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Mme Elisabeth Ouédraogo, Coordonatrice du CIEFFA : “Des disparités grèvent largement l’équité de l’universalisation de l’éducation”

Publié le mercredi 6 juillet 2005 à 07h31min

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La balance de l’éducation penche toujours en défaveur des filles malgré les nombreux engagements pris par les pays ces dernières années pour atteindre une parité entre les sexes.

Le forum de Dakar en 2000 sur l’éducation pour tous (EPT) avait préconisé l’élimination des disparités entre les sexes au primaire et au secondaire en 2005 et l’instauration de l’égalité d’ici 2015. Mme Elisabeth Ouédraogo, la coordonatrice du Centre international pour l’éducation des filles et des femmes en Afrique (CIEFFA), revient sur les ambitions et les réalités de l’éducation des filles en Afrique et au Burkina en particulier.

Sidwaya (S.) : Vous avez participé à la mi-juin à Dakar au forum régional sur l’éducation pour tous .Que retenez vous de cette rencontre ?

Elisabeth Ouédraogo (E.O.) : Des contenus des présentations suivies de discussions des différents rapports, des échanges lors des panels, je retiens que des progrès certains et même notables ont été effectués depuis 2000 en terme d’accès à l’éducation qui est actuellement de 9 enfants sur 10 ; que le maintien des enfants dans le système reste une préoccupation de taille parce que 4 enfants sur 10 ne terminent pas le primaire de même que l’aspect parité.

En terme d’équité, il a été noté de nets progrès ; toutefois les disparités géographiques et économiques grèvent largement l’objectif d’équité que sous-tend le principe de l’universalisation de l’éducation. Il y a aussi d’une manière générale les aspects amélioration de la qualité qui restent préoccupants.

S. : Un des six objectifs de l’EPT porte sur la parité gargons-filles dans l’éducation. Ou en est-on actuellement avec cet objectif dans les pays africains ?

E.O. : Pour revenir à la parité, on sait que l’objectif n° 5 de l’EPT est centré sur cet aspect de l’élimination des disparités entre les sexes au primaire et au secondaire d’ici 2005 et l’instauration de l’égalité d’ici 2015. Le rapport mondial de suivi sur l’Education pour tous en 2003/2004, intitulé : "genre et éducation pour tous, le pari de l’égalité" , a fait un état de la situation par rapport à cette question. Notre siège du CIEFFA a d’ailleurs abrité en avril 2004 la cérémonie de lancement de ce rapport au Burkina Faso présidée par le ministre de l’Enseignement de Base et de l’Alphabétisation, Mathieu Ouédraogo. Le tableau présenté dans ce rapport et intitulé : “probabilité d’atteindre l’objectif de parité entre les sexes, fixé pour 2005”, en Afrique fait ressortir que, 2 pays seulement, l’Egypte et la Mauritanie avaient de bonnes chances d’atteindre cet objectif. Comme on le constate, c’est bien maigre. Au dernier forum de Dakar, un exposé a été fait sur l’expérience de la Mauritanie et nous n’avons pas entendu dire que la Mauritanie a gagné le pari de la parité. Quelques chiffres nous ont été donnés concernant 2003-2004. Le taux brut de scolarisation des filles a enregistré une valeur de 97,9% à 3,8 points au-dessus de celui des garçons ; un taux de participation des filles de 49,4% ; un taux de redoublement supérieur à celui des garçons mais en baisse ; par contre un taux de rétention supérieur à celui des garçons.

Pour 2015, des pays comme le Botswana, la Namibie, la Gambie, le Ghana, l’Ouganda, le Congo ont de bonnes chances d’atteindre l’objectif n° 5 de l’EPT en son aspect égalité.

La grande majorité des Etats africains se trouvent dans la gamme des pays qui risquent de ne pas atteindre cet objectif d’ici à 2015.

S. : Au regard des conclusions du forum de Dakar, quelles sont les actions que peut mener le CIEFFA pour atteindre cet objectif sur la parité ?

E.O. : Le CIEFFA a contribué depuis 2004 par des résultats des études qu’il met à la disposition des pays pour atteindre cet objectif. En effet, à partir de sa publication : “Inventaire des expériences novatrices en matière d’éducation des filles et des femmes en Afrique de l’Ouest et du Centre”, le CIEFFA a fait réaliser et publier une étude de cas détaillées de trois des expériences les plus porteuses dudit inventaire en vue de leur mise en échelle dans les pays africains où la situation de scolarisation est encore très mauvaise afin d’accélérer l’éducation des filles.

Le CIEFFA va bientôt publier un guide sur le recrutement paritaire dans l’éducation formelle et non formelle. Il a en cours, l’élaboration d’un guide sur la prise en compte de la dimension genre dans les activités éducatives dans les pays africains, pour ne citer que cela. Le CIEFFA a aussi identifié d’autres activités qui vont contribuer à l’atteinte des objectifs de l’EPT et qui sont consignées dans son programme d’action.

S. : Quelle est la réalité au Burkina Faso en ce concerne l’éducation des filles ?

E.O. : Dans un document officiel du ministère de l’Enseignement de base et de l’Alphabétisation, relatif à la promotion de l’éducation des filles au Burkina Faso, on peut lire qu’en 2004-2005 le taux brut de scolarisation des filles est de 51,1% contre 62,3% pour les garçons.

Mais ces chiffres ne montrent pas tout le progrès qu’il y a eu depuis la mise en œuvre du Plan décennal de développement de l’Education de base (PDDEB). En effet, le taux brut de scolarisation des filles est passé de 41,05% en 2002-2003 à 51,6% en 2004-2005.

Le taux brut d’admission des filles, c’est-à-dire le rapport entre les non redoublants au CP1 et la population des enfants d’âge de 7 ans, est passé de 45, 46 % en 2002-2003 à 67,52% en 2004-2005 contre 60,06% en 2002-2003 et 76,4% en 2004-2005 chez les garçons.

En cinq ans, la progression des filles est supérieure à celle des garçons ; non pas pour dire que les filles vont dépasser les garçons mais pour dire plutôt qu’il y a espoir de combler le plus rapidement possible le fossé voire le gouffre qui sépare actuellement la situation des garçons de celle des filles.

La parité fille garçon a évolué. Elle est passée de 0,755 en 2001-2002 à 0,80 en 2004-2005. Bien sûr nous sommes loin de l’indice 1 qui est le chiffre attendu en terme de rapport filles/garçons, la parité étant atteinte quand le rapport entre le nombre de filles et le nombre de garçons donne 1. Mais connaissant le chemin qui nous reste à parcourir, avec la détermination politique des autorités de notre pays et l’appui des partenaires, les stratégies doivent être multipliées, les moyens renforcés pour nous permettre de parvenir à la parité, passage obligé de l’autre volet de l’objectif de l’égalité et cela dans des délais acceptables.

Propos recueillis par
Hamado NANA


Le CIEFFA en bref

Le Centre international pour l’éducation des filles et des femmes en Afrique (CIEFFA) est une institution publique des Etats africains sous l’égide de l’Union africaine. Le Centre qui a son siège à Ouagadougou, a pour objectif général de "promouvoir l’éducation des filles et des femmes en vue de leur pleine participation à l’élimination de la pauvreté et à l’avènement d’un monde de paix pour un développement humain durable".

Sa création s’inscrit dans les stratégies régionales et sous régionales de l’UNESCO pour la promotion de l’éducation des filles et des femmes en Afrique. Le CIEFFA a à son actif la réalisation de plusieurs formations, études et publications.

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