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Journées des maraichers : UFC-Dori présente une autre actualité du Sahel

Publié le lundi 2 mars 2020 à 00h26min

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Journées des maraichers : UFC-Dori présente une autre actualité du Sahel

Transformer des dunes de sable et des terres arides du Sahel en vastes jardins où poussent des produits maraîchers. Fou comme rêve, mais l’Union fraternelle des croyants de Dori (UFC-Dori) s’y investit en accompagnant des groupements de producteurs qui se réunissent chaque année pour exposer le fruit de leur labeur. La 15e édition des Journées du maraîcher du Sahel a été lancée ce 28 février 2020 à Dori. Mais un peu d’amertume cette année. Sept villages qui ont répondu présents aux 14 éditions précédentes n’étaient pas là, à cause de l’insécurité. Le thème de la présente édition se penche d’ailleurs sur le rôle des producteurs dans la reconstruction du vivre-ensemble au Sahel.

Le Sahel n’est pas qu’une vaste étendue infinie de sable où l’harmattan lèche des terres arides parsemées çà et là d’arbres épineux. Ces terres peuvent être productives et faire pousser différentes variétés maraîchères. L’Union fraternelle des croyants de Dori (UFC-Dori) accompagne 30 groupements de producteurs dans ce sens.

Les officiels coupent le ruban, marquant le lancement de la foire

L’organisation, qui a fêté ses 50 ans en 2019, s’est investie depuis plus d’une décennie dans l’hydraulique villageoise. Elle a construit des boulis, ces petites marres artificielles qui permettent aux groupements de producteurs de développer des activités rémunératrices de revenus. Les villageois bénéficient également de semences de qualité. Des potentialités insoupçonnées sont ainsi sorties des sables, créant de petits centres d’affaires dans certains villages, surtout pendant la saison sèche, qui rime le plus souvent avec désœuvrement. Hommes et femmes sont à la tâche et la terre le leur rend bien.

Les visiteurs admiratifs des produits maraîchers

Et chaque année, depuis 15 ans sans discontinue, il est organisé les Journées du maraîcher du Sahel (JMS). C’est un cadre, selon le coordonnateur de UFC-Dori, Paul François Ramdé, qui vise à créer des opportunités d’écoulement et de bonnes affaires pour les exploitants des sites maraîchers ; ce qui, naturellement, contribue à améliorer leurs revenus.

Il s’agit également de stimuler une saine concurrence entre les producteurs des différents sites, dans le but d’accroître la production et améliorer la qualité de cette production. Enfin, les JMS servent de cadre de concertation, de dialogue et d’échanges d’expériences entre producteurs dans le sens de mieux les organiser en réseaux crédibles qui offrent plus d’opportunités.

La visite commentée des stands

« Les acquis sont appréciables, de notre point de vue. Grâce à la saine concurrence créée entre producteurs, la production globale de ces sites encadrés a accru de plus de 40 %, et plus de 85% des producteurs maraîchers encadrés ont désormais un accès facilité au marché et ont amélioré leurs revenus », se réjouit Paul François Ramdé, qui précise que chaque village produit les variétés les plus prisées de son marché pour faciliter l’écoulement. Une précision qui vaut son pensant d’or, toutes les productions sont bio.

Les producteurs résilients espèrent de bonnes affaires

Une 15e édition perturbée par l’insécurité

« Nous avons failli ne pas tenir cette édition », a confessé le coordonnateur, le visage grave. L’insécurité que vit la région du Sahel impacte tous les secteurs d’activités. Les villages se vident de leurs habitants. Résultat, sept villages où il y avait des groupements de producteurs maraîchers accompagnés par l’UFC-Dori n’ont pas répondu au rendez-vous de la 15e édition.

Potentialités insoupçonnées du sahel

« Des communautés vivant auparavant en parfaite symbiose, sont en proie à des conflits fratricides. Des ethnies qui cohabitaient ensemble sont devenues de parfaits ennemis. Ces conflits inter et intra-communautaires ont conduit à une fragmentation du tissu social, mettant en péril la cohésion sociale et le vivre-ensemble, richesses de nos communautés », a dépeint avec amertume Dr Siaka Ouattara, directeur général de la promotion de la cohésion sociale, parrain de cette 15e édition.

