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Lutte contre la malnutrition : L’ONG Action contre la faim appelle à des financements endogènes

Publié le vendredi 22 février 2019 à 10h00min

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Lutte contre la malnutrition : L’ONG Action contre la faim appelle à des financements endogènes

Après « l’atelier-bilan 2018 et planification 2019 » du Programme intégré de diversification de la production et d’amélioration nutritionnelle dans la région des Hauts-Bassins (PADI) tenu le 20 février à Orodara, les acteurs dudit programme ont organisé, le jeudi 21 février 2019 dans la Cité du verger, un atelier de restitution des études sur les financements endogènes et privés de la nutrition et Link NCA (Analyse des causes de la nutrition). L’objectif de cet atelier était, d’une part, de présenter les résultats enregistrés par le PADIS et, d’autre part, d’échanger sur d’éventuelles contributions des différents acteurs afin d’enrichir les différentes interventions.

Le Programme intégré de diversification de la production et d’amélioration nutritionnelle dans la région des Hauts-Bassins (PADI) a pour objectif de contribuer à la sécurité alimentaire et nutritionnelle des personnes vulnérables y compris les personnes handicapées dans la région des Hauts-Bassins.

En effet, ladite région dispose d’un fort potentiel agricole et fournit à elle seule plus de 20% de l’offre nationale en céréales. Elle occupe le 2e rang en matière de production de légumes avec plus de 17 250 hectares de bas-fonds exploités en 2016, soit 17% de la superficie exploitée au niveau national. La province du Kénédougou est par excellence une zone de forte production. Malgré ses potentialités, les indicateurs de développement dans cette province ne sont pas encourageants. La prévalence de la Malnutrition aigüe sévère (MAS) demeure préoccupante par rapport aux deux autres provinces de la région des Hauts-Bassins.

Les participants

Il ressort ainsi du rapport de l’enquête nationale nutritionnelle « SMART 2017 » que la prévalence de la MAS est de 0,3% dans le Houet ; 0,6% dans le Tuy contre 1,8% dans le Kénédougou. Le PADI a ainsi pour ambition d’aider la région des Hauts-Bassins et particulièrement la province du Kénédougou dans l’atteinte de la sécurité nutritionnelle sous tous ses angles. Cependant, malgré les efforts consentis par l’Etat, les partenaires techniques et financiers et bien d’autres acteurs, les indicateurs relatifs à la malnutrition sont toujours préoccupants.

Selon la chargée de plaidoyer au niveau du bureau régional Dakar de l’ONG Action contre la faim (ACF), Judith Kaboré, sur la question du financement de la lutte contre la malnutrition, il y a un problème général en Afrique de l’Ouest et « la situation est assez critique pour les différents pays ». Elle a affirmé que le financement pour lutter contre la malnutrition n’est pas acquis parce que la plupart des financements sont basés sur les financements externes.

Judith Kaboré, chargée de plaidoyer du bureau régional Dakar de l’AFC

Selon une étude menée en 2016 par le Réseau de la société civile pour la nutrition présidée par ACF, il y a moins de 1% du budget national dédié à la nutrition. « Nous avons mené des études au niveau de la région, même du Burkina, pour voir un peu quelle est la part du budget national qui est attribuée à la nutrition. On se rend compte que le pourcentage est très faible. Nos études ont montré qu’il y avait moins de 1% du budget national dédié à la nutrition. Nous ne pouvons pas continuer comme ça, parce que la question de la nutrition est une question de souveraineté nationale et il faut qu’au niveau national, on trouve des voies et moyens pour pouvoir y faire face », a-t-elle déploré.

C’est ainsi que les acteurs de mise en œuvre du projet PADI ont réfléchi à différentes stratégies de financements innovants, endogènes et privés en soutien à la nutrition. Ainsi, la réalisation de l’étude Link NCA et celle sur les financements endogènes et privés contribuent à répondre à cette nécessité. La première étude, la Link NCA, a pour objectif d’analyser les causes profondes de la malnutrition dans la région afin de permettre une réadaptation des actions en cours à travers la mise en œuvre d’actions fortes et pérennes pour améliorer le bien-être des populations. Quant à la deuxième qui porte sur les financements endogènes et privés, elle a pour objectif de refaire l’état des lieux des financements au niveau local pouvant soutenir les actions de lutte contre la malnutrition.

