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Augustin Tankoano, maire de Diapaga : « Plusieurs fois, des délibérations ont été rejetées par le conseil municipal malgré la majorité écrasante du MPP »

Publié le mardi 10 juillet 2018 à 16h21min

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Augustin Tankoano, maire de Diapaga : « Plusieurs fois, des délibérations ont été rejetées par le conseil municipal malgré la majorité écrasante du MPP »

Sans langue de bois, le maire Augustin K. Tankoano de la commune urbaine de Diapaga, localité située dans la province de la Tapoa, à l’Est du Burkina, a bien voulu répondre à nos questions sur la vie de sa commune, lors de l’entretien que nous avons eu avec lui, le jeudi 5 juillet 2018.

Lefaso.net : Pouvez-vous présenter aux lecteurs la commune de Diapaga ?

Augustin K. Tankoano (A.K.T) : La commune urbaine de Diapaga est le chef-lieu de la province de la Tapoa, qui compte huit communes. Elle est à 216 km de Fada N’Gourma, chef-lieu de la région de l’Est, et à 445 km de Ouagadougou, la capitale du Burkina. La commune fait frontière avec le Niger et le Bénin.Elle se trouve ainsi limitée à l’Est par les Républiques du Niger et du Bénin, à l’Ouest par la commune rurale de Partiaga, au Nord par les communes rurales de Kantchari et Botou, et au Sud par la commune rurale de Tansarga.

La superficie approximative de la commune est estimée à 3 300 km². La ville de Diapaga, qui donne son nom à la commune, signifierait « village des célibataires ».L’historique du peuplement de la zone fait ressortir que le village de Diapaga a été créé au 17e siècle par des Haoussa venus du Tchad et plus précisément de Bornou. Fuyant les combats qui se déroulaient dans leur localité, ils franchirent miraculeusement le fleuve Niger, aidés par un serpent boa. La légende raconte que c’est sous l’imploration du patriarche Tchiani Coulidiaty qu’un boa géant se mit en travers du fleuve pour leur faciliter la traversée.

Dans l’ordre du peuplement, on peut relever pour la zone de Diapaga, qu’après les Couldiaty, vinrent successivement les Tankoano, les Ouali et les Ouoba (de Kantchari), les Lompo (de Fada), les Traoré (du Mali), les Peulhs, les Bissa, les Mossé.

Lefaso.net : Pouvez-vous présenter votre conseil municipal et donner votre appréciation de l’ambiance entre conseillers municipaux ?

A.K.T. : Les élections municipales du 22 mai 2016 ont permis à la commune de Diapaga, tout comme aux autres communes du pays, de renouveler leurs organes. La présente mandature est dirigée par un conseil municipal fort de 51 membres, dont 42 hommes, soit 82%, et neuf femmes, soit (18%). Cette situation est en-deçà des normes sur le quota genre en vigueur au Burkina Faso qui est de 30%, mais rassurez-vous, des actions sont entrain d’être conduites pour susciter plus d’engagement des femmes en politique, mais aussi pour leur meilleur positionnement au niveau des différents organes. Le suffrage a donné les résultats suivants :40 conseillers pour le MPP,9 conseillers pour l’UPC, 2 conseillers pour le CDP.

En termes d’instruction, le conseil municipal est peu instruit mais beaucoup expérimenté dans la conduite des affaires locales. Le niveau de participation aux sessions est très appréciable. Je vous avoue que plusieurs fois des délibérations ont été rejetées par le conseil, malgré la majorité écrasante du MPP. C’est pour dire à quel point la participation des conseillers est libre.Le conseil s’anime dans une ambiance sereine empreinte de courtoisie et de débats démocratiques, le tout est relayé par la radio Buayaba à travers sa retransmission en direct.

Lefaso.net :Quels rapports existe-t-il entre votre conseil et les autres collectivités ?
A.K.T. :
La commune de Diapaga entretient des rapports de collaboration avec les autres communes de la province. Nous nous fréquentons et partageons les expériences. En somme, nous pouvons dire que nous avons de très bons rapports.

Lefaso.net :Mise à part votre feuille de route, quels sont, à titre personnel, les objectifs majeurs que vous vous êtes fixé à titre personnel pour chaque année de gestion de la commune ?

A.K.T. : De manière exhaustive, je ne pourrais pas tout dérouler car tous les secteurs socio-économiques et culturels comportent une vision. A titre d’exemples :
Au niveau des infrastructures marchandes :

• La construction du campement communal ;
• la construction de 100 boutiques, des étales pour le marché à légumes ;
• La mise à jour du fichier des contribuables….

Au niveau culturel, nous avons des projets de sécurisation des sites sacrés.

Au niveau de la santé, nous avons deux CSPS que nous ambitionnons de construire au secteur 1 de Diapaga (Kogdangou) et dans le village de Bagli.

