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Dr Issaka Sondé, pharmacien et écrivain : « Si rien n’est comme avant, rien non plus n’est mieux qu’avant »

Publié le mercredi 14 septembre 2016 à 23h27min

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Dr Issaka Sondé, pharmacien et écrivain : « Si rien n’est comme avant, rien non plus n’est mieux qu’avant »

Les lecteurs du Faso.net l’ont découvert à travers l’épique chronique qu’il a animée pendant plusieurs mois sur notre site à travers « les contes d’Issaka Sondé » où il a raconté les pérégrinations « du peuple du Sofa Kiburna » en prise aux errements de Naaba Laibse. Ce pharmacien multi-diplômé a ainsi démontré sa parfaite maîtrise des lettres et de la vigilance aigüe qu’il garde de la bonne marche des choses publiques. Les leçons de l’insurrection et le bilan de la Transition, la gestion du pouvoir MPP et surtout la grave crise qui secoue la CAMEG ; voilà autant de questions que nous avons posées à celui qui, après le Niger, conseille depuis quelques semaines le gouvernement guinéen en matière d’approvisionnement pharmaceutique.

Qui est le Dr Issaka Sondé ?

Avant tout propos, il me plait de remercier et féliciter chaleureusement la dynamique et efficace équipe Lefaso.net, ce cordon ombilical qui relie aujourd’hui toutes les filles et fils du Burkina Faso à la mère patrie où qu’ils se trouvent. Je vous remercie aussi parce que vous m’avez toujours accordé la parole dans le cadre de la contribution citoyenne pour un Burkina meilleur et aujourd’hui pour cette opportunité que vous m’offrez de me faire mieux connaitre par tous ceux qui me lisent sur votre site.

Revenant à votre question, je suis Dr Issaka SONDE, citoyen Burkinabé et je suis pharmacien de profession. Je suis titulaire d’un diplôme de Doctorat d’Etat en Pharmacie et aussi entre autres, d’un Diplôme Interuniversitaire (DIU) sur le VIH/SIDA, d’un master en santé publique, d’un master en Immunohématologie et médecine transfusionnelle, d’un certificat sur la logistique et la gestion de la chaine d’approvisionnement des produits de santé, d’un certificat sur la prise en charge complète de la drépanocytose, d’un certificat sur la lutte contre la maladie à virus Ebola, d’un certificat sur la gestion des systèmes de services de santé-économie et planification des systèmes de santé.

Pour résumer, je peux dire qu’aujourd’hui, je suis au carrefour entre la pharmacie, la biologie et la santé publique ce qui me permet une large vision sur les diverses problématiques de la santé et les défis majeurs à relever.

Pouvez-vous nous parler un peu de votre parcours ?

Avant de parler de mon parcours, je tiens à remercier de tout cœur, tous ceux qui m’ont montré le chemin, m’ont guidé, m’ont enseigné, m’ont éduqué et ont pratiquement fait de moi ce que je suis aujourd‘hui. Je remercie aussi tous ceux qui m’ont accueilli sous leur toit tout au cours de ce parcours.

Revenant à mon parcours, j’ai eu l’honneur de fréquenté l’école primaire publique de Ouenga dans le Kouritenga. J’ai fini par terminer le cycle primaire à l’école publique de Bagré dans le Boulgou. J’ai poursuivi au Lycée Rialé de Tenkodogo où j’ai obtenu le baccalauréat série D. Ce fut ensuite l’université de Ouagadougou (actuelle Université Ouaga 1, Pr Joseph Ki Zerbo) pour les études en pharmacie à la Faculté de Sciences de la Santé (FSS), devenue UFR/SDS après l’invalidation de l’année académique 1999-2000.

