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"Libres ensemble" au Burkina Faso : L’initiative numérique citoyenne de la Francophonie présentée à Ouagadougou

Publié le jeudi 15 septembre 2016 à 00h00min

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A l’occasion de la cérémonie d’ouverture officielle de la Formation des formateurs sur la gouvernance de l’internet (FFGI) qui s’est tenue à Ouagadougou du 29 aout au 02 septembre 2016 sous le haut patronage du Premier Ministre du Faso et en présence de diverses autorités burkinabè dont le Ministre de l’enseignement supérieur et la Ministre de l’économie numérique, le Représentant de l’Organisation internationale de la Francophonie, Eric ADJA, Directeur Adjoint de la Francophonie économique et numérique a présenté Libres Ensemble, une initiative spéciale de Madame Michaëlle Jean, Secrétaire générale de la Francophonie. Notre équipe dépêchée à l’hôtel Silmandé de Ouagadougou a pu recueillir quelques commentaires auprès de l’intéressé.

Lefaso.net : Monsieur le Directeur, qu’est-ce que Libres Ensemble ?

Eric ADJA : Libres Ensemble est une initiative numérique citoyenne de l’OIF, portée par la Secrétaire générale de la Francophonie. Il s’agit d’une campagne de mobilisation de la jeunesse francophone contre la radicalisation, sous toutes ses formes.
En effet, dans un contexte international marqué par la manifestation croissante de phénomènes de radicalisation idéologique, politique, religieuse et sociale des populations, particulièrement des jeunes, Madame Michaëlle JEAN a lancé en mars 2016 une vaste campagne de prévention et de lutte contre la radicalisation des jeunes afin de mobiliser les jeunes francophones pour dire leur attachement au respect de la diversité culturelle, au vivre ensemble, aux libertés, à la paix, au dialogue.
Comme vous le savez, l’espace francophone n’échappe pas au phénomène des attaques terroristes. Cette situation semble s’être aggravée depuis plus d’un an par la multiplication d’attentats, ici à Ouagadougou, pas loin à Bamako ou à Grand-Bassam. Sans oublier le Cameroun, l’Egypte, le Niger, le Tchad, la Tunisie, la Belgique, Canada, la France, le Liban, etc.). Il en découle un risque de la montée de la haine, de la peur et du rejet de l’autre, cultivés à la fois par des mouvements extrémistes et terroristes.

Lefaso.net : Pourquoi avoir commencé par une campagne numérique ?

Eric ADJA : La stratégie déployée par les mouvements extrémistes et terroristes exploite les situations individuelles dans lesquelles le lien familial, social, scolaire, etc. a été fragilisé ou rompu, et fait, entre autres, délibérément écho aux besoins de sens, d’empathie, d’action et de reconnaissance qui caractérisent les adolescents et jeunes adultes, or la réponse à ce besoin n’est plus systématiquement fournie par les familles, les institutions, les sociétés. Le mode opératoire retenu repose souvent sur des méthodes sectaires d’influence, d’embrigadement et de déshumanisation ainsi que sur l’utilisation systématique des réseaux sociaux (Facebook, Youtube, etc.) et des méthodes de communication modernes.

La jeunesse constitue une cible privilégiée de ces mouvements, à la fois comme victimes potentielles de mesures de discriminations et d’actes de violences terroristes, et comme sources privilégiées d’instrumentalisation et de recrutement.
Cette jeunesse, dans son immense majorité, veut avancer avec optimisme et bâtir un monde qui relie les individus les uns aux autres, un monde de solutions, solidaire, coopératif, respectueux des libertés et de la diversité.

