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Crises à répétition au Faso : « Les symptômes d’une administration territoriale à vau-l’eau »

Publié le lundi 29 avril 2019 à 21h40min

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Crises à répétition au Faso : « Les symptômes d’une administration territoriale à vau-l’eau »

Dans la tribune ci-après, Maurice Beda parle d’échec de l’administration territoriale dans la prévention et la gestion des crises au Burkina. De son point de vue, des réformes sont indispensables dans ce département ministériel pour permettre la restauration de l’autorité de l’État au Burkina.

Tout récemment, je lisais en ligne sur la page de la Présidence du Faso un article qui avait pour titre : ‘’ Insécurité dans les régions : le président du Faso instruit les gouverneurs de rassurer les populations.’’ (Gaoua, 26 avril 2019).

Si le sommet de l’Etat arrivait à comprendre et à admettre publiquement que l’une des causes de l’insécurité et des crises communautaires à répétition au Burkina se trouve dans la défaillance de l’administration territoriale, le pays pourrait être en bonne voie pour trouver l’une des réponses durables à ses préoccupations actuelles, me suis-je dit après lecture dudit article.

Conformément au Décret N°2019-0139 du 18 février 2019 portant attributions des membres du gouvernement, le ministère de l’Administration territoriale est en charge entre autres :

-  de la représentation et de la permanence de la présence de l’Etat sur le territoire national ;

-  des relations de l’Etat avec les communautés coutumières, religieuses et la chefferie traditionnelle ;

-  du suivi de l’application de la règlementation en matière de libertés d’association à but non lucratif ;

-  de la collecte et de l’exploitation de toutes informations se rapportant à la mission générale d’administration du territoire ;

-  de la gestion des risques et catastrophes par la prévention, la prévision et l’intervention ;

-  de la prévention et de la gestion des conflits fonciers, inter-communautaires et culturels, miniers avec les ministères compétents.

Cette ossature d’attributions régaliennes donne à ce ministère un rôle de premier plan dans l’élaboration et la mise en œuvre de politiques et stratégies en matière d’administration du territoire.

C’est pourquoi, même si au Faso la pratique s’en moque visiblement parfois, c’est selon bien sûr, théoriquement le gouverneur de région, le haut-commissaire de province et le préfet de département sont les dépositaires de l’autorité de l’Etat. Et à ce titre, ils coordonnent toutes les politiques publiques de l’Etat dans leur ressort territorial.

Que parmi ces dépositaires de l’autorité de l’Etat, certains soient mal perçus aux yeux d’une catégorie de citoyens en raison de leurs accointances politiques affichées ou de leur style de management en déphasage avec les mutations actuelles, là n’est pas l’objet de mon cri du cœur.

Que parmi ces dépositaires de l’autorité de l’Etat, d’autres fassent en toute discrétion des pieds et des mains pour être relevés de leurs fonctions en raison de la précarité financière et logistique de leurs services ou des railleries sournoises de quelques administrés et agents publics à leur égard, cela n’est pas non plus l’objet de cette tribune.

La situation nationale de l’heure exige de chaque citoyen un minimum de langage de vérité sur la défaillance, plutôt la décadence de la politique nationale d’administration du territoire.

Le ministère en charge de l’Administration du territoire a fait preuve de passivité là où il devrait travailler à prévenir les crises. Il s’est résolu à faire le constat de faits malheureux là où il devrait agir pour empêcher leurs survenues et il faut oser le dire.
D’aucuns diront qu’il a fait de son mieux avec les moyens du bord, peut-être. Mais son rôle était plutôt d’agir pour empêcher la survenue de ce cycle d’évènements tristes dont les signaux étaient déjà perceptibles par de nombreux citoyens.

À l’image d’autres départements ministériels, je m’autorise à dire que l’essence du département en charge de l’Administration du territoire a été érodée par l’égoïsme de certains responsables et cadres, galvaudée par les pratiques politiques politiciennes des différents régimes et siphonnée par l’appétit vorace des assoiffés de fonctions ronflantes. Au résultat, même les auteurs de cette débâcle administrative s’étonnent aujourd’hui de l’effritement de l’autorité de l’Etat.

‘’Le pays est gouverné ’’. Contrairement à cette célèbre formule d’un ancien ministre burkinabé, ayons le courage d’écorcher notre orgueil national et rendons-nous à l’évidence, la gouvernance est à vau-l’eau au Faso et l’autorité de l’Etat est mise à rude épreuve. Pour s’en convaincre, il suffit de voir comment des gouverneurs, hauts-commissaires et préfets peinent à assumer la plénitude de leurs fonctions et sont obligés de courir derrière les évènements.

