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« J’ai l’impression qu’il y a beaucoup de gens qui travaillent pour qu’il y ait une autre insurrection au Burkina », député Bienvenue Ambroise Bakyono, MPP

Publié le vendredi 14 octobre 2016 à 03h05min

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« J’ai l’impression qu’il y a beaucoup de gens qui travaillent pour qu’il y ait une autre insurrection au Burkina », député Bienvenue Ambroise Bakyono, MPP

Elu député sous la bannière du Mouvement du peuple pour le Progrès (MPP), Bienvenue Ambroise Bakyonon est secrétaire adjoint chargé de l’énergie et des TIC (Technologie de l’information et de la communication) au sein du bureau exécutif national de son parti. Commissaire à la Commission de l’Informatique et des Libertés, le député Bakyono aborde dans cet entretien, et sans langue de bois, des questions relatives à la vie de son parti, à l’actualité nationale notamment le front social et l’affaire de la CAMEG. Entretien !

Lefaso.net : Comment se porte le MPP dans le Sanguié, après toutes ces joutes électorales ?

Bienvenue Ambroise Bakyono (B.A.B) : Comme nous l’avions prévu au cours d’une interview passée sur votre site (Lefaso.net), aujourd’hui, à l’instar de l’ensemble du pays, le MPP est le premier parti du Sanguié. Le président Roch (Kaboré) est arrivé en tête dans le Sanguié au cours des élections de novembre 2015, nous avons obtenu un député sur deux età l’issue des élections municipales de mai 2016, nous contrôlons sept communes sur dix. Donc, statistiquement et qualitativement, nous sommes la première force politique du Sanguié.

Lefaso.net : Comment se déroule le travail politique sur le terrain, quand on sait qu’il n’y a pas longtemps, vous étiez un leader dans le CDP ?

B.A.B :Le combat politique est plus facile quand il se fonde sur des valeurs ; des valeurs sur lesquelles nous nous sommes fondés pour quitter le CDP. C’était entre autres la défense de la démocratie (non à la modification de l’article37, non à l’instauration d’un Sénat inutile et budgétivore), le renforcement de l’Etat de droit et la lutte pour un Burkina meilleur pour tous. Pour nous, il fallait aller vers le renforcement de la démocratie, permettre au peuple de renouveler sa classe politique et faire appel à de nouvelles compétences pour aller de l’avant. En ce moment, c’était plus facile de s’exprimer vis-à-vis de la population et de lui expliquer le choix d’aller vers le MPP et de mener la lutte.

Lefaso.net : Comment se passe la cohabitation politique avec les camarades d’hier, qui sont restés au CDP ?

B.A.B : Aujourd’hui, quand on regarde le Sanguié, le CDP est quasiment inexistant ; c’est vrai qu’il dirige une commune (celle de Didyr) avec une coalition, mais personnellement, avec le maire CDP de cette commune, nous n’avons aucun problème. Bien au contraire, à ma première journée de redevabilité et de solidarité (RESO) organisée en août dernier à Réo, en tant qu’élu national, il était bel et bien présent et il a donné une communication très bien apprécié des participants. Nous entretenons aussi de bonnes relations les autres militants de ce parti. Il faut aussi souligner qu’il y a une bonne partie des militants du CDP qui ont migré vers le MPP et la NAFA (Nouvelle Alliance du Faso, ndlr). Il ne reste donc qu’une portion congrue du CDP dans le Sanguié.

Lefaso.net : Maintenant que les joutes électorales sont terminées, quelles sont les priorités au Sanguié en ce moment ?