Après l’université de Ouagadougou, de janvier 2002 à mars 2004 j’ai été chef de service de la pharmacie du Centre de traitement ambulatoire (CTA) de Ouagadougou aujourd’hui rattaché au CHU-Yalgado OUEDRAOGO. D’avril 2002 à aout 2007 j’ai été chef de service de la pharmacie du Centre Hospitalier Régional (CHR) de Ouahigouya. De Septembre 2007 à Juillet 2009 j’ai bénéficié d’une mise en position de stage pour faire une spécialisation de Master complémentaire en Immunohématologie et médecine transfusionnelle à l’Université de Liège (ULg) en Belgique. J’en ai profité pour faire parallèlement un master complémentaire en santé publique, orientation santé et développement à l’Université Libre de Bruxelles (ULB) en Belgique. Pour maximiser mon séjour en Belgique, j’ai bénéficié d’une belle opportunité qui m’a permis de faire un certificat en gestion des systèmes de services de santé-économie et planification des systèmes de santé, à l’Université Libre de Bruxelles (ULB) de juillet à août 2009. Ayant obtenu une mention grande distinction au master de santé publique, il m’avait été proposé une possibilité de carrière d’enseignement et de recherche à l’ULg mais j’ai préféré rentrer et me mettre au service de mon pays conformément à l’accord qui avait prévalu à ma mise en position de stage. Je suis rentré au Burkina Faso en septembre 2009 et j’ai dû attendre 7 mois avant d’être réaffecté en tant que pharmacien hémobiologiste au Centre Régional de Transfusion Sanguine (CRTS-Bobo) de Bobo-Dioulasso.

En janvier 2011, j’ai été recruté par le GIP ESTHER, et de Février 2011 à Décembre 2014, j’ai été le chargé du projet Estheraid Burkina qui a couvert 4 des 13 régions du Burkina Faso (Boucle du Mouhoun, Cascades, Hauts Bassins, Sud-Ouest) pour le renforcement global du système de santé, le renforcement spécifique du système pharmaceutique et l’amélioration de la prise en charge des personnes vivant avec a le VIH.

De mars 2015 à Juin 2016 j’ai occupé le poste d’assistant technique international à la Direction de la pharmacie et de la médecine traditionnelle au Ministère de la Santé Publique du Niger et depuis aout 2016 j’occupe le poste de conseiller en chaine d’approvisionnement des produits de santé pour le projet OPP-ERA phase II en Guinée Conakry. Tel est donc mon parcours rapidement brossé.

Vous vous présentez, dans certains de vos écrits comme « la pharmacie citoyenne » ; qu’est-ce que cela veut dire ?

C’est vrai que dans tous mes articles, j’ai toujours signé sous mon vrai nom. Je n’ai jamais eu recours à un pseudonyme même quand cela s’avérait un peu risquant. Du reste, des amis et connaissances me l’ont souvent reproché. Mais j’estime que chacun doit toujours pourvoir défendre et surtout pleinement assumer ce qu’il dit et ce qu’il fait. Pour revenir à la notion de « la pharmacie citoyenne, j’aurais dû dire « la pharmacie humanitaire » mon domaine actuel d’activité mais cela aurait reflété un cadre professionnel. Or ici, je suis dans la citoyenneté. J’ai voulu donc sortir du contexte professionnel d’où la préférence « la pharmacie citoyenne » qui reflète mieux mes interventions sur votre site, d’autant plus que j’ai recours aux mots pour espérer soigner des maux, les tares de notre société, la mal gouvernance, l’incivisme...

Il est du devoir de chaque citoyen d’avoir un avis sur la gestion de la cité et par conséquent d’élever sa conscience citoyenne pour réfléchir, parler, dénoncer et surtout agir en permanence pour le bien être global, le mieux vivre ensemble et le meilleur pour tous.

Vous avez tenu sur Lefaso.net une chronique sur les pérégrinations « du peuple du Sofa Kiburna » ; quels messages avez-vous voulu faire passer  ?

