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Dahirou Sant-Anna, conseiller au Bureau du procureur de la CPI : Onze situations sous enquête et 32 mandats d’arrêt délivrés

Publié le vendredi 19 octobre 2018 à 16h58min

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Dahirou Sant-Anna, conseiller au Bureau du procureur de la CPI : Onze situations sous enquête et 32 mandats d’arrêt délivrés

Il est actuellement le conseiller en coopération internationale au Bureau du procureur de la CPI, d’où il a respectivement été juriste auprès du conseiller chargé des relations extérieures du greffier de la Cour, chargé de protocole et juriste de la Section de la détention. Dahirou Sant-Anna (puisque c’est de lui qu’il s’agit) a séjourné au Burkina, du 2 au 7 octobre 2018, dans le cadre de la commémoration du 20e anniversaire du Statut de Rome initiée par le Centre africain de droit international pénal et de droit humanitaire (CADIPH) et l’Institut supérieur de sécurité humaine (ISSH) avec le soutien de l’Ambassade de France au Burkina. Dans cette grande interview qu’il a bien voulu accorder à Lefaso.net, celui-là qui a en charge un des volets du dossier ivoirien sur la crise de 2011 n’a esquivé aucune des questions qui lui ont été adressées, et sans langue de bois.

Lefaso.net : A la fin des activités, quelle appréciation faites-vous de l’engouement des différentes cibles autour du sujet ?

Dahirou Sant-Anna : Je précise d’abord que je suis ici sur invitation du CADIPH et de l’ISSH dans le cadre de la commémoration du 20e anniversaire de la CPI. J’ai été invité en tant que représentant du procureur, Fatou Bensouda, pour participer à trois conférences qui se sont déroulées tout au long de cette semaine ; la première était à Bobo-Dioulasso où nous avons (le 3 octobre) rencontré non seulement les autorités locales, le corps professoral, mais également des étudiants.

Nous avons ensuite eu une conférence (le 5 octobre, ndlr) avec des représentants du gouvernement, des institutions internationales et le corps diplomatique et consulaire au Burkina Faso, au cours de laquelle j’ai discuté de la coopération et la complémentarité dans le Statut de Rome du point de vue du Bureau du procureur. Enfin, le samedi, 6 octobre, dans les locaux de l’ISSH, nous avons eu une conférence publique avec différents panélistes, où j’ai pu parler du bilan, des défis et des perspectives de la CPI, 20 ans après l’adoption du Statut de Rome. Donc, je suis ici au Burkina Faso en tant qu’invité et j’en suis très honoré.

Je dois avouer que nous avons été (parce que je suis-là avec un autre collègue de la Cour) très impressionnés par la mobilisation que le CADIPH et l’ISSH ont réussi à faire ; parce que rien qu’à Bobo-Dioulasso, nous avons eu plus de 600 participants. C’est dire, me semble-t-il, que le public burkinabè, dans toutes ses composantes, est très intéressé par la question de la justice pénale internationale et les interactions que nous avons eues ; que ce soit dans le cadre des questions-réponses ou des échanges après les conférences, montrent qu’il y a un engouement autour de la question de la justice pénale internationale.

Cela montre aussi qu’il y a au niveau de la société burkinabè, un engagement à plus de justice, à cette cause qui nous est commune à savoir la lutte contre l’impunité. Pour quelqu’un qui travaille dans le milieu depuis plus d’une dizaine d’années, c’est toujours gratifiant de se voir poser les questions qui nous ont été adressées (des questions sans tabou), des questions très pertinentes auxquelles j’ai pris plaisir à répondre.

Lefaso.net : Quel commentaire faites-vous de la création même du CADIPH ?

Dahirou Sant-Anna : L’initiative de la création du CADIPH est à saluer ; parce qu’il va offrir des rudiments aux praticiens, aux étudiants et aux divers autres acteurs. Le droit pénal international et le droit humanitaire sont, depuis les années 90 avec la création des tribunaux pénaux ad hoc, beaucoup plus présents dans les débats de société.
Et j’ajouterais qu’à une ère où il est de plus en plus question de la lutte contre l’impunité des crimes du droit pénal international, il est important que les gens comprennent ce qu’est le droit pénal international, ce qu’est le droit humanitaire ; quelles sont les normes qui s’imposent à tous.

La connaissance des normes du droit pénal international, du droit international humanitaire ainsi que des principes du droit international des droits de l’homme est très importante notamment par les forces de l’ordre ou de sécurité qui, lors de leurs interventions dans la gestion des foules, notamment lors des manifestations, ou s’agissant des acteurs impliqués dans des crises et conflits armés, doivent s’assurer que ces normes et principes sont respectés.

Lefaso.net : On ne peut s’empêcher de s’étonner du parcours du jeune que vous êtes !

Dahirou Sant-Anna :
J’ai un parcours de juriste. J’ai commencé avec des études de droit, puis fini avec une thèse de doctorat en droit international. J’ai pratiquement fait une carrière de publiciste (pour être plus précis), autrement dit, une carrière qui était orientée vers des questions de droit international. Il faut dire que j’avais une prédilection pour les enjeux liés aux relations extérieures et à la coopération.

