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Procès du putsch : Le Général Pingrenoma Zagré, le témoin le plus attendu a parlé

Publié le lundi 25 février 2019 à 00h25min

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Procès du putsch : Le Général Pingrenoma Zagré, le témoin le plus attendu a parlé

Les généraux se suivent, mais ne se ressemblent pas...à la barre du tribunal militaire dans le cadre du procès du coup d’Etat. Celui-là était attendu par toutes les parties au procès. Son témoignage était jusque-là l’une des pièces manquantes au puzzle du putsch. Ce 22 février 2019, le Général Pingrenoma Zagré, chef d’Etat major général des armées au moment du putsch a comparu. Comme si lui même attendait ce moment, l’homme, d’un ton magistral et solennel, a expliqué tous les épisodes du coup d’Etat et du rôle qu’il a joué. Tout a été fait selon lui, pour dissuader le Général Diendéré afin qu’il renonce à son “aventure contre toute raison, contre toute logique”.

Quand le président du tribunal Seidou Ouédraogo demande au paritaire d’accompagner le Général Pingrenoma Zagré dans la salle, un petit brouhaha s’en suit. Dans le box, plusieurs accusés quittent momentanément la salle pour aller certainement se soulager. Quelques minutes après, Pingrenoma Zagré fait son entrée. Il est vêtu d’une tenue Faso Danfani, un cartable en main.

Après avoir décliné son identité et juré de dire toute la vérité en sa qualité de témoin, il commence sa narration des événements du 16 septembre 2015 et jours suivants en rendant grâce à Dieu pour avoir sauvé le Burkina Faso du chaos. Plus tard, il révélera n’avoir jamais vu un coup d’Etat qui a réuni autant de conditions de violence que celle du 16 septembre 2015.

Après avoir été informé de l’arrestation des autorités de la transition, le chef d’état-major général des armées de l’époque, dit avoir eu “un choc moral et psychologique”. Pingrenoma Zagré convoque alors la hiérarchie militaire, en plus de l’évêque de Bobo Dioulasso Jean-Paul Ouédraogo et l’ancien président Jean-Baptiste Ouédraogo comme témoin à la réunion avec le Général Gilbert Diendéré dans la soirée du 16 septembre. Il confirme devant l’assistance la prise en otage des autorités . Un acte qu’il justifie par l’exclusion de certains hommes politiques de l’élection présidentielle, le texte taillé sur mesure pour faire porter des étoiles de Général au lieutenant-colonel Yacouba Isaac Zida et la probable dissolution du RSP.

Au regard de tout cela, des éléments du RSP ont décidé de mettre fin à la transition pour changer la donne, aurait dit ’’Golf’’. Tous les membres de la CRAD étaient ébahis, raconte Pingrenoma Zagré. Selon lui, les membres ont rappelé à Diendéré qu’il n’était pas de la vocation de l’armée de s’immiscer dans les affaires politiques. Un langage de fermeté lui a été tenu. “Nous lui avons tenu toutes sortes de langage”, pour qu’il libère les otages, a expliqué le témoin. Mais peine perdue.

Le CEMGA suggère alors d’aller parler aux éléments du RSP au camp Naba Koom, mais le futur président du CND propose d’aller baliser le terrain. “Nous avons trouvé cela perplexe”, explique le désormais ambassadeur du Burkina Faso au Ghana.

Environ 45 minutes après l’ancien chef d’Etat-major particulier revient annoncer à l’assistance que les hommes ont décidé de ne pas faire marche arrière. Malgré tout le Général Pingrenoma, accompagné de Jean-Paul Ouédraogo, Jean-Baptiste Ouédraogo tentent le coup.

Selon le témoin, la salle dans laquelle une trentaine d’ éléments du RSP les attendaient était faiblement éclairée, certains étaient cagoulés et proféraient des menaces. “Si vous ne faites pas attention, vous ne sortirez pas du camp”, leur auraient lancé certains. Le témoin dit se rappeler de certaines personnes qui sont intervenues pour défendre les positions de Diendéré. Il s’agit entre autres du Capitaine Dao Abdoulaye, Nebié Moussa, l’adjudant Jean-Florent Nion et du Capitaine Zoumbri Oussène qui auraient traité les émissaires d’utopistes.

