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Gouvernance au Burkina : « Il faut, de façon urgente, construire un élan national … », Dr R. Seydou Ouédraogo, directeur exécutif de Free Afrik

Publié le mercredi 10 janvier 2018 à 20h47min

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Gouvernance au Burkina : « Il faut, de façon urgente, construire un élan national … », Dr R. Seydou Ouédraogo, directeur exécutif de Free Afrik

Institut de recherche, engagé depuis quelques années à produire des études pour servir la formation des politiques publiques, Free Afrik est auteur de plusieurs publications scientifiques dans son domaine d’intervention. Ainsi, après son rapport « Burkina Faso 2016/2017 : s’éloigner du précipice, engager le renouveau », l’institut annonce « Réarmer la gouvernance ». C’est en prélude à la sortie de ce rapport, qu’il se tient du 10 au 12 janvier 2018 à Ouagadougou, un atelier avec les « acteurs stratégiques » dans le but d’enrichir ledit document qui sera mis à la disposition du public dans une dizaine de jours.

L’institut Free Afrik s’est engagé dans le programme « Présimètre » avec un projet soutenu par Diakonia et l’Union européenne (UE) visant à assurer un travail d’évaluation, de suivi-évaluation scientifique et citoyen du Plan national de développement économique et social (PNDES) via trois manières. Il s’agit d’abord de produire des études, ensuite partager les résultats de ces études avec les « acteurs stratégiques » de la société et, enfin, aller dans le débat public pour permettre aux citoyens de former leur opinion sur la mise en œuvre des politiques publiques au Burkina, notamment celles mises en œuvre dans le cadre du PNDES.

« Aujourd’hui, nous restituons deux études qu’on a fusionnées en une, qui portent, toutes deux, sur la gouvernance. D’une part, la gouvernance économique, entendez par-là, la lutte contre la corruption et d’autre part, la gouvernance sociale, c’est-à-dire la problématique des grèves (dialogue social), la gouvernance sécuritaire (défi terroriste) », a précisé le directeur exécutif de Free Afrik, Dr Ra-Sablga Seydou Ouédraogo. Il réunit les « acteurs stratégiques » de la société (syndicats, administrations publiques, secteur privé, autorités coutumières et religieuses, presse, organisations de la société civile…).

L’atelier vise donc à permettre aux acteurs (participants) de discuter et enrichir les résultats que Free Afrik a établis dans cette sur la gouvernance économique (lutte anti-corruption), la gouvernance sociale (grèves et dialogue social) et sur la gouvernance sécuritaire. « Nous avons considéré que notre travail de suivi-évaluation du PNDES devrait commencer par la gouvernance, pour plusieurs raisons. La première est que la gouvernance est le premier axe du PNDES. Ensuite, tous les autres résultats sont conditionnés par cette gouvernance », justifie Dr Ouédraogo.

Avoir le courage d’opérer des réformes !

Le directeur exécutif de Free Afrik, Dr Ra-Sablga Seydou Ouédraogo

Ainsi, en attendant le contenu de ce rapport, le directeur exécutif de Free Afrik confie qu’au plan de la gouvernance économique, « nous notons des avancées importantes depuis quelques années sur le chantier de la lutte contre la corruption », notamment en matière de lutte contre la corruption (référence faite à la loi anti-corruption, qu’il qualifie de ‘’très bonne loi’’, qui donne une définition ample du phénomène, qui assure entre autres un rôle majeur à l’ASCE-LC).

Selon Dr Ra-Sablga Seydou Ouédraogo, les sondages d’opinions réalisés par le REN-LAC, mais aussi le travail de Transparency international, montrent ces dernières années, la majorité de la population a le sentiment que la corruption recule. « Ce sont des perceptions, ce n’est pas exactement la mesure de la corruption, mais ce sont de bonnes nouvelles, parce que les perceptions sont importantes pour la gouvernance », relativise-t-il.

« Par contre, il y a des chantiers importants à engager tout de suite ; la réforme de l’ASCE-LC doit être engagée avec plus de célérité, il y a des textes qui traînent, il faut qu’on les adopte vite », recommande-t-il.