De Tialgo à Zoaga en passant par Karangasso-Vigué, Yirgou, Arbinda, le ministère en charge de l’Administration territoriale doit assumer sa part de responsabilité dans ces tristes évènements. Il a failli à sa mission de prévention et de gestion de conflits, les insuffisances de ses actions ont ébranlé la cohésion sociale.

Comment asseoir une administration territoriale en phase avec les défis de l’heure ?
Ou comment mettre les dépositaires de l’autorité de l’Etat au diapason des nouvelles dynamiques sociales ?

Ou encore comment construire une intelligence territoriale performante et proactive ? Voilà des préoccupations qui méritent d’être inscrites en priorité dans l’agenda de ce ministère clé car si l’Etat n’impose pas son autorité à temps à travers de profondes réformes et des actions concrètes, les groupes privés imposeront durablement la leur à l’Etat.

BEDA Maurice, citoyen burkinabé

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Vos commentaires

  • Le 29 avril 2019 à 12:40, par HUG En réponse à : Crises à répétition au Faso : « Les symptômes d’une administration territoriale à vau-l’eau »

    Tes idées sont pertinentes mais vous avez oublié d’autre idées essentielles :
    - L’organisation du ministère de l’administration au niveau déconcentré( le gouverneur, la haut commissaire et le préfet) au niveau des régions. Cela fait du trop et les conflits de compétences apparaissent. j’aurais compris qu’un agent qui dans direction régionale fasse des ordres de missions, ces décisions de congé au Gouvernorat mais vous verrez que ces actes s’établissent au haut commissariat. Où est la logique.
    - La cohabitation entre la déconcentration et la décentralisation pose souvent des conflits entre les deux acteurs (préfet, haut commissaire, gouverneur et maires, président de conseil régional. Entre le politique(maires, président de conseil régional) et l’administratif (préfet, gouverneur, haut commissaire) souvent la situation est tendue.

  • Le 29 avril 2019 à 13:00, par Kado En réponse à : Crises à répétition au Faso : « Les symptômes d’une administration territoriale à vau-l’eau »

    Merci BEDA Maurice pour cette interpellation. Le ministre Simeon Sawadogo en lieu et place d’etre exclu du gouvernement a cause son incompetence et surtout sa negligence de la vie humaine (confert question de genocide de Yirgou), est plutot elevé au rang de ministre de l’Etat. Ce sont ces genres de politiciens (dont les conseillers sont des chefs coutumiers) remplis dans le MPP qui le conduisent honteusement vers sa derriere demeure.
    Cher President du Faso, faut-il attendre encore que l’opposition et les OSC vous obligent de chasser ce type de votre gouvernement ?

  • Le 29 avril 2019 à 13:02, par Dembo En réponse à : Crises à répétition au Faso : « Les symptômes d’une administration territoriale à vau-l’eau »

    Gouverner c’est prévoir dit-on. Que chacun fasse son travail.
    A bon entendeur...

  • Le 29 avril 2019 à 13:17, par Fousby En réponse à : Crises à répétition au Faso : « Les symptômes d’une administration territoriale à vau-l’eau »

    Chaque agent de l’admiration du territoire a sa part de responsabilité dans cette situation dont vit le ministère. A chacun de s’assumer.
    Les postes, les mercredis sont flatteurs. Ayez le courage de tout mettre à plat au sein ce département ministériel.

  • Le 29 avril 2019 à 14:06, par Tiiboo En réponse à : Crises à répétition au Faso : « Les symptômes d’une administration territoriale à vau-l’eau »

    Il faut simplement supprimer ces structures telles que gouvernorats et massin massin et mettre en place une direction régionale comme dans tous les autres ministères sinon la politique s’y invitera et non la compétence. Pourquoi sont ils au dessus des DR ? Et d’ailleurs en quoi ce ministère est il un ministère d’état ? Au lieu de mettre des compétences qu’il faut on nomme n’importe quoi qui sont là pour juste ouvrir des ateliers, présider des quoi, signer des certificats que les DR peuvent signer, s’accaparer des activités qui n’ont rien avoir avec le MATD tout juste pour empaucher des sous en plus de leurs indices forcés et tout ça pour s’amuser avec des jupons. N’importe quoi ce ministère. Créer des DR, des DP et autres et vous verrez ça va bouger. Pendant que leurs circonscriptions territoriales subissent des attaques certaines "autorités" inconscientes n’hésitent pas à se soûler la gueule à n’importe quel petit maquit du coin in soucieuse ment.