B.A.B : Nous ne sommes pas des régionalistes ou des gens qui travaillent juste pour une localité. Pour ma part, je suis un élu national et au niveau du MPP, je suis responsable au niveau national. Les préoccupations des populations du Sanguié sont pratiquement les mêmes que celles de l’ensemble du peuple burkinabè ; les questions d’eau, de santé, d’éducationetc., y sont récurrentes.Maintenant, c’est clair que le Sanguié, qui est une zone très agricole, qui pratique les cultures de contre-saison en matière de maraîcher-culture, a besoin vraiment d’un peu plus d’eau de surface, en somme de barrages, au demeurant actuellement beaucoup de retenues d’eau sont dans un état critique, de bas-fonds aménagés avec des systèmes d’irrigation à grande échelle, il faut aussi de l’eau potable, des routeset infrastructures marchandes pour pouvoir écouler la production. J’ai foi qu’avec le programme présidentiel et le PNDES, tout ce qui a été prévu dans le quinquennat sera réalisé pour le bonheur des populations du Sanguié et de l’ensemble des populations du Burkina. Nous y veillons !

Lefaso.net : On peut noter que les périodes de la confection des listes pour les élections législatives et municipales, surtout la désignation des exécutifs locaux,ont été des momentstrès difficiles dans nombre de localités et dans bien de cas, entre militants du MPP. Quelle a été la situation à votre niveau ?

B.A.B : Globalement, tout s’est bien passé dans la province du Sanguié. On a eu des soucis au niveau de la commune de Pouni. Mais, à ce niveau, je pense qu’avec le temps, les choses sont en train de rentrer dans l’ordre ; parce qu’il y a des dérives, biensûrmalheureuses, entre deux blocs de militants MPP (on ne va pas se le cacher), à l’instar de tout ce qui s’est passé au niveau national, quel que soit le parti, du reste.
Nous profitons de l’occasion pour lancer un appel à l’union, à l’entente et à la cohésion de l’ensemble des fils et filles de la commune de Pouni. Seul, en tant qu’élu, nous ne pouvons pas sauver la commune de Pouni. L’intérêt des populations de la commune de Pouni, qui n’attendent que le développement, doit être mis en avant.

Lefaso.net : C’est dire que la commune attend toujoursson Conseil municipal ?

B.A.B : Non, l’exécutif est déjà en place. Maintenant, il faut la réconciliation entre les fils et filles de la commune de Pouni pour que, main dans la main, ils aillent au développement.

Lefaso.net : C’était donc une guerre de leaders du MPP qui s’était déportée à ce niveau, dit-on !

B.A.B :Non, je ne pense pas. Il y a plutôt d’autres enjeux locaux qui déterminent les positions des gens au niveau local. Quand on est au niveau national, ce sont des questions nationales qui cristallisent les positions. Mais au niveau local, ce sont des enjeux locaux. Aussi, faut-il le dire, il y a eu des considérations ethniques, de la chefferie coutumières, de nouveaux et anciens venus au MPP, etc. Ce sont certainement ces considérations qui ont joué, sinon, pas de guerre de grosses têtes... Au MPP, on a des critères, une ligne de conduite et on essaie de les appliquer sans distinction ou sans imposer. C’est plutôt cette tendance vraiment à laisser la base décider de tout pendant ces élections de proximité quia certainement entraîné, à un moment donné, ces dérives. On n’a pas appliqué le centralisme démocratique ; on aurait pu le faire et imposer des militants, dire que c’est un tel qui va être le maire. Mais non, il y a eu des primaires à la base. Et quand on dit vote, il faut se dire qu’il y a campagnes. Et comme on le sait, campagnes riment parfois avec dénigrements (malheureusement), passion…et parfois ça peut dégénérer et c’est ce qui s’est passé et non une guerre de positionnement ou de leadership de grands leaders nationaux.

Lefaso.net : On retiendra aussi que ces élections municipales ont été émaillées de violences, qualifiées de jamais égalées au Burkina. Dans l’avenir, que faut-il faire pour épargner le Burkina d’une telle situation, qui est de trop ?

