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Constat sur les relations interpartis au Burkina Faso

Publié le mercredi 20 juillet 2005 à 07h25min

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L’échiquier politique burkinabè est très peuplé de partis ou formations politiques. Le ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, ministère de tutelle est peut-être le seul à pouvoir en fournir le nombre exact.

Dans le présent propos, nous voulons nous intéresser aux relations qui existent ou qui devraient exister entre des organisations qui ont la même vocation, à savoir gérer, participer ou influencer la gestion du pouvoir d’Etat.

En considérant la configuration actuelle des partis et formations politiques, en mouvance présidentielle d’une part et en partis d’opposition d’autre part, on peut dégager schématiquement deux types de relations qu’ils entretiennent de manière autonome entre eux, il s’agit :

- d’une relation de coopération à l’intérieur de chaque camp ;

- d’un défaut de coopération entre les partis des deux camps ;

la relation de coopération se traduit essentiellement à travers :

- des invitations que les partis de chaque camp s’adressent mutuellement pour participer à leurs congrès, conférences de presse...

- de la publication de déclarations communes sur des sujets jugés d’importance politique, économique et/ou sociale.

Convenons que le constat ainsi fait des relations inter partis est loin d’être satisfaisant. Il est même déplorable. C’est pourquoi pensons-nous qu’un effort doit être fait pour améliorer les relations de coopération existant dans chaque camp et l’instaurer entre les deux camps. A ce sujet, il nous plaît de reconnaître et de saluer :

- l’action du gouvernement qui, malgré l’existence des institutions de la République telles l’Assemblée nationale, le ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, crée des instances où partis de la mouvance et ceux de l’opposition sont dans des conditions de pouvoir dialoguer ;

- l’action des ONG comme le Centre pour la gouvernance démocratique (CGD), le National Democratic Institut (NDI)... qui, à travers leurs activités, favorisent le contact, partant le dialogue entre partis et formations politiques, toutes tendances confondues.

Ces approches venant du gouvernement et des ONG, donc de l’environnement extérieur des partis, devraient les amener à améliorer leurs relations autonomes en dépassant les simples invitations (du reste sectaires) à leurs cérémonies, la publication de déclaration communes pour se soutenir matériellement et financièrement car en la matière, ils n’ont pas les mêmes capacités.

En considération de ce qui précède, on peut comprendre :

- qu’un parti de la mouvance ou de l’opposition convie des partis, indépendamment de leur camp à ses cérémonies ;

- qu’un parti plus nanti matériellement et financièrement apporte son soutien à un parti moins nanti pour l’organisation de ses activités, indépendamment de son camp et du contexte.

Ces invitations et surtout ces soutiens matériel et financier ne constituent pas politiquement de grands dangers ni pour le parti qui le reçoit ni pour la démocratie.

Si la direction du parti politique bénéficiaire donne des consignes de comportement à ses militants et sympathisants, elle ne sera pas nécessairement suivie. Des cas récents en France, en République centrafricaine et en Guinée-Bissau démontrent que les bases des partis sont de moins en moins manipulables par leur chef ou leur direction. C’est dire que ces soutiens sont de portée limitée surtout au plan de la corruption électorale.

Ces cas illustratifs que nos avons évoqués permettent de comprendre qu’un parti "nanti", fût-il au pouvoir, ne peut envisager corrompre des partis d’opposition en leur apportant un quelconque soutien. Tout au plus, il pourra corrompre le dirigeant ou la direction, ce qui est négligeable comparativement à l’attente.

Si M. Laurent Bado a "bénéficié de millions de la part d’un envoyé du Président", et a jugé bon d’informer l’opinion publique, il a mis en avant la transparence qui aujourd’hui, plus qu’hier est la mode dans les relations publiques et non le phénomène de corruption. Si certains dirigeants de partis de l’opposition ou de la mouvance ont reçu également des largesses de la part du parti au pouvoir et préfèrent garder le silence, ils ne sont pas pour autant condamnables, car comme l’a dit M. Palé Welté à l’occasion de son TPR, "la meilleure façon de détruire un parti, c’est d’indiquer ce qu’il a en caisse". Nous ajouterons que l’essentiel est que "l’argent éventuellement reçu" serve effectivement à mener les activités du parti. La politique d’aujourd’hui coûte très cher. En tous cas, ce ne sont pas les dirigeants de partis et les journalistes qui diront le contraire.

En concluant ce propos, nous voudrions souligner trois choses :

- la transparence du financement des activités des partis politiques et des campagnes électorales est un idéal que la classe politique doit poursuivre, tout en évitant de se faire discréditer, sinon elle ne sera pas prise au sérieux malgré les progrès qu’elle enregistrera au fur et à mesure ;

- les médias et l’opinion jugeront et qualifieront toujours les faits et gestes des hommes politiques. Il revient à ces derniers de s’en expliquer et de se justifier, sinon ils se feront dicter leur conduite politique surtout par les médias qui feront un jour la politique à leur place, s’il ne le font pas déjà ;

- le constat fait des relations interpartis actuelles est politiquement inacceptable et moralement condamnable. Alors, si ces relations n’évoluent pas dans le sens positif, la classe politique n’aura pas mieux fait qu’une tendance du mouvement étudiant qui prônait ""la délimitation idéologique et la démarcation physique".

Mahama SAWADOGO
Député

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