En intégrant la Cour pénale internationale, certes, j’ai eu à exercer différentes fonctions comme je vous l’expliquais au début de cet entretien, mais finalement je peux dire que l’ambition qui était la mienne a été concrétisée, à savoir travailler pour une institution qui est dévouée à la justice pénale internationale, tout en exerçant dans un domaine de prédilection, à savoir la coopération internationale et les relations extérieures.
Il faut de la rigueur et de la ténacité à la fois dans le cadre des études comme dans la sphère professionnelle. Ces valeurs et bien d’autres comme la passion, l’envie de continuer d’apprendre, la joie de contribuer à une mission importante, sont indispensables à mon humble avis quel que soit le parcours que chacun veut suivre.

Lefaso.net : Quelles sont les missions qui vous sont dévolues ?

Dahirou Sant-Anna : En tant que Conseiller en coopération internationale, nous travaillons dans une équipe dite intégrée. Au sein du Bureau du procureur, vous avez également des enquêteurs, des substituts du procureur qui travaillent sur les poursuites.
Donc, cette équipe intégrée comprend le Conseiller en coopération internationale, les enquêteurs et les membres de l’équipe en charge des poursuites. Dans le rôle qui est le mien, je développe ce que nous appelons la stratégie de coopération que je discute avec mes collègues de l’équipe intégrée. Dans l’exécution de cette stratégie, je transmets des requêtes ou des demandes de coopération, dont je fais ensuite le suivi avec les différents partenaires, je m’assure de la bonne exécution de ces demandes de coopération, etc.

Donc, il y a une interaction assez dynamique entre le Conseiller en coopération internationale et les différents partenaires qui soutiennent la Cour ou avec lesquels le Bureau du procureur est amené à interagir pour permettre aux enquêtes d’avancer et aux poursuites de pouvoir se matérialiser dans le cadre des procès. C’est également en ma capacité de Conseiller en coopération internationale que je peux interagir avec les médias en développant une stratégie de communication sur les affaires ou situations devant la Cour dans lesquelles je suis impliqué, ainsi qu’en expliquant aux communautés affectées par les crimes relevant de la compétence de la Cour, l’évolution des affaires et en particulier le travail du Bureau du Procureur.

Lefaso.net : Peut-on avoir une cartographie de l’organisation même de la CPI ?

Dahirou Sant-Anna : Du point de vue de l’organigramme de la Cour, vous avez quatre organes à savoir, la Présidence de la Cour qui est composée du président et de deux vice-présidents ; ils ont en charge l’administration générale de la Cour. Vous avez l’organe dit judiciaire, c’est-à-dire les Chambres composés de juges qui sont les garants des procédures devant la Cour.
Vous avez ensuite le Greffe (qui apparait comme une sorte de secrétariat général d’une organisation internationale), mais qui fait aussi office de greffe dans le sens où on l’entend au niveau national et, bien entendu, le Bureau auquel j’appartiens (le Bureau du procureur) qui mène principalement trois activités : il s’agit des examens préliminaires qui aboutissent à l’ouverture d’une enquête (les enquêtes étant la seconde activité) et la troisième activité, ce sont les poursuites. Au soubassement de ces trois activités, vous avez la coopération, qui est essentielle à la réalisation de ces trois activités.

Lefaso.net : Quel est le type de coopération que la Cour entretient avec les juridictions étatiques ?

Dahirou Sant-Anna : Nous avons, au niveau de la CPI, des relations qui sont assez dynamiques. Lorsque nous parlons de coopération, elle est multifacette, c’est-à-dire qu’elle couvre différentes questions. A cet égard, nous avons ce que nous appelons l’entraide judiciaire, qui veut dire concrètement que lorsque le Bureau du procureur fait des demandes de coopération et que celles-ci doivent être exécutées par les juridictions nationales, cela implique des interactions avec des autorités judicaires qui devront aussi prendre des mesures à leur niveau (par exemple, s’il s’agit de procéder à des saisies, avoir accès à des dossiers et pièces).

Nos demandes peuvent aussi porter sur d’autres formes de coopération dont, par exemple, les différentes facilitations ou assistances accordées dans le cadre d’une activité d’enquête ou en matière de protection des témoins. Par ailleurs, il faut garder à l’esprit que la responsabilité première dans la poursuite des crimes relevant du statut de Rome repose sur les Etats.
C’est en cela qu’on parle de complémentarité, qui suppose que si l’Etat n’est pas en mesure ou n’a pas la volonté d’enquêter ou de poursuivre, la Cour intervient lorsque les critères du Statut de Rome sont remplis. Nous avons en particulier au niveau du Bureau du Procureur, une approche dynamique et positive de la complémentarité.