Au niveau de l’éducation :

Lefaso.net :Qu’est ce qui a fondamentalement changé dans la commune depuis l’arrivée de votre équipe ?

A.K.T. : C’est difficile de porter un jugementsur soi-même, mais lors de la journée de dialogue communale, les citoyens de Diapaga ont eux-mêmes cité les changements, notamment sur le plan infrastructurel, à savoir la réalisation de la clôture de la mairie ; l’extension du marché central à travers la construction de 64 boutiques de rue ; le traçage de voirie ; la construction de CSPS, du lycée communal ;le désenclavement de certains secteurs dans la commune ; la retransmission en direct de toutes les sessions du conseil municipal avec une participation citoyenne à tous nos débats.

Cela participe à l’approfondissement de la gouvernance locale et à l’amélioration du civisme dans tous les domaines de la vie au niveau de la commune. Toutes ces actions ont permis non seulement de changer l’aspect de la vie mais également d’améliorer les conditions de vie des populations.

Lefaso.net :Avez-vous le sentiment d’être soutenu depuis votrearrivée à la tête de la commune ?

A.K.T. : Oui. La population nous appuie beaucoup, elle ne ménage aucun effort pour sa participation aux activités ; et mieux, nos recettes propres ont augmenté par rapport aux années précédentes avant notre arrivée aux affaires.

Lefaso.net :Avez-vous des partenaires qui vous accompagnent dans la mise en œuvre du PCD ?

A.K.T. : Le PCD [ndlr : Plan communal de développement] de la commune est expiré depuis 2012. Nous avons lancé les travaux d’élaboration d’un nouveau PCD. Au total, cinq partenaires se sont prononcés pour nous accompagner dans le processus de sa rédactionqui est presqu’à terme. Il s’agit du programme Valpape, du DEPAC-A,du DEPAC-B,du PSAE, de TIN-TUA, de la FAO...Autrement, beaucoup de partenaires techniques et financiers nous accompagnent dans la réalisation de notre programme de développement.

Lefaso.net :Comment se présentent les secteurs sociaux de base dans votre commune ?

A.K.T. : D’une manière générale, les secteurs sociaux de base fonctionnent bien, carl’accès aux soins de santé primaire, à l’eau potable est bien réel. Au niveau de l’assainissement,beaucoup reste à faire pour donner un environnement adéquat à la commune. Aussi, les routes sont en état de dégradation avancée. Heureusement, vous l’avez tous suivi : le gouvernement a lancé les travaux de bitumage de la voie Kantiari-Diapaga-Frontière du Benin, et cela va beaucoup soulager les populations.

Lefaso.net :A ce stade de gestion de la commune, sur quel plan tirez-vous le plus de satisfaction ?

A.K.T. : Au stade actuel, je suis satisfait sur le plan des investissements ; à ce jour, toutes les infrastructures importantes prévues dans le PAI[ndlr : Plan annuel d’investissement] 2017 et 2018 sont réalisées ou en cours de réalisation. Cela est réellement un motif de satisfaction pour nous. Nous avons aussi des partenaires autour d’un certain nombre de projets.

Lefaso.net :En rapport avec la question précédente, quel est le gros point d’insatisfaction ?

A.K.T. : Je ne suis pas tout à fait satisfait du niveau de recouvrement [ndlr : des recettes fiscales] dans la commune. Diapaga dispose de beaucoup de ressources qui malheureusement ne sont pas assez bien exploitées.

Lefaso.net :Quels sont les principaux défis qui se posent actuellement à votre commune ?

A.K.T. : Les défis sont nombreux et sont quasiment liés àl’insuffisance des ressources financières. Voilà pourquoi je dirai que le principal défi constitue la mobilisation des recettes propres pour la commune ; ensuite travailler à impliquer efficacement les populations dans la gestion des affaires locales.

Lefaso.net :On sait que la condition de la femme est encore plus difficile dans cette partie du pays, du fait également des caprices de la nature. Que prévoyez-vous sous votre mandat pour améliorer les conditions de vie de cette catégorie sociale dans votre circonscription ?

A.K.T. : La condition de la femme surtout rurale occupe une place majeure dans le programme du conseil municipal de Diapaga. Avec nos partenaires, nous avons renforcé les capacités des femmes dans les filières agro-sylvo-pastorales et équipé bon nombre d’entre elles. Les activités génératrices de revenues ont été également soutenues avec l’appui de FAARF, des ONG…

Nous avons réalisé des forages dans au moins huit villages au profit des populations. Cela allège les tâches des femmes. Il y a eu également la réalisation de nouveaux CSPS, ce qui améliore la prise en charge des femmes au niveau obstétrical et des autres soins. C’est l’occasion de remercier le gouvernement pour la gratuité des soins dont nous bénéficions de façon satisfaisante.

Lefaso.net :La campagne agricole n’a pas du tout été satisfaisante dans nombre de localités du Burkina. Quelle est la situation à Diapaga…, et au cas où la situation alimentaire serait déficitaire, qu’envisagez-vous pour y faire face ?

A.K.T. : Au niveau de la commune, le déficit alimentaire est réel.La commune se trouve sur un plateau,d’où la difficulté à conserver les eaux de pluies, en dépit des labours croisés. Le changement climatique paraissait être l’apanage des pays occidentaux, mais regrettablement,il nous incombe aujourd’hui et j’invite la masse populaire à beaucoup travailler pour la restauration du couvert végétal, car les sols, les végétations et le ciel sont en telle corrélation qu’aucune de ses trois composantes ne peut subsister en perdant de vue les deux autres.

Oui, c’est vrai que la rareté des pluies commence à nous inquiéter mais nous espérons que la situation va s’arranger. Mais en temps opportun, nous verrons, dans la mesure de nos possibilités, comment accompagner nos braves paysans.

Lefaso.net :Qu’avez-vous comme message pour l’ensemble de votre population ?

A.K.T. : Je voudrais les appeler à l’union autour de l’objectif commun qu’est le développement de notre chère commune, à travers le civisme fiscal ; à la mobilisation autour des travaux d’intérêt commun pour une ville de Diapaga prospère.

Interview réalisée par Soumaila SANA
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 11 juillet 2018 à 11:34, par le paysan En réponse à : Augustin Tankoano, maire de Diapaga : « Plusieurs fois, des délibérations ont été rejetées par le conseil municipal malgré la majorité écrasante du MPP »

    Merci pour cet entretien et la bonne foi de Mr le Maire. Ce qui me chagrine c’est le niveau d’instruction des conseillers. Vous faites une fuite en avant en disant : "En termes d’instruction, le conseil municipal est peu instruit mais beaucoup expérimenté dans la conduite des affaires locales". C’est justement cette idée intellectuellement malhonnête qui va détruire notre pays. Il faudrait que le politique ait le courage de fixer un minimum de niveau (par exemple le BEPC ou le niveau 2nd) pour être conseiller ou député sinon le Burkina n’ira nul part. J’ai l’impression que les politiciens se sentent ou constatent que ceux qui l’entourent n’ont pas son niveau. Vous partez dans le Mouhoum c’est pire. Même des maires préfèrent travailler avec des illettrés que de responsabiliser des conseillers qui ont un niveau acceptables. Vous voyagez à l’extérieur ou vous voyez ce qui se passent dans les médias et continuer à enfoncer le Faso dans la médiocrité. Arrêtons un instant et cherchons des voies pour réussir. Commençons en 2020 et vous verrez qu’une certaine classe va vaincre leur timidité et s’intéresser à la politique. Dans ça les partis politique seront regorgés d’intellectuel "acceptables".

    • Le 11 juillet 2018 à 17:13, par li bayuali de Kindikombou En réponse à : Augustin Tankoano, maire de Diapaga : « Plusieurs fois, des délibérations ont été rejetées par le conseil municipal malgré la majorité écrasante du MPP »

      Monsieur le paysan, à travers votre écrit, ça se voit que vous ne faites pas de la politique. Les conseillers ne se nomment pas parmi les gens les plus lettrées ou éclairées ; ils s’élisent. Et pour qu’un conseiller soit élu, il faut qu’un parti politique le positionne sur ses listes. Et les partis politiques ne positionnent que leurs militants. Si les quelques intellectuels du village ne sont pas des militants actifs dans les partis politiques ou si les partis dans lesquels ils militent n’ont pas réussi à avoir des conseillers, à qui la faute ?
      Et puis, il ne faut pas aller vite en besogne ! Je connais des paysans analphabètes mais hautement intellectuels (intellectuel signifiant quelqu’un qui sait utiliser son intellect pour...). A contrario je connais des titulaires du BEPC qui ne donnent pas l’air de savoir lire. Ce qu’il faut pour nos communes, ce sont des gens engagées et disponibles, qu’elles soient titulaires du BEPAC, du PHD ou de rien du tout.

  • Le 11 juillet 2018 à 14:17, par B2 En réponse à : Augustin Tankoano, maire de Diapaga : « Plusieurs fois, des délibérations ont été rejetées par le conseil municipal malgré la majorité écrasante du MPP »

    Toutes mes félicitations au conseil municipal de Diapaga. Mes encouragements au Maire Tankoano.
    Je suis très heureux de savoir que du bon travail est fait avec des résultats tangibles sous votre leadership.

  • Le 12 juillet 2018 à 20:13, par Le roi En réponse à : Augustin Tankoano, maire de Diapaga : « Plusieurs fois, des délibérations ont été rejetées par le conseil municipal malgré la majorité écrasante du MPP »

    Mr le journaliste sana,l’entrerient pouvait etre plus riche que cela.les lecteurs attendent des questions pertinentes que ces genres de questions.neamoins bon courage

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