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Marché de la téléphonie mobile au Burkina : L’épidémie de coronavirus risque d’impacter les importations

Publié le dimanche 16 février 2020 à 12h00min

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Marché de la téléphonie mobile au Burkina : L’épidémie de coronavirus risque d’impacter les importations

Le Burkina Faso est consommateur par excellence d’appareils de télécommunication et électroménagers. La plupart du ravitaillement se fait en Chine, actuellement sous menace du coronavirus. Les commerciaux de ce secteur sont organisés en Association des vendeurs de cellulaires et de cartes prépayées du Burkina, pour mieux fédérer leurs idées. El Hadj Oumarou Compaoré, président de cette association, revient, dans une interview réalisée le 11 février 2020, sur la vie de l’association, le nouveau marché du téléphone et comment le secteur vit la situation présente de la Chine, son principal fournisseur.

Lefaso.net : Présentez-nous votre association

El Hadj Oumarou Compaoré : L’association est née depuis 2005. Elle a été associée à d’autres associations regroupées en fédération. Alors, lorsqu’on parle de la fédération, il y a plusieurs associations de commerçants qui se retrouvent à l’intérieur. La nôtre est particulièrement dans les appareils électroniques et électroménager.

Que fait cette association au quotidien ?

L’association a un rôle très diversifié. Au début, on s’était donné le devoir de sensibiliser les gens en matière de télécommunication. On leur demandait de ne pas communiquer en pleine circulation. Parce que là, on a vu que plusieurs cas d’accident sont liés au téléphone. Nous avions au début même invité la police à la Maison des jeunes où des vidéos sur les accidents de circulation liés à l’utilisation du téléphone ont été sorties. Présentement, nous sommes une interface entre le ministère du Développement de l’économie numérique et les commerçants du secteur.

Comment vous arrivez à fédérer tout ce beau monde du milieu des appareils téléphoniques, qui est un marché difficile à organiser ?

En tout cas, c’est très difficile à s’organiser dans ce domaine. Vous-même savez que tous ceux qui sont dans le domaine, sont des personnes qui ne sont pas allées à l’école et qui se sont retrouvées là-dedans. Donc c’est un marché qui accueille tout le monde ; même avec 15 000 F CFA, les gens se débrouillent et ils s’en sortent. Donc c’est difficile de s’organiser dans une telle situation.

Mais est-ce que vous arrivez à organiser ne serait-ce que des rencontres entre vous pour traiter des questions qui concernent votre domaine ?

Au début, ce n’était pas facile, parce que les gens ne prenaient pas cela au sérieux. Ils ne voyaient même pas l’importance d’une telle association. C’est lorsque nous avions approché le ministère qui voit que nous faisons du bon travail, que nous avons eu un peu plus du crédit. Pour revenir à votre question, plusieurs fois, nous avons eu des rencontres entre nous à la Maison du peuple où on se rencontrait chaque trois mois. Maintenant, l’association est en train de vouloir s’élargir pour être plus grande. Il y a des gens dans les provinces qui nous contactent pour voir comment ils peuvent être membres.

En octobre dernier, vous avez reçu la visite du ministre du Développement de l’économie numérique. A l’issue de la visite, vous avez eu des échanges. Sur quoi ont porté ces échanges ?

Ces échanges ont porté sur le nouveau site choisi pour la construction de notre nouveau marché qu’on a appelé Technopôle. Nous, on avait souhaité que le marché soit à la Maison du peuple qui est un endroit situé en centre-ville, ou bien au niveau du pont Kadiogo. Le ministre nous a fait savoir qu’elle en a parlé au maire de Ouagadougou qui a fait savoir qu’il ne pouvait pas changer le statut de ces endroits-là. Le pont Kadiogo, c’est l’environnemental et aussi il faut que la Maison du peuple reste la Maison du peuple. Et c’est là qu’ils ont trouvé Gampèla.

Donc c’est cet endroit qui sera le futur grand marché de tout ce qui est téléphone et électroménager. Ils ont tenu à nous préciser que le marché qu’ils vont nous construire sera un marché pour tout le territoire national, ce n’est pas uniquement pour ceux de Ouagadougou. C’est pourquoi, nous organisons une rencontre le samedi prochain. Nous avions essayé de communiquer à Koudougou et Bobo-Dioulasso pour que ceux qui veulent participer viennent. Donc nous élargissons cette rencontre, afin de toucher le maximum possible de personnes intéressées par le marché de Gampèla.

Pourquoi au début vous avez souhaité que ce soit la Maison du peuple ou le pont Kadiogo ? Quelle est leur particularité ?

Nous trouvons que c’est en plein centre-ville. Pour des vendeurs de téléphones, c’est mieux si c’est en ville. A Gampèla, ça va marcher mais c’est pour ceux qui ont les gros moyens. Par exemple, celui qui est à Gampèla et qui donne une pièce en gros à 500 et en ville on le vend à 600, un détaillant peut se rendre à Gampèla pour acheter mais pas un individu qui veut juste une ou deux pièces. Donc pour le petit commerçant, c’est au centre-ville qu’il peut faire de bonnes affaires.