Je vous remercie de m’avoir permis de partager cette chronique avec des lecteurs aux quatre coins du monde. Effectivement cette chronique était intitulée « Les contes d’Issaka SONDÉ : le peuple du sofa kiburna et la traversée du fleuve sacré ». Le fleuve sacré étant bien entendu toute la période trouble de fin de règne du président Blaise COMPAORE à la fin de la transition. Sur cette chronique nous avons successivement publié :
 Naaba Laibse, le royaume du Sofa Kiburna et la Long-régnite
 Naaba Laibsé et le prix de la profanation répétée du fétiche sacré
 La chute de Naaba Laibsé
 La vacance du trône
 La montée des eaux troubles
 Le naufrage
 Le sauvetage
 Le débarquement en terre hostile

A travers cette chronique, il s’agissait essentiellement de dénoncer les abus, les dérives, la mal gouvernance qui avaient été érigés en mode de gouvernance au Burkina Faso ; ensuite élever la conscience citoyenne ; en fin proposer des solutions pour un mieux vivre ensemble et le meilleur pour tous. A titre d’exemple, le mardi 30 Septembre 2014, voici le traitement qui avait été suggéré : « A notre humble avis, la Retraitine® à dose unique semble pour l’heure le meilleur remède pour Naaba Laibse pour un Sofa Kiburna de paix et pour le bonheur de son peuple souverain ». Hélas, prescription vaine et la suite nous a donné raison.

Peut-on s’attendre à une suite de cette chronique ?

Evidemment !!!
La chronique avait pour but de poser le diagnostic d’un mal qui gangrenait le tissu social, remettait fondamentalement en cause la cohésion nationale et menaçait la paix vitale. Le peuple souverain a dû prendre ses responsabilités à chaque moment clé pour extirper sans anesthésie le cancer incurable. Avec le retour à l’ordre "normal", nous avons estimé que les nouvelles autorités devraient bénéficier d’un délai de grâce de la part des administrés avant tout jugement objectif sur leur aptitude à proposer une alternance alternative. Si toutefois, à un certain moment il s’avère qu’il y a une quelconque rechute du mal que le peuple avait espéré avoir bouté loin du Faso, pour que plus rien ne soit comme avant, alors chacun avisera et prendra à nouveau ses responsabilités. Dans ce cas, ce qui avait perdu le roi, pourrait perdre un prince incapable.

Un pharmacien avec un tel talent littéraire, ce n’est pas courant ; d’où vous vient cette passion ?

Avant de répondre à cette question, permettez-moi de partager avec vous cette vision de Pierre-Gilles de Gennes, prix Nobel de physique de 1991. A propos de la formation du pharmacien, voilà ce qu’il déclarait : « De par l’étendue de leurs connaissances, les pharmaciens sont parmi les rares personnes à pouvoir appréhender l’ensemble du monde réel ». C’est pour dire que le pharmacien n’est pas seulement celui qui dispense les médicaments aux patients. Il est l’alpha et l’oméga de toute la chaine du médicament depuis la recherche fondamentale pour trouver les molécules actives en passant par de nombreux essais, puis la fabrication à l’industrie, la distribution et la dispensation aux patients à l’officine et dans les formations sanitaires. C’est le spécialiste du médicament par essence et par excellence. Le pharmacien est loin d’être un intellectuel cyclope, un borgne à vision unique, un technicien à compétence linéaire. Non c’est tout sauf cela. C’est un intellectuel à connaissances transversales et à géométrie variable ; c’est un professionnel très polyvalent qui embrasse à la fois les branches de la biologie, de la chimie, de la médecine, de la gestion, de la réglementation…. Mais cela est peu connu du grand public.

Pour revenir à votre question, je ne peux pas me prévaloir d’un quelconque talent littéraire mais je peux juste vous assurer que je suis très passionné de la lecture depuis mon adolescence. Avec les livres, même à 10 ans on peut vivre une expérience millénaire et trouver des réponses à des situations complexes. La lecture permet de se découvrir soi-même, de savoir qu’on sait et se rassurer, de savoir qu’on ne sait pas et d’apprendre, et aussi de se prémunir des affres de ne pas savoir qu’on ne sait pas. Je lis donc en permanence et cela me facilite les choses quand c’est mon tour de rendre en écrivant ! Voilà donc ce que je peux dire sur cette question. Et j’encourage vivement tous ceux qui ont la chance de savoir lire, de vraiment beaucoup lire car c’est la nourriture de l’esprit.

