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Mané : Un village exempté de cas d’excision

Publié le dimanche 18 décembre 2016 à 22h15min

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Mané : Un village exempté de cas d’excision

Après Damesma la veille, les journalistes se sont rendus dans le village de Mané pour constater l’effectivité de l’abandon des mutilations génitales féminines. C’était le 16 décembre 2016.

A Kaya dans le Centre-nord, au moins 53 communautés villageoises ont déclaré publiquement leur engagement à dire non à l’excision sur leur territoire. Ces engagements ont-ils eu l’effet escompté ? Sont-ils désormais exemptés de cas d’excision en leur sein ? Le changement opéré depuis ces engagements communautaires est-il saisissant ? Ce sont autant de questions que le Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA) a voulu lever en initiant une sortie de terrain dans la province du Sanmatenga à l’endroit des hommes du quatrième pouvoir. Et c’est Mané, un village situé à une trentaine de kilomètres de Kaya qui a reçu la visite des journalistes après celle de Damesma.

A l’entrée de cette localité, un fait a retenu toute notre attention. Une pancarte qui affichait clairement l’engagement des populations : « à Mané, 08/06/2013 Nous disons non à l’excision ». Un ouf de soulagement peut-on dire car une avancée notable a été enregistrée. Sans oublier la baisse significative de la prévalence de l’excision. En effet, de 36% en 1996, la prévalence est passée à 13% en 2010 à 11% en 2015 chez les filles de 0 à 14 ans selon l’enquête démographique de santé et l’enquête multisectorielle de 2015. Et même s’il y a la persistance de l’excision sous des formes pernicieuses, nous sommes tentés de dire que l’engagement de la tolérance zéro à l’égard des mutilations génitales féminines (MGF) dans lequel le Burkina Faso s’est inscrit peut être une réalité.

Au cours donc de la visite, les journalistes ont rencontré Naaba-Saaga chef de Mané, par ailleurs président du réseau des leaders coutumiers et religieux du Burkina qui confirme leur engagement pour l’abandon de la pratique de l’excision. « Au regard des conséquences néfastes de la pratique, nous n’avons pas hésité à dire non à l’excision. Pour ce faire, nous avons adopté la stratégie porte à porte pour sensibiliser la population. Egalement, j’ai même convoqué les chefs de quartiers dans mon royaume pour les conscientiser », foi du chef de Mané. Pour lui, à travers leur engagement public, une bataille vient d’être gagnée. Toutefois, les responsables n’entendent pas pour autant baisser les armes. Mieux, ils ont décidé de poursuivre la sensibilisation. « Notre vœu est de voir l’abandon de la pratique de l’excision au Burkina Faso », souhaite Naaba-Saaga.

Il n’existe aucune mention de l’excision dans le Coran

Mohamine Sanfo de la communauté musulmane lui a emboîté le pas pour faire front à ceux qui croient que l’excision est recommandée, voire prescrite par l’islam et la pratique dans le but de remplir un devoir religieux. Selon lui, il n’existe aucune mention de l’excision dans le Coran. Il s’agit en fait d’une pratique culturelle. Par ailleurs, l’influence de la sorcellerie joue un rôle important dans le maintien de la pratique de l’excision. Car, estime l’agent de la communauté musulmane, il n’est pas rare que les décès survenant à la suite de l’excision soient attribués aux femmes accusées de sorcellerie. « Mais cela n’est pas vrai », a-t-il tranché. Aussi, il n’est pas allé du dos de la cuillère pour mettre en garde les adeptes de cette pratique qui constitue une grave atteinte à l’intégrité physique de la femme. « Certes, la religion musulmane est puissante, mais la loi interdisant les MGF dans notre pays l’est encore plus », a-t-il noté. Il a pris la résolution que toute personne qu’on prendra la main dans le sac sera conduite devant les autorités compétentes pour répondre de son acte.

2 alertes dont une fausse depuis 2014

« Depuis ma prise de service en 2014, nous n’avons pas encore une fois enregistré une déclaration de cas d’excision. Mais à deux reprises, nous avons eu des alertes. La première c’était une fausse alerte. La personne qui a donné l’alerte avait une dent contre la famille de l’accusé qui avait accusé sa mère de sorcellerie. En 2016, une autre alerte a été donnée à Guidayarsé. Nous avons investigué mais par manque d’information claire, ça n’a pas abouti », a témoigné le commissaire de police du district de Mané, Abdoul-Aziz Compaoré.

Visiblement satisfait de ce résultat, le point focal de la direction provinciale de la femme, de la solidarité nationale et de la famille du Sanmatenga, Ayouba Tao n’a pas manqué d’exprimer ses sentiments : « (…) Nous pensons que nos populations ont réellement adhéré. Certainement, on aura d’ici quelques années la tolérance zéro que nous poursuivons ».

Aïssata Laure G. Sidibé
Lefaso.net

Quelques avis à l’issue de la visite de terrain
Lassina Zerbo, point focal du programme conjoint UNFPA-UNICEF

« Nous sommes comblés parce qu’au regard du nombre d’agences de presse, tout le monde était présent. Et déjà pour nous c’est quelque chose d’assez formidable qui permet donc de pouvoir relayer ce que nous faisons sur le terrain au niveau national. Egalement, lorsque nous nous referons aux différents centres d’intérêt que vous avez exprimés pour pouvoir rendre publiques les différentes réalisations niveau terrain, nous nous pensons que nos attentes ont été comblées ».

A.L.G.S.

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