De Arbinda à Dori, le courage d’un déplacé interne, Patrice Nana

Le conseiller technique du gouverneur, Moussa Dicko, n’en dira pas plus. Pour lui, le vivre-ensemble au Sahel est profondément touché. « Les liens séculaires se sont fragilisés du fait de la méfiance, de la suspicion. Plus personne ne fait confiance à l’autre et chacun jette l’opprobre sur son prochain », constate-t-il. C’est d’ailleurs pour conjurer les démons de la division et de la violence que l’édition 2020 des JMS se penche sur le rôle des maraîchers dans la restauration du vivre-ensemble.

Un thème bien à propos, dira le directeur général de la promotion de la cohésion sociale, surtout que depuis 2015, l’UFC-Dori a mis en place des comités locaux de paix qui s’investissent dans la gestion des conflits dans leurs communautés (conflits agriculteurs-éleveurs, entre les membres d’une même famille, inter-ethniques) avec des solutions souvent endogènes. « Si un minimum de conditions sont réunis pour leur permettre de retourner dans leur milieu de vie, ces producteurs de groupement déjà mobilisés sur les thématiques de culture de la paix et de gestion des conflits, sont de véritables acteurs de restauration de la confiance sociale et de cohésion sociale », a plaidé Paul François Ramdé, coordonnateur de UFC-Dori.

Solidarité inter-producteurs

Après la coupure de ruban qui a marqué l’ouverture officielle de l’exposition-vente, les officiels ont eu droit à une visite commentée de tous les stands. Malgré la situation difficile, plusieurs groupements de plusieurs villages étaient bien là. Parmi les exposants, le groupe de producteurs d’Arbinda est le symbole de l’entraide entre producteurs, suite aux drames répétés subis par les populations de cette commune.

Patrice Nana est ressortissant d’Arbinda, et depuis quelques mois, déplacé interne à Dori. « Il nous restait sept jours pour récolter la tomate quand les mauvaises personnes (les terroristes, ndlr) sont arrivées et ont tiré. Ce jour-là, ils n’ont pas eu quelqu’un à tuer. Mais avant de partir, ils ont brûlé notre taxi-moto. C’est là que nous avons fui », relate-t-il.

Et comme lieu de refuge, c’est Dori que Patrice Nana et les siens ont choisi. Et pour ne pas vivre aux crochets des autres, ils ont entrepris de continuer les activités maraîchères qui les occupaient à Arbinda. « Quand nous sommes arrivés, nous avons pris attache avec les camarades des groupements accompagnés par l’UFC-Dori, et ils nous ont aidé à avoir un terrain », note le déplacé interne, devant sa récolte de pomme de terre. Cette solidarité entre les groupements de producteurs accompagnés par l’UFC-Dori a ainsi permis d’amoindrir le traumatisme des personnes qui ont subi des atrocités dans leurs villages.

Selon le coordonnateur de UFC-Dori, plus de 400 producteurs et leurs familles ont dû fuir leurs sites en pleine production, par suite d’attaques terroristes répétées dans lesquelles ils ont même perdu des connaissances. Raison pour laquelle tenir cette 15e édition des Journées du maraîcher du Sahel, du 28 février au 1er mars 2020, était aussi une façon d’entretenir l’espoir. « Nous voulons que ce soit une édition d’opportunités pour au moins ceux qui ont pu produire, mais qui, malheureusement, ne peuvent pas vendre comme les autres années, parce que les marchés locaux sont devenus dangereux pour beaucoup de gens ».

Déjà, juste après la visite des stands, alors que nous étions retourné pour les interviews avec les exposants, plusieurs stands avaient déjà réussi à écouler une bonne partie de leurs produits. Une preuve que la demande est bien présente, pour peu que les producteurs aient des cadres organisés pour l’écoulement.

