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Protection de l’enfance : Christian Children’s fund of Canada veut insuffler une nouvelle dynamique

Publié le jeudi 1er novembre 2018 à 23h18min

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Protection de l’enfance : Christian Children’s fund of Canada veut insuffler une nouvelle dynamique

L’enfant burkinabè a un avocat : Christian Children’s fund of Canada. Ce défenseur, qui lutte depuis 1987 contre les inégalités et les violences faites aux filles, nourrit aujourd’hui de grandes ambitions dans le cadre de son futur plan stratégique 2020-2022 qui prévoit une extension de sa zone d’intervention. L’organisation veut faire peau neuve en changeant, certes de dénomination, mais aussi en gardant intactes les valeurs d’amour, de partage et de solidarité qui font aujourd’hui sa force. Pour en savoir davantage, nous avons rencontré, le mardi 30 octobre 2018, Christelle Kalhoulé, la directrice pays de l’organisation.

Lefaso.net : Pouvez-vous, en quelques mots, présenter votre organisation à nos lecteurs ?

Christelle Kalhoulé (C.K.) : Christian Children’s fund of Canada (CCFC) est une organisation créée en 1938 et qui intervient dans plusieurs pays à travers le monde. En Afrique, elle est présente au Ghana, en Ethiopie et au Burkina Faso. CCFC travaille dans la promotion et la protection des droits de l’enfant en faisant en sorte que les enfants et les communautés bénéficient de services adéquats pour leur bien-être.

Lefaso.net : Vous venez de prendre les rênes de l’organisation il y a de cela quelques temps. Etes-vous satisfaite du chemin parcouru, même si on ne peut encore parler de bilan ?

C.K. :
La CCFC est présente au Burkina Faso depuis 1987 et depuis lors elle a pu réaliser beaucoup de choses pour les enfants et les familles au sein des communautés des zones d’intervention. Cette contribution est à saluer à sa juste valeur car grâce à l’organisation, beaucoup d’enfants et de familles bénéficient aujourd’hui de meilleures conditions de vie. Je suis arrivée il y a quelques temps mais je me réjouis déjà de pouvoir, dans la continuité, apporter une contribution avec l’ensemble des collaborateurs pour davantage améliorer les conditions de vie des enfants et des ménages.

Lefaso.net : Quels sont les programmes phares de l’organisation ?

C.K. : L’un de nos programmes phares concerne l’éducation des enfants dont l’âge est compris entre 0 et 8 ans. Il s’agit du programme LTP (Learning Through Play) « apprendre en jouant » qui prend en compte l’éducation parentale mais aussi la préparation des enfants pour aller et rester à l’école.
Nous avons des programmes de lutte contre les violences faites aux filles comme le mariage précoce. Ce sont des programmes que nous intensifions dans la région de l’Est.
Nous avons également des programmes de renforcement de la participation des enfants et des jeunes au processus de changement.

Lefaso.net : Quelle est votre vision pour cette organisation à court et à moyen termes ?

C.K. :
Nous venons de finaliser notre plan stratégique 2020-2022. Nous voulons accroître les revenus de l’organisation, renforcer le partenariat avec le secteur privé, renforcer l’impact de nos interventions au sein des communautés, améliorer notre influence et apporter l’innovation dans nos interventions en améliorant et en diffusant davantage les meilleures pratiques. Ce sont les ambitions que nous nourrissons pour l’organisation pour les trois prochaines années.

Lefaso.net : Par innovation, à quoi devra-t-on s’attendre ?


C.K. :
Apporter de l’innovation passe par la mise en œuvre de projets pilotes et la diffusion de bonnes pratiques en saisissant les nouvelles opportunités qu’offrent les technologies de l’information et de la communication. Nous voulons être plus inventifs et plus créatifs dans la recherche de solutions afin de lutter efficacement contre les problèmes que nous rencontrons.

Lefaso.net : Quels sont les axes majeurs que vous visez avec ce nouveau plan stratégique ?

C.K. : Depuis 2005, le programme LTP (apprendre en jouant) a touché 11 754 parents d’enfants ; 28 137 enfants ont bénéficié d’un soutien intégré du programme LTP ; 2 740 enfants ont accédé à l’éducation préscolaire ; 105 formateurs des élèves-maîtres et des travailleurs sociaux ont été formés à l’approche ; 1 911 enseignants du préscolaire et du primaire ont été formés ; 265 moniteurs LTP communautaires ont été formés ; 32 centres LTP ont été construits ; 12 centres préscolaires ont été construits et équipés
Pour le renforcement de l’économie des ménages, depuis 2014, 21 communes ont été impliquées et dans cinq régions avec 127 communautés. En août 2018, 434 groupes VLSA (Village savings and loans associations. En français, Groupement villageois d’épargne et de crédit, GVEC) impliquant 9 354 femmes ont pu épargner 407 605 592 F CFA.

Nous avons finalisé le plan stratégique et nous sommes en train de le préparer pour la phase d’opérationnalisation qui va débuter en avril 2019. C’est un plan ambitieux qui nous permettra de renforcer nos actions autour de l’éducation. Nous y croyons fermement car l’éducation est le moyen par lequel le changement interviendra dans la vie des citoyens.

Nous allons ensuite mettre l’accent sur la santé maternelle et infantile, la prévention des maladies chez les enfants et la santé sexuelle et reproductive des jeunes.
Nous allons en outre mettre l’accent sur la lutte contre les violences faites aux enfants et travailler davantage avec les communautés et les autres acteurs terrain.
Le volet va concerner la participation des enfants au processus de changement. Et nous avons lancé une méthodologie dénommée « la redevabilité sensible à l’enfant » sur laquelle nous allons beaucoup travailler. Cette méthodologie est un outil qui va permettre mieux promouvoir la participation de l’enfant qui est un principe fondamental de la protection de l’enfant.

