Lefaso.net : Qu’est-ce que l’obésité ?

Dr Youssouf Nagabila : L’obésité est un excès de poids dû à une accumulation de graisses. Cette définition est théorique. En pratique, chez l’adulte, est obèse celui ou celle qui a un Indice de masse corporelle (IMC) supérieur ou égal à 30 kg/m2. Exemple de calcul de l’IMC à partir de la calculatrice de votre téléphone portable : si votre poids est de 98 kg et votre taille de 1,62 m ; alors votre IMC est de 98/1,62=60,49 et 60,49/1,62=37,34 kg/m2, qui est supérieur à 30 ; donc vous êtes obèse.

Chez l’enfant, c’est un peu plus complexe car l’IMC se calcule à partir des courbes de l’IMC d’une population de référence d’enfants, en fonction de l’âge et du sexe. Nous y reviendrons ultérieurement de façon spécifique.

L’obésité ainsi définie figure en bonne place dans la Classification internationale des maladies (CIM) de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) car elle entraîne des conséquences néfastes pour la santé. Pourtant, dans nos pays en voie de développement, elle est très souvent perçue comme un signe d’aisance ou le reflet d’une réussite sociale.

Comment l’obésité entraîne-t-elle des conséquences néfastes pour la santé ?

A moyen et long termes, l’obésité est un terrain fertile pour le développement de maladies multiples et variées. Bien que la liste ne soit pas exhaustive, une quarantaine de maladies figurent au compteur des complications de l’obésité. Aussi, vous me permettrez de me limiter aux principales complications.

L’excès de graisses se retrouve sous forme de graisses libres circulant dans le sang et de dépôts de graisses dans les organes et autour d’eux. Les principales conséquences seront les suivantes : les muscles utilisent les graisses à la place du sucre qui s’accumule dans le sang avec comme résultat le diabète.

Le pancréas secrète beaucoup d’insuline pour réduire l’excès de sucre et finit par s’épuiser, laissant le sucre s’accumuler dans le sang avec comme résultat le diabète. Le foie n’arrive plus à transformer et stocker tout le sucre issu de la digestion des aliments, déversant ainsi l’excédent dans le sang et le résultat, c’est également le diabète. Les vaisseaux sont « bouchés » et durcis par les dépôts de graisses ; les graisses libres circulant épaississent le sang, favorisant ainsi l’hypertension artérielle, les accidents vasculaires cérébraux, l’infarctus du myocarde (ou crise cardiaque).

Au niveau du squelette, l’excès de poids « écrase » les os et les articulations, expliquant les douleurs articulaires (arthrose). Dans le tube digestif, les organes sont coincés par les dépôts de graisses, expliquant les aigreurs, la constipation, les hémorroïdes… Les voies respiratoires sont « bouchées » par les dépôts de graisses ; le diaphragme « compressé » n’arrive plus à faire les mouvements de va-et-vient, entraînant un essoufflement au moindre effort ou pendant le sommeil, un ronflement…

Quelles peuvent être les causes et/ou les facteurs favorisant l’obésité ?

Il faut dire que les facteurs obésogènes sont liés, entre autres, à la mauvaise hygiène alimentaire, la sédentarité, la prise de certains médicaments, les prédispositions génétiques. Manger trop sucré, gras ou salé ou encore les trois à la fois, cela expose à l’obésité. Pourtant, c’est devenu la norme avec l’industrialisation de notre mode de vie. En plus de cela, il y a également le fait d’être peu actif physiquement, c’est-à-dire la sédentarité qui expose aussi à l’obésité.

Car, dans le passé, l’obésité était beaucoup plus rare, parce que nos ancêtres suivaient un mode de vie traditionnel où l’activité était plus promue. Aussi, la prise de certains médicaments contenant des hormones augmente la teneur de cette substance dans votre sang. C’est le cas de la pilule qui fait grossir un bon nombre de femmes. Cela ne permet pas de lutter contre l’obésité.