Avec le recul, quelles leçons tirez-vous de l’insurrection et de la période de la Transition ?

D’abord c’est la maturité du peuple souverain du Burkina Faso. Ce peuple fier et travailleur, intransigeant sur l’honneur et la dignité, qui sait souvent fermer les yeux, somnoler parfois sans pour autant dormir mais dont le moindre sursaut d’éveil périodique peut causer des insomnies irréversibles et des exils ! Les principales leçons que j’ai retenues, sont que le peuple éclairé, uni et conscient finit toujours par avoir le dernier mot face à tout pouvoir oppressif, tyrannique et despotique ; ensuite, que la seule voie de salut pour tout pouvoir, c’est d’être en phase avec le peuple, connaitre à temps les aspirations légitimes du peuple et de gouverner au mieux dans la transparence et l’équité en privilégiant toujours l’intérêt commun. En ce qui concerne la transition, malgré toutes les récriminations à l’encontre des principaux acteurs, il faut leur reconnaitre au moins le mérite d’avoir pu organiser les élections jugées transparentes dans un contexte très difficile et d’avoir pu passer la main aux nouvelles autorités élues. C’était leur principale mission.

Depuis quelques mois, le MPP est au pouvoir, comment appréciez-vous sa gestion ?

Effectivement, le président Roch Marc Christian KABORÉ a été investi président du Faso le mardi 29 décembre 2015. Nous sommes donc pleinement dans le 9e mois de sa présidence. 9 mois, c’est aussi la durée normale d’une gestation. En attendant d’accueillir joyeusement le bébé, le peuple devrait au moins déjà voir poindre le déroulement normal de la grossesse, qui est ici le début de concrétisation des promesses électorales du mandat présidentiel. Or on a l’impression qu’il y a un grand immobilisme au sommet de l’Etat. D’abord le temps mis pour former le gouvernement Paul Kaba THIEBA, mais cela se comprend dans une situation de quasi triumvirat nécessitant toujours des longues concertations pour trouver un consensus RSSien.

Les attentats du 15 Janvier et les harcèlements aux postes frontaliers, ont certainement ralenti la propulsion du moteur MPP avec un changement de priorité pour le volet sécuritaire. Globalement sur la gestion du pouvoir MPP, pour l’instant je reste sur ma faim. Je ne sens pas un dynamisme enthousiaste fédérateur, je ne sens pas un élan quelconque patriotique, ni un début de changement de mentalités, un début de changement dans le faire, le faire faire et le savoir-faire dans l’ensemble des strates de notre société. J’ai l’impression que, si rien n’est comme avant, rien non plus n’est mieux qu’avant. J’espère vraiment que ce n’est qu’une fausse impression et que le meilleur de la gouvernance MPP reste à venir mais sans perdre de vue qu’il est dit que quand on suspend longtemps l’os, le chien commence à se décourager.

Pour revenir à votre domaine de spécialisation, les médicaments, vous avez écrit récemment sur la situation de la CAMEG qu’ll n’y a pas de petite querelle….

Effectivement, en tant que pharmacien, donc spécialiste du médicament par essence, tout sujet surtout d’ordre national y afférent m’interpelle à juste titre. C’est pourquoi, dès le début de la crise à la CAMEG, crise consécutive au renouvellement du contrat du directeur général, j’avais estimé que toute contribution citoyenne était utile pour aider à circonscrire rapidement le conflit dans l’intérêt global du peuple burkinabè. Le médicament de par sa spécificité et sa complexité doit toujours faire l’objet d’une attention particulière.

