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Lutte contre la dégradation des terres : ‘’ Il faut appuyer les communautés rurales, villageoises à fructifier les potentiels qu’ils ont ’’, invite Mamadou Moussa Diakhité, administrateur principal à l’Agence du NEPAD

Publié le lundi 19 juin 2017 à 00h25min

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Lutte contre la dégradation des terres : ‘’ Il faut appuyer les communautés rurales, villageoises à fructifier les potentiels qu’ils ont ’’, invite Mamadou Moussa Diakhité, administrateur principal à l’Agence du  NEPAD

Le 15 juin 2017, le Burkina a accueilli la célébration de la journée mondiale de lutte contre la désertification au plan mondial. Pour l’occasion, Ouagadougou a mobilisé, outre des Chefs d’Etat, des responsables d’institutions internationales sur la question. Présent à Ouagadougou dans ce cadre, l’administrateur principal du programme Gestion durable des terres et des ressources en eau à l’Agence du NEPAD, Mamadou Moussa Diakhité. Par cet entretien, il a bien voulu revenir sur des initiatives lancées au plan africain pour la prévention des terres non-dégradées et la lutte contre la désertification. Selon Mamadou Moussa Diakhité, le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), qui est une Agence technique de l’Union africaine, a reçu un mandat pour travailler dans la restauration des terres. Entretien !

Lefaso.net : Vous venez de sortir d’un Colloque de haut niveau sur le thème mondial de la journée mondiale de lutte contre la désertification « Notre Terre. Notre Maison. Notre Futur ». Que retenir d’essentiel à la fin des travaux ?

Mamadou Moussa Diakhité : La première chose à retenir, c’est un engagement très fort, au plan politique. On a vu trois présidents de pays du Sahel qui ont été présents pour appuyer cette initiative qui vise à lutter contre la dégradation des terres et leur rendre leur potentialité de productions économiques dans ces pays.

Lefaso.net : Qu’est-ce que le citoyen lambda doit comprendre de ce thème de la commémoration 2017 : « Notre Terre. Notre Maison. Notre Futur » ?

Mamadou Moussa Diakhité : Tous les citoyens des pays qui sont affectés par la dégradation, non seulement en Afrique, mais bien au-delà, peuvent comprendre avec ce genre d’initiatives, qu’il y a un moyen de rendre les terres qui sont dégradées à la production, pour qu’elles soient rentables, non seulement pour les communautés, mais aussi pour faire des investissements économiques.

Lefaso.net : Les défis à l’issue de ce colloque ?

Mamadou Moussa Diakhité : C’est de persuader ou d’inviter les pays africains qui restent, à s’engager dans cet effort de restauration, de s’engager de la façon la plus formelle possible. En plus des 23 pays qui ont déjà adhéré, on est en contact avec plusieurs autres pays africains, on est dans les démarches techniques, les échanges de documents, en espérant que l’engagement formel va nous parvenir très bientôt.

Lefaso.net : A la faveur du forum d’investissements pour la restauration des Forêts et des paysages dégradés, tenu à Kigali les 16 et 17 mai dernier, vous avez annoncé que 22 pays africains se sont engagés pour restaurer, d’ici à 2030, 75 millions d’hectares. Sur quels leviers comptez-vous appuyer pour que cet engagement soit une réalité ?

Mamadou Moussa Diakhité : Effectivement, à ce jour, il y a 23 pays, qui ont rejoint une initiative, qui est complémentaire de celle-là, qui s’appelle AFR 100 (ou African Forest and Landscape restoration initiative/Initiative de restauration des Forêts et des paysages africains ; l’initiative est conduite par le Secrétariat du NEPAD : Ndlr). L’objectif, c’est de restaurer 100 millions d’hectares de terre d’ici à 2030 en Afrique. Cette initiative s’inscrit dans une autre beaucoup plus globale, qu’on appelle « le défi de Bonn (qui est un effort mondial dont l’objectif est de restaurer 150 millions d’hectares de terres dégradées et déboisées d’ici à 2020 et 350 millions d’hectares d’ici à 2030, ndlr) » qui est au plan mondial, en Amérique latine et en Asie. Les pays qui ont rejoint cette initiative bénéficient d’abord d’une évaluation nationale de leurs terres dégradées, et en même qu’il y a cette évaluation qui se fait, il y a l’identification des opportunités de restauration des terres, des forêts et des ressources en eau. Et d’ailleurs, nous avions eu une réunion technique ici à Ouagadougou, il y a deux mois de cela (à la mi-avril) pour préparer un rapport sur l’état de la dégradation et les opportunités de restauration des terres en Afrique. On espère que ce rapport sera prêt pour être présenté officiellement lors de la conférence tripartite de la désertification qui se tiendra en Chine au mois de septembre.

