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Bilan des eaux usées de la ville de Ouagadougou : Test sur les capacités épuratoires de production du biogaz

Publié le jeudi 12 décembre 2019 à 15h01min

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Bilan des eaux usées de la ville de Ouagadougou : Test sur les capacités épuratoires de production du biogaz

1. Introduction

Le réchauffement climatique est un phénomène alarmant constaté depuis les années 1970 mais son ampleur est fortement ressentie de nos jours [1]. Ce phénomène a eu pour conséquence le bouleversement de tous les autres phénomènes atmosphériques, climatiques et météorologiques. Le réchauffement est souvent cité comme causé par les activités anthropogéniques et plus précisément par les émissions de gaz à effet de serre (GES).

Une des sources d’émission de carbone provient du manque de procédés adéquats de traitement des eaux qui entraîne un transfert de carbone des eaux vers l’atmosphère notamment par le gaz méthane produits lors des traitements biologiques et dont le potentiel de réchauffement global (PRG) est 25 fois supérieur à celui du gaz su gaz carbonique.

Il est important de présenter aux techniciens des industries de moyens simples pour vérifier la capacité auto épuratoire de leurs effluents avant leur rejet dans les stations et de mettre à la disposition des décideurs du ministère de l’environnement les potentialités des eaux usées.

Le travail que nous présentons ici a été effectué en grande partie pendant la période de Janvier à Juin 2009. Il commence par un bilan quantitatif et qualitatif des eaux usées de la ville de Ouagadougou, ensuite un essai de traitement par biodigestion et par lagunage de manière concomitante. Cela permettra de montrer la capacité auto épuratoire des différents effluents et de quantifier les quantités de biogaz pouvant être valorisées à partir de ces eaux usées.

2. Méthodologie

Chaque échantillon moyen est soumis à un traitement aérobie et à un autre traitement anaérobie de biodigestion. Le rôle du traitement aérobie permet de déterminer la capacité de l’effluent urbain à être traité par lagunage pendant que le traitement de biodigestion nous renseigne sur la capacité de l’effluent à produire du biogaz dans les conditions d’anaérobiose.

Le réacteur aérobie est un récipient en PET un peu évasé d’une capacité de 2 litres sans couvercle, ce qui permet de créer une plus grande surface libre afin de favoriser un meilleur contact de l’eau avec l’air qui contient l’oxygène nécessaire au traitement. Le niveau de l’eau est ramené au niveau initial avec de l’eau distillée avant prélèvement pour analyse.

Figure 1. Bocaux de traitement aérobie

Le réacteur de biodigestion est un récipient étanche, hermétique d’où l’effluent est traité moyennant l’apport de substrat qui est la bouse de vache. Un couvercle solidement attaché au récipient permet de faire l’étanchéité, empêchant ainsi le contact du liquide avec l’air du milieu ambiant. Un dispositif muni d’une vanne permet d’évacuer les gaz produits. Au cours du traitement, la vanne est ouverte une fois tous les trois jours.

Figure 2. Bocal de traitement anaérobie

Les temps de séjour et les méthodes de traitement sont choisis sur la base des technologies existantes au laboratoire de l’IRSAT testées dans des études antérieures. Le temps de séjour moyen pour chaque échantillon est d’environ un mois, durée optimale du traitement. Si l’on se base uniquement sur les eaux usées de Ouagadougou, on note un flux annuel total d’eaux usées domestiques de 14 859 200 m3 et des eaux usées industrielles de 790520 m3.

3. Résultats

Une DCO totale annuelle de 55217 T pour les eaux usées domestiques et de 1837 T pour les eaux usées industrielles a été obtenue. Si on s’en tient au total des eaux usées domestiques qui donnent le meilleur traitement anaérobie et donc produisant du biogaz de qualité suffisante, et les conclusions de travaux effectués ailleurs cités plus haut, nous trouvons un potentiel de production de biogaz pouvant atteindre 8142 m3 j-1 soit 2 971 830 m3 an-1 sur la base du volume et 30 256 m3 j-1 soit 11 043 400 m3 an-1 sur la base de la DCO totale.

