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Le Changement au Burkina ? Chronique d’une ère machiavélienne

Publié le dimanche 3 juillet 2016 à 22h54min

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Le Changement au Burkina ? Chronique d’une ère machiavélienne

Les changements de circonstances ou de situations doivent imposer également à l’élu -ou au gouvernant- une modification constante de la manière de faire et de penser afin de réussir sa mission. C’est cela le cours changeant des choses que Machiavel recommande au Prince dans son œuvre du même nom. C’est une lapalissade que de dire le Burkina Faso traverse en ce moment une période fébrile. Si les braves citoyens ont accompli leur devoir avec l’insurrection d’octobre 2014 puis la résistance face au coup d’état du Conseil National pour la Démocratie (CND) en septembre 2015, ceux qui devaient conduire ce vaillant peuple vers une ère nouvelle où plus rien ne sera comme avant ont eu du mal à matérialiser leur pensée en action concrète ou simplement se sont servis au lieu de servir le peuple. Du moins c’est ce qui se laisse croire. Tout comme une révolution menée à moitié n’en est pas une ; une insurrection annonce une ère nouvelle avec des hommes nouveaux autrement elle n’est qu’un simple changement d’hommes ; pas un changement de système. Aujourd’hui, nous avons accordé et à plein gré la légitimité à un homme et son équipe afin qu’ils puissent nous gouverner les cinq prochaines années. N’est-il pas permis d’espérer ?

Depuis l’existence de l’humain sur terre, la nécessité d’avoir un chef qui se chargerait de conduire la masse a toujours prévalue face un désordre innée et incohérent. Cependant, le désormais chef devrait pouvoir combiner douceur et fermeté s’il veut vraiment accomplir la mission pour laquelle il a été désigné. Notre pays le Burkina Faso n’a pas encore fini de vivre son catharsis ; on pourrait même dire qu’il ne se passe pas un jour où l’on n’entend des cas d’incivisme venant de toute part : usagers de la route, responsables politiques, groupes d’autodéfense qui ne veulent défendre qu’eux-mêmes, juristes, OSC, forces de l’ordre et même nos braves agriculteurs et éleveurs dans nos campagnes les plus profondes. En même temps, cela nous fait penser que les ordres nouveaux n’ont pas pu diagnostiquer encore le mal que souffre la société afin de pouvoir lui octroyer les soins adéquats ? Par compromis ou par compromission, les gouvernants ont toujours agi dans l’intérêt partisan avant l’intérêt général. Et pourtant -et à juste titre- l’unique camp qui les trahit c’est celui de l’intérêt partisan. Demandez au régime Compaoré et il vous dira que le peuple n’est jamais complètement soumis. Un dirigeant c’est aussi celui qui sait anticiper. C’est-à-dire se détourner de cette image-écran qu’on lui donne à voir, prendre un peu de recul afin d’en tirer une conclusion adéquate et le plus tôt possible. En reconnaissant de loin les maux qui naissent dans un État, on les guérit vite ; mais quand on les laisse croître de sorte que chacun les reconnaisse, il n’y a plus de remède qui vaille ! La fermeté renforce le pouvoir de celui qui sait l’utiliser quand il le faut ; mais jamais en avance ni jamais en retard. Un gouvernement presque plébiscité devrait pouvoir agir dans le sens du bien commun car c’est en connaissance de cause qu’ils ont été élus. User parfois du bâton au lieu de la carotte ne pourrait dévaluer les bonnes actions de ce gouvernant légitime. Le bâton, dans cette métaphore n’est pas synonyme de répression barbare ; le bâton c’est de faire respecter strictement et scrupuleusement la loi. En démocratie, celui qui ne sait pas user de ce bâton est soit incompétent, soit trempé dans des compromissions. Pendant ce temps, les koglwéogo font parler d’eux ; et avec manière. Peut-être qu’un jour les « miliciens de dimanche » comprendront que nous vivons dans un État de droit moderne, « démocratique » avec ses lois et règlements. Nos gouvernants doivent comprendre aussi qu’il n’y a pas de bonnes lois là où il n’y a pas de bonnes armes au propre comme au figuré. Les institutions fortes que recommande le président Obama rentrent dans le figuré. Dans le sens propre du terme, les bonnes armes sont les forces de l’ordre républicaines et les armes auxiliaires sont celles des milices, mercenaires, étrangères, koglwéogo ? Celui qui fait la part belle aux armes auxiliaires ne sera jamais assez ferme encore moins en sécurité. Il est par conséquent à la merci de ce groupe de défense ou d’autodéfense, de cette milice. Car les armes auxiliaires sont désunies, ambitieuses, indisciplinées et mettraient toujours leur intérêt avant l’intérêt de la nation. L’ex-président Blaise Compaoré, l’aurait appris à ses dépens en confortant continuellement le désormais défunt Régiment de Sécurité Présidentiel (RSP) qui n’était autre chose qu’une « milice » aux ordres d’un homme et son clan. En claire, le salut du dirigeant vient exclusivement dans l’application vertueuse et stricte des lois républicaines ; pas partisanes.

