En plus des autorités politiques, il y avait des représentants d’autres confessions chrétiennes et musulmanes ainsi que des autorités coutumières. Tous sont venus témoigner leur compassion au nom de la fraternité et prier pour l’âme du père Antonio César Fernandez, « un homme qui a vécu toute sa vie au service de l’humanité ». « Santos subito » (qu’il soit fait saint tout de suite), pouvait-on lire sur des T-shirts que plusieurs personnes arboraient à la messe.

Mgr Piergiorgio Bertoldi, nonce apostolique du Burkina/Niger, a déclaré dans son homélie : « Il semble que le père César a été tué après avoir déclaré qu’il était prêtre. Et on ne sait pas ce que le père a pu dire avant de mourir mais on lui prête les propos de Jésus : ‘‘Pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font’’ ».

Pour lui, ce sont peut-être les négligences des hommes qui ont plongé beaucoup d’entre eux dans la pratique de la violence. C’est pourquoi, s’adressant à l’assistance, il a ajouté : « Qu’avez-vous fait pour empêcher ces individus de sombrer dans la voie de la violence et d’en être des adeptes ? ». Dans une vie de société, ce sont des évènements qui mettent chaque citoyen face à ses responsabilités.

Le père César Fernandez, précédemment directeur de la Maison des religieux salésiens, est tombé sous les balles assassines de terroristes alors qu’il revenait d’une rencontre de la communauté au Togo. Pour Mgr Léopold Médard Ouédraogo, « le témoignage de sa vie et de sa mort nous affranchit de la peur de mourir ». Au Togo, une messe a aussi été célébrée en la mémoire du père César.

Une délégation du gouvernement burkinabè y a pris part. Mgr Piergiorgio Bertoldi, en conclusion, a déclaré : « Nous prions pour le père César et pour les quatre douaniers abattus à la même occasion. Mais en se rappelant les propos de Jésus à l’endroit des femmes de Jérusalem, c’est sur nous-mêmes que nous pleurons et sur ces jeunes à qui la vie a été donnée, mais qui sont devenus des adeptes de la violence ».

Etienne Lankoandé (stagiaire)
Lefaso.net

Témoignage sur la vie du père César Fernandez par un de ses confrères qui a été son élève au couvent

« Quand j’étais aspirant, nous craignions beaucoup le père César parce qu’il était notre formateur et il était très exigeant. Cette exigence, il la vivait personnellement et nous l’imposait parce qu’il était convaincu de sa vision du service pour le monde. Pendant un an, j’ai été dans la même communauté que lui et on disait que notre communauté de formation d’alors était un peu difficile.

Notre père spirituel, qui était avec nous avant César, ne pouvait plus supporter ; alors on avait fait appel au père César, n’a pas pu terminer l’année avec nous. En l’espace de deux ans, j’avais eu trois directeurs dans la maison de formation. Et quand César partait, je m’en souviendrai, il avait dit : « Je m’en vais non pas parce que j’ai échoué, mais parce que je veux que vous puissiez vivre libres et que vous compreniez une chose ; je veux pour vous la conversion réelle parce que vous serez au service du peuple de Dieu. Le peuple de Dieu n’attendra pas de vous votre philosophie que vous êtes en train d’apprendre et avec laquelle vous êtes en train de parler avec moi. Votre philosophie, ça sera votre vie réelle ».

Et César était pour nous, non pas une théorie de vie, non pas un formateur en théorie, mais un formateur concret, qui nous a enseigné par sa vie. Je l’ai connu pendant 17 ans et depuis que j’étais aspirant à Bobo-Dioulasso, chaque fois il passait et à plusieurs reprises pour visiter les confrères. Deux épisodes retiennent particulièrement mon attention.

J’étais au presbytère à Bobo-Dioulasso lorsqu’il passait rendre visite aux confrères, et la situation était tout à fait dangereuse à l’époque en Côte-D’Ivoire. Les confrères lui avaient conseillé de ne pas continuer le voyage, vu le danger qui le guettait. Père César a crié fort au point de nous dire que nous n’avons pas assez de foi et qu’il irait voir ses confrères qui étaient dans une situation assez difficile. Il est parti et ce que nous lui avions dit s’est avéré.

César avait été emprisonné, mis dans un conteneur pendant deux jours. Au retour, nous lui avons dit : « Mais père César, on t’avait dit de ne pas partir ». Et il disait en réponse : « C’est ma mission ». Il était vraiment un homme qui avait de la conviction et quand il engageait, il le faisait jusqu’au bout. Et c’était le Seigneur Jésus-Christ qui lui avait donné cette mission. Il avait cette vocation, peut-être sans le savoir, d’être martyr et c’est ce qu’il a vécu.

A la veillée de prière à la paroisse de la Patte-d’oie, je disais que « si César n’était pas mort de cette façon, il n’aurait pas assumé sa vocation réelle en tant qu’apôtre de Jésus Christ ». Peut-être parce qu’il était prêtre ou peut-être c’est à cause de sa peau. Nous évitons toute polémique, mais de toute façon, César a été tué en tant que missionnaire.

Etant mort à la frontière entre le Togo et le Burkina Faso, Togo qui a été sa première terre de mission et le Burkina qui était la terre de sa dernière mission, César nous fait la synthèse de sa vie, un homme dévoué à tout. Et en ce moment précis où il nous regarde du ciel, qu’il intercède pour que ces violences puissent cesser sur cette terre ».