Toni Morrison : L’encre de la célèbre romancière américaine ne coulera plus
La romancière, l’écrivaine, l’essayiste, la nouvelliste, la critique littéraire, la dramaturge, la librettiste, l’éminente professeure de littérature et éditrice afro-américaine, la cinéaste, Toni Morrison, de son vrai nom Chloe Anthony Wofford, a rangé définitivement son encrier, lundi 5 août 2019, à l’âge de 88 ans.
Lauréate du Prix Pulitzer de la fiction en 1988 et du Prix Nobel de littérature en 1993, Toni Morrison, la célèbre romancière afro-américaine, a épuisé sa dernière goutte d’encre, en ce 5 août 2019, au Centre médical Montefiore de New York, aux Etats-Unis, victime d’une pneumonie aiguë. Elle faisait partie du cercle des écrivains les plus talentueux. Avec sa disparition, la littérature mondiale perd une grande auteure qui aura contribué à lui donner toutes ses lettres de noblesse. Son style s’impose par sa précision et sa clarté, son souffle et son lyrisme, avec un sens avisé d’observation de la réalité, du rêve et de la psychologie de l’environnement mondial.
La plupart de ses romans affichent la misère que vivent les Noirs aux Etats-Unis et restituent leur esprit de combativité, selon la chronologie et la mémoire de l’histoire de ce pays. Dans ses écrits littéraires, à la technique narrative bien singulière, Toni Morrison se fait l’artiste-peintre du vécu quotidien, des laissés-pour-compte, ces voix enchâssées dans les croyances, les mythes et les rêves américains.
- L’icône adulée de la littérature s’en est allée
Le contexte du racisme et de la pauvreté, de l’identité bafouée et du déracinement, est également présent dans les œuvres de la romancière afro-américaine, tiraillée entre l’héritage culturel de ses ancêtres et le modèle de promotion sociale des Américains. Elle est née d’une famille ouvrière (le couple Ramah-George Wofford), le 18 février 1931 à Lorain, dans l’Ohio, aux Etats-Unis. Pour s’être intéressée très tôt à la littérature, en particulier pour les œuvres de Léon Tolstoï et Jane Austen, Toni Morrison opte pour des études littéraires à l’Université Howard, qu’elle intègre en 1949, puis à l’Université Cornell où elle obtint un Master of Arts. Nantie de ce diplôme, elle entame alors une carrière de professeure de littérature dans plusieurs universités américaines dont la prestigieuse Université Howard.
Dans le domaine littéraire, Toni Morrison a écrit son premier roman, « The Bluest Eye », à l’âge de 39 ans. C’est avec son roman « Beloved » qu’elle obtint le Prix Pulitzer de la fiction en 1988, avant d’être couronnée le 7 octobre 1993 du prestigieux Prix Nobel de littérature pour l’ensemble de son œuvre. Le roman « Beloved » a été adapté au cinéma en 1998 par Jonathan Demme, avec, entre autres, Danny Glover, dans les rôles principaux. En matière de production, il importe de reconnaître en Toni Morrison une belle moisson littéraire. A son actif, plus d’une dizaine de romans, près d’une dizaine de livres pour enfants, des poèmes, des nouvelles, une dizaine d’essais, des pièces de théâtre… centrés essentiellement sur les difficiles conditions de vie de Noir et de Femme aux Etats-Unis.
- Barack Obama et la célèbre romancière, un trésor national
Tes mots ont touché bien au-delà des frontières américaines !
Sur Toni Morrison, une cinquantaine d’œuvres ont été produites, en plus des articles de presse et des documents audiovisuels et audiophoniques portant sur elle et/ou ses productions. Sur la qualité des œuvres de l’auteure, les appréciations sont élogieuses. Pour Jean Guiloineau, écrivain et traducteur, « Toni Morrison a une écriture absolument prodigieuse… Elle ne fait pas une écriture politique, elle fait une écriture hautement littéraire, c’est pour ça qu’il y a dans ses œuvres une puissance à la fois d’évocation et de conviction qui est irremplaçable ».
Selon la conteuse Mara Menzies, « Toni Morrison est un modèle absolu pour toute une génération d’auteurs et d’artiste… Ce qui m’impressionne dans ses livres, c’est l’audace qui la caractérise ». De l’avis de l’Académie suédoise, « on ne peut qu’être séduit par sa remarquable technique narrative qui porte la marque d’un esprit original ». Selon certaines presses, « les ouvrages de Toni Morrison, dans lesquels cohabitent le registre tragique et un questionnement métaphysique, atteignent une forme d’humour qui passe par une tonalité burlesque et fantastique ».
- Toni Morrison, prix Nobel de littérature en 1993
Toni Morrison, la romancière afro-américaine dont le monde littéraire pleure aujourd’hui la disparition, a reçu, du fond de son sommeil éternel, les hommages de personnalités dont Barack Obama, Oprah Winfrey, Beyoncé, les époux Clinton, l’actrice Bette Midler et le sénateur Bernie Sanders. Sur son compte twitter, l’hommage de Barack Obama est la réalité de ce que fût l’impératrice des lettres afro-américaines : « Toni Morrison était un trésor national ». Mais n’est-ce pas que ses mots ont touché bien au-delà des frontières américaines ?
Elevée en 2012 au rang de la médaille présidentielle de la Liberté, le plus grand honneur civil des Etats-Unis, Toni Morrison peut estimer avoir accompli sa part de mission dans le monde des vivants. Puisse son âme littéraire reposer en paix !