Cette approche consiste, lorsque les Etats, dans des pays de situation, décident de mener des enquêtes, mais n’ont pas l’expertise ou l’expérience nécessaire, à apporter notre assistance (partage d’expertises, d’expériences) ou partager des informations, pour les aider à mener les enquêtes et les poursuites au niveau national. Ce faisant, nous essayons tous de contribuer aux efforts que les juridictions nationales déploient pour faire reculer voire mettre fin à l’impunité.

Lefaso.net : Un Etat-partie, dans lequel est ouverte une information judiciaire, qui se montre réticent à collaborer coure-t-il le risque d’une sanction ?

Dahirou Sant-Anna : Lorsqu’un Etat ratifie ou adhère au Statut de Rome, il y a des obligations qui en découlent pour celui-ci, conformément au droit des traités. Et l’une des obligations pour cet Etat, c’est celle de coopérer. Cette obligation a un corolaire ; c’est que, s’il y a des déficiences ou des défaillances au niveau de l’ordre juridique national, cet Etat doit prendre des mesures pour les pallier en incorporant les dispositions pertinentes du Statut de Rome dans sa législation nationale. Vous avez des situations où les Etats peuvent ne pas vouloir coopérer et dans ce cas, je prendrai deux cas de figure. L’Etat qui est partie au Statut de Rome, et qui ne donne pas suite à une demande de coopération.

Dans cette hypothèse, la CPI fait un rapport à l’Assemblée des Etats parties qui prend les mesures qu’elle juge nécessaires. Deuxième cas de figure, c’est lorsque le Conseil de sécurité des Nations unies renvoie une situation devant la CPI (comme dans les cas de la Libye et du Darfour qui ont été les deux situations qu’il a renvoyées à la CPI) et dans ce cas, lorsqu’il n’y a pas de suite aux demandes de coopération, le Procureur peut faire un rapport au Conseil de sécurité qui peut également prendre les mesures qu’il juge nécessaires.

Lefaso.net : Comment sont recrutés les 18 juges de la CPI ?

Dahirou Sant-Anna : Nous avons effectivement 18 juges à la CPI. Ils viennent non seulement de différentes régions du monde, mais aussi de différents systèmes juridiques. Ils sont élus par l’Assemblée des Etats parties, pour un mandat de neuf ans, non renouvelable. Ces juges sont désignés sur la base de leurs qualifications, de leur intégrité et de leur impartialité. Ce sont eux qui sont garants de l’équité des procédures, qui émettent les mandats d’arrêt et de remise ou des citations à comparaître, qui rendent les décisions.

Ce sont également eux qui décident notamment de la participation des victimes devant la Cour, tout comme les mesures de protection qui peuvent être envisagées pour les témoins dans le cadre des procédures devant la Cour. Globalement, il faut retenir que ces juges sont répartis à travers deux organes (les juges des chambres : préliminaires, de première instance et de la Chambre d’appel, et la présidence dont les membres siègent dans l’une ou l’autre des chambres). C’est parmi ces 18 juges que sont élus (par les juges eux-mêmes) le président et les deux vice-présidents qui assurent l’administration générale de la Cour.

Lefaso.net : Vous avez en charge un aspect « Dossier N°2 » d’un des dossiers les plus médiatisés de la CPI, à savoir le dossier ivoirien. Si ce n’est un secret, quelle est la mission qui vous est confiée ici ?

Dahirou Sant-Anna : En tant que chargé de coopération, je dois galvaniser les efforts pour une meilleure coopération par les partenaires. Je m’assure de la transmission des demandes de coopération et fais le suivi pour la mise en œuvre de ces demandes. Je travaille dans le cadre d’une équipe et ici, il s’agit du deuxième volet (intitulé Dossier N°2, ndlr) des enquêtes du Bureau du procureur dans la situation en Côte d’ivoire.
Je dois préciser ici qu’il y a plusieurs conseillers en coopération au sein du Bureau du Procureur qui gèrent différentes situations et affaires. Pour ma part, je gère le deuxième volet de la situation en Côte d’Ivoire, mais également la situation en Ouganda.

S’agissant de la situation en Côte d’Ivoire, je gère les questions de coopération en assistant l’équipe en charge de l’enquête à collecter les éléments de preuve. Pour ce qui est des enquêtes, comme vous le savez, Madame le procureur elle-même, a maintes fois informé le public qu’elles se poursuivaient, s’agissant de la crise post-électorale en Côte d’Ivoire.
Vous comprendrez que les enquêtes sont, par nature confidentielles et que nous ne pouvons pas discuter de leur déroulement. Mais, je puis vous dire (de même que le procureur l’a sans cesse répété) que nous travaillons avec détermination, en toute impartialité et indépendance, sans crainte ni parti pris. Donc, nous poursuivons et continuons notre travail.

Lefaso.net : La communauté internationale commémore cette année, le 20e anniversaire de la CPI. En ces moments d’introspection, quelles leçons tirez-vous de la vie de cette juridiction pénale internationale ?