B.A.B : Je pense qu’il faut toujours continuer à former les militants. Quand je prends le MPP, c’est bien appelé Mouvement du Peuple pour le Progrès. Celui qui s’y connaît en dynamique politique, sait que nous travaillons à aller vers un vrai parti ; parce que nous sommes toujours au stade d’un mouvement. Un mouvement qui est né au départ pour l’enracinement de la démocratie, pour s’opposer au pouvoir à vie. Donc, a eu ses premiers militants, ensuite des militantssont venus après l’insurrection, pour la campagne législative et présidentielle et un autre lot de militants est arrivé juste à la veille des élections municipales. Il y a donc eu beaucoup de flots qui ont animé cette dynamique. Les gens n’ont pas le même niveau de conscience politique, ni la même formation politique (il y en a qui sont venus d’autres obédiences politiques ; des gens de droite même qui sont arrivés au MPP) et il faut maintenant travailler à formater tout cela pour avoir un ensemble cohérent, un parti autour de la ligne idéologique du MPP qu’est la social-démocratie. Pour le moment, on a un statut de parti politique mais, il faut l’admettre nous n’avons pas encore la force, la cohésion et la discipline d’un vrai parti politique. C’est pour cela que ça crée un certain nombre de désagréments. Mais, il faut continuer la formation politique et civique des militants, tout en sanctionnant pour l’exemple les cas d’indiscipline notoire conformément à notre statut et notre règlement intérieur.

Lefaso.net : Mais, là aussi, le MPP n’a-t-il pas ramé contre ses propres propos, lorsqu’on sait que ses responsables avaient déclaré qu’il n’était pas question pour le parti d’accueillir n’importe qui….Mais, à un moment donné, on a enregistré des militants venus d’autres partis, notamment le CDP, pour rejoigne le MPP et être placés sur les listes électorales…

B.A.B : Personne n’a été placée sur les listes MPP…

Lefaso.net : Pour être plus précis, on a noté que des gens, accusés à tort ou à raison surtout au CDP,ont quitté le navire pour le MPP et placés sur les listes électorales ; ce qui a même créé des frustrations au sein des premiers militants MPP dans certaines circonscriptions !

B.A.B : La première des choses, est que le MPP ne sera jamais ni un repère ni un refuge pour bandits ou détourneurs de deniers publics. S’ils sont appelés par la justice, ilsvont répondre et s’il y a sanctions aussi, ils vont subir. C’est clair et net. Ensuite, le MPP, c’est aussi un parti qui a appliqué la démocratie à la base. Pour le choix des conseillers municipaux, ça a été fait de façon démocratique, avec même des assemblées générales pour désigner les candidats (au niveau des villageset même des secteurs). Pour le choix des maires, ça a été des instances de désignation et non d’appréciation. La nuance est-là. C’est dire que la direction politique nationale n’a imposé personne. Ni en termes de conseillers ni en termes de maires. Il y a eu des cas où certains candidats étaient tellement soupçonnés de corruption que la direction politique nationale était obligée d’intervenir pour leur demander de se retirer.

Lefaso.net : Vous allez donc, bientôt, passer de ‘’mouvement’’ à ‘’parti politique’’. Faut-il s’attendre à une sorte d’émondage !

B.A.B :C’est clair ! Celui qui s’y connaît en vie politique s’imagine bien que le MPP doit se renforcer, c’est une nécessité. C’est une question de survie. Il doit réaffirmer sa position, sa ligne idéologique, tout en renforçant sa discipline et sa cohésion interne pour pouvoir aller de l’avant et remplir pleinement sa nouvelle mission qui est la gestion du pouvoir d’Etat.

Lefaso.net : On vous a connus avec de nombreuses initiatives au plan local dont l’Université d’été... Que deviennent ces initiatives ?

