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...Et après la visite de Macron ?

Publié le lundi 4 décembre 2017 à 18h54min

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...Et après la visite de Macron ?

Ceci est une tribune de Karim Traoré suite à la visite du président français Emmanuel Macron au Burkina Faso.

Le jeune président français Emmanuel MACRON a effectué une visite d’amitié et de travail à Ouagadougou du 27 au 29 novembre 2017. Il a eu droit à un accueil digne de son rang, mais en marge il y a eu des remous.

Que retenir de cette visite officielle au-delà du communiqué conjoint de satisfecit ? E.MACRON est venu, a parlé et est reparti, nous laissant dans nos dissensions et contradictions manichéennes. Jamais visite d’un chef d’état étranger n’a soulevé autant de passion et de polémique.

De son discours fleuve prononcé à l’université Ouaga1 Joeph KI-ZERBO, il ressort un nouvel évangile selon saint Emmanuel : la fin d’une politique africaine de la France, la coopération plus efficace, l’émigration, la démographie, la lutte contre le terrorisme etc… Attendons de voir si ces déclarations de bonnes intentions vont résister à la realpolitik.

Devoir de mémoire pour les crimes de la colonisation, du néo-colonialisme oui, mais il ne faut pas se complaire dans le complexe du passéisme’’ et dans une contestation stériles à coup de ‘’ anti-isme’’ forcenés. La clé c’est le travail pour occuper sa place dans le concert des nations. Les USA ont été colonisés par l’Angleterre ; qui s’en souvient encore ?

Les États-Unis se sont vite défaits de la tutelle britannique pour devenir la première puissance mondiale crainte et respectée. Il y a à peine quelques décennies, la Chine était le terrain de jeu des puissances dites impérialistes et pataugeait dans le sous-développement ; aujourd’hui c’est la deuxième puissance économique du monde. Ce résultat spectaculaire, c’est par le travail ! Travaillons donc sans complexes à rendre nos ÉTATS africains plus forts ! Les relations entre États n’ont jamais été un jeu d’angélisme, tout est une question de rapport de force, et ce, depuis la nuit des temps. De GAULLE a été sans ambages dès le début sur la politique étrangère de la France : " La France n’a pas d’amis, elle n’a que des intérêts ’’ Ce n’est pas cynique mais cela a plutôt l’avantage d’être on ne peut plus clair, franc.

Aujourd’hui E.MACRON, comme tous les présidents français qui ont succédé à De Gaulle quel que soit leur bord idéologique, défend les intérêts de son pays. Il tient un discours décomplexé, de vérité. C’est de bonne guerre. En face, c’est à nous de travailler à défendre nos intérêts supérieurs ; c’est ce qui fait défaut depuis nos indépendances jugées factices. N’accusons pas facilement, éternellement la France des maux passés, actuels et à venir qui entravent notre développement. Il faut s’assumer, tout de suite et maintenant. Les incantations et slogans démagogiques et populistes n’ont jamais développé un pays. Il est temps de passer à des actions plus concertées et productives à long terme.

Le diable est souvent dans les détails et l’histoire est souvent cruelle. Si de la visite de F.MITTERAND le 17 novembre 1986 au Burkina Faso, l’histoire retient surtout la joute oratoire de l’éloquent camarade président Thomas SANKARA à l’encontre du vieux chef gaulois, cette fois ci, la piteuse prestation des étudiants burkinabè ce 28 novembre 2017 à ‘’l’amphi libyen’’ dans la phase de questions au Président MACRON ne pourra être passée sous silence. L’intervention des étudiants a été lamentable et indigne de l’amphithéâtre jugé à priori marxiste et panafricain par l’hôte du jour. Ce n’est pas seulement la pertinence des questions posées qui laisse à désirer (au regard des vrais enjeux stratégiques de la communauté estudiantine), mais c’est surtout le langage approximatif, douteux, médiocre de ces étudiants qui a été un naufrage intellectuel. La responsabilité de ceux qui ont sélectionné ces étudiants (peu importe le procédé) est entière pour la légèreté avec laquelle ils ont géré cette affaire virtuellement.