Maintenant que nous pouvons mettre noms et prénoms sur le front de nos élus locaux ; du moins dans les communes urbaines et rurales où il n’y’a pas eu d’échauffourées, tout laisse croire qu’il y’a eu véritablement un changement d’hommes à la tête de l’ensemble de ces communes. Mais comme nous l’avons avancé plus haut, le changement ne doit pas s’arrêter à un remplacement. Ce dont le pays nécessite c’est un changement dans les actes que nos élus vont poser au quotidien ; bon an si le désir des citoyens coïncide avec l’ambition desdits élus pour leur communes. On entre dans la politique pour servir et non se servir. José Mujica, président de l’Uruguay connu aussi sous le sobriquet de « président des pauvres » ne disait-il pas que « il y’a des gens qui adorent l’argent et se mettent dans la politique ; s’ils adorent tant l’argent qu’ils fassent du commerce, de l’industrie ou tout ce qu’ils veulent ce n’est pas grave…Mais la politique c’est pour servir les gens » fin de citation.

Notre pays revient de loin et aucun citoyen burkinabè n’est plus prêt à tolérer un mal gouvernance aussi bien locale que nationale. Les déchirures successives que nous avons vécue avec l’insurrection et le coup d’état manqué ont provoqué un effet pervers : Nous avons le camp des nostalgiques qui continuent de ne jurer que pour l’ancien système ; le camp des désillusionnés politiques qui ont du mal à reconsidérer leur prétention et veulent s’imposer vaille que vaille ; le camp des non-alignés qui sont restés sur leur soif du changement véritable, donc devenus nihilistes. A dire vrai, une telle segmentation de la société burkinabè ne facilite pas les choses aux dirigeants actuels pourtant choisis majoritairement par ce même peuple. Mais quand nous suivons le comportement des concitoyens électeurs, nous nous perdons d’avantage car il n’y’a pas de fait plus insolite que de voter aujourd’hui une liste en toute connaissance de cause et discréditer cette même tête de liste le lendemain en avançant des arguments on ne peut plus bancals. De la même manière – en m’adressant maintenant aux élus- on ne peut pas vouloir diriger une commune en dehors de celle-là. Ceux qui veulent diriger leurs communes rurales à distance ne le feront pas avec vertu ni avec empathie ; ce qu’ils y cherchent c’est le financement de leur confort citadin. Ailleurs ce serait un scandale que de constater que le maire d’une petite localité a préféré résider dans un grand centre urbain. Que tous nos élus se le tiennent pour dit : la rosée du matin arrive la veille au soir. Par conséquent, ceux qui y vont pour réellement travailler dans le sens du bien et du juste trouveront de la fortune ; alors que ceux qui jubilent à l’idée que l’heure est venue pour eux de se remplir les poches et la panse n’auront que leurs yeux pour pleurer à force de regret. Le plus grand travaille qui attend ces responsables locaux fraîchement élus c’est d’abord se confronter à leurs propres citoyens communaux. La confrontation n’est nécessairement pas physique ; elle viendrait des trois camps de notre société segmentée. Beaucoup rejetterons leurs maires pour des questions d’ordre politique, d’autres avanceront des arguments d’incompétence notoire, les derniers tireront sur la fibre ethnico-régionaliste pour saboter ou boycotter les actions du régime en place car nostalgiques de l’ancien système. Mais quoi dire de plus sinon que c’est au pied du mur que l’on reconnait le bon maçon ! Espérons seulement que les appelés à gouverner ont pu capitaliser les différentes leçons de l’insurrection ; car il n’est de changement sans introspection et sans conscience.

Les plus hautes autorités de l’État ont un énorme rôle dans le processus d’apaisement social, de réconciliation, de renouveau tout court…mais avec la carotte et le bâton. Au plan global, la gouvernance actuelle (depuis près de 10 ans déjà) se fonde désormais sur la vérité, la justice, la probité, la simplicité bref, la vertu. Autrement, le régime cours dans le précipice que lui-même aurait aidé à creuser. Le printemps arabe qui enchainât avec d’autres « printemps » en sont l’illustration. Quand le dirigeant s’éloigne de son peuple, il devient aveugle donc ne perçoit pas et ne s’imprègne pas du vécu quotidien de ses concitoyens. Les « grands » qui l’entourent diront toujours qu’il s’agirait d’une manipulation politique mais en réalité ceux-là ne défendent que la conservation de leur privilège.

C’est pourquoi, l’Homme d’État nouveau doit faire fi des « grands » qui l’entourent et procéder par observation directe afin de pouvoir bâtir de nouveaux ordres sur une base légale et au bénéfice de tous. « Il n’y a chose plus difficile à traiter, ni plus douteuse à réussir, ni plus dangereuse à manœuvrer que de prendre l’initiative d’introduire de nouveaux ordres. (…) parce que celui qui les introduit a pour ennemi tous ceux qui tirent avantages des vieux ordres et pour tièdes défenseurs tous ceux qui tireraient avantage des nouveaux ordres ». Machiavel (in Le Prince). Mais le gouvernant prudent sait s’engager sur des voies battues par de grands hommes qui ont existé et/ou qui existent dans son pays où dans un pays tiers. Car c’est le seul moyen d’obtenir progressivement la sympathie du peuple et de satisfaire le peuple. Cette satisfaction du peuple comblerait -à n’en pas douter- le gouvernant de vertu et de fortune…immatérielle.