Dahirou Sant-Anna : Nous parlons de 20 ans, mais uniquement pour l’adoption du Statut de la Cour qui a eu lieu en 1998. Lorsque nous prenons la Cour, en partant de ce que le Statut est entré en vigueur en 2002, nous parlons en réalité de seize ans. La Cour est donc jeune. Elle est jeune, mais elle a fait quelques avancées louables. Il faut dire que la Cour n’a ni l’ambition ni pour vocation de juger tous les crimes qui se commettent partout dans le monde ; parce que la responsabilité première est du ressort des Etats.

Mais si on considère notre parcours, et quand vous parlez de leçons tirées de la vie de la Cour, je crois que d’une certaine manière à travers les décisions que la Cour a pu prendre, nous avons ne serait-ce que pour cette décennie et demie, fait bouger les choses (il y a des avancées notables).
Je citerai deux points qui me paraissent importants ; nous avons eu dans le cadre du premier procès à la CPI, à poursuivre un ressortissant congolais, Thomas Lubanga, pour la conscription et l’utilisation d’enfants de moins de quinze ans dans les hostilités armées. Il a été condamné à l’issue du procès pour ce crime.

Depuis cette décision, une prise de conscience accrue quant à la problématique des enfants soldats et des changements de politique dans le cadre de la protection des enfants mineurs confrontés à des situations de conflits armés ont été notés. Un exemple frappant peut être partagé ici : consécutivement à l’affaire Lubanga, l’ancienne représentante spéciale du Secrétaire général de l’ONU pour les enfants et les conflits armés, Madame Radhika Coomaraswamy a déclaré que ce jugement a eu un effet dissuasif sur les groupes armés.

Elle a à cet égard cité la démobilisation de milliers d’enfants soldats qui étaient impliqués dans le conflit au Népal. C’est un résultat positif qu’il faut saluer (ce n’était que le premier jugement, mais il a pu avoir un impact). Donc, il y a là un message que nous adressons à tous ceux qui sont tentés de vouloir utiliser des enfants dans les conflits. Vous vous souviendrez aussi de l’affaire récente concernant la destruction de bâtiments religieux et historiques à Tombouctou (l’affaire le Procureur c. Ahmad Al Faqi Al Mahdi).

Dans le contexte d’une campagne par des groupes qui se disent « djihadistes » et qui s’emploient notamment à détruire le patrimoine culturel et historique des communautés sur leur passage (Afghanistan, Irak, Syrie, Mali, etc.), la condamnation d’Al Mahdi pour ce crime de guerre(attaques contre des bâtiments religieux et historiques) a eu un impact très significatif non seulement au Mali, mais aussi ailleurs dans le monde quant à l’importance et au respect dû aux monuments culturels et historiques et, surtout, aux victimes de ce crime qui ont pu ainsi obtenir pour une fois une réponse à leur besoin de reconnaissance et un certain soulagement de leurs souffrances.

Plus généralement, l’impact dissuasif de la CPI se voit par la connaissance de plus en plus répandue de son existence, de sa mission, et de sa capacité de poursuivre les plus hauts responsables des crimes de masse qui, autrement, pourraient ne pas être poursuivis par les juridictions nationales en raison de manque de moyens ou d’absence de volonté de celles-ci. L’avènement de la CPI a donc changé la donne et tous les débats – y compris les critiques à son égard. J’en veux pour preuve que de plus en plus, dans les discours des hommes politiques, la CPI est mentionnée, comme pouvant être un élément dissuasif.

Lorsqu’on est à l’approche des élections, chaque parti politique, chaque responsable politique fait mention de la CPI ne serait-ce que pour rappeler leurs adversaires politiques de ne pas recourir à la violence. Cet exemple illustre la contribution de la CPI à la désescalade des tensions. Donc, même pour la jeune institution qu’elle est, nous commençons déjà à avoir quelques résultats de la Cour. Le bilan est positif à mon avis. Il va sans dire que beaucoup reste encore à faire, et on ne peut pas s’arrêter en si bon chemin.

Mais, dans le même temps, pour pouvoir y parvenir, il faut le soutien des Etats, un soutien à toutes les activités de la Cour (au niveau des opérations, du budget ; des arrestations et de la remise des suspects). En tant que mécanisme de justice, la Cour travaille en toute indépendance et en toute impartialité pour faire avancer les choses, lutter contre l’impunité des responsables des crimes internationaux. Je crois donc qu’en termes de bilan, la CPI fait des progrès dans la mesure des moyens qui sont mis à sa disposition et j’ose espérer qu’à l’avenir et avec des ressources adéquates, elle pourra avoir un plus grand impact.

Lefaso.net : Au regard des crises à travers le monde, on dira que la CPI a fort à faire !

Dahirou Sant-Anna devisant avec Ali Ouattara, président du Conseil d’administration pour la Coalition pour la CPI en Côte d’Ivoire et Maître Xavier Jean Keïta, avocat à la CPI (à droite).