  • Le 29 avril 2019 à 14:20, par le petit tranquilos En réponse à : Crises à répétition au Faso : « Les symptômes d’une administration territoriale à vau-l’eau »

    Tant que les politiciens ne revoient pas la qualité des hommes qu’ils mettent comme conseillers ou maires, le Burkina aura toujours du chemin à parcourir. Imaginez un conseiller qui ne peut même écrire son nom se trouve à décider pour sa commune, c’est vive la pagaille. Ce qu’ils interprètent, ils pensent que c’est ça la vérité, hors gérer une administration, il y a des règles. Certains ne peuvent pas analyser l’importance de certains actes et c’est le cas surtout au Sahel et dans d’autres communes. Vous remarquerez que là ou ça chauffe, c’est le coin ou la majeur partie des conseillers sont des illettrés. Rehaussez le niveau de nos conseillers (au minimum le BEPC) et vous verrez que l’administration au niveau déconcentré ira mieux. Si assistez à certaines réunions dans certaines communes, vous allez vous rentre que c’est peut être 03 personnes qui maitrise la langue de molière et il faut passer tous les temps à traduire les interventions.
    Ce que dit Koro est une vérité et cela est constaté dans les travaux de BTP.

  • Le 29 avril 2019 à 16:05, par sheiky En réponse à : Crises à répétition au Faso : « Les symptômes d’une administration territoriale à vau-l’eau »

    Merci pour ce type de contribution. Au délà de l’analyse qui peut être appréciée selon la compréhension de chacun, elle permet d’élargir la vision qu’on peut avoir des raisons de la propagation et de la persistance des crises sécuritaires. La politique de décentralisation et de déconcentration a été un sujet très bien porté et financé dans notre pays pendant plus d’une décennie. Mais on se rend compte que les fruits n’ont pas été à la hauteur des fleurs. La mise en application et le suivi ont été faits à l’aune des ruses et stratégies politiques. C’est également l’un des impacts négatifs de l’ancien régime. Des personnes très compétentes ont été utilisées (j’évite de citer des noms) dans ce processus, mais à la fin, on reste dubitatif sur le résultat.
    Malgré tout, on se rend compte que le pouvoir actuel n’a pas une feuille de route idoine permettant de redresser la barre. C’est vrai qu’il y a des urgences partout, mais sachons que ce sont les hommes qui sont nécessaires. Il faut tout simplement essayer au maximum de mettre l’homme qu’il faut à la place qu’il faut. En outre, on ne devrait pas hésiter à remplacer des responsables en cas d’incompétence et de défaillance. Mais il est aujourd’hui connu de tous que le Rocko est incapable d’appliquer une telle gestion du pouvoir. Lui et son entourage sont TROP politiques et malheureusement le Bukina post-insurrection n’avait pas besoin d’un système outrancement politique. Espérons que si il gagnent un deuxième mandat la donne va changer. Mais je reste sceptique.
    Que Dieu bénisse le Faso

  • Le 29 avril 2019 à 17:25, par citoyen LAMBDA En réponse à : Crises à répétition au Faso : « Les symptômes d’une administration territoriale à vau-l’eau »