Enfin, nous avons un volet promotion genre. Nous allons travailler pour que les inégalités liées au genre soient surmontées que ce soit au niveau de l’éducation, de l’accès aux services sociaux de base, et permettre aux filles et aux femmes de pouvoir contribuer de façon significative.

Lefaso.net : Est-ce à dire que le mode d’intervention de CCFC va changer avec ce nouveau plan ?

C.K. : Le mode d’intervention de CCFC reste essentiellement fondé sur le travail avec les partenaires locaux. Cela ne va pas changer. Nous allons diversifier les partenaires en nouant des alliances avec d’autres acteurs pour nous accompagner sur les thématiques parce que nous sommes convaincus que la synergie des actions et le partage d’expériences peut nous amener loin.

Lefaso.net : Quelles sont vos zones d’intervention et avec l’opérationnalisation du plan stratégique, doit-on s’attendre à un élargissement du périmètre d’intervention ?

C.K. : Actuellement, CCFC intervient dans les régions de l’Est dans les provinces du Gourma, de la Gnagna et de la Tapoa ; du Centre-Est dans la province du Kouritenga ; du Centre au Kadiogo ; du Plateau Central dans le Ganzourgou. Avec le nouveau plan stratégique, nous prévoyons d’étendre nos interventions à la région du Centre-Nord et éventuellement à la Boucle du Mouhoun.

Lefaso.net : Qu’est-ce qui explique le choix de ces deux nouvelles régions ?

C.K. : CCFC regarde les indicateurs liés notamment à l’éducation et aux problèmes liés à la protection de l’enfance.

Lefaso.net : L’Est, l’une de vos zones d’intervention, vit une situation sécuritaire difficile avec la recrudescence des actes terroristes, ce qui peut fortement handicaper l’école. Avez-vous un message à l’endroit des enfants et de leurs parents ?

C.K. : C’est un message d’encouragement parce que nous sommes conscients que c’est un moment très difficile, un moment où il faut se battre. Nous sommes convaincus que très bientôt, ce sera un très lointain souvenir. Nous lançons un message à l’endroit des autorités à continuer la lutte afin que la paix revienne dans cette partie du pays.

Lefaso.net : L’une des difficultés que rencontrent les organisations et associations de développement est le « service après-vente » à la fin des projets qui doit être assuré par les partenaires locaux. Rencontrez-vous les mêmes difficultés ?

C.K. : C’est une réalité. Souvent la durabilité et la pérennisation des actions, après les projets, posent problème. A CCFC, il y a un volet que nous prenons en compte qui est le renforcement institutionnel et organisationnel des structures. Nous pensons qu’il faut des organisations fortes à la base qui vont propulser la dynamique de développement au niveau des communautés. Voilà pourquoi nous avons une autre approche.

De façon pratique, pour nous donner plus de chance, nous travaillons avec nos partenaires à promouvoir la participation des communautés depuis le début de nos interventions jusqu’à la fin.
Lorsque nous entrons dans une communauté, c’est à travers un diagnostic et une étude de base avec les différents acteurs et les populations, et nous nous accordons sur un temps et les problématiques sur lesquelles nous allons travailler.

Lefaso.net : CCFC serait dans un processus qui aboutirait très prochainement à un changement d’identité… Pourquoi ce changement ?

C.K. : C’est vrai que nous réservons la surprise du nom. Nous changeons d’identité mais nous maintenons les valeurs qui inspirent nos interventions. Nous sommes inspirés par l’amour du Christ et les valeurs de partage et de solidarité. Nous poursuivons un idéal de justice, nous travaillons à réduire les inégalités pour un monde meilleur.
Même après le changement d’identité, ces valeurs vont rester. Par exemple, depuis 1987, nous avons un grand programme de parrainage d’enfants. Certains sont aujourd’hui des professionnels dans plusieurs secteurs dont les banques, les compagnies d’assurance, etc. C’est pour nous un motif de satisfaction car nous sommes convaincus d’être donc dans le bon combat.

La dénomination change pour mieux refléter ce que nous sommes. Quand on regarde le nom Christian Children’s Fund of Canada, les gens pensent, à cause du « Christian », que c’est une organisation qui fait de l’évangélisation alors que ce n’est pas le cas.
Nous ne faisons d’ailleurs aucune discrimination dans nos interventions que ce soit dans le recrutement du personnel, le choix de nos partenaires ou de nos bénéficiaires. Nous avons estimé qu’il faut que notre nom reflète mieux ce que nous sommes.

Il y a également le mot « Fund » qui fait que les gens pensent que nous sommes une fondation ou que nous avons des fonds à distribuer. Alors que nous allons vers les fondations pour la mobilisation des ressources financières.
Il y a enfin le mot « Canada », qui fait penser que la mobilisation des ressources se fait uniquement au Canada alors que nous avons une plus grande ouverture.

Lefaso.net : Un mot de fin ?

C.K. : Je voudrais revenir sur le plan stratégique en précisant qu’un accent sera mis sur la contribution du secteur privé. Il y a dans ce pays des organisations, des entreprises socialement responsables qui veulent contribuer et qui peuvent participer au processus de développement.
Nous allons travailler à identifier ces entreprises, à aller vers elles, à leur proposer des projets. Et avec notre savoir-faire, ces entreprises pourront faire quelque chose pour contribuer au développement socio-économique des personnes vulnérables.

Propos recueillis par Herman Frédéric Bassolé
Lefaso.net

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