Dahirou Sant-Anna : Je dirai que le rôle de la Cour relève d’une responsabilité partagée. Il y a beaucoup de tensions, de conflits, de crises. La Cour ne peut intervenir que dans le cadre de sa compétence et des moyens mis à sa disposition. Le Conseil de sécurité a dû renvoyer deux affaires à la Cour (Darfour et Libye) sur le fondement du chapitre VII de la Charte des Nations Unies, parce que ces deux pays ne sont pas des Etats-parties au Statut de Rome.
La CPI est compétente pour agir là où le Statut de Rome lui permet d’intervenir et, bien entendu, en sachant que ses interventions ne se font aussi que si les Etats, qui sont les premiers responsables pour protéger leurs populations, n’interviennent pas. Si les Etats interviennent (mènent des enquêtes et des poursuites véritables, etc.), la Cour n’intervient pas. Il y a un système de justice pénale internationale dont la CPI est certainement le noyau, mais elle ne peut rien sans le soutien de tous.

Lefaso.net : N’est-ce pas là également une des faiblesses de la CPI ?

Dahirou Sant-Anna : Je ne pense pas du tout que cela soit une faiblesse. Je me répète sans doute…mais le Statut de Rome consacre la complémentarité comme pilier central. D’une part, la Cour n’a pas vocation à remplacer les juridictions nationales. D’autre part, la juridiction de la CPI est exercée conformément au Statut de Rome ; cela signifie que les crimes dont la CPI peut connaître sont ceux de sa compétence telle que consacrée par le Statut. C’est le cadre juridique de l’action de la CPI. Est-ce une faiblesse que la CPI ne soit pas en mesure d’exercer sa compétence partout où les crimes de génocide, crimes contre l’humanité, crimes de guerre et crime d’agression sont commis ?

Le Statut de Rome est un traité qui s’applique conformément au droit des traités. Dans ce sens, il faut comprendre les limites juridictionnelles de la CPI comme étant justifiées par le droit des traités lui-même. Evidemment, le Conseil de Sécurité de l’ONU peut requérir du Procureur de la Cour qu’il ouvre une enquête dans un pays qui n’est pas un Etat Partie si les crimes déjà mentionnés ont été commis. Avec la Cour, personne ne peut aujourd’hui prétendre pouvoir commettre des crimes de masse (même sur le territoire d’un Etat non Partie) sans s’exposer tôt ou tard à de potentielles poursuites de la CPI, lorsque les conditions du Statut de Rome sont remplies.

Lefaso.net : Justement, quelles sont les enquêtes en cours et les mandats d’arrêt délivrés à travers le monde et leur état des lieux ?

Dahirou Sant-Anna : Nous avons actuellement onze situations sous enquête. Il s’agit du Burundi, de la Centrafrique (où nous avons eu deux renvois), de la République démocratique du Congo, de la Côte d’Ivoire, du Mali, de l’Ouganda, du Kenya, du Soudan/Darfour, de la Libye et de la Géorgie. Dans le cadre de ces situations, nous avons 32 mandats d’arrêt qui ont été délivrés dont quinze non encore exécutés.
Ces quinze mandats d’arrêt concernent cinq pays de situations ; le Darfour, l’Ouganda, la République démocratique du Congo, la Libye et la Côte d’Ivoire. Pour ces quinze fugitifs, nous avons en tout pour eux, l’équivalent de 135 chefs d’accusations (71 pour crimes de guerre, 64 pour crimes contre l’humanité, trois pour génocide et cinq pour atteinte à l’administration de la justice).

Il est important donc que ces personnes soient appréhendées pour que justice soit rendue aux victimes. Outre cela, nous avons dû retirer certains mandats d’arrêt (parce qu’il y a eu quatre décès avant leur procès). Mais en ce moment, nous continuons à faire les examens préliminaires (il y en a dix en cours).
Nous avons la Palestine, les Philippines, l’Afghanistan, le Venezuela, la Colombie, la Guinée, l’Irak, le Nigeria, la Birmanie dans l’affaire de la déportation des Rohingyas vers le Bengladesh, et l’Ukraine. Ce sont les dix situations que nous continuons à analyser ; ce qui vous donne une idée de la cartographie de nos enquêtes et examens préliminaires qui sont actuellement en cours.

Lefaso.net : Trois des cinq membres du Conseil de sécurité (les Etats-Unis, la Chine et la Russie) ne sont pas Etats-parties au Statut de Rome. Considérant l’influence de ces puissances, leur absence n’engage-t-elle pas le pronostic vital de la CPI ?

Dahirou Sant-Anna : Je comprends là où vous voulez en venir, mais ratifier le Statut est un acte souverain, volontaire de chaque Etat. Il est vrai que les grandes puissances comme les Etats-Unis, la Chine, la Russie, l’Inde, le Pakistan et d’autres, n’ont pas encore adhéré au Statut de Rome. Mais, ce qu’il faut plutôt se demander à mon avis serait pourquoi est-ce important d’adhérer au Statut et quel est l’objectif ou la raison d’être de la CPI.
C’est une institution judiciaire qui a été créée par les Etats pour lutter contre l’impunité des crimes internationaux. C’est une institution qui est là pour rendre justice aux victimes. C’est une institution qui n’intervient que si les Etats n’ont ni la capacité ni la volonté de le faire.

