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Economie Afrique subsaharienne : Une croissance de 3,1%, « un taux positif », mais insuffisant

Publié le vendredi 20 avril 2018 à 00h51min

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Economie Afrique subsaharienne : Une croissance de 3,1%, « un taux positif »,  mais insuffisant

Après avoir enregistré en 2016, une croissance économique évaluée à 1,5% ; 2 ,6% en 2017, la croissance de l’Afrique subsaharienne pourrait atteindre 3,1% en 2018 et s’établir à un taux de 3,6% durant la période 2019-2020. C’est ce qu’indique le récent rapport semestriel de la Banque mondiale, « Africa’s Pulse ». Les résultats de ce rapport qui analyse l’état des économies africaines, ont fait l’objet d’échanges via visioconférence ce mercredi 18 avril 2018, depuis le siège de l’institution à Washington.

« Une croissance économique qui rebondit, mais trop lentement », un accroissement du ratio de la dette publique sur le PIB, l’accélération de l’électrification pour booster la croissance économique. C’est la substance de ce dernier rapport Africa’s Pulse, dont la dernière édition est parue ce mercredi.

Cette expansion économique n’est que le reflet de la reprise économique de la croissance dans les trois plus grandes économies de la région que sont le Nigéria, l’Angola et l’Afrique du Sud. Une croissance de 3,1% en 2018, c’est « un taux positif et même une bonne nouvelle pour l’Afrique » note l’économiste en chef de la Banque mondiale pour la région Afrique, Albert Zeufack, précisant que : « Pour la première fois depuis 2016, la croissance du produit par tête de l’Afrique est positive. En 2016-2017, en raison du fort taux d’accroissement de la population, notre croissance par tête a été négative ».

« Les prévisions de la croissance tablent sur la stabilité des cours des hydrocarbures et des métaux, et sur la mise en œuvre dans les pays de la région, de réformes visant à remédier aux déséquilibres macroéconomiques et à stimuler l’investissement. (…) L’activité économique va repartir à la hausse dans certains pays exportateurs de métaux, sous l’effet de la production et de l’investissement dans le secteur minier » peut-on lire dans le communiqué de presse.

Toutefois, poursuit l’économiste en chef de la banque mondiale, cette croissance économique reste peu solide pour éradiquer la pauvreté dans la région. « Ce taux reste faible et nous encourageons les pays à poursuivre les réformes pour l’accélérer car il est juste légèrement supérieur au taux de croissance de la population qui est de 2,7%. Ensuite, ce taux reste très loin du niveau de croissance que l’Afrique a connu avant l’effondrement du cours des matières premières à partir de 2014 » a-t-il expliqué. D’où la nécessité d’accélérer les réformes et de les approfondir. A ce sujet, Albert Zeufack relève que les pays de la zone CEMAC (Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale) doivent redoubler d’efforts sur l’ajustement fiscal pour stabiliser leur cadre macroéconomique.

En Afrique de l’Ouest, il soutient que des pays comme la Côte d’ivoire et le Sénégal conservent une croissance solide assez élevée et tirent la croissance de la CEDEAO. En Afrique de l’Est, dit-il, à la faveur de l’amélioration de la croissance du secteur agricole, des pays comme l’Ethiopie, le Rwanda, la Tanzanie, continuent de croitre à un taux élevé et c’est « grâce à ces pays que la croissance de l’Afrique remonte à un taux de 3,1% ». Par ailleurs, explique le chef de département de la banque mondiale pour la région Afrique, cette croissance de 3,1 est également obtenue sur l’hypothèse que les prix des matières premières qui ont repris depuis 2017, conserveront cette tendance. « Ce qui n’est pas totalement sûr et ce qu’il faudrait noter, c’est que les transitions qu’on observe en Afrique du Sud et en Angola, positionnent deux des trois plus grandes économies africaines à réaliser plus de croissance dans le futur. Raison pour laquelle, l’autre projection à moyen terme (3,6% en 2019) est favorable » confie-t-il.

18 pays africains en détresse

Albert Zeufack, économiste en chef de la Banque mondiale pour la région Afrique

De l’avis d’Albert Zeufack, les pays africains devraient accorder une attention particulière à la dette. Selon lui, contrairement aux années 90-2000, où la dette était essentiellement concessionnelle, la structure de la dette en Afrique a changé et désormais, les pays se tournent vers les marchés pour émettre des bons et empruntent auprès d’acteurs privés. Ces dernières années, il indique que de nombreux pays en Afrique ont doublé leur dette en moins de 5 ans et vu que la dette émise sur les marchés est de courte maturité, alors les problèmes de soutenabilité sont devenus croissants.