Aujourd’hui, la CAMEG est la seule centrale d’achat du Burkina Faso à importer certains types de médicaments notamment les antirétroviraux et les antituberculeux par exemple tout en dépannant au passage de nombreux pays de la sous-région (Mauritanie, Sierra Léone, Niger, Congo RDC...). Ce sont des médicaments qui ne sauraient souffrir de la moindre rupture au risque majeur de compromettre dangereusement le traitement des patients. Il faut que les uns et les autres aient toujours la lucidité d’écouter ceux qui parlent, ceux qui critiquent, ceux qui conseillent et dont pour rappel, le rôle n’est ni de faire plaisir, ni non plus de faire du tort, mais de gratter sur la plaie pour le seul intérêt de déclencher la nécessité d’un pansement salvateur.

Je me souviens toujours des remontrances et des menaces que j’avais reçues au CHR de Ouahigouya en 2005, quand j’avais été sincère en attestant à la RTB à l’émission Santé MAG que j’avais reçu du ministère de la santé en tout 300 flacons d’ampicilline 500mg pour toute la grande région du Nord pour lutter efficacement contre la méningite ! J’avais bien dit que mon stock me permettrait de traiter à peine une dizaine de patients. Entre mentir pour plaire à une minorité ou dire la vérité dans l’intérêt d’une majorité silencieuse et souvent résignée, le deuxième choix s’imposait. Mal m’en a pris mais c’est vraiment sans regret ! Norbert ZONGO le disait si bien : « Le pire n’est pas la méchanceté des gens mauvais, mais le silence des gens bien ».

Vous suivez donc assidument ce qui se passe à la CAMEG et vous avez même déjà écrit pour rappeler qu’il « n’y a pas de petite querelle » ; comment appréciez-vous l’évolution de cette crise ?

Hélas, le constat est que la crise va crescendo avec une diarchie de fait à la CAMEG ! Deux CAMEG, deux PCA, deux Directeurs, deux camps dans un seul pays. Comment comprendre cette cacophonie ! Chaque camps tient mordicus l’un sûr de sa légalité, l’autre de sa légitimité et la pauvre CAMEG se craquelle, s’effrite, s’émiette et s’enfonce inexorablement dans l’abîme ! Pense-t-on vraiment à la population la plus démunie, qui ne consent à se rendre dans les formations sanitaires que dans l’extrême urgence, sachant que le moindre acte médical, le moindre médicament est un sac de céréales, un coq, un mouton ou une vache de moins ? Dans ce combat sans gloire, le seul perdant sera le Burkina Faso et sa population la plus démunie. Ceux qui le peuvent, au moindre rhume, fendront les airs pour l’occident et malheureusement aux frais du pauvre contribuable qui n’aura que ses yeux rouges pour pleurer la défaillance de la CAMEG.

Dans cette situation malheureuse, ce qui est encore moins compréhensible, c’est le silence absolu et l’indifférence apparente au sommet. Si un père de famille reste dans le mutisme et laisse faire, laisse des membres de sa famille se quereller à longueur de journées sans intervenir, sans régenter, alors, soit il est complice de celui qu’il pense être le plus fort, soit il est un incapable. Il n’y a pas de petite querelle et on a vu l’issue d’une simple altercation entre deux élèves dans un établissement de Koudougou en 2011. Il faut savoir intervenir à temps.

Personnellement, je félicite ceux qui avaient eu la sagesse, la vigilance, la lucidité, la clairvoyance en osant proposer en 1997 les statuts actuels tant querellés de la CAMEG notamment le statut d’association. C’est grâce à ce statut que la CAMEG a connu une croissance staturopondérale fulgurante largement au-dessus de 3 Z-scores depuis son enfance jusqu’à son adolescence actuelle au point de tendre à la fois vers le gigantisme et l’obésité ! C’est ça aussi tout son malheur actuel me semble-t-il ! Otez ce statut d’association à la CAMEG et elle connaitra le même sort que la SONAPHARM. Elle sera à l’image aussi de toutes ces sociétés d’Etat SONABHY, SONABEL et autres toujours perfusées et transfusées mais permanemment en état de déshydratation extrême et d’anémies sévères. De grâce, évitons cela à la CAMEG à tout prix. Jusque-là, elle est incontestablement une réussite et une fierté nationale, la pierre angulaire notre politique pharmaceutique nationale et de notre système de santé.