Le samedi, nous allons demander à ceux qui sont intéressés par le nouveau site d’aller réfléchir. Le ministère viendra après avec une délégation et ses techniciens et nous allons nous rendre sur le site pour visiter. Mais lorsqu’on fera le recensement pour attribuer les hangars, l’association va considérer ceux qui ont leur reçu des impôts pour faire ce recensement. Parce que nous pensons qu’en bon citoyen, il faut être en règle vis-à-vis des impôts. Ce sont ces recettes que le gouvernement utilise pour nous construire tout cela. Nous ne demandons pas de l’argent, mais il faut au moins cette condition.

Que comptez-vous faire pour ce problème de centre-ville que vous aviez évoqué ? Allez-vous continué les négociations pour un site en centre-ville, ou bien vous avez fini par accepter le site de Gampèla ?

En tout cas, pour l’instant, nous n’avons pas le choix que de prendre ce site-là. Mais nous allons toujours faire des négociations, pour que cela arrange tout le monde. S’il y a la possibilité d’avoir d’autres sites, ça sera bien.

En dehors du nouveau marché des téléphones cellulaires et appareils électroménagers, est-ce qu’il y a eu d’autres points que vous avez abordés avec le ministre ?

On a discuté de beaucoup de choses telles que l’encadrement de ceux qui sont dans la réparation des téléphones ou appareils électroménagers. Certains mêmes peuvent être amenés à l’international pour revenir servir ici. Ce sont des gens qui font du bon travail mais ils n’ont eu aucune formation. Mais nous pensons que leur encadrement va permettre de remédier des problèmes, pourquoi pas recycler nous-mêmes nos téléphones ? Donc c’est à l’Etat aussi d’aider le secteur qui est plus informel à se formaliser.

Est-ce que le marché lui-même n’est pas rempli d’arnaqueurs ? Des gens qui cherchent toujours à vous vendre un appareil au-delà de son prix réel ?

Cet aspect est beaucoup plus constaté chez les revendeurs. Pour ceux qui ont des boutiques, on peut dire que ça va. Mais pour le cas des revendeurs, les appareils passent de main en main. Parfois même des gens essaient de jouer les intermédiaires en accompagnant d’autres personnes. Et lorsqu’ils viennent, ils s’attendent à ce que le commerce leur verse quelque chose. Donc une personne peut se faire arnaquer mais c’est surtout plus chez les revendeurs.

Aujourd’hui, si l’on vous posait la question de savoir : est-ce que ce marché se porte très bien ? Quelle serait votre réponse ?

Oui, on peut dire qu’il se porte bien parce que ceux qui y sont ne se plaignent pas. Quand moi je venais ici à Zaabredaaga en 2002-2003, toutes ces boutiques n’étaient pas là. Et j’étais au dehors avec une petite tablette avec laquelle je me débrouillais. Mais avec ce travail, on a pu s’acheter des parcelles, construire et se marier. Donc on peut dire que le marché se porte bien parce que beaucoup de gens gagnent leur vie dans ce marché.

Venons-en à l’actualité maintenant où l’on parle de coronavirus en Chine. Plusieurs commerçants se ravitaillaient dans ce pays. Comment vivez-vous cette situation ?

Nous prions Dieu pour qu’une solution soit trouvée rapidement pour cette maladie qui attaque la Chine. Si ça va durer, c’est vrai qu’elle attaque la Chine seulement pour le moment, mais les conséquences ne seront pas pour la Chine seulement. Chez nous au Burkina, les populations consomment plus des produits chinois. Donc s’il n’y a plus de ces produits, ça va impacter toute l’économie. Pour le moment, les voyages ont été arrêtés.

En dehors de la Chine, est-ce qu’il y a d’autres pays où vous pouvez avoir les mêmes produits ?

C’est toujours le même problème. La plupart des commerçants d’ici même, c’est à Dubaï qu’ils achètent leurs produits. Mais là-bas aussi, ce sont les Chinois qui les ravitaillent. Donc même à Dubaï, ce sont les produits chinois que tu iras acheter. Donc à la longue, ce qui était concentré là-bas va s’épuiser et le manque va se ressentir.

Pour l’instant, est-ce que vous sentez un problème de rupture de certains produits chinois ?

Pour le moment, on ne sent pas encore le manque. Parce qu’une rupture de téléphones, il faut environ deux mois avant de commercer à sentir cette rupture. Beaucoup ont des stocks de 200 à 300 pièces. Ce sont ces stocks que les gens vont commencer à sortir. Donc on peut atteindre deux à trois mois avant de sentir la rupture.

Qu’attendez-vous d’autre des autorités burkinabè ?

Jusqu’à présent, nous avons toujours des problèmes de visa alors que les relations entre le Burkina et la Chine ont repris. Si les Burkinabè veulent voyager, il faut toujours passer par Lomé, par Abidjan ou au Niger pour les avoir. Pourquoi on ne peut pas les produire ici aussi ? Donc nous voulons que le gouvernement burkinabè pense à cela.

Votre mot de fin

Mon mot de fin, c’est demander aux vendeurs d’appareils de télécommunication et électroménagers de faire l’effort pour vendre toujours ce qui est de bonne qualité. Zaabredaaga est rempli de boutiques. Donc pour maintenir un client, il faut lui proposer une chose de qualité sinon il ne reviendra plus demain. Aux clients, j’attire leur attention sur le choix de leurs demandes en téléphones. Il faut la qualité mais il faut aussi aller là où tu sais que tu pourras revenir si ça ne va pas.

Interview réalisée par Etienne Lankoandé
Lefaso.net

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