Lefaso.net : Quelle sera la séquence de l’évaluation à l’échelle nationale ?

Mamadou Moussa Diakhité : Comme c’est un processus relativement lent, on projette que l’évaluation se fasse entre trois et cinq ans, pour donner toujours un état des lieux de la dégradation, mais également des progrès qui seront enregistrés en matière de restauration des terres.

Lefaso.net : On retient également qu’au moment où cette offensive est annoncée, il y a le phénomène d’accaparements des terres, qui est une réalité encore plus poussée dans nombre de pays africains. Cette situation ne sera-t-elle pas une limite à votre élan ?

Mamadou Moussa Diakhité : Avec ce phénomène, ce qu’il faut voir, c’est de bien distinguer les acquisitions de terres qui sont légales, qui se conforment aux lois du pays. Et nous, au NEPAD, c’est cela notre mandat au plan continental ; c’est qu’on essaie toujours de créer des espaces de dialogue. S’il y a des différends, qu’on s’asseye pour déterminer la situation de chaque cas. Cela permet aussi de discuter d’un problème beaucoup plus global, qui est l’accès à la terre des communautés des femmes et des jeunes ; comment leur assurer qu’ils peuvent compter sur la terre sur laquelle ils cultivent, ils travaillent et qu’il n’y aura pas de changement à tout moment. Donc, cette sécurité va favoriser aussi la production, l’agriculture et permettre aussi de fixer les populations dans leurs communautés respectives.

Lefaso.net : On ne peut évoquer cette question sans faire un lien avec la COP 21 (accord de Paris sur le climat), d’où les Etats-Unis viennent de se retirer. Cette donne n’aura-t-elle pas un impact négatif sur votre volonté de lutte ?

Mamadou Moussa Diakhité : Je crois que les Chefs d’Etat aujourd’hui ont montré qu’au contraire, cela va redoubler la détermination des pays, non seulement africains, mais de l’ensemble de la communauté internationale. On a vu qu’en parallèle à cette décision, les Etats individuels américains ont réaffirmé leur engagement à l’accord de Paris et de Marrakech sur les changements climatiques.

Lefaso.net : Ce qui est reproché à ce genre d’initiatives, c’est le manque de contact réel avec les populations, la masse. Comment comptez-vous assurer cette jonction, quand on sait que l’intérêt ici, ce sont les populations, dans les zones rurales … ?

Mamadou Moussa Diakhité : Je pu vous assurer qu’il y a des contacts quotidiens avec les pays. Ce n’est pas le contact avec les populations qui manque ; il y a le travail d’un côté, qui est fait et il y a le travail avec les populations. C’est une question de communication. C’est pour cela qu’avec les interactions, comme avec vous aujourd’hui (les médias), on espère que le message va porter et que les populations africaines vont voir et s’intéresser à ce que des structures comme l’Union africaine, le NEPAD font au quotidien.

Lefaso.net : Pour terminer ?

Mamadou Moussa Diakhité : Le principal message, c’est de continuer à appuyer les communautés rurales, villageoises à fructifier les potentiels qu’ils ont. Les encourager à investir dans la production du karité, du ‘’monringa’’, de balanites, de la gomme arabique ,etc., avec des ressources relativement limitées, en misant sur la collaboration entre les communautés villageoises, rurales et les gouvernements, les ONG (Organisations non-gouvernementales) qui sont actives dans le domaine. On peut donner de quoi investir aux femmes et aux jeunes dans nos pays, pour qu’ils restent et ne soient pas tentés par une immigration non contrôlée qui nous cause beaucoup de dommages.

Propos recueillis par Oumar L. Ouédraogo
(oumarpro226@gmail.com)
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