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Côte d’Ivoire : missive à mon oncle

Publié le mercredi 10 août 2005 à 08h04min

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Très cher neveu. Le 7 août dernier, la Côte d’Ivoire a célébré le 45e anniversaire de son indépendance. Tu sais qu’au bon vieux temps, cette fête était commémorée ici généralement en présence des chefs d’Etat du Conseil de l’Entente (Dahomey (actuel Bénin) Haute Volta (actuel Burkina) Côte d’Ivoire, Niger et Togo.

Les chefs d’Etat des pays ci-dessus cités s’étaient d’ailleurs arrangés pour que les différentes commémorations se suivent : 1er août pour le Bénin, 3 août pour le Niger, 5 août pour le Burkina et 7 août pour la Côte d’Ivoire. Le Togo a adhérépar la suite au Conseil de l’Entente. Chaque chef d’Etat, malgré le court décalage entre ces commémorations, mettait un point d’honneur à assister aux festivités marquant celles de l’autre pays membre.

Aujourd’hui, ce plaisir partagé et cette communion ne sont plus que de vieux souvenirs alors qu’ils constituaient le ciment qui faisait des populations des pays concernés, un même peuple au destin inséparable. Aujourd’hui, cette page glorieuse de notre histoire n’est même pas enseignée. Elle est remplacée par une certaine haine qui sème le vent de l’intolérance et du déni de fraternité. Personne ne pouvait imaginer, il y a à peine dix années, qu’un Burkinabè pouvait être considéré comme un pestiféré en Côte d’Ivoire.

Même au plus fort de la crise politique entre les deux pays, due à un conflit de générations entre deux conceptions de la conduite des hommes. Aujourd’hui, je verse des larmes quand j’entends Laurent Gbagbo se réclamer de la pensée politique d’Houphouët tout en organisant quotidiennement et à grande échelle la chasse aux sorcières. Le dernier cas en date, c’est la récente arrestation de 6 Burkinabè soupçonnés d’être mêlés aux événements d’Anyama, Azaguié et Agboville.

Du reste, le discours guerrier, c’est de coutume chez lui, lors de la fête de l’indépendance, n’augure rien de bon quant à la tenue effective du scrutin présidentiel d’octobre prochain. Je dis cela parce l’espoir placé en Tabo MBeki est sur le point de s’effriter en raison du récent scandale sur la vente d’armes au régime de Gbagbo et dont les coupables sont en Afrique du Sud. En plus, Tabo MBeki permet à Gbagbo de solder sans frais, sa part de responsabilité dans l’énorme gâchis humain, politique et socio-économique de la Côte d’Ivoire.

En donnant raison à Gbagbo et tort aux autres protagonistes de la crise politique, MBeki perd sa qualité de médiateur et prend le manteau d’arbitre. Mais son coup de sifflet risque de rester sans écho. A la limite, il aurait dû imposer une thérapie collective à tout le monde. En innocentant Gbagbo, n’obéit-il pas à ce réflexe de survie qui hante le syndicat des chefs d’Etat ? Ce dernier épisode risque de donner raison à Chirac qui disait que le président Sud africain ne connaissait pas l’âme des Africains de l’Ouest.

Tout au plus, Tabo MBeki peut se flatter de connaître l’âme de Gbagbo. Maintenant que Gbagbo et MBeki marchent la main dans la main, il ne reste plus à ce dernier qu’à donner à Gbagbo, le remède miracle à même de lui permettre d’organiser des élections crédibles dans un pays en guerre. Le président ivoirien a beau contraindre certains de son entourage comme le colonel Yao Yao, porte-parole des forces armées nationales, à lexil, rien ne permet d’affirmer que la paix est pour bientôt. Il ne pourra pas balayer sa cour et se débarrasser de tous ceux qui pensent comme ce colonel. En effet, Dieu seul sait combien de Jules Yao Yao sont encore autour de Gbagbo.