Le déplacement n’eut pas l’effet escompté. De retour au ministère de la défense, le Gal Diendéré porte à la connaissance des membres de la CRAD que les hommes qui ont procédé à l’arrestation des autorités ont l’intention de créer le Conseil national pour la démocratie (CND). Contrairement à ce qui est dit par le Gal jusque là, il n’a jamais proposé à qui que ce soit de prendre la tête du CND, selon Pingrenoma Zagré. Mais l’ancien président Jean-Baptiste Ouédraogo lui a effectivement dit, au regard de son intransigeance et de celui de ses hommes de ne pas reculer, de prendre sur lui le coup d’Etat, toutes les implications et les conséquences qui en découleront. Le futur président du CND a alors demandé l’aide de la hiérarchie militaire. “On ne peut pas vous apporter un quelconque soutien”, aurait-elle rétorqué.

Le souci en ces moments était selon le Gal Pingrenoma d’obtenir la libération des otages, alors que les pressions de toutes part allaient dans le sens d’un assaut contre le camp Naba Koom.

Jamais une mission héliportée demandée par le CEMGA

Au regard des exactions commises en ville par les éléments du RSP, l’ancien CEMGA dit avoir instruit la gendarmerie et la police de continuer leurs missions régaliennes de maintien d’ordre, après avoir demandé au RSP de regagner son camp. “Ça aurait été irresponsable de ne pas le faire”, se défend le témoin.

“Je n’ai jamais donné l’ordre au chef d’Etat major de l’armée de l’air, ou à un officier pour autoriser une mission héliportée. Aucun ordre n’a été donné pour aller chercher du matériel de maintien d’ordre” martèle l’ambassadeur. Bien au contraire, il dit s’être emporté avec le Gal Diendéré , parce qu’en tant que CEMGA, du matériel militaire ne doit entrer sur le territoire national sans qu’il n’en soit informé. Et pourtant le Gal Diendéré a encore soutenu le contraire. “Dans la nuit du 18 septembre, je l’ai appelé pour dire que j’ai besoin d’un hélicoptère. Il m’a dit qu’il va prendre attache avec l’armée de l’air. Le chef d’Etat-major de l’armée de l’air m’a effectivement appelé pour dire qu’il a reçu l’ordre du CEMGA”, a soutenu pour sa part l’accusé.

L’ancien CEMGA a en outre révélé que la hiérarchie militaire a continué à parler au Gal afin qu’il renonce à son aventure contre toute raison et contre toute logique. Une déclaration de démission lui a même été proposée. Déclaration qu’il a prise, “les mains tremblantes ” sans donner de suite. Mais en lieu et place, il a demandé au premier responsable de l’armée de lui proposer une liste pour constituer le CND. “Un délire” selon lui.

Le témoin a par ailleurs salué l’engagement et le sens patriotique du Commandant Aziz Korogo, responsable par intérim du RSP qui a permis d’éviter des affrontements entre entités d’une même armée.

L’audition du témoin se poursuit ce 25 février 2019.

Tiga Cheick Sawadogo
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 25 février 2019 à 05:34, par Pascal En réponse à : Procès du putsch : Le Général Pingrenoma Zagré, le témoin le plus attendu a parlé

    Je suis très fier de mon pays. Il y a encore des responsables intègres. Général pingrenoma. Que Dieu te bénisse tu as sauvé bcp de vie humaine grâce à ton sang froid ton habilité ton intelligence ton intégrité..

    Très fier de toi.