B.A.B : Oui, elles sont toujours là. Nous avons fait la première université d’été et directement après, nous sommes entré dans l’année électorale. Donc, nous avons décidé de faire le point cette année pour rentrer dans le cadre global du parti qui poursuit et améliore sa structuration. Au début, nous étions en phase d’émulation pour implanter notre parti et cette initiative se trouvait dans ce cadre. De nos jours, toute action doit s’inscrire dans la dynamique globale du parti. Nous avons reçu les félicitations du président du parti en son temps (aujourd’hui Président du Faso) qui avait souhaité que par la suite, le parti se saisisse de cette initiative pour lui donner une envergure nationale. Vous avez donc vu que cette année, nous sommes partis vers une Université d’hivernage des élèves et étudiants du parti et je pense que dans les années à venir, nous allons passer vers une telle initiative au niveau de chaque région. La formation de la jeunesse est une nécessité, et est même vitale, pour notre parti et notre Faso. L’actuel président du parti (par intérim, ndlr), le camarade Salifou Diallo, est dans cette veine.

Lefaso.net : Dix mois maintenant que vous êtes à l’Assemblée nationale, comment appréciez-vous votre présence au sein de l’hémicycle ?

B.A.B : Il faut bien comprendre son rôle d’élu (si je peux m’exprimer ainsi) et en tant que tel, j’agis en tant qu’élu national, même si la circonscription électorale est en générale la province. Nous sommes à l’Assemblée nationale pour représenter non une circonscription mais plutôt l’ensemble du peuple burkinabè. Nous travaillons à ce que, ce qui a été prévu par exemple par le Président du Faso soit réellement mis en œuvre pour le bonheur du peuple. Il y a eu des mesures générales du gouvernement qui ont, bien sûr, touché le Sanguié. Nous avons accompagné le gouvernement dans un certain nombre d’actions et dont les effets sont visibles sur le terrain. Je saisis cette opportunité pour dire donc que, je suis parfois étonné quand on me dit que les choses ne bougent pas au Burkina, que l’argent ne circule pas…. Non ! Il y a beaucoup de choses qui sont faites. Si aujourd’hui les fonctionnaires prennent leur salaire chaque mois et que les effets de la loi 081 sont gérés correctement, quand la dette régulièredes entreprises est payées (elles ont pris environ 35 milliards et près de 40 milliards seront encore débloqués pour gérer la dette dite irrégulière en 2017), il faut quand même reconnaître qu’il y a des choses qui sont faites. Quand il y a la gratuité des soins pour les enfants de moins de cinq ans et les femmes enceintes, il faut reconnaître qu’il y a des efforts qui sont faits. Quand le gouvernement fait l’effort de baisser le prix du carburant, quand après des négociations on baisse le prix du ciment…, il faut se dire qu’il y a quelque chose. Il faut noter au passage l’intensification des travaux HIMO (haute intensité de main-d’œuvre), le recrutement massif d’enseignants, les routes en cours de réalisation, les centrales solaires en construction pour pallier le déficit énergétique et baisser les coûts des facteurs de productions, les bouclages de nombreux financement de projet etc., et j’en oublie ! L’ensemble des compartiments, des couches sociales du pays sont pris en compte par un certain nombre de mesures actuellement. Il faut que le Burkinabè donne un peu de temps au nouveau pouvoir afin d’avoir des résultats beaucoup plus tangibles.

Lefaso.net : Les Burkinabè n’ont fait que prendre les dirigeants aux mots…, puisqu’ils ont fait savoir lors de la campagne qu’ils n’ont pas besoin de temps pour faire décoller l’appareil !

B.A.B : Oui, l’appareil a décollé. Quand les gens disent que ça ne va pas, je leur pose la question : qu’est-ce qui ne va pas ? Dites-nous concrètement ce qui ne va.