C’est quand même ahurissant de demander avec désinvolture à des étudiants sortis d’’un choix aléatoire d’aller se préparer tout bonnement sans encadrement, sans vérifier leur niveau dans la prise de parole en public. Au lieu de la crème de l’élite intellectuelle de ce temple du savoir, il semble qu’on a eu affaire à la lie des étudiants à une exception près. C’est là le nœud du problème. Il n’était pas superflu de faire une ’’répétition’’ avec ces étudiants avant ce grand ‘’oral’’ face à un rhéteur aussi redoutable que Macron. Beaucoup a déjà été dit sur cette déconvenue, mais il faut continuer à stigmatiser cette médiocrité qui frise l’insouciance afin que toutes les conséquences en soient tirées pour le futur.

Les autorités auraient tort de faire passer par pertes et profit cette bévue. Il faut faire un bilan sans complaisance de cet épisode et sévir contre les responsables, organisateurs, qui ont travaillé avec tant d’amateurisme et de dilettantisme pour nous servir ce fiasco retentissant qui ternit l’image du pays du très charismatique et cultivé Thomas SANKARA.

Ceci étant dit, les contestataires à outrance, doivent savoir souvent mettre un peu d’eau dans leur vin pour aller à l’essentiel même si nous sommes en démocratie. On ne combat pas l’impérialisme, le néo-colonialisme et tous les ‘’isme’’ tant décriés à coups de jérémiades puériles. Cet activisme débordant ne peut produire que le boucan médiatique, symbolique et sensationnel. Le milieu jeune et estudiantin est réputé par essence bouillonnant, mais la contestation radicale à outrance est parfois contre-productive in fine. On peut adapter sa stratégie en fonction de l’interlocuteur en faisant preuve de discernement pour aboutir à un résultat satisfaisant sans verser dans l’extrémisme dogmatique.

Il faut surtout donner sa contribution de façon responsable par le travail de tous les jours, chacun à son niveau, pour rendre notre pays plus fort économiquement et tout le meilleur suivra pour tous. Chaque Burkinabè, quelle que soit sa position, doit apporter sa modeste contribution dans la gestion de la cité au lieu de demeurer en spectateur suiviste et indifférent dans la marche de la nation ; comme le disait THUCYDIDE : « Un homme ne se mêlant pas de politique mérite de passer, non pour un citoyen paisible, mais pour un citoyen inutile ».

TRAORE Karim de Labola
karimdelabola@yahoo.fr
226 70 23 02 28

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Vos commentaires

  • Le 5 décembre 2017 à 07:15, par Issaka En réponse à : ...Et après la visite de Macron ?

    Bravo pour cette analyse lucide et toute en mesure que je partage entièrement.
    Elle se démarque nettement de la "diatribe exacerbée" (habituelle ici) supposée pan-africaniste et censée combattre je ne sais quel impérialisme .
    Bravo monsieur et surtout continuez à modérer vos propos car comme dit Talleyrand,"tout ce qui est excessif est insignifiant"

  • Le 5 décembre 2017 à 07:48, par Pierre En réponse à : ...Et après la visite de Macron ?

    "Le seul bon wack est le travail." Félicitations Karim TRAORE pour ce recadrage salutaire.

    • Le 5 décembre 2017 à 10:58, par marthe En réponse à : ...Et après la visite de Macron ?

      Analyse assez claire et pertinente .j apprécie cette manière modéré de s exprimer .vivement que le peuple et surtout nous jeunes prenions conscience que personne ne développera notre patrie a notre place. Félicitation TRAORE et continu surtout.

  • Le 5 décembre 2017 à 09:44, par Patrick O’CORRAIN En réponse à : ...Et après la visite de Macron ?

    La visite du Président Français au Burkina Faso est analysée avec modération et discernement par Karim de Lebola TRAORE . Celui-ci s’adresse bien davantage aux forces vives de son peuple qu’aux rhétoriques écrites d’Emmanuel MACRON, lequel maîtrise mal ses comportements improvisés...
    Ayant un projet écosophique (les 3 écologies : environnementale, sociétale et individuelle) qui pourrait se tourner vers l’Afrique, je prendrai prochainement contact avec ce éditorialiste talentueux pour en discuter. Cordialement O’Corrain (Français d’ascendance irlandaise)

  • Le 5 décembre 2017 à 09:46, par Sogossira Sanou En réponse à : ...Et après la visite de Macron ?

    Merci pour cet écrit. Ce jeune homme là, il a reussi son coup de PUB ; vous pouvez en avoir la preuve de la distraction qu’il a offerte ? Que toute l’Afrique soit braquée sur lui. Et malheureusement, nous l’avons tous fait, moi aussi à travers la lecture des diatribes qui sont suscitées çà et là.
    Mais s’il avait réussi à semer une certaine diversion au Faso, le frere du Ghana ( Nana Akufo-Addo) a lavé l’honneur de toute l’Afrique en lui faisant mettre la queue entre les pattes (image du chien). Au moins il rentre à la maison la queue entre les pattes
    C’est aussi cela la soldarité agissante africaine.
    Je souhaite que des reactions de ce genre puissent laver l’honneur du patriarche Bob du côté du Zimbabwe.
    Il y a de la matière à faire pour ce qui s’y passe et qui n’est qu’une copie conforme de l’original de ce que blaise avait en son temps fait àThomas.
    Ouvrons bien les yeux et le bon oeil. Venerons nos HEROS que nous ne devons jamais jeter en pature à l’occident à travers les comportements peu dignes qui sont courants actuellement.

  • Le 5 décembre 2017 à 10:28, par marthe En réponse à : ...Et après la visite de Macron ?

    Analyse pertinente et claire de la situation actuelle TRAORE et j apprécie cette manière modéré de s exprimer.

  • Le 5 décembre 2017 à 11:04, par marthe En réponse à : ...Et après la visite de Macron ?

    Analyse pertinente et claire de la situation actuelle TRAORE et j apprécie cette manière modéré de s exprimer.vivement que le peuple prenne conscience et surtout la jeunesse que personne ne viendra développer notre pays a notre place. Félicitation et continu dans cette lance.

  • Le 5 décembre 2017 à 11:07, par maan ne sugri En réponse à : ...Et après la visite de Macron ?

    Ce qui m’a choqué dans la prise de parole des étudiants, c’est le faite de n’avoir pas bien préparer les étudiants dans cette prise de parole. Il y a une pédagogie dans la manière de s’adresser à une personnalité du rang de MACRON mais je dirai une chose. En 1979 -1982, les paysans de l’ancien département de Bagare dans le Passore regroupant les communes actuelles de La-Toden et Bagare se défendaient mieux devant des missions d’expatriés venus de Ouaga pour les entretenir sur n’importe quel sujet de développement et parfois même sur des sujets politiques si des questions de ce genre leur avaient été posées. Si ces paysans étaient capables, tout simplement parce que les agents de terrain (Agriculture) leur avaient appris, un langage de vérité dans le tricte respect de l’interlocuteur mais surtout dans le professionnalisme. Pourtant ici, nous n’étions pas dans un marché de Katr Yaar, ni de goughin yaar, ni de bascuit Yaar encore moins de sankaryaare. Il devait y avoir des consignes claires, ne pourra poser sa question l’etudiant qui l’avait préparée et soumise à un groupe de professeurs devant apprécier non seulement la pertinence mais surtout sa courtoisie. A bon entendeur, salut. Seul le travail de préparation paie.

  • Le 5 décembre 2017 à 22:51, par rochballur En réponse à : ...Et après la visite de Macron ?

    j ne suis pas d’acord avec toi t penses que ces etudiants de maintenant peuvent etre soumis a ce type de test ? des gens qui se disent tout connaitre ou qui refusaient meme la venue du president Macron au burkina ? c’est. bien fait pour eux comme ca

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