  • Le 25 février 2019 à 08:35, par Dedegueba Sanon En réponse à : Procès du putsch : Le Général Pingrenoma Zagré, le témoin le plus attendu a parlé

    J’espère qu’on va y arriver enfin à la fin de ce procès. Ça commence à faire long et très long même. Difficile de trier le vrai du faux, et il faut comprendre le rôle de cette hiérarchie militaire que Golf veut noyer coûte que coûte. En droit on dit obtenir l’aveu de quelqu’un sous la force n’est pas valable, Golf a donc tout faux de dire que cette hiérarchie fut impliquée, car l’enfermer au camp avec des hommes en armes pour l’obliger à s’impliquer ne peut donc être pris en compte. Du reste elle a été assez courageuse pour dire "certaines vérités" à Golf. Néanmoins il se peut que parmi cette hiérarchie certains ont eu un comportement d’opportunistes, en cherchant le meilleur parti de cette crise, et c’est sans doute ce qui rend furieux Golf. Mais le noeud de toute l’histoire c’est malheureusement Golf lui-même. J’avais respecté l’homme au début d’abord pour sa loyauté à Blaise et sa dignité lorsqu’il disait assumer une bourde en quelque sorte, de ses hommes. Car ce putsch ne lui ressemblait pas, et j’avais fait un parallèle en disant que ses hommes lui ont fait le coup que lui-même avait fait à Blaise un 15 Octobre.... Mais par la suite il s’est mis à se dédire dans tous les sens et s’arcbouter sur cette hiérarchie militaire, comme si être impliqué était plus grave que présider un putsch.
    Par contre le rôle de l’autre général me reste ambiguë. Il a été le premier à lâcher Blaise et le retrouver encore dans le camp des "pro Blaise", me surprend beaucoup.

  • Le 25 février 2019 à 10:59, par sidwaya Gomis En réponse à : Procès du putsch : Le Général Pingrenoma Zagré, le témoin le plus attendu a parlé

    A mon avis, lors de ce coup d’état de septembre 2015, le CEMGA a manqué à son devoir en ne déclenchant pas une action militaire contre le RSP.

    Le CEMGA n’aurait jamais dû laisser les jeunes officiers lui bruler la politesse sur ce point. Au contraire il devait être au devant de ce mouvement des jeunes officiers.

    L’argument selon lequel il ne souhaitait pas qu’un soldat burkinabè tire sur un autre soldat burkinabè ne tient pas du tout. En disant cela le CEMGA d’alors montre que la vie des civils burkinabè lui importe peu ; en effet des soldats burkinabè ont tiré sur des civils burkinabè et ça c’est extrêmement grave et le CEMGA se devait d’en tirer les conséquences et ordonné une action contre le RSP !

  • Le 25 février 2019 à 12:17, par Nabiiga En réponse à : Procès du putsch : Le Général Pingrenoma Zagré, le témoin le plus attendu a parlé

    Chapi ! Plus rien à dire. Jetez Gilbert en prison et il doit remercier le tribunal en passant. Il s’est toujours cru intelligent, il a s’est créé cette mystère autour de lui-même afin de s’en servir pour faire des basses besognes.
    ’Il a pris la déclaration, les mains ; tremblant comme un enfant’. Ça ce n’est pas la posture d’un gandawgo mossi que nous sommes, nous.

  • Le 25 février 2019 à 12:49, par ragnague En réponse à : Procès du putsch : Le Général Pingrenoma Zagré, le témoin le plus attendu a parlé

    Mon cher « SIDWAYA GOMI » vous êtes un ennemi déclaré du peuple burkinabé. Vous dites que « le CEMGA a manqué à son devoir en ne déclenchant pas une action militaire contre le RSP »  ? Vous êtes vraiment dangereux et criminel en plus. Un affrontement aurait fait plus de victimes civils que militaires, de dégâts matériels incalculables. Je ne sais même pas pourquoi je perds mon temps avec un individu de votre genre.
    Revenant aux choses sérieuses, le Général Pingrénoma ZAGRE mérite le grade de Maréchal, pour avoir utilisé Intelligence, Sagesse et Courage pour éviter le chaos au Burkina Faso en septembre 2015. Félicitations, le peuple burkinabé est fier de vous, mon Général !
    Que Dieu nous aide, et bénisse ma Patrie !

  • Le 25 février 2019 à 13:05, par EBENEZER En réponse à : Procès du putsch : Le Général Pingrenoma Zagré, le témoin le plus attendu a parlé

    Je fais confiance au tribunal...................................................................................................
    Si je parle on dira que.....................................................................................................................................

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