Donc, en tant qu’institution judiciaire, sa mission est celle-là. Dans le même temps, je suis convaincu que la Cour participe aussi au renforcement de la paix et de la sécurité internationales, elle participe à renforcer la protection des droits humains et peut contribuer durablement à la paix et au développement des pays en contribuant à la prévention des crimes.
Quand on tient compte de cette ambition, de cette mission de la Cour, qui est une mission noble (protéger les personnes, l’humain, œuvrer dans l’intérêt de l’humanité), la soutenir, c’est soutenir un outil précieux au service de la justice et de la promotion du droit. L’adhésion de chaque Etat, contribuerait à renforcer cette mission de la Cour.

Lefaso.net : Il y a également que le système de financement se fait interroger. Quand on a de grands contributeurs au fonctionnement de la Cour, comment peut-on en retour ne pas leur être redevable ? Autrement, cela ne biaise-t-il pas l’impartialité et l’indépendance de la Cour ?

Dahirou Sant-Anna : La question du financement de la Cour est très simple. Le budget de la Cour est financé par les Etats-parties. Lorsque la Cour fait soumet son projet de budget, il doit faire l’objet d’un vote par les Etats, dans le cadre de l’Assemblée des Etats parties. Il y a des discussions préalables qui se tiennent avec un comité qui s’appelle Comité du budget et des finances, qui fait des recommandations, sur la base des propositions faites par la Cour, à l’Assemblée des Etats-parties qui décide en dernier ressort du budget qui est alloué à la CPI. Donc, ce budget repose sur des contributions des Etats parties, et son exécution est faite de façon indépendante par la Cour.

Autrement dit, les Etats qui votent le budget ne donnent pas d’instructions à la Cour sur la façon dont elle doit utiliser son budget. Je voudrais donc vous rassurer que le versement de leurs contributions par les Etats ne donne nullement lieu à des faveurs de la part de la Cour qui reste une institution judiciaire impartiale et indépendante.

A côté de ce budget ordinaire qui est voté de façon annuelle pour les activités de la Cour, vous avez effectivement des projets qui contribuent à mieux expliquer le travail de la Cour ou à aider au renforcement des capacités nationales dans le cadre de partages d’expertises ou à faciliter un certain nombre d’activités qui viennent renforcer la visibilité de la Cour (missions de sensibilisation des populations affectées par les crimes dans des pays en crise, financement des stages à la Cour, formation de journalistes, ou de séminaires variés,…). Ce sont des activités de renforcement de la visibilité de la Cour, donc, leur financement n’a aucun lien avec le budget annuel de la Cour. Ce sont deux types de financement séparés et qui n’influencent pas l’impartialité et l’indépendance de la Cour.

Lefaso.net : Sur le continent africain, la CPI est perçue comme une entité destinée à traquer uniquement les Africains. Quelle est votre réaction sur cette perception ?

Dahirou Sant-Anna : Je crois que c’est effectivement une perception, qu’il faut changer. Ceux qui sont généralement à l’origine de ces perceptions ne tiennent pas compte de la réalité des faits et du contexte. Vous savez, lorsque les négociations ont commencé pour l’adoption du Statut de Rome, dans les années 90, les pays africains ont été de grands contributeurs, en ce sens qu’ils ont apporté leur soutien à cette CPI. J’en veux d’ailleurs pour preuve le fait que le premier pays à avoir ratifié le statut de Rome en 1999 est un pays africain : le Sénégal. Actuellement, nous avons 123 Etats parties (l’Afrique compte 33 Etats parties, le plus gros bloc).

Il me semble que cela témoigne d’une chose : l’engagement des pays africains (les Africains en général) pour la promotion de la règle de droit, pour la promotion de la justice. Et effectivement, lorsque le Bureau du Procureur est appelé à intervenir dans certaines situations, il n’intervient pas parce que c’est l’Afrique, il intervient parce qu’il y a une situation qui justifie cette intervention, que les critères stricts, juridiques et factuels qui relèvent du Statut de Rome sont remplis.
Il n’y a pas d’autres considérations. On oublie souvent que bon nombre de situations en Afrique ont été renvoyées à la CPI par les Etats eux-mêmes (République démocratique du Congo, l’Ouganda, la République centrafricaine à deux reprises, la Côte d’ivoire, le Mali).

Certes, il y a d’autres situations où le Procureur a recouru à son pouvoir proprio motu (le Kenya, le Burundi) parce que les crimes de la compétence de la Cour avaient été commis sur le territoire d’un Etat Partie (où dans le cas de la Côte d’Ivoire sur le territoire d’un Etat ayant accepté la juridiction de la Cour) mais sans qu’un renvoi ait été fait, et à côté desquelles il y a les saisines de la Cour par le Conseil de sécurité pour deux situations en Afrique (la Libye et le Soudan).