    A plusieurs reprises, des personnes de bonne foi ont attiré l’attention du président du Faso sur la déliquescence et le délitement de notre administration publique en raison de l’instauration et de la promotion de l’irresponsabilité et de la médiocrité en son sein à travers la politisation à outrance ,"l’amicalisation ,la parentalisation ,la régionalisation ,la tribalisation, des nominations aux postes de responsabilité étatiques .Et tout semble indiquer que de nos jours plus, vous êtes incompétent ,irresponsable ,négligeant ,et médiocre, voir délinquant , plus ce pouvoir vous élève dans les hautes fonctions de l’Etat et le cas du ministre de l’administration territoriale actuelle est un cas affligeant et flagrant . Plus grave encore , jamais dans un pays ,l’administration publique n’a été aussi envahie par des personnes issues du secteur privé ,personnes non formées à la déontologie administrative ,au sens du service public et de l’Etat qui s’apprennent dans des écoles professionnelles créées par l’Etat à cet effet . Etre serviteur de l’Etat s’apprend d’abord à travers des valeurs nobles que l’on vous a inculquées dans une structure de formation professionnelle . Ce n’est pas parce que qu’on a un simple diplôme universitaire qu’on acquiert les vertus du bon serviteur de l’Etat .Au BURKINA FASO d’aujourd’hui on devient ministre ,DG ,Conseiller ou chargé de mission à la Présidence du Faso ,à la primature ,dans les ministères sans la plus petite des expériences professionnelles dans la gestion des affaires publiques . Certains hauts fonctionnaires ne connaissent même pas le B.A.B .A de l’administration publique d’où des comportements arrogants qui sont à l’origine de beaucoup de crises inutiles dans les ministères et autres structures de l’Etat . Comme quelqu’un l’a déjà dit, l’administration publique burkinabè a été en outre totalement privatisée . Comptons seulement le nombre de présidents d’institutions ,de ministres ,,de DG etc ,actuellement aux postes de responsabilités dans l’administration publique ? Le dire ne veut pas dire qu’on est contre les travailleurs du secteur privé . Seulement dans la vie de tous les Etats, le service public doit être essentiellement assuré par les agents du public .Point barre . Quand bien même, on peut faire appel à des personnes issues du privé, c’est généralement des personnes qui ont déjà travaillé comme fonctionnaire avant d’aller au privé, ce qui fait qu’elles connaissent déjà les règles et les valeurs de l’administration publique . Quand des personnes inexpérimentées viennent du privé pour prendre les rennes de l’administration publique elles viennent généralement avec un complexe de supériorité tel qu’ils se croient sortis de la cuisse de Jupiter et que les fonctionnaires de l’Etat ne sont rien devant eux .C’est tout cela qui est entrain d’assassiner notre administration publique et qui est à l’origine de beaucoup de crises évitables dans les ministères et autres grandes structures de l’ETAT, tout comme de la perte de l’autorité de l’Etat . Et il est étonnant, que malgré tous les appels en direction du président u Faso ,rien ne soit résolument engagé pour arrêter la descente aux enfers de notre administration publique . Dommage pour l’avenir de notre pays .

    • Le 30 avril 2019 à 10:31, par INTEGRE En réponse à : Crises à répétition au Faso : « Les symptômes d’une administration territoriale à vau-l’eau »

      CITOYEN LAMBDA , tu as tout dit et je pense que le président RMCK doit prendre cela à bras le corps s’il veut venir à bout de ce que nous connaissons comme problèmes aujourd’hui . On est contre personne , on veut que notre pays se porte bien et que le président RMCK soit tranquille dans la gestion du pays .On ne peut pas comprendre que des agents du privé (ils sont certes burkinabè ) sans expérience ; qui n’ont jamais géré un cabinet de plus de 10 personnes ,soient nommés ministre , conseiller, DG d’entreprises publiques etc. A moins que l’intention du président RMCK ne soit un partage pur et simple du "gâteau" (les faibles ressources du BURKINA) entre parents et amis et ce serait dommage . Mr RMCK , si vous vous êtes de blaise Compaoré et que on vous a élu comme étant la solution en 2015, c’était pour ne plus avoir à faire à ces arrogances du temps des Compaoré . Il y a des burkinabè qui sont là , prêts à conduire les affaires de l’Etat avec dynamisme et transparence mais ils sont oubliés , sinon mis de coté tout simplement parce que n’ayant pas une carte des partis au pouvoir . Mr le Président il est temps de mettre fin à certaines qui perdurent et qui sont à l’origine de tous nos maux aujourd’hui , à savoir la politisation de l’administration . Les voyous de grands chemins se cache derrière cette politisation pour mettre à plat nos ministères , nos entreprises d’Etat , bref toute l’administration du pays . Quand malgré leur inexpérience ,leur incompétence , leur immaturité ils sont nommés frauduleusement ,ils organisent des groupuscules de pillage pour arriver à leur fin . Mr RMCK dites "trop , c’est trop " et revoyez la gestion de notre administration et l’histoire parlera de vous .

  • Le 29 avril 2019 à 18:47, par aboubacar En réponse à : Crises à répétition au Faso : « Les symptômes d’une administration territoriale à vau-l’eau »

    Vous touchez du doigt des problèmes de l’administration publique et pas de la seule administration territoriale : la politisation, le clientélisme, la déliquescence, l’effritement de l’autorité de l’Etat.
    Ces problèmes n’ont pas commencé aujourd’hui et prendront de plus en plus d’ampleur avec cette classe politique actuelle. Pour s’en convaincre, il suffit de suivre l’actualité.
    Rien n’est adapté lorsque vous parler de l’administration publique : on crée des institutions qui ont les mêmes missions et qui ne servent à rien, des ministères qui poussent pour loger du personnel politique. Suivez le programme gouvernemental, combien me diront que ce gouvernement est à la hauteur des défis du Burkina Faso ?

  • Le 14 mai 2019 à 00:23, par Zoungrana En réponse à : Crises à répétition au Faso : « Les symptômes d’une administration territoriale à vau-l’eau »

    Que pensez vous pour notre avenire si l’education va continuer de cette maniére ?

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