Lefaso.net : Ils pourraient dire que des mesures que vous avez citées plus haut en exemples, mise à part la baisse du prix du carburant, on note qu’au niveau du ciment, les professionnels du domaine ont indiqué qu’il n’y a pas baisse de prix et le gouvernement est revenu préciser en expliquant qu’il s’agit en réalité de l’effet de la concurrence, au niveau de la gratuité des soins, l’efficacité ne semble pas se constater sur le terrain, au niveau de l’épurement de la dette intérieure, il y a un début mais de nombreuses entreprises attendent toujours…, l’application de la loi 081 fait également grincement des dents …

B.A.B : Il y a des grincements de dents parce ce que, si vous prenez la loi 081 par exemple, nous ne sommes pas les auteurs de la mouture de la loi ; nous avons voté pour juguler l’incidence budgétaire. Maintenant, si la loi elle-même est mal formulée, il faut la reprendre et la corriger. Pour ce qui concerne la gratuité des soins, ce qui a été dit est fait. Maintenant, si les gens veulent plus, c’est autre chose. Il faut d’abord évaluer la première phase avec l’incidence budgétaire réelle que ça a engendré et pouvoir faire la dotation en conséquence sur l’année 2017, et je pense que ce sera fait parce qu’en 2016, nous avons hérité d’un budget qui n’était pas le nôtre. C’est en 2017 que nous aurons notre propre budget, voté pour le Président Roch Kaboré et son gouvernement au bénéfice du peuple burkinabè. En ce qui concerne le ciment, c’est clair que nous sommes dans une économie de marché, on peut discuter avec les opérateurs pour réduire leurs marges. Ça s’est fait sur la bière où certains opérateurs, malgré l’augmentation des taxes, ont pris la charge sur eux. Nous sommes donc dans cette dynamique de défendre la population, d’être proche d’elle. Mais, aussi, il faut se dire la vérité (je l’ai dit une fois, sur les réseaux sociaux et ça a un peu choqué les gens) : la frange intellectuelle n’est pas la seule au Burkina. 150 mille fonctionnaires, l’Etat seul bouffe près de 95% de nos ressources fiscales. La part salariale monte à près de 45% (ramenée à 41% pour 2017). Si les 150 mille fonctionnaires, bouffent tout l’argent, le reste des 17 millions de Burkinabè eux, ont droit à quoi ? Aujourd’hui, il faut voir que toutes les grèves sont menées par les intellectuels, entre griffes, ceux qui sont allés à l’école, qui sont une infime partie de la population du Burkina. Cela est inacceptable. Il faut que nous soyons conséquents avec nous-mêmes sinon, nous allons tuer la poule aux œufs d’or. Si les 17 millions se mettent aussi en grève, alors que ce sont eux qui produisent les richesses du Burkina on fait comment ?Je pense qu’il faut qu’on commence à se tenir un langage de vérité et dire que ce n’est pas l’Etat qui crée la richessemais plutôt le peuple burkinabè à travers son travail. Les gouvernants et tous les politiciens doivent aussi aller vers les populations et tenir ce langage de vérité. Nous devons avoir le courage aujourd’hui de reformer notre économie pour la rendre beaucoup plus forte, et je pense que c’est ce qui est prévu dans le PNDES, qui est une émanation du programme présidentiel.

Lefaso.net : Il y a une fronde sociale qui s’élargie de jour en jour, quelle peut être la solution pour qu’enfin,les Burkinabè puissent désormais réorienter les énergies vers les chantiers de développement ?