L’OIF a donc privilégié une approche en trois étapes :
Une étape communicationnelle et événementielle via une campagne participative de mobilisation et d’engagement citoyen des jeunes en continu sur internet et à l’occasion d’événements spécifiques et majeurs tels que le 20 mars et le Sommet d’Antananarivo ; une étape programmatique : Activités et projets d’engagement des jeunes, de formation, de sensibilisation, à travers les quatre missions de la Francophonie ; et enfin une étape politique et diplomatique : actions de plaidoyer de haut niveau, mobilisation des Etats et gouvernements francophones.
L’adresse de la plateforme est : libresensemble.com

L’on peut y trouver une vidéo de lancement de la campagne par la Secrétaire générale, en compagnie d’artistes et de personnalités reconnus auprès des jeunes, pour les appeler eux-mêmes à manifester leur adhésion et leur expérience du vivre-ensemble à travers leurs propres vidéos avec créativité et énergie à travers la poésie, le chant, les arts visuels, le théâtre, l’humour, le sport, la gastronomie, notamment.
D’autres personnalités, artistes et leaders d’opinion, témoins et experts seraient mobilisés régulièrement tout au long de la campagne afin de maintenir la dynamique.
La plateforme permet également de recueillir les différentes vidéos. Les meilleures créations des jeunes seront valorisées à l’occasion du Sommet d’Antananarivo, à Madagascar, fin novembre de cette année.

Lefaso.net : Quelles sont les perspectives de l’initiative Libres ensemble ?

Eric ADJA : La Secrétaire générale de la Francophonie a souhaité dès le début de cette campagne que les jeunes s’approprient l’initiative, car il s’agit d’eux avant tout. Vous pouvez vous rendre compte de l’engouement que suscite la plateforme, avec des vidéos de jeunes originaires de toute la francophonie. Beaucoup de ces vidéos présentent des projets ayant besoin de financements, en général modestes. L’OIF prévoit donc le lancement prochain d’une plateforme de financement participatif, pour permette à ces jeunes de lever des financements en ligne, dans toute la mesure du possible. Cette plateforme sera complétée par un dispositif de formation massive des jeunes francophones à l’entreprenariat numérique.

Lefaso.net : Votre mot de la fin. ?

Eric ADJA : Au-delà de l’initiative Libres Ensemble, nous faisons l’heureux constat que l’esprit de coopération semble prévaloir au sein de la Francophonie, pour instaurer un environnement numérique de confiance et renforcer les cadres législatifs et réglementaires de la cybersécurité, dans le respect des droits fondamentaux des citoyens et de la protection des données à caractère personnel. Ces questions ont été évoquées, notamment à l’occasion de la Conférence internationale sur le renforcement de la cybersécurité et de la cyberdéfense dans l’espace francophone, tenue à Grand-Bassam en février 2016.

L’éducation, cette « arme de la construction massive » comme aime à le dire Madame Michaëlle JEAN, constitue, de mon point de vue, l’un des véritables défis francophones. Cela passe aussi par un renforcement de l’éducation à la citoyenneté qui comprend la sensibilisation aux droits de l’Homme et aux principes démocratiques.

Ces actions préventives doivent être complétées par une mise en réseau des centres de prévention de la radicalisation violente existants dans l’espace francophone. Elle doit s’accompagner par des initiatives innovantes pour sensibiliser et former les acteurs de l’éducation et de la prévention aux risques et signes de radicalisation.
Outre l’éducation, l’insertion économique et sociale, en particulier des jeunes, qui arrivent de plus en plus nombreux sur un marché du travail souvent saturé et concurrentiel, constitue le second défi. Ainsi, de manière récurrente, le lien jeunesse-précarité-radicalisation est souvent énoncé et dénoncé. Il y a donc un vaste champ de coopération internationale innovante à explorer, pour accompagner le développement économique des pays. C’est pourquoi la Secrétaire générale a fait de la mise en œuvre concrète de la stratégie économique de la Francophonie une priorité.

Les projets utilisant la microfinance qui offrent des perspectives concrètes et rapides d’inclusion économique aux populations jeunes et/ou peu qualifiées pourraient dans cet esprit être davantage soutenus. Le développement économique de ces pays dépend également de leur environnement juridique et fiscal qui doit être modernisé et harmonisé afin qu’il soit propice aux investissements.
Dans cette démarche d’inclusion des jeunes, notamment des plus vulnérables, une place importante doit en outre être accordée aux vecteurs linguistiques, culturels et religieux.

Lefaso.net

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