Dr Firmin Kouassi, expert analyste Link NCA

Au cours de cet atelier, les résultats de ces études ont été présentés à toutes les parties prenantes. Pour le Dr Firmin Kouassi, expert analyste, « l’étude Link NCA est standardisée, multisectorielle, participative et communautaire ». Il a souligné que c’est une étude qui implique toutes les parties prenantes et la communauté, afin de pouvoir analyser la cause de la malnutrition dans le contexte local. A l’en croire, l’étude est toujours en cours. « A ce stade, nous avons fini le volet quantitatif et nous sommes à la seconde phase. Nous cherchons à comprendre le pourquoi et cet atelier va nous donner des pistes de réflexion.

Les premières tendances montrent que dans le Kénédougou, la malnutrition chronique est [beaucoup plus] présente chez les enfants garçons que chez les filles. Le Kénédougou est une zone qui produit et seulement 12,6% des ménages ont manqué de nourriture l’année dernière. Et ces des ménages présentaient un risque élevé de malnutrition chronique », a indiqué le Dr Firmin Kouassi.

Par ailleurs, il affirme que les causes de la malnutrition ne sont pas forcément liées à la quantité de la nourriture que nous consommons. « Il y a d’autres éléments qu’il faut prendre en compte, notamment la qualité », a-t-il indiqué.

Judith Kaboré, pour sa part, a expliqué la raison pour laquelle l’équipe d’ACF a voulu explorer les financements endogènes dans la région. En effet, c’est au regard de la raréfaction croissante des ressources extérieures et de l’insuffisance des investissements de l’Etat en faveur de la nutrition que cette étude a été commanditée. « Nous l’avons voulue, pour voir un peu quelles sont les dispositions existantes, comment on peut trouver des voies et moyens pour pouvoir prendre en charge cette question de malnutrition au niveau de la localité. Déjà, il y a l’étude qui a été menée et qui montre beaucoup de pistes possibles.

Célestin Koussoubé, président du conseil régional des Hauts-Bassins.

Nous avons exploré aussi au niveau du privé pour voir qui peut accompagner ou prendre en charge cette question. Parmi les pistes qui ont été dégagés, il y a une trentaine d’industries et d’entreprises qui sont dans la région et nous avons eu à faire des entretiens avec leurs responsables pour voir un peu comment eux, ils accompagnent les secteurs sociaux de base. Pas seulement la malnutrition, mais l’éducation, l’hygiène, l’assainissement, la santé et autres », a-t-elle laissé entendre.

Selon elle, cette étude n’est que la première étape. « Nous allons continuer en termes de plaidoyer, pour essayer de convaincre les gens que la malnutrition est une question importante et qu’ils doivent contribuer pour la prise en charge à travers les Plans régionaux de développement (PRD) ou les Plans communaux de développement (PCD) qui sont élaborés au niveau de la localité », a expliqué la chargée de plaidoyer du bureau régional Dakar d’ACF.

Toutefois, elle a souhaité que le programme puisse être autonome dans la région. Et qu’à l’issue du plaidoyer, il y ait un financement local dédié à la prise en charge de la question de la malnutrition, que l’on ne s’attende pas à ce que les financements viennent d’ailleurs.

Cet atelier a été présidé par le président du conseil régional des Hauts-Bassins, Célestin Koussoubé, qui a dit être venu encourager l’ONG Action contre la faim dans la mise en œuvre de ce « programme ambitieux » dans les Hauts-Bassins. Il a noté que « intégrer la nutrition dans les politiques et stratégies publiques alimentaires et nutritionnelles, visant à la fois l’alimentation diversifiée et l’alimentation équilibrée, est une préoccupation majeure ».

Ainsi, l’intégration et les financements adéquats de la nutrition dans les PCD et PRD pourraient contribuer fortement à résoudre cette préoccupation. C’est pourquoi, le président du conseil régional des Hauts-Bassins a invité toutes les populations et particulièrement les maires des communes, à être des acteurs du plaidoyer pour un monde sans faim. Il fonde l’espoir que les résultats de ces études permettront d’élaborer des stratégies et actions de plaidoyer en faveur de la nutrition dans les Hauts-Bassins.

Au cours de cet atelier, des débats ont été menés sur d’éventuelles contributions des différents acteurs, afin d’enrichir les différentes interventions.

Romuald Dofini
Lefaso.net

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