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Situation au Togo : Faure au forceps

Publié le mardi 3 mai 2005 à 08h05min

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Après trois jours de vive tension et d’émeutes, le calme revient progressivement à Lomé, la capitale togolaise.

Avec le soutien de "son" armée, de la CEDEAO et de la Communauté internationale, Faure a donc imposé sa loi dans un pays où l’exode massif des populations vers le Bénin se poursuit.

L’ordre martial règne à Lomé après la bourrasque née de la proclamation des résultats de la présidentielle du 24 avril 2005 qu’une partie de l’opposition avait jugé "nuls et de nul effet". Bob Akitani, le candidat de la "coalition des 6", s’était même auto-proclamé président ce qui n’était pas sans rappeler le scénario malgache où Marc Ravalomanana avait opté pour la même position, précipitant le départ de Didier Ratsiraka du pouvoir.

Mais, le Togo n’est pas Madagascar, et l’opposition togolaise n’a ni les moyens, ni la structuration de son homologue pour "bousculer" Faure Gnassingbé. Infantilisée par Gnassingbé Eyadéma qui a usé et abusé d’elle, cette opposition présentait des fissures avant même le scrutin du 24 avril 2005. C’est ainsi que des "rénovateurs" comme Dahuku Péré, transfuge du RPT et des "modérés" comme Tony Lawson avaient appelé les Togolais à participer au scrutin, alors même que le processus électoral était entaché d’irrégularités criardes.

Même si l’autre "Joker" de Faure, Henri Olympio s’était retracté après la démission spectaculaire du ministre de l’Intérieur, Esso-Boko, le fils, Eyadéma avait bien ficelé son affaire pour présenter à l’opinion internationale un scrutin "propre". Il ne restait plus que les intérêts du peuple togolais à sauvegarder mais comme on le sait, les intérêts des peuples africains sont souvent passés par pertes et profits au profit d’autres plus capitaux.

Le triomphe du réalisme ?

La paix des cimetières de Faure n’a donc pas rencontré une levée de boucliers à la hauteur du forfait (plus de cent morts et des milliers de blessés), ce qui s’explique aisément. Après la crise ivoirienne, ni la puissance tutélaire, ni la sous-région n’avaient besoin d’une autre guerre civile.

Avec un budget du ministère de la Défense rapetissant comme peau de chagrin, la France n’a plus les moyens de sa politique africaine, son incapacité à résoudre la crise ivoirienne illustrant cette assertion. Si le Togo entre en zone trouble, "le précarré du précarré" serait définitivement perdu. Déjà, les Américains ont "montré les dents", après la démission du ministre Boko, même si eux aussi semblent se raviser en raison du sacro-saint principe de la "communauté d’intérêts".

Quant aux "barons" de la sous-région particulièrement pour les pays de l’hinterland, une crise prolongée au Togo les plongerait eux-aussi en crise. Lomé est devenue une plaque tournante du commerce sous-régionale en attendant qu’Abidjan cesse de "tousser".

Alors, le réalisme doit être de mise, même si "quelques cadavres" sont venus allonger la longue liste des Gnassingbé père et fils. C’est à ce niveau qu’il convient de mettre un bémol à l’optimisme ambiant, car, "si le sorcier oublie toujours, la mère de la victime a la mémoire vivace". Malgré sa "pauvreté" intellectuelle, matérielle et organisationnelle, l’opposition togolaise conserve toujours une certaine capacité de nuisance.

Le peuple ayant "marre" du "système Gnass", il attendra le moment opportun et les soutiens éventuels pour rebondir. Pour avoir banalisé la demande sociopolitique en Côte d’ivoire, les dirigeants du pays l’ont plongé dans une guerre civile qui ne finit pas de finir.

En faisant le même calcul au Togo, on espère seulement que les uns et les autres ont prévu des balises pour éviter au Togo de déraper. Pour l’heure, Faure est passé au forceps, et l’ordre règne à Lomé. Pour toujours on l’espère.

Boubakar SY
Sidwaya

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