Tiga Cheick Sawadogo
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 2 mars 2020 à 08:15, par Pathe Diallo En réponse à : Journées des maraichers : UFC-Dori présente une autre actualité du Sahel

    Toutes mes felicitations est mes encouragement à UFC Dori. C’est la preuve que même au Sahel si les populations sont soutenues elles peuvent produire pour se nourir et contribuer au dévelopement du Faso. Que Dieu sauve le Faso

    • Le 2 mars 2020 à 15:06, par Kôrô Yamyélé En réponse à : Journées des maraichers : UFC-Dori présente une autre actualité du Sahel

      - Pathe Diallo, kori a fini e jam kay ? Ce qui est plus intéressant c’est que UFC = Union Fraternelle des Croyants. C’est une union créée et qui regroupe musulmans et catholiques dans la plus grande fraternité et avec une alternance dans la présidence et la vice-présidence de l’Union. Voilà un exemple de bon enseignement de fraternité loin de tous les brouhahas des religieux analphabètes ! C’est un exemple à encourager et à répliquer.

      Conclusion : Paate Jallo, a y’i na ? So diinaji di sawroken fu, adunaaru du tiida ta faae. Allah laato baaloh

      Par Kôrô Yamyélé (Yo min Kôrô Yamyélé)

  • Le 2 mars 2020 à 10:49, par Ivo En réponse à : Journées des maraichers : UFC-Dori présente une autre actualité du Sahel

    Mes encouragements et félicitations sincères ! L’harmonie règnera. Soyons vigilant seulement… Que l’état poursuive, avec chacune des personnes y résidant, et avec chacun des burkinabés, selon ses moyens, la protection de ces régions et villages ! … Nous vaincrons.

  • Le 2 mars 2020 à 11:24, par Danton En réponse à : Journées des maraichers : UFC-Dori présente une autre actualité du Sahel

    Francois Paul Ramde et l’UFC Dori, respect à vous. Je suis tout admiratif du travail qui est abattu depuis des années pour préserver la cohésion sociale et le vivre-ensemble. Soyex bénis. Vive le Burkina Faso ! Danton.

  • Le 2 mars 2020 à 12:01, par OOUEDRAOGO Gérard En réponse à : Journées des maraichers : UFC-Dori présente une autre actualité du Sahel

    Toutes mes vives félicitations à l’UFC-DORI pour la tenue de la 15è édition des journées du maraicher du sahel malgré les conditions sécuritaires que l’on connait ; cela témoin d’un engagement vrai au côté de la population du sahel. Vive les Journées du Maraîcher du Sahel !
    Que DIEU vous donne les moyens de tenir la 16 è édition dans de meilleure condition de paix et de sécurité.

  • Le 2 mars 2020 à 13:52, par kap En réponse à : Journées des maraichers : UFC-Dori présente une autre actualité du Sahel

    La terre ne ment pas . Il suffit que l’homme s’y investisse financièrement et physiquement . Un filière rentable pouvant lutter contre la pauvreté et du coup l’insécurité dont nous subissons aujourd’hui .Du courage aux initiateurs et acteurs . Que notre état s’implique et s’y investisse pleinement .

  • Le 2 mars 2020 à 14:12, par Nabiiga En réponse à : Journées des maraichers : UFC-Dori présente une autre actualité du Sahel

    Félicitations en effet à Dori et toute la région sahélienne. Dori, c’est notre Californie, ou notre Israël où le désert nourrit les populations de ces deux pays-là. N’eut été les terroristes, partisans de CDP qui sèment la terreur dans le nord du pays, le Sahel de notre pays serait allé loin dans l’autosuffisance alimentaire mais hélas, tantôt une attaque ici, une autre par là
    Justement, puisque nous y sommes, lors du l’insurrection nombreux furent ceux qui ne voulaient pas forcément le démantèlement de la milice compaorienne du RSP mais la positionner plutôt à Dori ou quelque part dans le désert entre des dunes. Mais les partisans de crime, de l’impunité et pro article 137, ont argué que Dori n’était pas capable de se nourrir encore moins abriter la milice RSP. On sait désormais que c’est faux. Regardez les produits de Dori.

  • Le 2 mars 2020 à 15:01, par Yovis En réponse à : Journées des maraichers : UFC-Dori présente une autre actualité du Sahel

    Félicitations au coordinateur et à tous les animateurs de UFC. Pareillement pour les membres des communautés qui démontrent ainsi que l’idéal commun et partagé est le meilleur stimulant du vivre-ensemble et de la paix sociale.
    Shame on the terrorists.

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