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Barbiers traditionnels : De la coiffure à la circoncision des enfants, les réalités d’un métier controversé

Publié le mercredi 5 février 2020 à 23h20min

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Barbiers traditionnels : De la coiffure à la circoncision des enfants, les réalités d’un métier controversé

Ils sont communément appelés « Wasam ». Ce sont des barbiers et inciseurs traditionnels, un métier qui s’exerce depuis des lustres dans de nombreux pays de la sous-région ouest-africaine. Dans le flux des populations, la pratique s’est également déportée au Burkina Faso. De la coiffure à la circoncision des enfants, ces Wasam font le bonheur de plusieurs personnes. Nous vous proposons de découvrir la pratique…

Tout comme Mohamed Buhari, la cinquantaine presque sonnée, ils sont nombreux, principalement de la communauté haoussa, à avoir déposé leurs valises au Burkina Faso. Ils se sont installés aux abords de la Grande mosquée de Ouagadougou et un peu partout dans la ville et dans d’autres localités du pays. A la recherche de leur pitance, ils sont appelés « Wasam », un terme dérivé de la langue haoussa qui décrit les tâches de la profession : circoncision, incision, art de faire la barbe…

Le materiel de travail

Une activité saisonnière exercée après les récoltes, puisque pendant l’hivernage, « nous partons cultiver », explique Mohamed Buhari.

Au quotidien, le travail consiste à « raser les cheveux et la barbe, exercer des incisions sur des plaies, extraire des ganglions de la gorge, pratiquer la circoncision des jeunes garçons », nous détaille un de ses confrères. Bref, « c’est un petit docteur », résume-t-il. La coiffure se fait sur place, mais les circoncisions se font à domicile.

Jeunes et personnes âgées s’offrent les services de ces salons de coiffure en plein air. Les tarifs varient entre 150 et 300 F CFA pour la coiffure. Pour la circoncision des enfants, la somme de 5000 F CFA et quelques boules de savon sont demandées. Les plus grandes recettes sont obtenues pendant les fêtes de Tabaski et de Ramadan.

Certains clients disent recourir à ces praticiens pour la qualité de leurs prestations. « Nous préférons leur faire appel pour la circoncision de nos enfants parce que c’est plus facile avec eux. Ils offrent les soins à domicile. Les plaies cicatrisent plus vite et nous les trouvons très professionnels », confie Inoussa, un client des Wasam. « Dans la pratique, nous disposons de produits que nous préparons, et lorsque nous faisons l’incision de la partie génitale, nous y apposons ces produits. Au bout de trois jours, nous faisons le premier pansement. Après trois autres jours, le dernier pansement est fait et le patient est déjà guéri », relate Mohamed Buhari.

Alam, un produit qui était appliqué sur la tête après rasage et quelques fois remplacé par l’alcool

De la coiffure à la circoncision, ces « travailleurs » ont des méthodes traditionnelles. En effet, de l’explication de Buhari, il existe trois étapes dans la coiffure. D’abord, il faut badigeonner les cheveux d’eau et de savon ; ensuite, on passe au rasage dans le sens des poils et enfin, on applique de l’Alam ou de l’alcool une fois le travail bouclé. « Mais depuis peu, notre entourage nous a recommandé d’appliquer de l’alcool à la place de l’Alam », a-t-il-laissé entendre. Qu’à cela ne tienne, certains clients préfèrent toujours l’Alam.

Des revers quand même…

Même si les clients de ces coiffeurs traditionnels y trouvent leurs comptes, certains en revanche souhaitent une amélioration de la prestation. C’est le cas de Wendlèouda Ouédraogo, voisin de marché des Wasam, qui confie que « malheureusement, des malicieux utilisent souvent une lame pour plusieurs usages ».

« En tant que voisin, lorsque nous les surprenons, nous les menaçons et sensibilisons aux graves risques sanitaires », poursuit-il. Pour lui, la majorité de ces travailleurs sont analphabètes et ignorent l’importance des règles d’hygiène. Adama Cissé, un autre Wasam installé au grand marché de Ouagadougou, rétorque : « Nous avons des pratiques normales. A chaque fois que l’on finit de coiffer quelqu’un, nous changeons la lame. Le soir, nous désinfections nos outils à l’eau bouillante et à l’eau de Javel ».

Le sac avec lequel les wasam se deplacent

Wendlèouda Ouédraogo, pour sa part, suggère de demander à chaque client d’apporter son matériel de rasage pour éviter tout risque de contamination. En effet, « même si la lame est renouvelée, vu que l’on utilise le même porte-lame, cela ne présente-il pas toujours des risques de contamination ? », s’interroge-t-il.

Une tradition qui se perpétue

Le métier se transmet de père en fils. Traditionnellement, dès l’âge de 7 ans, les secrets du métier sont peu à peu dévoilés aux enfants. Arrivés à l’âge de 15 ans, ils sont aptes à exercer tout en continuant de se perfectionner. « C’est une école comme les autres », convainc M. Buhari. Mais la pratique prend du recul, reconnaît Ibrahim Kano, un ancien Wasam, qui a rangé lames et ciseaux pour se reconvertir. Pour lui, les jeunes trouvent ce métier dévalorisant et préfèrent d’autres activités. La preuve est que les Wasam que nous avons rencontrés disent subvenir à leurs besoins grâce à ce métier, mais aucun de leurs enfants n’a voulu emboîter leurs pas.

Mariam Ouédraogo
Lefaso.net

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