Cela montre que le procès qui est fait à la CPI d’être une Cour sélective contre les Africains n’est pas du tout justifié. J’irais même plus loin pour dire que sur les demandes de coopération que nous envoyons, nous recevons des réponses, et je peux même dire avec fierté que les pays africains représentent un grand pourcentage s’agissant des demandes de coopération ayant donné lieu à des suites positives.

Donc, nous avons un dialogue avec les Etats africains. Il est certes vrai qu’il y a eu des difficultés résultant d’un problème de perception, mais nous travaillons ensemble avec les pays africains concernés pour les surmonter. Lorsque l’occasion se présente, le Procureur rencontre les Chefs d’Etat et de gouvernement pour discuter de la Cour pour expliquer la façon dont elle fonctionne, et nous le faisons à tous les niveaux que ce soit en Afrique ou ailleurs.

Je crois que, lorsque vous observez les zones de crises en Afrique, que vous vous rendez compte du nombre d’opérations de maintien de la paix ou de la forte présence onusienne dans ces zones, vous ne pouvez pas rester insensible aux souffrances des victimes. Lorsque les critères du Statut sont donc remplis et que les conditions nous permettent d’intervenir, nous le faisons.
Nous n’intervenons pas contre les Africains (nous n’intervenons contre personne), nous le faisons pour que justice soit rendue aux milliers de victimes qui demandent à être protégées, qui demandent qu’on écoute leur voix, qui vivent d’immenses souffrances.

Avant d’ouvrir une enquête, je vous ai expliqué que le Bureau du Procureur doit d’abord déterminer sur la base des informations reçues et des critères juridiques du Statut, s’il y a ou non une base raisonnable de le faire. Nous en sommes à ce stade par exemple en Guinée (Conakry, ndlr) et au Nigeria où nous menons des examens préliminaires actuellement.

La Guinée ayant décidé de faire des enquêtes et de poursuivre les personnes responsables des crimes prétendument commis là-bas, nous observons, nous suivons l’évolution de ces procédures pour voir si à l’avenir, il est nécessaire pour nous d’intervenir ou non.

En somme, je dirais que la relation avec l’Afrique est une relation dynamique qui se poursuit, elle doit aller de l’avant, c’est un dialogue qui doit continuer pour qu’on explique davantage la façon dont nous travaillons. C’est un faux procès que de dire que la CPI ne s’active que lorsqu’il s’agit de l’Afrique. Nous menons des enquêtes en Géorgie et de nombreux examens préliminaires sur d’autres continents.
N’oublions pas non plus par exemple le récent renvoi de la situation au Venezuela par six Etats Parties (cinq pays d’Amérique du Sud et le Canada) ! Il faut le souligner, la Cour fait son travail sur la base des éléments du droit et des faits et les Etats ont la responsabilité de faire leur travail ; s’ils le font, la CPI n’a pas à intervenir. Le succès de la CPI se verra lorsqu’elle interviendra de moins en moins, parce que les Etats font leur travail.

Lefaso.net : Des pays comme l’Afrique du Sud, le Burundi, la Gambie avaient annoncé leur retrait du Statut de Rome. A ce jour, quelle est la position de ces pays vis-à-vis de la juridiction pénale internationale ?

Une des conférences publiques commémoratives du 20 ème anniversaire du Statut de Rome.

Dahirou Sant-Anna : Les Etats ratifient souverainement le Statut de Rome et ils ont aussi le droit de se retirer (l’article 127 du statut leur donne cette possibilité). En pratique, l’Etat notifie sa décision de retrait au Secrétaire général de l’ONU qui est le dépositaire des instruments internationaux, en l’occurrence du Statut de Rome, l’informant de sa décision de retrait. La notification peut mentionner que le retrait entrera en vigueur à une date ultérieure, mais le principe est qu’à compter de la date de dépôt de la notification de retrait, il faut un délai d’un an pour que ce retrait soit effectif.

Effectivement, vous avez pu voir que dans le cadre des Etats que vous venez de nommer, certains avaient effectivement menacé de se retirer ; le Burundi s’est retiré, mais selon le Statut de Rome, lorsque des procédures sont en cours (examens préliminaires, enquêtes ou procès) avant qu’un Etat ne décide de se retirer, ces procédures se poursuivent. Autrement dit, le fait de la notification ne met pas un terme aux procédures qui ont été préalablement engagés.

Donc, l’Etat est encore tenu vis-à-vis de la Cour, pour la période jusqu’à la fin des procédures engagées au moment où il était encore Etat-partie au statut. Donc, en 2017, quand les juges ont rendu une décision concernant l’autorisation pour le Procureur d’ouvrir une enquête au Burundi, ils n’ont pas manqué de préciser que les crimes qui avaient été commis durant la période couverte par l’examen préliminaire jusqu’à la date du retrait du Statut relevaient toujours de la compétence de la Cour. C’est fort de ce principe que les enquêtes au Burundi se poursuivent. Pour ce qui est de la Gambie, il a réintégré le Statut de Rome avant l’entrée en vigueur de sa notification de retrait ; l’Afrique du Sud demeure toujours Etat partie du Statut de Rome.

