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« Pinocchio le Kikirga » : Le Théâtre Soleil joue le pillage du patrimoine culturel

Publié le lundi 19 novembre 2018 à 21h30min

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« Pinocchio le Kikirga » : Le Théâtre Soleil joue le pillage du patrimoine culturel

C’est une pièce de résistance, de refus, de dénonciation et surtout d’alerte. Jouée de façon magistrale par des comédiens et musiciens, « Pinocchio le Kikirga » allie théâtre et marionnettes pour plonger le spectateur dans les légendes africaines, où le naturel et le surnaturel se côtoient. Théâtre Soleil, qui diffuse le spectacle, touche surtout une problématique saignante et bien actuelle : le trafic et la vente des objets sacrés. Que restera-t-il de nous si nous vendons nos identités, bradons ce que nos aïeux ont jalousement préservé, juste pour nos intérêts égoïstes, juste contre des broutilles ? La mémoire collective s’enlise. Et une société sans mémoire est juste sans âme. C’est là le message de « Pinocchio le Kikirga » dont la première a été jouée le 15 novembre 2018.

« Pinocchio le Kikirga », longtemps caché dans le bois sacré, est découvert par Larba le bûcheron qui, ne comprenant pas les choses étranges qui arrivent avec ce tronc d’arbre apporté de la brousse. Il file la patate chaude à Raogo. L’esprit de Pinocchio le Kikirga quitte le bois et prend une forme humaine, un petit garçon. Il est innocent, naïf, comme tout enfant de son âge.

Les mésaventures se succèdent. Sous l’instigation de son ami Bala le Pétrolier, il refuse d’aller à l’école, lui pourtant qui rêvait d’être « un grand quelqu’un » pour subvenir aux besoins de son père Raogo, lui acheter un chapeau de Saponé...

Mamio, la déesse de la fécondité et de la protection, est vendue par Siapopo le Renard et Guiro le Chat. Ils ne tardent pas à se rendre compte de l’imparable ; ce n’est pas tout qu’il faut vendre, surtout pas les objets sacrés. Des incendies, des décès inexpliqués, la famine et toutes sortes de calamités s’abattent sur le village.

Avec l’argent issu de ce trafic, il n’arrive pas non plus à sortir son père Raogo de la pauvreté, puisqu’au moment de regagner le village, il fait la rencontre de deux imposteurs. Sia Popo le Renard et Guiro le chat lui promettent de multiplier les cinq pièces d’or. La tentation est grande et le Kikirga cède. Dans les labyrinthes de cette recherche du bonheur imaginaire, il tombera dans le traquenard de ces deux vendeurs d’illusion. Une première, puis une deuxième fois. Il est chaque fois secouru par Mamiwatta à qui il avait promis honnêteté, loyauté et bravoure, sans quoi son nez s’allongerait chaque fois qu’il mentirait.

Le chemin de Pinocchio le Kikirga croise celui d’un passeur, Périmpé, qui lui promet le pays des merveilles à l’autre bout du monde. Il ne tardera pas à se rendre compte qu’il a plutôt affaire à un trafiquant d’êtres humains, un esclavagiste. Des coups de chicote, des maltraitances de toutes sortes font braire les enfants esclaves comme des ânes. Il finit par retrouver son père, et Mamio qui était dans une embarcation pour être liquidée en Europe. C’est la trame de cette pièce de théâtre savamment jouée par des comédiens talentueux et accompagnée par des musiciens aguerris.

Selon Thierry Ouéda, directeur artistique du Théâtre Soleil, auteur et metteur en scène de la pièce de la dernière création, Pinocchio le Kikirga est une adaptation inspirée de Carlo Collodi (journaliste, écrivain et critique italien, auteur du chef-d’œuvre mondial de la littérature enfantine, Les aventures de Pinocchio).
Pinocchio le Kikirga est une version très tropicalisée de l’œuvre de l’Italien. Mamio (la statuette de la fécondité volée dans la commune de Pobé Mengao, puis retrouvée en Europe), le chapeau de Saponé, le trafic d’enfants, sont autant de scènes introduites avec dextérité dans cette pièce pour lui donner un caractère local, et pour répondre à des problématiques actuelles.

« En tant qu’artistes, nous devons aussi travailler pour la mémoire. La mémoire permet de ne pas oublier, de pas commettre les mêmes erreurs. Avec cette pièce, nous essayons de rappeler l’histoire avec les objets sacrés qu’on vole, pourtant importants pour notre culture. Ce spectacle permet de défendre la culture », explique Thierry Ouéda. Le metteur en scène ajoutera que la philosophie du Théâtre Soleil est certes de produire des spectacles pour jeune public, mais cela n’est pas une porte fermée à un public adulte. La preuve avec la dernière création qui était accessible à ces deux types de public, avec un message accessible.

Deux mois de travail intense auront permis aux comédiens de peaufiner le spectacle pour le servir au public. « Pinocchio le Kikirga » se joue au Théâtre Soleil à Cissin, jusqu’au 30 novembre 2018.
Précisément les 21, 22, 23, 24, 28, 29 et 30 novembre 2018.

Tiga Cheick Sawadogo
Lefaso.net

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