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Suspension des transports en commun : Désarroi et inquiétude à la gare routière de la Patte-d’oie

Publié le mardi 31 mars 2020 à 19h30min

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Suspension des transports en commun : Désarroi et inquiétude à la gare routière de la Patte-d’oie

Ils font partie des victimes collatérales du Covid-19. Les transporteurs, taximen et commerçants de la gare routière Ouagarinter sis à la Patte-d’oie, broyent du noir depuis la décision de suspendre les transports en commun en vue de limiter les risques de propagation de la maladie. Leur quotidien se limite désormais à se tourner les pouces en attendant la levée de la suspension, qu’ils espèrent pour bientôt.

Ce sont des minicars communément appelés « Dina » qui s’offrent à perte de vue à notre regard à la gare routière de la Patte-d’oie. Ce lundi 30 mars 2020, à notre passage, l’ambiance était toute morose dans ce lieu qui grouille habituellement de monde. Tout comme partout ailleurs dans le pays, ces cars de transport en commun sont interdits de circuler avec des passagers à bord. Assis en groupes sous les hangars, chauffeurs, apprentis et rabatteurs devisent tantôt tranquillement, tantôt bruyamment. Toujours est-il que la discussion tourne inlassablement autour de la maladie à coronavirus et ses conséquences sur leur secteur.

Si presque tous sont unanimes à reconnaître le bien-fondé de la décision de suspendre les transports en commun, ils déplorent néanmoins une décision brusque qui n’a fait que les plonger dans le désarroi sans qu’ils n’y soient préparés. Du jour au lendemain, ils se retrouvent donc sans revenus et passent leurs journées à la gare pour tromper l’ennui.

Les Mini cars garés, en cause, suspension des transports en commun

« Nous ne travaillons plus. Actuellement, c’est avec nos économies que nous vivons. C’est vrai que c’est pour notre protection que le gouvernement a pris ces mesures, mais il faut qu’il nous aide. On ne peut pas être là, on ne travaille pas et pourtant il faut bien qu’on mange. Il faut que le gouvernement nous vienne en aide » martèle Antoine Nikiéma, chauffeur.

Les chauffeurs se retrouvent à la gare pour passer le temps

Et devant notre micro, tout le groupe tient à exprimer son désarroi. « Nous sommes rentrés de Manga et nous avons appris que le lendemain, on ne doit plus rouler. Nous sommes assis sans rien. Il faut que le gouvernement nous vienne en aide, sinon nous finirons par devenir des voleurs. On va faire un mois sans travailler, comment on va vivre ? », se demande Djibrina Zoundi.

Et Hyppolite Zoungrana de renchérir que leur présence à la gare, malgré la suspension, c’est juste pour s’encourager et aussi parce qu’ils ne peuvent pas rester à la maison, vu qu’ils n’y sont pas habitués.

Djibrina Zoundi plaide pour une réduction du temps de suspension des transports en commun

Certains font même des propositions au gouvernement pour alléger leur situation. « Nos véhicules prennent 27 passagers. Pour limiter la propagation de la maladie, je pense que le gouvernement peut nous demander de nous limiter à quinze passagers. C’est mieux que de suspendre purement et simplement les transports en commun en nous mettant dans une situation financière difficile », suggère Yacouba Zoundi.

Yacouba Zoundi suggère que le nombre de passagers passe de 27 à 15 etque le transport reprenne

« En l’absence des passagers, nous ne vendons plus »

Aziz Ouédraogo vend des téléphones portables à la gare routière. Comme lui, ils sont nombreux les commerçants installés ici et dont les principaux clients sont les passagers. Avec la suspension des transports en commun, il voit son chiffre d’affaires dégringoler. « Avant la mesure de suspension, je pouvais vendre quatre à cinq téléphones par jour. Maintenant, même un seul, je n’arrive pas à vendre. Sans passagers, nous ne vendons plus », affirme-t-il.

Aziz Ouédraogo, vendeur de téléphones portables déplore le manque de marché

Sia Anne, restauratrice ; François Ouédraogo, vendeur d’accessoires de téléphones ; Mahamoudou Nana, vendeur de parfums, tous déplorent le manque de « marché » dû à la suspension des transports en commun.

Et ce ne sont pas les taximen qui diront le contraire. Ablassé Bonkoungou, chauffeur de taxi, rappelle que ce ne sont pas tous les Ouagalais qui possèdent un moyen de déplacement. Ils sont nombreux à utiliser le taxi pour leurs déplacements quotidiens ou occasionnels. Il affirme même que le taxi fait souvent office d’ambulance dans certaines situations, par exemple pour transporter une femme en travail à l’hôpital. C’est pourquoi il estime que le gouvernement aurait pu laisser les taxis circuler avec seulement trois passagers à bord, pour limiter les risques de contamination.

Ablassé Bonkoungou, chauffeur de taxi

Jusqu’à quand pourront-ils tenir sans travail et sans revenus ? Tous se posent la question. Certains comme Djibrina Zoundi suggèrent que la mesure soit levée au bout de deux semaines, au lieu de pratiquement un mois comme signifié dans le communiqué officiel.

Le kiosque de Sia Anne vide sans clients

Mais en entendant un retour à la normale, et même s’ils ne respectent pas vraiment les mesures barrières, tous se tourne vers Dieu et prient pour que, dans les jours à venir, l’épidémie de Covid-19 ne soit plus qu’un mauvais souvenir.

Justine Bonkoungou
Lefaso.net

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