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Crise ivoirienne : Mbeki a-t-il réussi là où tout le monde a échoué ?

Publié le vendredi 3 juin 2005 à 07h44min

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Dans cette déclaration, "Le Zoung" nous amène dans les profondeurs des crises ivoirienne et togolaise. En ce qui concerne la crise ivoirienne, il pense qu’il n’y aura de solution que si l’ONU supervise la prochaine élection présidentielle. Quant au Togo, selon lui, la solution de la CEDEAO a été une stratégie qui a permis à Faure de remporter les élections.

La crise qui divise les frères Ivoiriens est si profonde que de nombreux chefs d’Etat et de diplomate s’y sont immergés. D’Accra à Marcoussis en passant par Lomé et Abuja, ce n’est pas la volonté de réconcilier les frères ennemis qui a manqué.

Les raisons des échecs répétés

En rappel, c’est l’ivoirité, ce concept né au lendemain de la disparition du vieux Houphouët pour écarter l’homme qui a dirigé le pays pendant plus de six mois pendant que le riche président était aux bons soins de grands docteurs en Suisse, qui est à l’origine de la guerre qui a divisé le pays en deux. Même si Henri Konan Bédié était le successeur constitutionnel, Alassane Ouattara, cet expert en économie appelé par Houphouët au chevet de la Côte d’Ivoire au plus profond de sa crise économique, était l’intérimaire du président absent.

Le succès, la popularité et la maîtrise des affaires de l’homme venu du Fonds monétaire international (FMI) inquiétaient l’héritier numéro un, qui n’est pas passé par quatre chemins pour s’autoproclamer président de la république dès l’annonce de la mort de l’inamovible Houphouët. La succession n’a suivi aucune règle de l’art. Ce fut un coup d’Etat qui ne dit pas son nom. La méfiance s’installa et la chasse aux sorcières commença. Bref.

La cause défendue aujourd’hui par les forces nouvelles est très juste si bien qu’il est difficile pour un homme épris de justice d’être indifférent et totalement neutre dans cette affaire. On sait que Laurent Gbagbo n’est pas le géniteur du virus qui a infesté la paix sociale en Côte d’Ivoire, mais il l’a récupéré, défendu et utilisé pour se maintenir au pouvoir. Donc on comprend aisément que la jeunesse de la partie lésée prenne les armes contre lui.

On ne peut mettre en marge de la république une moitié de la population et crier démocratie, justice jour et nuit. C’est ce qui explique en partie les échecs des chefs d’Etat tels que Wade, Kuffor, Obasanjo, Bongo et même le grand naaba (chef) Chirac. Tous sont taxés de connivence avec les rebelles par Gbagbo. C’est Tabo Mbeki, le dernier venu, qui a arraché de lui ce qu’il a refusé aux autres.

Les accords de Pretoria : report ou résolution de la crise ?

Après Accra 1, 2, 3, Lomé, Abuja, Marcoussis, Kleber et on ne sait où encore, on est en droit de se demander ce que Mbeki, le mandataire de l’Union africaine (UA), a bien pu promettre à Koudou Gbagbo pour obtenir de lui l’acceptation de la candidature d’Alassane Dramane Ouattara. Pourquoi avoir perdu tant de temps, d’énergie, d’argent et de vies humaines ? Ce qui est au moins sûr, Gbagbo a plus d’un tour dans son sac. Lesquels ? Un proche avenir nous le dira.

Si la formule médicamenteuse trouvée par le président sud-africain est la même que celle proposée à Faure Gnasingbé du Togo par la CEDEAO pour qu’il accepte de quitter le pouvoir, quitte à y revenir par élection, il faut craindre un rebondissement de la crise au lendemain des élections en Côte d’Ivoire.

Un faux remède pour deux vraies crises

La réaction postélectorale de la CEDEAO fait penser que le remède proposé à Faure était une complicité passive de la Communauté pour lui permettre de remporter les élections. Sinon, comment comprendre que des membres de la délégation envoyée par cette organisation pour superviser les élections se désolidarisent du rapport de mission et s’insurgent contre les déclarations des dirigeants de cette Communauté sur la qualité du scrutin ? Ce remède est inapproprié au mal dont souffre le Togo. Il ne convient pas non plus à la crise ivoirienne.

Ce sera une grave erreur si l’Union africaine, par l’intermédiaire de son « docteur », Mbeki, administre ce même produit à la crise ivoirienne ; il est à craindre que la crise soit à venir. On ne le souhaite pas parce que personne n’y gagnerait. Même pas Gbagbo. Surtout pas l’UA, qui va perdre toute crédibilité si jamais elle reconnaissait des élections truquées, en faveur d’un candidat. Donc, si c’est cela le deal, l’UA doit retourner dans son laboratoire, car ce médicament n’est pas le bon. Par contre si elle adopte une position juste, on aura roulé pour une fois Gbagbo dans la farine, car il lui sera difficile de remporter des élections transparentes. Le peuple ivoirien a besoin de paix et n’entendra qu’un message de paix.

Le pacte de Paris sonne la paix, mais dégage une odeur nauséabonde

Le 18 mai 2005, quatre partis politiques d’opposition (le PDCI de Konan Bédié, Le RDR d’Alassane Ouattara, l’UDPCI du général Guei et le MFA, dirigé par un des pères fondateurs du FPI de Laurent Gbagbo) se sont retrouvés à Paris et ont concocté une coalition pour défaire le parti au pouvoir à l’élection d’octobre 2005 en Côte d’Ivoire si elle a lieu. Cette coalition présente une couleur pas très jolie et dégage une odeur nauséabonde. Si elle était un produit chimique, elle exploserait. Mais en politique, toutes les combinaisons sont permises surtout si c’est pour arriver au pouvoir. Ces partis se sont même partagé le gâteau qui est toujours au feu. On va se régaler.

On se souvient que c’est au moment où Henri Konan Bédié était au pouvoir qu’est né le fameux concept de l’ivoirité (qu’il définit banalement aujourd’hui comme étant le caractère de ce qui est ivoirien) qui a fait d’Alassane Ouattara et de toute la communauté Dioula de Côte d’Ivoire des étrangers chez eux. On se rappelle aussi que c’est le général défunt qui a déchu le prince devenu roi au bord de la lagune Ebriée. Et ils ne sont nombreux, les hommes à pouvoir le lui pardonner. C’est une alliance pas très homogène qu’il faut attendre sur le terrain des opérations pour juger de la bonne foi des uns et des autres.

Un bon remède pour une mauvaise crise, ça existe !

Des élections ont été organisées au Togo, pourtant la crise reste en l’état. On peut espérer que cela va servir de leçon dans le règlement de celle de la Côte d’Ivoire. Il ne suffit donc pas d’organiser des élections. Il faut que les résultats traduisent la volonté populaire. Si la communauté internationale ne veut pas s’embourber en Côte d’Ivoire comme la CEDEAO l’est déjà au Togo, si elle veut une paix durable pour ce pays, cela n’est pas affaire de charlatanisme : au nom d’une ingérence humanitaire, l’ONU doit se saisir du dossier élection dès maintenant et le conduire jusqu’à son terme. Il n’existe pas de solution alternative qui marche. Celui qui s’opposera à cette solution dévoilera lui-même ses intentions. Alors Dame ONU, tu es prévenue !

Le Zoung

Tél : 76 60 23 49/ tasszoungrana@yahoo.fr

Observateur Paalga

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