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Liberia : 22 pour un fauteuil

Publié le jeudi 25 août 2005 à 07h29min

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Lorsque, le 14 octobre 2003, Gyude Bryant prenait la tête du pouvoir au Liberia, il savait que rien ne serait facile. Non seulement, il remplaçait Charles Taylor en exil à Calabar (Nigeria) depuis le 11 août 2003, après l’intermède de Moses Blah, un Charles Taylor qui, en véritable seigneur de guerre devenu président, a fait de la résistance avant de partir chez Olusegun sous l’injonction de Georges Bush, qui lui avait donné quelques jours pour le faire sinon...

Mais il héritait surtout d’un pays exsangue, après 15 ans de guerre civile et tous ses corollaires de milliers de morts et de déplacés.

En effet, Gyude Bryant devait démobiliser quelque 45 000 combattants des différentes factions rivales encore en action, dont la moitié sont des enfants, restaurer et maintenir la sécurité sur l’ensemble du territoire, remettre en état les réseaux d’électricité et d’eau potable, résoudre le chômage, qui frappe 80% de la population, et surtout organiser des élections libres et transparentes.

Sans préjuger de rien du tout, et tout en mentionnant que sur plusieurs fronts, beaucoup reste à faire, on peut affirmer néanmoins que sur le déroulement de la transition démocratique, le chef de l’Etat intérimaire est en passe de réussir. Selon les règles arrêtées pour cette transition, une élection présidentielle devrait avoir lieu le 13 octobre 2005, et le président élu devra être investi le troisième lundi du mois de janvier 2006.

Dans moins de deux mois donc, les Libériens pourront en principe renouer avec l’expérience démocratique qu’ils n’ont pratiquement pas connue, depuis plus de deux décennies. Et pour cette course à la magistrature suprême, 22 candidats, soit un candidat pour 100 000 habitants, sont sur la ligne de départ.

Exception faite de certaines candidatures fantaisistes, certaines personnalités sortent du lot de ces prétendants au trône. On peut en citer bien sûr le candidat du NPP (l’ex-parti de Taylor) dont le champion est Roland Masakwa, qui, bien qu’on affirme que le célèbre rouquin de Monrovia lui aurait donné beaucoup de moyens, assure qu’il part à ce scrutin avec peu :

"Si Taylor nous avait donné de l’argent, on aurait pu faire campagne avec des 4x4 et tenir nos meetings dans des grands lieux, au lieu de les faire sous des hangars", affirme-t-il.

Il y a également l’Amazone de l’opposition libérienne, la courageuse Ellen Johnson-Sirleaf, qui se donne toutes les chances pour parvenir au fauteuil présidentiel.

On ne saurait omettre non plus Sékou Damaté Conneh, l’ex-chef des Libériens unis pour la réconciliation et la démocratie (LURD), qui a maille à partir actuellement avec son épouse, Aïcha Keita Conneh, qui tente de prendre le contrôle du Lurd, aidée par quelques-uns de l’entourage de Damaté.

Enfin, il y a Mister Georges, qui, le 16 novembre 2004, a annoncé officiellement sa candidature au scrutin d’octobre 2005. Le joueur-phare du Liberia et, à un certain moment du monde, a choisi de ranger les crampons pour descendre dans l’arène.

C’est vrai que certains le voyaient venir, par certains de ces actes altruistes : solde des dettes de la fédération libérienne de football, actions caritatives multiples.

Bref, du sport, Weah est passé à la politique et peut sortir vainqueur de ce duel, car il est très populaire au sein de la population. Alors Weah comme hier Nkurunziza au Burundi, même si la comparaison s’arrête au niveau du sport avec grand s ?

La certitude est que quel que soit le gagnant de cette présidentielle, il aura en face des chantiers titanesques pour remettre définitivement le Liberia sur les rails. Non seulement, il devra poursuivre la réconciliation entre les Libériens, que 15 ans de guerre et 15 000 morts et autant d’exilés séparent, mais aussi reconstruire tout : économie, infrastructures...

Le prochain chef de l’Etat de ce pays aura aussi à faire face à la conjoncture sous-régionale : la Côte d’Ivoire est au bord du gouffre, déclarent certains politologues, et à tort ou à raison, le Liberia est souvent cité comme un pays impliqué dans la crise ivoirienne.

Ainsi, les massacres des paysans de Duekué le 2 juin 2005 sont imputés à des mercenaires libériens qui se seraient trompés de cibles. Régulièrement, on cite le pays de Charles Taylor comme le bras séculier de "pays du Nord" pour déstabiliser la Côte d’Ivoire.

Autant dire que le nouveau président devra résoudre cette récurrente question. Et ce n’est pas tout ! Le "cas" Charles Taylor demeure pendant, et bien qu’il soit en exil, on le dit toujours très influent au Liberia.

En dépit du fait que les USA réclament sa comparution devant le Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL), celui qui l’a accueilli, le président en exercice de l’Union africaine, Olusegun, préfère qu’il soit jugé par les Libériens dans un Etat de droit.

Que fera le prochain locataire d’Osu Rock (présidence libérienne) face à tous ces casse-tête libériens ? Eléments de réponse d’ici quelques mois.

Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana

Observateur Paalga

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