En mars 2018, 18 pays africains étaient classés comme étant exposés à un risque élevé de surendettement, contre huit en 2013. « L’accélération du taux d’endettement de la dette a eu lieu à partir du moment où les cours des matières premières se sont effondrés. Cela pose un problème fondamental au niveau de notre politique budgétaire, de la gestion de nos recettes et dépenses publiques » a noté monsieur Zeufack, précisant qu’il est important d’avoir une politique budgétaire beaucoup plus stricte, qui met l’accent sur l’efficacité de la dépense. Et d’ajouter que : « L’un des problèmes de soutenabilité de la dette que nous connaissons, c’est que les investissements qui sont faits dans nos pays ne sont pas suffisamment efficaces pour que le rendement puisse servir à rembourser la dette qui a été contractée dans le cadre des investissements ». Et ce, d’autant plus que la faiblesse des échanges intra-africains limite la faiblesse des échanges à moyen et long termes. « Seulement 15% du commerce africain est intra -africain. Si vous retirez l’Afrique du Sud et ses voisins, cela revient à moins de 2% du commerce africain. L’Accord continental ou libre échange permettra d’avoir des perspectives de commerce beaucoup plus bonnes ».

L’électrification pour une croissance économique solidaire

Si le présent rapport met un accent particulier sur l’électrification, Albert Zeufack a relevé lors des échanges, que Seulement 42% des ménages avaient accès à l’électricité en Afrique, en 2016. La situation est encore moins reluisante dans les pays les plus fragiles, où moins de 10% de la population a accès à une électricité peu fiable. « 2 / 3 des entreprises dans les capitales africaines n’ont pas accès à une électricité de qualité. Ce qui limite leur compétitivité et ce qui les emmène à ne pas créer suffisamment d’emplois pour la jeunesse africaine » a-t-il signifié.

Pour la Banque mondiale, il est temps pour l’Afrique d’embrasser la technologie et mettre à profit l’innovation pour résoudre le problème de l’accès universel à l’électricité. L’objectif étant d’accélérer l’électrification en Afrique subsaharienne et de parvenir à une croissance économique plus solidaire et de lutter contre la pauvreté.

Nicole Ouédraogo
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 26 avril 2018 à 16:48, par KONE En réponse à : Economie Afrique subsaharienne : Une croissance de 3,1%, « un taux positif », mais insuffisant

    LE COMMERCE
    Un moteur de croissance pour l’Afrique
    Les pays africains devraient profiter du nouveau cycle de négociations commerciales pour obtenir des concessions dans les domaines qui les intéressent au premier chef — la libéralisation des marchés agricoles mondiaux et l’élargissement de l’accès aux marchés des pays industrialisés. En contrepartie, ils devraient continuer à libéraliser leurs propres régimes commerciaux.
    LES ANNÉES 90 ont été marquées par des progrès substantiels des réformes économiques dans bien des pays d’Afrique subsaharienne, qui ont comprimé leurs déficits budgétaires et extérieurs courants, abaissé l’inflation et entrepris des réformes structurelles axées sur le marché, notamment la libéralisation des échanges.
    De 1992 à 1997, la croissance moyenne dans la région est passée de 1 % à 5 %, dépassant 3 % dans 32 des 47 économies. Le PIB réel par habitant est en hausse après cinq années consécutives de déclin. Mais, pour rehausser le niveau de vie et sortir leur population de la pauvreté, les pays africains doivent encore accélérer leur croissance.
    Les études empiriques font systématiquement apparaître un lien étroit entre la croissance économique et celle des exportations.
    D’ailleurs, aucun pays dans l’histoire récente n’a réussi à enregistrer ou à maintenir des taux de croissance élevés dans une économie fermée et avec une politique de repli sur soi.
    Les études empiriques montrent aussi que la croissance économique est essentielle pour lutter contre la pauvreté. Ces vingt dernières années, les exportations comme les taux de croissance économique de l’Afrique subsaharienne sont restés inférieurs à ceux des autres régions en développement. De 1975 à 1997, les exportations nominales et le PIB réel de l’Afrique subsaharienne ont augmenté respectivement de 4,7 % et 2,2 % par an, contre 15,7 % et 7,6 % dans six pays d’Asie de l’Est et 9,6 % et 3,0 % en Amérique latine.
    La part de l’Afrique dans le commerce mondial est tombée d’environ 4 % en 1980 à moins de 2 % aujourd’hui.
    Les exportations d’un pays sont influencées par ses richesses naturelles, les facteurs exogènes et ses politiques macroéconomiques et structurelles.

    Un cadre d’incitations macroéconomiques approprié, complété par des mesures structurelles qui renforcent la réaction de l’offre — y compris une politique commerciale libérale —, est indispensable à de bons résultats à l’exportation.
    À cet égard, comme en matière de croissance, l’Afrique a été handicapée par ses régimes commerciaux restrictifs, ainsi que par la faible progression du revenu par habitant, son éloignement des principaux marchés et les coûts élevés de transport.

