LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Mauritanie : Un réfugié trop bavard

Publié le jeudi 11 août 2005 à 08h28min

PARTAGER :                          

« Dieu, préserve-moi de mes amis, quant à mes ennemis, je m’en charge » dit l’adage. Un adage que doit réciter, tel un écolier, l’ex-président de la Mauritanie, Ould Taya. En effet, après plusieurs tentatives infructueuses de coups d’Etat orchestrés par ses opposants pour le bouter de son trône usurpé en 1984, c’est finalement le fidèle parmi les fidèles qui chassera sans coup férir ce despote du pouvoir.

Ould Taya finalement n’aura récolté que ce qu’il a semé, lui qui, en deux décennies, avait instauré dans son pays un pouvoir de terreur où on exécutait Négro-Mauritaniens et supposés opposants à tour de bras.

Et Maaouyia Ould Taya ne peut que s’en prendre à lui-même. Il doit se mordre les doigts depuis son éviction de la tête de l’Etat mauritanien, le 3 août 2005, par ses propres chiens de garde. Il aurait été démocrate que toute la communauté internationale se serait mobilisée pour le rétablir dans ses droits.

Or ce n’est pas le cas, tout le monde semblant se satisfaire ou s’accommoder à la nouvelle donne à Nouakchott. Et c’est là que l’exilé au Niger saura que la bonne administration de la démocratie est le seul gage qui puisse permettre à un chef d’Etat de rester au pouvoir, d’effectuer des voyages officiels à l’étranger sans être angoissé pour son fauteuil.

Plutôt que d’appeler l’armée à renverser la junte au pouvoir, Ould Taya devrait se taire, se terrer et rester tranquille dans son coin, surtout que les putschistes ont eu l’élégance de laisser son épouse le rejoindre à Niamey.

Et c’est au mépris des règles de l’asile - le devoir de réserve et l’obligation de rester en dehors des actions politiques de son pays d’origine - que l’ex-président a lancé un appel à l’armée à résister contre les putschistes.

Un appel qui n’a aucune chance d’être entendu quand on sait qui sont ses tombeurs. En agissant ainsi, Taya risque d’embarrasser ses hôtes que l’on pourrait soupçonner de l’aiguiller et de le soutenir. C’est donc dire qu’il ne rend pas service et risque de mettre en délicatesse ses hôtes avec les nouveaux hommes au pouvoir du côté de Nouakchott.

Ce coup d’Etat a tout pour plaire aux Mauritaniens, car il a été perpétré par les hommes du président déchu. Un moindre mal pour le pays qui réunissait petit à petit tous les ingrédients pour qu’éclate une rébellion armée. En effet, Ould Taya avait dans ses geôles de nombreux militaires tandis que d’autres avaient trouvé refuge à l’étranger ou avaient été simplement trucidés.

Or, c’est toujours dangereux pour un pays d’avoir beaucoup de militaires mécontents de leur situation et malheureux de voir leur pays végéter dans la misère du fait d’un groupuscule. A coup sûr, si ces exilés avaient les moyens, ils allaient tenter de revenir au bercail au moyen des armes.

A bien y réfléchir, la bande du colonel Ely Ould Mohamed Vall a évité des affres à la Mauritanie. Fait non négligeable à souligner, ce changement de pouvoir à Nouakchott, parce qu’il a été opéré par les gens du sérail, a été pacifique, sans effusion de sang.

Mieux, il n’y aura pas de règlement de compte ni de chasse aux sorcières, car on aura pris les mêmes pour conduire les affaires de l’Etat, à commencer par l’ex-Premier ministre d’Ould Taya, pour repartir du bon pied.

Le temps d’errance a-t-il sonné pour Ould Taya ? On est en droit de le penser puisque dans la nuit d’avant-hier, il est arrivé en Gambie à bord d’un avion d’une compagnie privée. Il a installé ses pénates dans un hôtel de « Senegambia », à une vingtaine de kilomètres de Banjul, alors que le président Yahyah Jammeh venait d’entamer une visite officielle au Brésil.

Ould Taya est-il à Banjul pour une virée ou pour y demeurer ? Pourquoi a-t-il quitté Niamey ? Après Banjul où déposera-t-il son baluchon ? Les jours à venir nous situeront davantage sur tout cela.

Toutefois, la sagesse devrait lui commander de rester calme puisque la preuve de son impopularité a été faite dans son pays. Il ferait mieux d’aller se la couler douce dans tout pays de son choix, surtout qu’à l’heure actuelle il n’y a pas de poursuites judiciaires à son encontre, plutôt que de s’user inutilement à vouloir retrouver son fauteuil doré, qu’il a perdu à jamais.

Ainsi c’en est fini d’un despote qui, lui aussi, avait profité du voyage de son prédécesseur de chef d’Etat à l’étranger pour ravir son fauteuil en 1984. En nouveau roitelet de cette république, au lieu d’instaurer une réelle démocratie, il avait préféré ériger une dictature. Il avait oublié que les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets.

Observateur Paalga

PARTAGER :                              

Vos commentaires

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique