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Présidentielle française de 2002 - présidentielle burkinabè de 2005 : L’analyse comparée du député Mahama Sawadogo

Publié le mercredi 13 juillet 2005 à 07h40min

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Le député Mahama Sawadogo évoque, dans cet écrit, les similitudes et les différences entre l’élection présidentielle de 2002 en France et celle du 13 novembre prochain au Burkina Faso.

Le premier tour de l’élection présidentielle française de 2002 a constitué une grande surprise, aussi bien pour les élites politiques que pour les observateurs, même les plus avertis. Cette surprise a été évidemment l’arrivée au second tour de Jean-Marie Lepen du Front national et l’absence à ce tour de Lionel Jospin du Parti socialiste (PS) considéré comme chef de file de l’opposition.

Comment est-on arrivé à cette situation ? Manifestement on peut l’expliquer vraisemblablement par le fait que le Parti socialiste, premier parti de l’opposition, n’a pas été en mesure de gérer rationnellement les candidatures au sein de l’opposition de gauche (présenter une ou deux candidatures).

Le défaut de ce management politique, dont l’expression a été la multitude des candidatures à gauche, a été la principale condition qui a favorisé « l’outsider » qu’est M. Lepen au second tour du scrutin.

Le premier tour n’a pas constitué seulement qu’une surprise, il a été aussi une sérieuse alerte pour toute la classe politique (du moins à gauche et à droite) sur la nature diverse des dangers qui peuvent menacer la Démocratie et la République. Sur la liste de ces dangers figurent en bonne place le sectarisme politique, la « pureté idéologique » et l’opposition systématique.

L’élite politique, du moins celle de l’opposition de gauche, a immédiatement réagi en apportant au 2nd tour son soutien à Jacques Chirac, candidat de la droite au pouvoir, afin de barrer la route de la présidence à M. Lepen candidat de l’extrême droite considéré comme un danger pour la Démocratie et la République.

"L’ADF/RDA n’a pas pu canaliser et organiser les candidatures"

L’élection présidentielle de novembre 2005 au Burkina Faso apparaît (pour le moment) analogue à l’élection présidentielle française de 2002. La mouvance présidentielle présente une seule candidature tandis que l’opposition en présente une dizaine. Au-delà de la multitude de candidatures en son sein, l’opposition comporte les tendances suivantes :
- une tendance subversive analogue au Front national dont il en est l’inverse et non l’opposé ;
- une tendance extrémiste et contestataire ;
- une tendance "sociale-démocrate" ayant un passé d’opposant mais dénuée d’expérience en matière de gestion du pouvoir ;
- une tendance "socialiste", parti né dans le feu de l’actualité.
L’analyse de l’échiquier électoral permet de faire les observations suivantes :
- le premier parti d’opposition, l’ADF-RDA, n’est pas parvenu à canaliser et organiser les candidatures de l’opposition ; .
- dans cette situation, une candidature de l’ADF-RDA pourrait vraisemblablement connaître un sort analogue à celui du Parti Socialiste français en 2002 ;
- la probabilité que le candidat d’un parti subversif ou de celui d’un parti contestataire, autrement dit d’un "outsider", parvienne au 2nd tour ou tout au moins occupe la deuxième place à l’issue du premier tour du scrutin existe réellement.
Face à cette situation, les termes de l’alternative qui se pose à l’ADF-RDA sont :
- soit ignorer l’expérience française de 2002 et faire courir un risque analogue à lui-même et à la démocratie burkinabè ;
- soit tirer leçon de cette expérience en s’abstenant de présenter une candidature propre. Dans cette hypothèse, deux options possibles se présentent au premier parti de l’opposition :
• ne donner aucune consigne de vote à l’endroit de ses électeurs ;
• porter son soutien à un candidat donné.

"Attitude du P.S français, attitude de l’ADF/RDA
La première option n’est peut être pas suffisante pour contribuer à contrecarrer efficacement le risque évoqué ci-dessus. Quant à la seconde, elle a !’avantage d’être claire et active, donc plus efficace pour amoindrir les chances des candidats des tendances subversive, contestataire et autres de l’opposition.

La décision du congrès de l’ADF-RDA des 02 et 03 juillet 2005 de soutenir la . candidature de Blaise Compaoré est le triomphe des tenants du point de vue ci-dessus exprimé sur les’ tenants des points de vue contraires (présenter un candidat propre, ne pas présenter un candidat, tout en évitant de donner une consigne de vote).

En guise de conclusion, nous aimerions souligner trois choses :
- la différence à retenir entre l’attitude du PS français et celle de l’ADF-RDA est que le premier a apporté son soutien au candidat du pouvoir au 2nd tour, tandis que le second a décidé de soutenir le candidat du pouvoir dès le premier tour, et cela en considération de l’analyse qui précède ;
- le PS a conservé à l’issue du scrutin sa place de premier parti de l’opposition tandis que l’ADF-RDA envisage renoncer à son statut de chef de file de l’opposition qu’il détient légalement mais non légitimement puisqu’il n’est pas parvenu à canaliser les différentes tendances de l’opposition ;
- le PS a su préserver son unité à l’issue du scrutin, l’ADF-RDA devrait réussir également le même pari c’est-à-dire parvenir à concilier les tenants des différents points de vue avant et après le scrutin de novembre 2005.

Mahama SAWADOGO

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