En se basant sur le fait qu’un ménage moyen utilise pour sa cuisine 3 m3 de biogaz par jour, on arrive à la conclusion que la production de biogaz pourrait servir pour 10 085 ménages par jour sur la base de la DCO dégradée et 2714 ménages en se fiant au rapport de la quantité d’eaux usées dégradées. On obtient de cette production de biogaz, une énergie journalière de 242 MWh et donc une puissance de 10 MWh. Cela permet d’avoir plus vraisemblablement sur la base de la DCO, 20 629 L équivalent pétrole par jour.

C’est donc un potentiel énergétique considérable pour la ville de Ouagadougou sans compter le fait que cela a permis de réduire les gaz à effet de serre par la valorisation du méthane. En tenant compte d’une composition moyenne de biogaz de 73% de méthane et de 11% de gaz carbonique, on trouve une valeur totale de 22 086 m3 de méthane et 3328 m3 de CO2 par jour. A même concentration, le méthane contribue 25 fois plus à l’effet de serre que le gaz carbonique.

La production du méthane et du CO2 correspond au total de 555 478 m3 j-1 équivalent CO2. En brûlant le biogaz dans un moteur, la production totale de gaz carbonique sera de 25414 m3 j-1 de gaz carbonique soit une réduction de 95,4% d’équivalent gaz carbonique produit.

Tous ces calculs nous permettent de conclure qu’on gagnerait en connectant tous les ménages de Ouagadougou à un réseau de collecte et de traitement des eaux usées. On gagnerait en énergie de la même façon qu’on maîtriserait les émanations néfastes de gaz à effet de serre. Cela passera aussi par une augmentation de la capacité de la station existante ou une construction de petites stations pour un petit groupe de population.

4. Conclusion

Le biogaz évalué permet d’avoir une énergie journalière de 242 MWh et donc une puissance de 10 mWh. Cette énergie représente un manque à gagner pour nos systèmes actuels de traitement. La nécessité de faire ce traitement s’impose à triple niveau en ce sens que cela permet, primo, de traiter les eaux de la ville de Ouagadougou, secundo de gagner en énergie comme explicité ci-dessus et tierço de réduire de 95,4% les gaz à effet de serre représentés par la quantité de CO2 rejetée.

ZONGO Inoussa1, KABORE Aminata2, COMPAORE Jérôme2

1Institut de Recherche en Sciences Appliquées et Technologies, 03 BP 7047 Ouaga 03, Burkina Faso

2Institut de l’Environnement et de Recherches Agricoles, 04 BP 8645 Ouaga 04, Burkina Faso


5. Pour en savoir plus - Bibliographie indicative

Bennouna, M., Kehal, S., (2001). Production de méthane à partir des boues des stations d’épuration des eaux usées : potentiel existant en Algérie, Revues des Energies Renouvelables : Production et Valorisation - Biomasse, 2001, 29-36 p.
Zongo, I., Diallo-Koné, M., Palm, K., Tiemtoré, A., Sanogo, O., Guiguemdé, E., Lapicque, F., Leclerc, J.-P., (2012). Bilan des eaux usées de la ville de Ouagadougou : capacité auto-épuratoire en vue de la production de biogaz, Scientific Study & Research - Chemistry & Chemical Engineering, Biotechnology, Food Industry 13 (2) (2012), 153 -167 p.

Moletta, R., (2002). Gestion des problèmes environnementaux dans les industries agroalimentaires, Collection Sciences et Techniques Agroalimentaires, Paris, 2002.
Wauthelet, M. Traitement anaérobie des boues et valorisation du biogaz, Faculté des Sciences Agronomique de Gembloux, Belgique.

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