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Fait divers : Plus de mariage

Publié le lundi 25 juillet 2005 à 07h32min

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Cette phrase avait été prononcée sur un ton qui n’admettait pas de réplique. Malgré les bonnes relations qu’il entretenait avec sa belle-famille, Abdoul était resté stoïque et ferme sur sa décision. Comme l’a écrit Manan Makan Diabaté dans "Le lieutenant de Kouta" : "le vent qui fait tomber le mortier n’a ni égard ni respect pour le pilon". La séquence du film prenait fin.

Awa était mariée à Abdoul depuis trois ans. N’ayant pas réussi à l’école, elle vivait avec sa mère, ses frères et sœurs car leur père était décédé depuis belle lurette. La mère vendait du riz cuit, matin et soir, pour s’occuper de la famille. Un jour, elle envoya Awa avec un vélo chercher un sac de riz chez le commerçant.

Au retour, sous le poids du sac de riz de 50 kg, Awa bascula et entra en collision avec un véhicule. Transportée d’urgence à l’hôpital, elle retourna six jours plus tard à la maison. Bien qu’ayant raison, Abdoul prit en charge les frais d’ordonnances et jusqu’au rétablissement complet de Awa, il lui rendait visite tous les jours.

Awa qui avait arrêté les études juste après le CE.P aidait sa mère dans la vente du riz car ne fréquentant plus. Sept mois après cet accident et ironie du sort, les bans étaient annoncés à la mosquée, les mariages religieux et civil célébrés. Dans l’année qui suivit, Awa mit au monde un joli garçon qu’ils nommèrent Moumouni.

Le jour de l’accident, Aboul qui se rendait à son travail avait été surpris par le mouvement opéré par Awa. Quand il sortit précipitamment, il vit de ces cuisses café au lait bien galbées car le pagne s’était défait ne laissant que le slip. Son sang fit un tour. Avant que les badauds n’accourent il avait recouvert ce qui s’était présenté à ses yeux et hélé un taxi pour l’hôpital.

L’accident qui s’était produit dans le quartier fit vite porté à la connaissance de la mère qui se retrouva au chevet de sa fille. Abdoul avisa la police pour le constat. Non seulement il prit sur lui les frais d’ordonnance, mais apportait chaque jour des fruits à Awa jusqu’à sa sortie et pendant sa convalescence.

Dieu merci, Awa n’avait rien de cassé. Pour la mettre en train, Ahmed l’invitait parfois à aller manger un poulet. Parfois, c’était elle qui le rejoignait à la maison.

Ahmed, fils d’un commerçant, était fort en calcul. C’est tout naturellement qu’après avoir obtenu son DEA en sciences éco, il fut recruté comme gestionnaire dans un projet. Les commerçants sollicitèrent souvent ses services pour leur bilan. Il vivait à l’aise car la villa où il vivait lui appartenait. Très souvent, il mangeait au restaurant et rarement en famille car ses parents vivaient toujours. Il fréquentait rarement les filles mais le sort voulut qu’il tombât sous le coup de foudre de Awa.

Alors que Moumouni trottinait, il tomba malade et fut hospitalisé. En temps normal, c’était Awa qui choisissait dans la garde-robes ce que Ahmed devait porter pour aller au boulot. Un jour, en choisissant des chaussettes au fond de l’armoire, il y trouva des amulettes. Instinctivement, il jeta un regard et sous le lit, il trouva des fioles remplies de liquide de couleur noirâtres et d’autres amulettes.

Il ne souffla mot jusqu’au jour où, de retour de l’hôpital alors qu’il était couché dans le lit Awa, ouvrit l’armoire. Sans lever les yeux du livre il lui demanda ce qu’il y avait dans les amulettes et les fioles dans l’armoire et sous le lit. Awa, surprise par cette question perdit contenance et se mit à pleurer en racontant tout le processus.

Ainsi, c’était la mère qui dans le doute et la volonté de consolider la vie du couple l’avait conduite chez les marabouts. Il y avait des talismans à mettre dans l’armoire, des fioles dont le contenu devait servir à arroser les habits et le lit conjugal et d’autres qui devaient être mis dans la nourriture tous les vendredis.

A ces derniers mots, Ahmed se mit sur ses coudes et dit d’une voie tremblotante car dominé par la colère et le dégoût car on était justement un vendredi. "Si toi et ta mère vous n’avez pas cru en mon amour pour me tuer avec vos poisons, prépare tous tes bagages et retourne épouser ta mère".

Malgré ses pleurs et supplications, rien n’y fit et aussi vite qu’il avait été célébré, le divorce fut aussi vite prononcé avec les droits à la pension alimentaire car le mariage s’était célébré avec séparation des biens.

Avis à celles qui consultent les devins, charlatans pour envoûter leurs époux. Dire que toutes les fins de mois, lors des fêtes, Ahmed donnait des sous à sa belle-famille. Comme l’a écrit Clémenceau : "il n’ya pas de défaite sans trahison car on est toujours trahi par les siens" . Ce fut le cas de Awa.

Rakissé
Sidwaya

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