B.A.B  : Il faut que tous les acteurs, les leaders syndicaux, les dirigeants …se parlent. Se parler, pas pour qu’on prenne tout l’argent pour redistribuer à tout le monde, mais se parler pour qu’on accepte une trêve, parce que c’est le travail qui crée la richesse. Ce que je vais dire ne va certainement pas plaire mais, j’ai l’impression qu’il y a beaucoup de gens qui travaillent pour qu’il y ait une autre insurrection au Burkina. Et je pense que cela n’est pas sérieux. Ce n’est pas qu’on refuse de voir qu’il y a des attentes énormes du peuple burkinabè mais, aujourd’hui, ceux qui parlent le plus sont une minorité, par rapport au 17 ou 18 millions de Burkinabè. Si les paysans vont prendre leur part (ce sont eux qui créent le maximum de richesses au Burkina), je pense que l’Etat burkinabè risque de disparaître et au grand dam de nous tous. Donc, il faut que nous acceptons que quand l’Etat, dans son fonctionnement accorde environ 96% (et si on accède à toutes les revendications aujourd’hui on va être à 104% du budget par exemple), où est l’épargne budgétaire dans tout ça ?Qu’est-ce qu’on gagne et qu’est-ce qu’on garde pour construire des infrastructures sociales, des écoles et CSPS, des barrages, des routes ? On doit donc permettre à l’Etat de réformer sérieusement notre économie, d’aider à booster les secteurs porteurs de notre économie. Ce serait une grosse erreur d’aller nous endetter pour payer les salaires, notre endettement doit servir à booster l’économie, à faire des investissements. Nous ne pouvons pas nous endetter pour payer des salaires, ce n’est pas du tout responsable. Et même si on accédait à toutes les revendications de tous ceux qui manifestent aujourd’hui, l’investissement de demain serait où ? Nous n’aurions rien fait pour le décollage économique et demain, ça va nous rattraper. Et les mêmes personnes viendront encore dire que l’Etat est défaillant, qu’il ne joue pas son rôle etc. Je pense qu’il faut qu’on fasse confiance au Président Roch Marc Christian Kaboré (ce n’est pas parce que je suis de la majorité), il y a de la cohérence dans ce qui est fait depuis le départ. Il y a de la cohérence dans son programme, programme sur la base duquel le peuple l’a élu et le PNDES est une émanation du programme présidentiel. Aujourd’hui, le débat qui se pose c’est, est-ce qu’on prend par exemple 30 milliards qu’on distribue à la jeunesse pour la calmer parce ce que le marché de l’emploi n’est pas florissant pour l’instant, donc du saupoudrage, ou bien on fait les fondations d’une économie bien ancrée et durable qui va se traduire par une croissance à deux chiffres et le plein emploi de la jeunesse ? Il faut qu’on se comprenne et qu’on donne une chance au pouvoir actuel de mettre en place des fondations solides pour notre économie. Le diagnostic de la situation sociale du Burkina est maitrisé, les difficultés sont connue et les solutions sont maîtrisées, on sait exactement où on va. Et celui qui veut savoir où est-ce qu’on va, il y a le budget, il y a le PNDES, il y a le programme présidentiel. Quand on parle de tâtonnements, je suis surpris donc. Il n’y a aucun tâtonnement, c’est bien maitrisé et on sait où on va. Ce n’est qu’une question de temps. Il faut qu’on arrive à changer notre mentalité, qu’on quitte cette mentalité d’Etat-papa, qui doit tout donner. Il faut que les Burkinabè se disent qu’autant ils sont pauvres, autant l’Etat est pauvre ; s’ils sont riches, l’Etat deviendra riche parce que, c‘est leur travail qui produira de la richesse. C’est le travail de chaque Burkinabè, pris individuellement, qui produira cette richesse.

Il faut aussi se dire que malgré tout, il y a eu beaucoup de mal gouvernance de par le passé. Et pour ne pas devancer l’iguane dans l’eau, dans les jours à venir, nous vous ferons l’économie de deux enquêtes parlementaires sur le foncier urbain (rapport disponible à ce jour, ndlr) et sur les entreprises minières (rapport attendu le 25 octobre prochain, ndlr) et leur responsabilité sociale et là, vous verrez l’ampleur du désastre d’une mauvaise gouvernance dans ces deux secteurs.

Lefaso.net : Il y a beaucoup à dire… ?

B.A.B : Vous allez être témoin de ce qui se passait en termes de gouvernance dans ces deux secteurs. Ces deux commissions ont été dirigées par des députés, que ce soit de l’opposition ou de la majorité. A l’issue des restitutions des rapports de ces enquêtes, nous allons travailler pour l’amélioration dela gouvernance dans ces secteurs ; c’est de la responsabilité politique du Chef de l’Etat, du Parlement, de l’Exécutif, du système judiciaire, et même des OSC (Organisations de la société civile) qui sont actives dans ce domaine, de contribuer à l’amélioration de la gouvernance dans notre pays ce qui conduit à une bonne utilisation de nos ressources au grand bonheur de nos populations.