Lefaso.net : A votre avis, quelles sont les réformes qui s’imposent aujourd’hui à la juridiction pénale internationale ?

Dahirou Sant-Anna : La CPI est une jeune institution. Toute institution est appelée à faire des réformes ; lorsque vous faites des réformes, cela suppose que vous tirez des leçons du passé et que vous vous tournez résolument vers l’avenir pour mieux faire.
Je crois que dans l’histoire de la CPI, nous n’avons pas attendu le 20e anniversaire de l’adoption du Statut pour décider quelles reformes ou quels changements étaient nécessaires. Il y a eu déjà à différentes étapes de la jeune vie de la Cour, des changements ; soit parce qu’il y a eu des amendements au Statut de Rome, soit des difficultés ont été rencontrées dans le cadre des procédures et qu’il a fallu leur apporter une réponse.

Je peux vous citer par exemple un manuel (guide pratique) de procédures que les juges ont adopté à l’issue d’un certain nombre de retraites (réflexions) sur des difficultés rencontrées dans le cadre des procédures. Ce document a été adopté afin de faciliter l’efficience et la célérité des procédures devant la CPI. Ça touche aux modalités de la participation des victimes aux procédures, la confidentialité dans les enquêtes, les contacts entre les témoins des différentes parties, etc.

Au niveau du Bureau du Procureur, nous avons aussi essayé de faire en sorte d’apprendre de ces années passées pour pouvoir améliorer notre façon de travailler. Il y a un plan stratégique qui est adopté et revu tous les trois ans. Dans le cadre nous définissons des objectifs stratégiques ; je peux vous citer l’objectif N°2 qui concerne la lutte contre les crimes sexuels et à caractère sexiste qui permet au Bureau du Procureur d’avoir une approche sensible aux questions de genre dans l’ensemble de nos activités, pour pouvoir déterminer la meilleure approche pour communiquer avec les victimes de ces crimes, les témoins, leurs familles, leurs communautés, prêter notamment attention dans le cadre du travail du Bureau à leurs réalités culturelles sur ce genre de crimes, pour former les membres du personnel comme il convient, etc.

Donc, il y a là, au niveau du Bureau du Procureur des pratiques qui ont été améliorées sur la base des expériences passées. Nous sommes en train de développer aussi une politique relative aux crimes contre les enfants ou qui sont affectés par les conflits. Nous envisageons de faire quelque chose de similaire pour les crimes liés aux monuments culturels, religieux, et historiques, etc. Nos enquêtes qui étaient au départ des enquêtes très ouvertes sont de plus en plus ciblées, et nous permettent de viser ceux qui portent la plus grande responsabilité dans la commission des crimes, y compris ceux qui sont situés à des rangs intermédiaires ou inférieurs.

Je vous expliquais que nous travaillons dans le cadre d’une équipe intégrée qui permet, dès le début d’une enquête, aux composantes du Bureau du Procureur de travailler ensemble pour pouvoir être en mesure de collecter les éléments de preuve. Cela nous a permis de développer une nouvelle approche qui consiste, au moment où le Bureau du procureur soumet à la Chambre préliminaire une demande visant à émettre un mandat d’arrêt, à être prêt pour déjà présenter des preuves au procès.

Nous avons aussi adopté un Code de conduite au niveau du Bureau qui permet aux membres de l’équipe de savoir comment se comporter, non seulement dans leur travail de tous les jours, mais également lorsqu’ils interagissent avec l’extérieur (les victimes, les témoins, etc.). Donc, il y a eu un certain nombre de leçons apprises du passé qui nous ont permis de mieux améliorer notre façon de travailler, notre fonctionnement. Il y a donc tout un ensemble de mesures qui ont été prises à différents niveaux dans les différents organes pour accroître l’efficacité et l’efficience de la CPI.

Lefaso.net : A la fin de cette interview, que souhaiterez-vous que vos lecteurs gardent de la CPI ?

Dahirou Sant-Anna : Je crois qu’il est possible de rappeler, dans le cadre de la commémoration de ce 20e anniversaire, que la CPI est une institution qui est là pour lutter contre l’impunité, faire reculer l’impunité. C’est une institution qui est au service de la justice pénale internationale et qui a besoin du soutien de tout le monde pour renforcer son efficacité pour pouvoir faire son travail, c’est-à-dire exécuter son mandat suivant le Statut de Rome. La contribution de chaque individu à tout niveau est essentielle pour que la Cour ait un impact réel.

Le Bureau du procureur continuera de faire sa part afin que nous tendions vers un monde où prévalent le respect des droits humains et le droit, la sécurité et la paix ; un monde plus sûr, plus juste, plus paisible, plus prospère. Sans justice pénale internationale, nous risquerions de régresser voire de courir le risque de voir la violence et ses conséquences prévaloir.

Interview réalisée par Oumar L. Ouédraogo
Lefaso.net

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