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<I>Droit dans les yeux</I> : Vous avez dit solidarité ?

Publié le mardi 31 mai 2005 à 07h38min

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La solidarité est l’une des qualités les plus nobles de l’humanité, et dont l’expression est l’aide apportée aux nécessiteux, mais cette solidarité doit être perçue à sa juste valeur. L’aide mondiale en faveur du développement est de l’ordre de 60 milliards de dollars, tandis que les dépenses militaires s’élèvent, elles, à 900 milliards de dollars.

Dans les années 1980, les pays riches avaient promis de céder 0,7% de leur PNB pour contribuer au développement des pays pauvres.

Seulement, l’Amérique n’est jusqu’aujourd’hui, qu’à 0,1% et seul quatre petits pays sont à 0,7% ; et cette aide est encore souvent intéressée : on vous promet par exemple un camion, mais à la seule condition qu’il soit fabriqué dans le pays qui octroie l’aide ; ce pays verse donc une subvention à sa propre industrie avec l’argent annoncé pour l’aide au développement.

Des analyses démontrent que jusqu’à 40% de l’aide globale au développement sont employés pour les études, les voyages et les évaluations des projets par des experts, la plupart du temps expatriés.
Je me sens blessé quand, en congé en Europe, je m’entends dire : "Vous avez reçu tellement d’aide... et vous ne progressez pas".

J’estime l’aide des riches et je les en remercie ; mais qu’ils n’exagèrent pas. Par ailleurs, leurs subsides agricoles tuent notre progrès. Sans cette concurrence déloyale, le Burkina pourrait doubler son PNB dans six ans. Encore une fois, je remercie ceux qui nous aident, mais je leur demande d’inscrire cette aide dans un contexte de solidarité désintéressée et de ne pas exiger une reconnaissance ostensible avec courbettes de la part des aidés.
Que les écologistes donnent un cadeau au dernier bébé 2004 et au premier bébé 2005 à la maternité St-Camille est bien, mais titrer "les écologistes font des heureux" (Le Pays n°51 2005) est un peu trop ! Combaty international offre une ambulance au CSPS : c’est magnifique, mais une page entière avec trois photos dans le plus grand quotidien du Burkina (Le Pays n°3283) est selon moi, exagéré.

"Je ne suis pas colonisable"

La commune de Ouagadougou a remis des fournitures scolaires à 3250 élèves : bravo ! (Le Pays n°3229). Mais écrire que le Secours populaire français (encore une page entière dans Le Pays n°3229) vient avec 10 avions et 35 aviateurs apporter des médicaments d’une valeur de 15 millions de francs CFA à 4 pays est faux.

Ils veulent faire un voyage avec leurs avions dans les quatre pays et ils ont eu la gentillesse (c’est vrai, merci !) d’apporter des médicaments, mais s’ils étaient venus pour nous, ils auraient mieux fait d’envoyer l’aquivalent du coût de leur voyage pour que nous achetions des médicaments !

Voyons, plaçons l’aide dans son vrai contexte : ces trente-cinq aviateurs qui ont apporté des médicaments, c’est très gentil de leur part parce qu’ils ont aussi pensé à nos malades. Mais parler d’un "raid humanitaire" est exagéré et m’humilie.

Un autre exemple : Castel Beer (encore un "raid humanitaire", surtout publicitaire selon moi) (Le Pays n°3234) arrive avec une équipe de 19 personnes, finance un télécentre- cybercafé pour un jeune Burkinabè et un puits dans le centre oasis de Timia au Niger. On ne doit pas exagérer et qualifier cela de "raid humanitaire", bien que ce fût très gentil de leur part, d’avoir aidé quelques personnes.

Je ne veux pas critiquer l’aide à la base, mais je veux critiquer l’aide donnée de manière condescendante. Je ne veux pas critiquer la solidarité, mais je n’aime pas que des gens se prévalent du titre de sauveurs de vies. Heureusement qu’il y a, à l’opposé, des exemples réconfortants : les missionnaires (protestants et catholiques) ont trouvé des milliards de francs CFA pour l’aide et le développement du Burkina. J’en connais un qui a construit plus de vingt-cinq écoles.

Tout cela est bon, très bon, mais se fait avec discrétion : bravo ! Je n’aime pas que l’on m’humilie parce que je suis pauvre : étaler devant tout le monde qu’on m’aide parce que je suis pauvre ce n’est pas respecter ma dignité. On veut parfois même m’imposer, par un don, de faire quelque chose. Je refuse, je ne suis pas colonisable.
Je suis très reconnaissant pour toute aide, aussi infime soit-elle.
Aidons nos riziculteurs et consommons le riz burkinabè.

Bonne nouvelle : Au cours d’une session de l’OMC (Organisation mondiale du commerce), à Doha en 2001, a été admis le principe que les pays pauvres puissent acquérir des médicaments génériques contre le Sida "avant l’expiration officielle du brevet de propriété intellectuelle" (20 ans).
En août 2004, la décision a été rendue effective et le ministre de la Santé du Burkina a entrepris des démarches pour l’acheminement desdits médicaments.

F. BALEMANS B.P. 332 Koudougou (frans_balemans@hotmail.com)
Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 1er juin 2005 à 17:38, par BURKINBI En réponse à : > <I>Droit dans les yeux</I> : Vous avez dit solidarité ?

    Très belle analyse. Le gouvernement Burkinabè doit prendre ses responsabilités et faire en sorte que pour les projets de développement l’on fasse appel à des experts Burkinabè.
    Vu les efforts que fait le Burkina dans la formation en attribuant des bourses d’études à l’étranger se serait un mensonge de dire qu’il manque des compétences dans des domaines dit spécialisés. Allez jetter un oeil dans les archives du CIOSPB et vous verrez que des EXPERTS BURKINABE IL Y EN A !!!
    Le paradoxe est que pour les projets de développement on fait venir des experts étrangers payé très cher et qui souvent n’ont pas le niveau de qualification de ces jeunes Burkinabè formé en France, au Canada et partout en Europe.
    La règle devrait être simple si un organisme veut financer un projet au Burkina alors celà doit être fait avec la coopération des cadres Burkinabè si on doit faire appel à un expert étranger, alors soit !!! mais avec les fonds de l’organisme et celà ne doit pas être déduit des fonds consacré au projet de développement du pays...Ayant fait mes études en Europe, je sais de quoi je parle !!! l’Afrique interesse peu de personnes en occident...seul les experts qui sont grâcement payé pour des missions de quelques semaines y ont des intérêt...jettez un coup sur leur CV et vous vous rendez compte que la majorité d’entre-eux ne font pas partie de la crème intellectuelle de leur pays...Et pendant ce temps il y’a de jeunes Africains bien formé et competant qui ont du mal à trouver du boulot !!!...Les parlementaires Burkinabè doivent prendre leurs responsabilités et voter des lois qui protègent l’expertise Nationale !!! CAR ELLE REVIENT MOINS CHERE ET favorisera une utilisation optimale de l’aide au developpement...

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