De son avis, il faut donner l’autonomisation financière, indispensable à cette autorité, pour que la lutte contre la corruption ait vraiment la vigueur requise. « Il nous semble que c’est le chantier le plus important dans notre pays, si nous voulons avoir deux choses : de l’argent (des ressources publiques importantes, parce que l’Etat perd plusieurs dizaines de milliards par an à cause de la fraude massive) et la crédibilité de la gouvernance. Le vrai problème, ce n’est pas seulement que la corruption nous prive de ressources publiques indispensables, c’est que la corruption sape la crédibilité, la légitimité de la gouvernance et par conséquent, on n’est pas en mesure d’engager des reformes considérables parce que la crédibilité est faible, la légitimité manque parfois », soutient Dr Ra-Sablga Seydou Ouédraogo.

Au plan de la gouvernance sécuritaire, le directeur exécutif de l’institut note une « exacerbation de la situation inédite » de défis terroristes. Il énumère plus d’une centaine d’attaques depuis avril 2015, plus d’une centaine de morts et une « situation extrêmement grave » dans la partie septentrionale du pays avec les mines anti-personnelles. « Les mines anti-personnelles, il faut les poser aujourd’hui, et elles vont avoir des effets plusieurs années, voire des décennies après. Nous pensons qu’il faut, de façon urgente, construire un élan national pour faire en sorte qu’on arrive à bout de ce défi, nous sommes profondément convaincus que ce n’est pas impossible au Burkina Faso de se sortir de cette situation », a-t-il expliqué.

Un défi sécuritaire majeur

De gauche à droite : le directeur exécutif de Free Afrik, Dr Ra-Sablga Seydou Ouédraogo ; le représentant de la délégation de l’Union européenne, Thomas Huyghebaert et le directeur pays de Diakonia, Luther Yaméogo

« Cependant, nous notons quelque chose de grave : dans notre pays, nos Forces de défense et de sécurité sont de plus en plus (c’est la nouveauté), en train de s’aliéner le soutien et la collaboration des populations locales. Il y a des rapports qui parlent d’exactions, il y a des témoignages très clairs qui indiquent que des populations, parce qu’elles appartiennent à la partie septentrionale de notre pays, qui se sentent lésées, piétinées, parfois blessées, voire tuées, par nos forces régulières. Je ne leur jette pas la pierre, mais j’indique que c’est une situation extrêmement grave parce que c’est un paramètre critique de la lutte contre le terrorisme. Si vous voulez lutter contre le terrorisme, il faut indispensablement que votre population soit avec vous, et ça, il faut le traiter, faire en sorte qu’on ait un élan national pour aller à la lutte », révèle Dr Ra-Sablga Seydou Ouédraogo.

Le sujet sur la gouvernance sociale, les grèves et le dialogue social sera aussi scruté. « Vous connaissez la situation inédite… Il est impératif qu’on trouve des voies et moyens pour remettre le pays au travail. Il est impératif que des discussions s’engagent, de façon beaucoup plus crédible, beaucoup plus professionnelle, que nous trouvons plus vite des voies et moyens pour sortir de la situation actuelle et remettre le pays au travail », a lancé Dr Ouédraogo.

Le directeur-pays de Diakonia, Luther Yaméogo, a salué l’initiative de ce dialogue démocratique. « C’est déjà un gage de redevabiolité, puisqu’il s’agit d’un exercice de redevabilité, de responsabilité assumée et d’imputabilité politique que dire ce qu’on fera, de faire ce qu’on a dit et de revenir dire qu’on a fait ou comment on l’a fait », a soutenu M. Yaméogo, magnifiant « l’intrépidité et la perspicacité » des productions de l’institut Free Afrik. Pour lui, le thème « Réarmer la gouvernance » autour duquel l’institut invite à réfléchir est, lui-même, porteur d’un programme.

« Il n’y a pas mieux qu’un séminaire qui rassemble des acteurs clés de la société civile, du secteur privé, des institutions gouvernementales de contrôle à revoir des analyses et discuter ensemble pour voir comment mieux avancer. (…). Qu’un institut indépendant puisse discuter avec tous les autres acteurs pour approfondir encore ses études pour ensuite les présenter au public est un élément extrêmement important dans une démocratie », a jugé le chef de la section gouvernance de la délégation de l’Union européenne au Burkina, Thomas Huyghebaert.

Cet atelier s’achève le vendredi, 12 janvier 2018 par un panel à partir de 16 heures à la DGOOP pour échanger sur le constat que Free Afrik a fait sur les grèves et ses propositions qu’il va discuter avec les syndicats, le secteur privé et le gouvernement.

OL
Lefaso.net

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