Lefaso.net
Roland Zongo Sanou, correspondant en Espagne

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Vos commentaires

  • Le 4 juillet 2016 à 06:30, par Le Gouru En réponse à : Le Changement au Burkina ? Chronique d’une ère machiavélienne

    On entre dans la politique pour servir et non se servir. Il y ’a des gens qui adorent l’argent et se mettent dans la politique ; s’ils adorent tant l’argent qu’ils fassent du commerce, de l’industrie ou tout ce qu’ils veulent ce n’est pas grave… C’est malheureusement le triste constat dans le Burkina post insurrectionnel surtout avec certaines responsables du MPP. Pour preuve, il n’est pas rare de les attendre affirmer qu’ils se sont reconvertissent en politique en se faisant élire comme député, question pour eux de se faire de l’argent afin de mieux préparer leur retraite. L’élu en question est à moins de deux (02) ans de la retraite et a passé 17 ans à la tête d’un lycée de la ville de Koudougou. Mais, visiblement elle n’a pas eu l’argent dont elle avait besoin et conséquence, il faut aller à la députation. Mais, c’est se tromper. Ils quitteront l’Assemblé Nationale plus misérable qu’à leur arrivé s’ils ne revisitent leurs intention parce que nous les tenons à l’œil.

  • Le 4 juillet 2016 à 09:20, par le peul En réponse à : Le Changement au Burkina ? Chronique d’une ère machiavélienne

    Ce n’est pas vrai .Il n’y a pas un bobo aussi intelligent pour dire de bonnes choses comme le contenu de cette réflexion . En tous cas chapeau bas petit Bobo .

  • Le 4 juillet 2016 à 09:37, par Lassane En réponse à : Le Changement au Burkina ? Chronique d’une ère machiavélienne

    Visiblement les RSS attendent qu’une gigantesque manifestation vienne les secouer et les rappeler la gravité de la situation que traverse actuellement le BF . Ils oublient que du jour ou le peuple excédé se décidera à sortir pour manifester son mécontentement face à cette insouciance et nonchalance dans la gestion du pays ,la probabilité est trop grande qu’une marrée humaine se déferle sur Kosyam avec les conséquences que tout le monde peut imaginer . C’est dire que le PF gagnerait à agir vite pour restaurer l’autorité de lEtat et à se débarrasser de collaborateurs encombrants,incompétents,quelque soient leur rang au sein du MPP .

  • Le 4 juillet 2016 à 13:00, par boudson le bombardier filitoxeur En réponse à : Le Changement au Burkina ? Chronique d’une ère machiavélienne

    BJT TRÈS BONNE LEÇON DE MORALE POLITIQUE POUR NOS ÉLUS ACTUELS. PLUS RIEN NE SERA COMME AVANT.EN BON ENTENDEUR SALUT

  • Le 4 juillet 2016 à 13:12 En réponse à : Le Changement au Burkina ? Chronique d’une ère machiavélienne

    Ne vous trompez pas, ne rêvez pas non plus. Ceux qui nous gouvernent aujourd’hui ne peuvent pas nous proposer autre chose que ce que nous avons connu sous leurs 27 premières années.

  • Le 4 juillet 2016 à 21:50, par transcendeur En réponse à : Le Changement au Burkina ? Chronique d’une ère machiavélienne

    En tout cas c’est de la merde et il fo qu’’on se mette encore à la rue À bas ce régime RSS copié et même mal mal !!!
    hé roch !!! hé salif !! hé simon !

  • Le 4 juillet 2016 à 23:41, par sidbala En réponse à : Le Changement au Burkina ? Chronique d’une ère machiavélienne

    Pour nous les citoyen lamda les RSS devaient mieux faire que BLAISE COMPAORE. Ils sont suffisamment riches et intelligents, qu’ils ne doivent plus demande l’aide de Blaise ?. Aller en cote d’ivoire pour voir le Blaiso ? alors là il y a problème, il faut que le peuple se mettent debout pour les chasser vers le nord Mali sinon on va mourir de faim, parce que ça veut dire que c’est COMPAORE qui travaillait et eux mettaient le feu partout ?, et comme le peuple aussi avait BIEN MANGER il était devenu bête qu’il a fait tuer la poule aux œufs d’or ; c’est dommage pour l’avenir du pays.

  • Le 7 juillet 2016 à 20:48, par Fly En réponse à : Le Changement au Burkina ? Chronique d’une ère machiavélienne

    Avec ce que nous vivons et constatons depuis l’arrivée des RSS, internaute 5 aura finalement raison si rien ne change !

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