Lefaso.net : On se demande tout de suite comment ça va se faire, toutes ces révélations, quand on sait que ce sont quasiment les mêmes personnes qui ont géré le pays depuis environ trois décennies… !

B.A.B : Les résultats de l’enquête doivent être mis à la disposition du public. Nous, tenons à jouer notre rôle d’élus du peuple. Et nous allons le faire. Sans état d’âme. Nous avons dit, et nous le répétons, le « Plus rien ne sera comme avant » sera effectif et le peuple burkinabè le verra. Ce n’est pas un slogan. L’actuel Président, pour ceux qui peuvent aller regarder dans les documents, verront qu’il a été parmi les premiers à dire : « Plus rien ne sera comme avant »à sa première marche avec l’oppositionle 18 janvier 2014 à la place de la révolution, vous pouvez réécouter son interview. Et nous sommes toujours avec lui sur la même ligne. Vous avez dit que ce sont les mêmes qui ont géré, et bien justement, bientôt par les actes, vous comprendrez notre détermination à faire avancer la cause du peuple burkinabè à aller vers, non pas seulement un changement, mais une rupture véritable et salvatrice dans la gestion de la chose commune, dans l’intérêt du peuple burkinabè.

Lefaso.net : Revenons à la fronde sociale, il faut donc que les Burkinabè consentent le sacrifice nécessaire à une relance économique !

B.A.B : Il faut encore consentir le sacrifice. Et un sacrifice qui est même presqu’achevé parce que, j’espère que d’ici à trois mois, on aura beaucoup plus de lisibilité sur la capacité du gouvernement à mobiliser des ressources pour des investissements pour le bonheur du peuple. Mais, si on n’a pas le temps de le faire, si tout le monde réclame l’argent à la fois, où est-ce qu’on peut trouver ces ressources ? Même si le pire arrivait et que quelqu’un d’autre prenait le pouvoir, demain sera pire qu’aujourd’hui ; parce qu’il ne pourra pas inventer l’argent, ni la richesse pour tous. Et si nous allons n’importe où pour chercher l’argent, c’est pour rendre le Burkina esclave parce qu’on connaît les conditions de certains bailleurs de Fonds, ça va peser sur des générations et cela ne sera pas responsable. En tant qu’homme d’Etat, il faut avoir de la vision et le Président Roch Marc Christian Kaboré est réellement un homme d’Etat qui tient à respecter son contrat social, ce pour quoi il a été élu. Il ne faut pas lui mettre la pression pour le pousser à la faute. C’est ce que nous constatons, si pour contenter les frondeurs aujourd’hui, on se met à détourner l’argent (c’est-à-dire à changer la destination initiative de l’argent), ce ne sera pas bien pour l’économie, on va rendre les gens contents pour un jour mais, on va se réveiller le lendemain avec une gueule de bois face aux mêmes problèmes. Il faut faire en sorte àinvestir pour faire tourner les entreprises, créer de l’emploi pour la jeunesse. Il y a deux axes qui peuvent aider pour l’emploi : c’est la dynamisation du secteur agro-sylvo-pastoral et la réforme du système éducatif. Les statistiques sont-là, les données sont connues et on sait comment le faire. Encore faut-il qu’il y ait de la volonté politique et une volonté populaire citoyenne ; parce que la volonté politique peut ne pas rencontrer l’assentiment populaire. On est entre quatre à cinq tentatives de réformes du système éducatif au Burkina. Mais ça n’a jamais abouti ; parce que c’est encore nous intellectuels qui disons :’’non, si nous on a eu tels diplômes pourquoi on veut que nos enfants soient juste des techniciens, des plombiers ou des peintres’’. Tout le monde veut s’installer dans un bureau. Quand on voit qu’il y a environ un million de candidats pour douze mille postes à pourvoir à la fonction publique, ça donne froid au dos. Aujourd’hui au Burkina, même dans le secteur de la construction, on est obligé de faire appel à la main-d’œuvre du Ghana, du Togo, du Bénin, etc. Et ces gens n‘ont rien à envier aux fonctionnaires. Pourquoi ne formera-t-on pas des Burkinabè dans ces domaines ? Le secteur agricole, est reconnu comme le premier bassin d’emplois du Burkina. Donc, il faut reformer le système éducatif vers la formation professionnelle et technique pour qu’il y ait une adéquation entre notre système éducatif et le marché de l’emploi. Aujourd’hui, il y a une inadéquation criarde entre les deux secteurs. Notre système éducatif produit des chômeurs ! C’est connu de tous ! Quand on sort cinq mille juristes par an au Burkina Faso, c’est pour aller où ? C’est un exemple parmi tant d’autres. L’on doit aussi accepter que notre économie soitportée par des secteurs comme l’agriculture, qui est notre première richesse puis l’élevage. Ensuite, parce ce que la nature nous a donné qu’est le secteur minier. Derrière, on peut aussi vendre notre intelligence, notre savoir et notre savoir-être. La richesse ne vient pas d’ailleurs, c’est par notre travail. Et c’est là-bas qu’il y ale plein emploi, ce n’est pas dans le tertiaire. Il faut que le Burkinabè prenne conscience qu’il doit se remettre au travail, et dans les secteurs qui peuvent nous créer la richesse. On a beau dit que le Burkinabè est travailleur, c’est vrai. Mais, il faut revoir notre manière de travailler. Tout le monde veut s’asseoir au bureau, ça ne marche pas. Il faut qu’on change donc notre manière de travailler pour être beaucoup plus productif, beaucoup plus rentable.

