permet psychologiquement de nous rappeler qu’il y a une pandémie qui est là. Que la situation est grave et que chacun doit prendre ses dispositions. Pour que cette mesure soit efficace, il faudrait que les cache-nez soient disponibles. Honnêtement c’est le vrai problème. Il n’y a pas de cache-nez et chacun y va avec ce qu’il peut. Il ne faut pas aussi que nous utilisions des cache-nez qui n’ont vraiment aucun effet en matière de protection.

Mon appel est qu’il ait une grande disponibilité des cache-nez. À la limiter si on peut les distribuer. Je disais une fois dans le cadre de la lutte contre le terrorisme que nous sommes 600 000 travailleurs du formel au Burkina Faso, 200 000 à la fonction publique, 400 000 dans le privé. 1000 FCFA par mois ça fait 600 000 F CFA, en 10 mois ça fait 6 milliards. Vous vous rendez compte. Et, je dis, parfois, il faut un peu de chacun pour qu’effectivement on puisse faire un grand pas ensemble. Je profite lancé un appel à tous les travailleurs et surtout aux militants de la CSB à imiter ce bel exemple car, dans les jours à venir, j’emboiterais cet exemple.

Armand Tapsoba : je dirais que c’est une bonne chose mais c’est venu un peu en retard. Quand on reçoit quelque chose on ne dit jamais que ce n’est pas bon mais selon moi depuis le départ quand on était à 40 ou 50 personnes atteintes du covid-19, le président en tant que premier responsable faisait un geste. Mais je ne sais pas pourquoi il a gardé le silence jusqu’ à maintenant pour décider. C’est toujours bien.

Le hic est que ce qu’il va céder va-t-il arriver au bon port. C’est surtout ça notre inquiétude. Et je trouve que toutes les contributions que les Burkinabè ont données pour lutter cette maladie, la population ne ressent rien. Par exemple on parle de confinement mais je ne le souhaite pas mais je pense qu’un confinement total n’est pas possible au Burkina. Pourquoi parce que l’État ne veut pas s’occuper de la population. Je pense qu’on devrait tous, ensemble, lutter pour se sortir de cette maladie. Le geste du président c’est comme le médecin après la mort.

Le port obligatoire de cache-nez est une bonne chose mais il y a un problème. Moi par exemple je suis asthmatique et je ne supporte pas. Et quand on va m’obliger à porter et que je tombe en cours de route. Qu’est-ce que l’État va décider en ce moment. Qui prendra la responsabilité. Il ne faut pas à cause de la pandémie, on fasse des morts en dehors de la pandémie ou bien des orphelins. C’est mieux de dire à tous ceux qui peuvent porter à le faire et à ceux qui ne peuvent pas un autre moyen. Moi par exemple j’ai mis du beurre de karité dans mes narines pour circuler et ce qui me permet de mieux respirer.

Florent Sou : pour moi cette décision est mi-figue mi-raisin parce que si le président et ses ministres sont des salaries, et ils décident de donner leurs salaires, ils vont manger où ? Ce qui signifie qu’il y a anguille sous roche. Cette décision n’est rien pour moi. Pire elle va entrainer plus de détournement encore. Un salarié qui vit de son salaire ne peut pas céder tout son salaire. Ce qui fait que moi je ne suis pas d’accord avec cette mesure. Pour le port du cache-nez, je trouve la décision très sage. Mais c’est quel genre de cache-nez même. Si les cache-nez médicaux, cela va être compliqué pour tout le monde au regard des difficultés.

Arouna Ilboudo : avec cette décision qu’est-ce que nous on peut dire d’autant plus les salaires qu’ils percevaient même étaient en dehors de la loi qui fixe leur salaire. Et c’est n’est qu’une partie de ce qu’ils nous devaient comme l’a dit l’autre. Ce qu’ils vont donner là, c’est le revenu du peuple. Maintenant est-ce que ça sera utilisé à bon escient ?

Là je me pose des questions. Depuis que le pays est plongé dans cette maladie, ce qu’ils ont récolté comme contribution dépasse le milliard mais dites-nous dans le milliard qu’est-ce qu’on a pu faire ? Et si cela est une source de biens pour d’autres. N’oublions pas que nous sommes en année électorale, qu’est-ce qui prouve que l’argent ne sera pas mis à coter pour pouvoir battre la campagne ?

Aujourd’hui par exemple avec la fermeture des marchés, ils disent qu’ils ont donné du riz aux commerçants. Par exemple un sac de 25 kilogrammes pour 40 personnes, ça fait 0,00623 gramme à peu près. Ce qui ne peut même pas faire de la bouillie. On ne sait pas si le président est bien entouré ? Est-ce que son entourage a besoin de lui d’abord. Ou bien on a trouvé sa faiblesse et on veut l’exploiter parce que tous ceux qui gravitent autour de lui risquent de le conduire dehors comme on a fait à l’autre (Blaise Compaoré en 2014, NDLR). Même s’il a pris des journalistes dans le gouvernement pour ne plus être critiqué et a fermé la bouche de certains pour qu’ils ne disent rien.

Si vous exigez à ce que tout le monde porte des cache-nez comment comptez-vous faire ? Ils seront distribués ou pas ? Il ne faut pas que les autorités profitent de cette maladie pour ce faire de l’argent. Et pourtant tout porte à le faire croire. c’est ce que nous voyons.

Pierre Badolo : six mois de son salaire, ça ne signifie rien même un an. Le Burkina Faso n’est pas l’épicentre de la maladie et importer des cache-nez est une irresponsabilité. Six mois de son salaire ne va pas éradiquer la maladie. Ce qu’on veut qu’ils lèvent les mesures afin de permettre aux gens d’aller chercher leur pain quotidien.

El hadji Oumarou Kiéma : cette décision est une bonne chose mais là où ça m’inquiète, je ne sais pourquoi les autres ministres ne cèdent qu’un mois. Ils doivent faire plus comme les deux ministres d’État et je signale que c’est la première fois que nous voyons ça au Burkina. Pour moi le port de cache-nez doit être obligatoire parce que l’État veut protéger la population. Je le félicite pour cette décision. Celui qui ne peut pas porter qu’il reste à la maison. Mais pourquoi les chefs de projet ne font rien, les patrons d’institutions. Si l’État a décidé ainsi il faut qu’ils se prononcent aussi. Vraiment j’adhère à cette prise de décision.

Jean Marc Sawadogo : pour le port du cache-nez, je suis d’accord avec cette mesure parce que c’est pour nous protéger. Donc c’est mieux que chacun achète son cache-nez pour se protéger contre le Covid-19. L’argent que les responsables donnent là on ne peut pas prendre ça pour lutter contre cette maladie parce que c’est insuffisant. Si c’est son salaire qu’il laisse car avec ça il ne peut pas nous soigner avec.

Propos recueillis par Issoufou Ouédraogo
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