Sita TARBAGDO
Lefaso.net
Vos commentaires
1. Le 8 août 2019 à 04:03, par Zimm En réponse à : Toni Morrison : L’encre de la célèbre romancière américaine ne coulera plus
Article bien écrit et félicitations à vous Sita TARBAGDO et à Fasonet. Oui, c’est une Très Grande Dame de la littérature Afro-américaine qui vient de nous quitter et à mon goût elle n’était pas très connue du monde francophone. Je pense que cet article peut aider un peu plus dans ce sens. Well Done !
Le 8 août 2019 à 13:15, par AMKOULEL En réponse à : Toni Morrison : L’encre de la célèbre romancière américaine ne coulera plus
@ZIMM, c’est normal que de tel talent du monde Afro soit inconnu de nous africains francophones, puisque nous nous plaisons dans le carcan bien tracé par nos bourreaux depuis la colonisation. Tous nos rêves, tous nos projets sont approuvés par Paris. Qu’est-ce que ça me scie les jambes quand je regarde nos programmes d’enseignements comparativement à des pays sérieux comme le vietnam, le cambodge, le laos... qui forment leur population autocentrée sur leurs intérêts d’abord et leurs priorités ensuite. Que dire, quand nous de la classe politico-intellectuelle, nous nous battons sur des ring francophonie, CAMES, et autres structures dont le premier objectif est de nous cloisonner, de nous parquer comme des gamins sur une aire de jeu. Mais franchement !!! Je transpire de douleur quand je me rends compte que j’ai fait tout mon cursus d’enseignement sans jamais lire, étudier à fond ou entendre parler d’écrivains africains, de vrais écrivains ein pas les écrivains pacotilles que le maître colon a avalisé d’abord, Tierno MONEMBO, Mongo BETI, les oeuvres de BIKO, .... Nous faisons TOUT FAUX dans ce domaine. Parachutage de NZ, tout élève Burkinabè devait le réciter de tête déjà. Mais tout ça va bientôt changer !! Plus vite que ceux qui profitent de cette médiocrité ambiante n’y pensent.
Le 8 août 2019 à 14:40, par AMKOULEL En réponse à : Toni Morrison : L’encre de la célèbre romancière américaine ne coulera plus
@ZIMM, c’est normal que de tel talent du monde Afro soit inconnu de nous africains francophones, puisque nous nous plaisons dans
le carcan bien tracé par nos bourreaux depuis la colonisation. Tous nos rêves, tous nos projets sont approuvés par Paris.
Qu’est-ce que ça me scie les jambes quand je regarde nos programmes d’enseignements comparativement à des pays sérieux comme
le vietnam, le cambodge, le laos... qui forment leur population autocentrée sur leurs intérêts d’abord et leurs priorités ensuite.
Que dire, quand nous de la classe politico-intellectuelle, nous nous battons sur des ring francophonie, CAMES, et autres structures
dont le premier objectif est de nous cloisonner, de nous parquer comme des gamins sur une aire de jeu. Mais franchement !!! Je transpire
de douleur quand je me rends compte que j’ai fait tout mon cursus d’enseignement sans jamais lire, étudier à fond ou entendre parler
d’écrivains africains, de vrais écrivains ein pas les écrivains pacotilles que le maître colon a avalisé d’abord, Tierno MONEMBO,
Mongo BETI, les oeuvres de BIKO, .... Nous faisons TOUT FAUX dans ce domaine. Parachutage de NZ, tout élève Burkinabè devait le
réciter de tête déjà. Mais tout ça va bientôt changer !! Plus vite que ceux qui profitent de cette médiocrité ambiante n’y pensent.
2. Le 8 août 2019 à 10:30, par Sacksida En réponse à : Toni Morrison : L’encre de la célèbre romancière américaine ne coulera plus
Que la Paix de Dieu soit sur cette grande Dame de la Litterature Afro-Americaine. Comme dit l’adage : La mort est un vetement que tout le monde portera a son temps. Salut.
3. Le 8 août 2019 à 12:02, par Mars En réponse à : Toni Morrison : L’encre de la célèbre romancière américaine ne coulera plus
Belle synthese de l’oeuvre litteraire de la grande dame Toni Morrison. Le resume de Dame Sita montre qu’il y a encore des journalistes qui ont de la prose au Burkina. Ca incite a aller lire ses livres .
Merci Sita !
4. Le 8 août 2019 à 14:44, par Jack En réponse à : Toni Morrison : L’encre de la célèbre romancière américaine ne coulera plus
RIP à toi et merci pour le partage. J’ai eu la chance d’étudier The Bluest Eye au département d’études anglophones de l’UO, ce qui m’a poussé à en apprendre davantage sur l’immense auteure qui nous quitte en laissant tout un trésor à la postérité. Les artistes ne meurent jamais !
5. Le 8 août 2019 à 16:06, par Yves En réponse à : Toni Morrison : L’encre de la célèbre romancière américaine ne coulera plus
Très bel article.Cela incite à aller à la rencontre des œuvres de l’illustre écrivaine.Toutes mes félicitations Sita TARBAGDO...
6. Le 8 août 2019 à 16:36, par Soka En réponse à : Toni Morrison : L’encre de la célèbre romancière américaine ne coulera plus
Merci, Sita Tarbagdo, pour votre article.
Il est tellement bien écrit qu’il s’impose à la lecture, sans commentaire.
Eternité à l’oeuvre de Toni Morrison !
Paix à son âme !
7. Le 8 août 2019 à 22:42, par kenfo En réponse à : Toni Morrison : L’encre de la célèbre romancière américaine ne coulera plus
C’est vrai que Sita Tarbagdo a une très belle plume, une excellente plume. Merci a elle de nous faire savourer sa saveur unique.
Kenfo