En tant que spécialiste du domaine, que proposez-vous pour sortir de cette crise ?

Aujourd’hui la sortie de cette crise n’est plus du ressort du seul spécialiste du domaine dans la mesure où, elle est désormais juridico juridique. La justice a donc le dernier mot et elle y joue toute sa crédibilité. Sinon c’était simple, il aurait suffi de rassembler tout le personnel de la CAMEG et chacun s’aligne derrière le PCA et le DG de son choix. Le PCA qui aurait la plus longue file serait le PCA légitime. De même pour le DG. Mais hélas, nous ne sommes ni à Dioulassoba, ni à Bagassi ! (pour faire un clin d’œil à mes parents à plaisanterie, les Bobos)

Ce que je suggère, c’est de dépassionner les débats et se focaliser sur l’essentiel à savoir la priorité en termes d’impact, de retentissement sur la santé publique. In fine il faut que l’esprit de civisme prévale et que chaque acteur se conforme au verdict du dénouement judiciaire à venir. Le civisme commence par le respect de la loi et le premier exemple doit venir du sommet. Il ne faudra pas que l’Etat se discrédite dans cette affaire en voulant imposer quoi que ce soit au risque de perde la confiance des partenaires. Ce sera alors la mort de la poule aux œufs d’or et un énorme gâchis, une perte non pas seulement pour le Burkina Faso mais pour toute la sous-région. Le moindre mal pour la pérennité de la CAMEG, c’est de préserver son statut d’association. Ensuite il faudra procéder à des réformes profondes pour asseoir des organes dirigeants selon des critères de compétence et dans la sérénité et l’unanimité pour éviter toute victoire à la Pyrrhus.

Nonobstant, l’issue du contentieux judiciaire, pour une sortie honorable de cette crise, primo je propose d’entamer dans l’immédiat, une série de révisions des documents normatifs de la CAMEG (statut, règlement intérieur, conventions) à fin de toiletter l’insuffisance des textes querellés et de disposer pour toujours, une CAMEG institution forte à l’abri des humeurs. Secundo, de procéder à la mise en place des instances (Assemblée Générale, nouveau Conseil d’Administration) consensuelles, crédibles et transparentes. Pour la défense de ces dossiers et leur conduite à bons termes, le CA et le DG actuels me semblent mieux outillés sur la connaissance des dossiers en cours que les "nouveaux CA et DG". Bien entendu, le délai de mise en œuvre nécessaire ne saurait dépasser le mandat légal de l’actuel CA.

Tertio, il serait souhaitable qu’à l’image de toutes les structures de la stature de la CAMEG, que tous les documents (organigramme, manuels de procédure comptable, financière et administrative) soient élaborés ou révisés et standardisés. C’est une étape préalable qui permettra à la CAMEG d’aller vers la certification ISO préalable à une démarche de procédure de reconnaissance comme centre collaborateur de l’OMS par exemple. Voici donc une ébauche de pistes qui renforceraient la CAMEG pour en faire une institution forte, crédible et à l’abri des influences externes et de conflits évitables et inutiles. Notre système pharmaceutique et notre système de santé se porteraient mieux et près de 300 agents travaillerons dans la sérénité d’esprit indispensable pour l’atteinte des objectifs nobles de la santé pour tous.

Dr Sondé, votre mot de la fin ?

Je vous réitère mes sincères remerciements pour l’honneur et le privilège que vous m’avez toujours accordés pour souvent dire ce que je pense sur la gestion de la cité. A l’ensemble des filles et fils du Faso, unissons nos forces, que chacun apporte sa pierre édificatrice pour un Burkina meilleur. Ensemble, tout est possible !
Je vous remercie !

Entretien réalisé par Cyriaque PARE
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