    Au plan intérieur, les pays africains doivent donner priorité à la libéralisation des échanges et à l’adoption de réformes macroéconomiques et structurelles complémentaires. Au plan international, ils devraient user de leur influence à l’OMC — où ils représentent 27 % du total des membres — pour modifier le cadre des échanges internationaux de manière à faciliter l’intégration des pays pauvres dans le système du commerce mondial. Dans le cycle de négociations commerciales lancé à Seattle, les nations africaines devraient unir leurs forces pour persuader les pays industrialisés de libéraliser l’agriculture et d’ouvrir leurs marchés aux exportations de l’Afrique.

    Une priorité pour l’Afrique
    La réforme des échanges est une grande priorité pour l’Afrique subsaharienne. La croissance économique va de pair avec des régimes commerciaux ouverts et des secteurs d’exportation robustes, et les barrières commerciales sont maintenues aux dépens de la croissance et du bien-être des populations de l’Afrique. Mais la réforme du commerce ne pourra pas être efficace sans réformes complémentaires des politiques intérieures visant à instaurer un cadre d’incitations tourné vers l’extérieur et axé sur le marché.
    L’adoption de politiques appropriées qui privilégient les échanges ne conduit pas nécessairement au développement des exportations de produits manufacturés ou de tout autre produit.
    Il faut plutôt rechercher l’efficience économique et tirer parti des possibilités d’échanges lorsqu’elles se présentent.
    Selon l’avantage comparatif du pays, il pourra se concentrer sur les produits de base, les produits agricoles (y compris les produits transformés et autres produits à forte valeur ajoutée), les textiles, les produits manufacturés ou les services.
    Le nouveau cycle de négociations offre une instance à l’Afrique pour travailler à des réformes du commerce international susceptibles d’améliorer les perspectives de la région dans ce domaine. Mais, en retour, les pays d’Afrique subsaharienne doivent être disposés à libéraliser leurs propres politiques commerciales. Un environnement plus favorable au commerce extérieur, conjugué à un cadre de politiques macroéconomiques et structurelles judicieuses, y compris des politiques commerciales libérales, est le moyen le plus sûr de stimuler les exportations et de récolter les fruits d’une participation plus entière au système commercial mondial.

    Politique commerciale en Afrique
    Malgré les progrès substantiels réalisés dans les années 90, les politiques commerciales de l’Afrique restent, en moyenne, plus protectionnistes que celles de ses partenaires commerciaux et de ses concurrents. Dans une récente étude de la libéralisation des échanges dans les pays appliquant des programmes appuyés par le FMI, celui-ci a mis au point un indice du degré de restriction du régime commercial (restrictif, modéré ou ouvert) pour faciliter les comparaisons entre pays et suivre l’évolution de la politique commerciale dans la durée. L’étude indique qu’au début des années 90, plus de 75 % des pays africains avaient des régimes restrictifs, et aucun n’avait un régime pouvant être classé comme ouvert. Bien des pays ont entrepris depuis d’ambitieuses réformes commerciales ; à la fin de 1998, la proportion de pays appliquant des régimes restrictifs était tombée à 28 %, tandis que près de 40 % avaient un régime ouvert. Les régimes commerciaux en Afrique restent néanmoins plus restrictifs que ceux d’autres régions (graphique 1). Les droits de douane, variable la plus couramment utilisée pour mesurer le degré de restriction des échanges, sont plus élevés — 20 % en moyenne — en Afrique qu’ailleurs.
    Des politiques commerciales transparentes, libérales et tournées vers l’extérieur sont essentielles pour attirer les investissements étrangers. Les entrées de capitaux privés ont beaucoup moins augmenté en Afrique que dans les autres régions en développement, et l’Afrique n’a pas profité des avantages qui accompagnent souvent ces apports — transferts de technologie et de compétences de gestion et d’organisation et création d’emplois. Entre 1980 et 1997, les apports de capitaux privés sont passés de 6 milliards de dollars à seulement 16 milliards en Afrique, alors qu’ils ont bondi de 12 milliards de dollars à 140 milliards pour l’ensemble des pays en développement.
    La dépendance de l’Afrique à l’égard des produits de base n’est pas en soi le principal problème. Les termes de l’échange des exportations africaines se sont détériorés, de quelque 15 % peut-être, au cours des deux dernières décennies.
    Cependant, tandis que le commerce des produits de base exportés par l’Afrique a augmenté plus lentement que le commerce mondial total, il a tout de même sensiblement progressé.
    Le problème est que l’Afrique voit sa part de marché décroître et qu’elle est lente à se placer sur de nouveaux marchés d’exportation. Si elle avait maintenu sa part de marché au niveau de 1980, ses exportations hors pétrole se seraient élevées à plus de 150 milliards de dollars en 1997 au lieu des 62 milliards enregistrés.

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