Lefaso.net : En tant qu’à la fois élu national et membre de l’organe dirigeant du parti au pouvoir, comment vivez-vous la situation de crise au niveau de la CAMEG ?

B.A.B : Il y a tellement d’implications judicaires dans cette affaire, que je n’aimerais pas en rajouter. Je n’aime pas commenter les questions de justice. Surtout qu’aujourd’hui, les insurgés se plaignent de la justice, les non-insurgés aussi se plaignent d’elle, pour caricaturer un peu la situation, bref tout le monde se plaint de la justice. Il y a donc certainement quelque chose à revoir à ce niveau avec en ligne de mire, une réconciliation vraie du peuple burkinabè avec sa justice.Car, il faut le dire, il y a une rupture de confiance entre l’autorité judicaire et le peuple burkinabè. Maintenant, en ce qui concerne la crise à la CAMEG, pour moi, si je vais donner une appréciation, elle reste une appréciation militante et je l’assume. On ne peut pas permettre par principe, qu’au détour de certains subterfuges juridiques, un groupe d’individus puisse s’accaparer d’un segment aussi important que puissant de notre système sanitaire, de notre chaîne sanitaire au Burkina. C’est inconcevable. Quel que soit la situation, il faut que l’Etat ait le contrôle de ce segment vital, c’est clair. Donc, je suis solidaire de l‘action gouvernementale.Tous les monopoles, tous les systèmes mafieux ou pseudo-mafieux doivent être démantelés au Burkina. C’est une exigence historique qui prend ses fondements dans l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014.

Lefaso.net : Mais, cela a toujours fonctionné sous le sceau du privé mais apparemment bien !

B.A.B : Plus rien ne sera comme avant. Il faut que ça change.

Lefaso.net : Même s’il faut tordre le cou à la loi ; puisqu’on dit qu’il y a un mandat qui court jusqu’en 2017 et la justice a rendu une décision qui impose une attitude au ministère !

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