En plus de ces différents facteurs de risque, il y a des personnes dont le bagage génétique rend la prise de poids plus facile. C’est-à-dire, si dans une famille, plusieurs personnes sont obèses, il y a de fortes chances que les descendants souffrent du même problème.

Mais finalement, à vous attendre parler, pour ne pas exagérer, l’on dirait que toutes les maladies peuvent être mises sur le compte de l’obésité !

Je dirais non et oui à la fois. Non, parce que des personnes non-obèses peuvent bel et bien souffrir de ces maladies. Oui, parce que les mécanismes expliqués ci-dessus, scientifiquement prouvés, montrent clairement que l’obésité favorise ces maladies. Vous constatez très souvent qu’une seule personne peut souffrir de plusieurs de ces maladies à la fois.

Il y a sans doute un dénominateur commun, c’est l’obésité. Par ailleurs, plusieurs études ont montré que la fréquence de ces maladies est de 3, 4, 6 et même 20 fois plus élevée chez les obèses par rapport aux non-obèses.
Enfin, plusieurs travaux d’éminents « savants » rapportent qu’une réduction de l’excès de poids permet de retarder la survenue de ces maladies ou d’amoindrir leur gravité lorsqu’elles sont déjà présentes.

Si l’obésité coexiste avec ces maladies, si elle n’est pas la cause à elle seule, elle est l’une des causes ou tout au moins un facteur favorisant ou aggravant. L’obésité n’est donc pas innocente, les preuves disponibles suffisent largement pour agir afin de circonscrire ce mal qui menace l’humanité entière.

On parle aussi souvent de maigreur, de poids idéal, de surpoids… Que recouvrent ces termes ?

Répondre à cette question reviendrait à établir une classification des adultes en fonction de l’IMC. Ainsi, lorsque l’IMC est inférieur à 18,50 kg/m2, on parle d’insuffisance de poids qui équivaut à la maigreur. Pour un IMC entre 18,50 et 24,99 kg/m2, le poids est normal ; c’est une situation favorable à une bonne santé et elle est comparée à un feu vert.

On circule tout en restant vigilant à tout moment (bien entendu si on exclut d’autres facteurs de risque et/ou maladies que l’individu pourrait avoir). Le surpoids ou la pré-obésité se définie par un IMC compris entre 25 et 29,99 kg/m2 (le risque est modérée, le feu est orange, c’est l’alerte et il faut s’arrêter et même reculer).

Quant à l’obésité qui est définie par un IMC supérieur ou égal à 30 kg/m2, le risque de maladies est accru. C’est-à-dire que le feu est rouge ; c’est le danger. Mais il y a rouge et rouge car l’obésité comprend trois degrés de gravité croissante. Ainsi, pour un IMC entre 30 et 34,99 kg/m2, l’obésité est de 1er degré ou modérée (le feu est rouge clair). Quand l’IMC est compris entre 35 et 39,99 kg/m2, l’obésité devient sévère ou de 2e degré (le feu est rouge vif). Enfin, lorsque l’IMC atteint ou dépasse 40 kg/m2, l’obésité est de 3e degré ou morbide (le feu est rouge foncé, presque noir, d’où le terme morbide qui contient le radical « mort ».

Quelles sont les moyens de lutte contre l’obésité ?

Pour prévenir l’obésité, il faut manger moins gras, moins salé et moins sucré, en évitant au maximum de grignoter. En dehors de l’alimentation, il faut être plus actif, parce qu’en général, l’homme moderne est peu actif physiquement. Et il est recommandé qu’on ait une activité physique régulière de 30 minutes par jour, trois à quatre fois par semaine, soit en marche ou en jogging, ou encore du football, du vélo, etc. Peu importe la discipline, ce qui importe, c’est qu’on soit physiquement actif.

Interview réalisée par Yvette Zongo
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