Même s’ils se gardent aujourd’hui de parler, ils ne pensent pas moins, comme Yao Yao, qu’il faut changer de politique. En effet, on ne peut pas bâtir les fondements d’un Etat en s’appuyant sur des opportunistes de la trempe de Blé Goudé.
Malheureusement, le pouvoir de Gbagbo a atteint un degré d’aveuglement tel qu’on n’a plus rien de bon à espérer de lui. En attendant, cher neveu, la petite lueur d’espoir, c’est la reprise du trafic ferroviaire entre la Côte d’Ivoire et le Burkina. C’est le seul et dernier fil qui relie les deux pays. Pourra-t-il résister aux sautes d’humeur des courtisans de Gbagbo ? L’avenir nous le dira.

Ton oncle

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 24 août 2005 à 15:21, par Simplice En réponse à : > Côte d’Ivoire : missive à mon oncle

    Mon cher ami, tu est tellement partisan que je me demande s’il existe dans ton cerveau un esprit critique qui se mettrait dans la peau de l’autre pour entrevoir ne serait ce que pour une seconde, la position de l’autre. Il est evident, qu’en CI il ya au sud beaucoup de gens qui en veulent a Gbagbo, parmi lesquels beaucoup de Burkinabes. Comment devrait il etre etonnant que des burkinabes soient arretes. c’est un secret pour personne que Compaore supporte la rebellion et que bon nombre de burkinabe sont decendus sur la CI pour faire la guerre et d’autres deja installes ont joint les rebelles. Tu devrais t’estimer heureux que jusqu’a present les ivoiriens vivent en bonne entente avec les etrangers et les burkinabes en particuliers. Mais il ne faut pas leur demander des miracles : les ivoiriens souffrent de ce phenomene, les burkinabes en souffriront aussi, puisqu’ils participent de la situation. Toutefois que les rebelles arrivent dans des localites nouvelles, ils recruitent dans les quartiers Dioulas(nordistes, burkinabe, maliens...). alors il ne faut pas t’etonner que l’armee fasse des descentes dans ces endroits. En angleterre, Les musulmans extremistes ont attaque le TUBE(metro), les officiers de police ont pour ordre de cibler les asiatiques musulmans avec sacoche au dos. Eh, c’est inconvenient, mais c’est la vie. Ca ne sert a rien de fouiller la vieille dame blanche. elle ne posera jamais de bombes ! Alors je pense que si tu veux vraiment que la CI retrouve le respect qu’elle accordait aux etrangers, alors tu aurais un meilleur impact en sensiblisant les masses burkinabe a s’abstenir de se meler au probleme ivoirien et en disant a ton president de cesser de chercher a destabiliser la CI.

    Un ivoirien en Irlande.

    • Le 24 août 2005 à 23:38 En réponse à : > Côte d’Ivoire : missive à mon oncle

      Qu’est-ce que tu fais en Irlande ? J’espère que tu n’as pas trouvé de logement, et que ta sécurité n’est pas manacée en Irlande dans ce pays où l’IRA aussi pose des bombes. S’il te plaît réfléchis à ce que tu as raconté alors que tu vis dans un pays étranger qui a connu la guerre civile et qui aspire désormais à la paix. Tant que les ivoiriens n’auront pas compris que ceux qui ont pris les armes sont des ivoiriens qui refusent la théorie de l’ivoirité, il n’y aura plus jamais de paix en Côte-D’Ivoire. Je regrette de le dire car j’adore ce pays pour y être né et avoir fait mes brillantes études qui m’ont conduit en France où je suis actuellement un auxiliaire de justice. Alors un peu de réflexion et arrêtez de blasphémer comme Blé Goudé qui n’a pas intérêt à ce que la guerre s’arrête. C’est son terreau car s’il n y a plus de guerre, il n’y aura plus de Blé goudé. Soit pas comme lui et raisonne intelligemment à moins que tu ne retournes vivre tranquillement dans une campagne en CI. Je ne te le souhaite pas et espère que tu t’épanouis en Irlande, pays d’accueil et d’espérance comme la CI.
      Salutations fraternelles tout de même.

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