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Réduction du mandat présidentiel au Sénégal : Le Conseil constitutionnel tranche le débat

Publié le jeudi 18 février 2016 à 00h21min

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Réduction du mandat présidentiel au Sénégal : Le Conseil constitutionnel tranche le débat

Le mandat en cours du président sénégalais Macky Sall s’achève en 2019. Le référendum constitutionnel est prévu le dimanche 20 mars prochain, et le Chef de l’Etat appelle à voter oui. Au lendemain de cette annonce, la presse sénégalaise titre sur cette actualité.

La décision du chef de l’Etat, Macky Sall, de poursuivre son mandat actuel jusqu’à son terme, suivant l’avis du Conseil constitutionnel, est le sujet le plus en vue dans la livraison de mercredi de la presse sénégalaise, en même temps que les implications politiques de cette annonce. Ce renoncement était prévisible, analyse Walf Quotidien, à Dakar. « De 2012 à 2015, Macky Sall avait promis urbi et orbi, juré sur tous les dieux, sans jamais faire référence au Conseil constitutionnel, de réduire la durée de son mandat. Mais, au finish, le Président a renié son engagement ». Pourquoi ? Parce que dès le départ, affirme Walf Quotidien, les faucons de son parti étaient contre : « au plan juridique, ils affirmaient que réduire le mandat, c’était violer la constitution. Et au plan politique, ils estimaient qu’un président nouvellement élu ne pouvait rien faire en cinq ans ». Résultat, poursuit Walf Quotidien, « lors de son discours à la Nation le 31 décembre dernier, Macky se ligote. Il affirme, en effet, son intention de recueillir les avis du Conseil constitutionnel et du président de l’Assemblée nationale avant de soumettre son projet au peuple. Et ce qui devait arriver arriva… ».

Ce renoncement est alors perçu comme un retour à la case-départ, après beaucoup de temps perdu et beaucoup d’énergie dépensée. Pour sen360, Macky Sall court le risque d’une rupture avec le Peuple comme Wade l’avait subi en 2011, à cause de la célèbre dédite relative à son troisième mandat. « Macky Sall devra trouver des ressources pour regagner la confiance des citoyens qui peuvent désormais avoir de bonnes raisons de ne plus croire aux engagements présidentiels » écrit sen360.

De son côté, La Tribune s’exclame : « Macky Sall obligé à 7 ans ». Tout ça pour ça, déplore le quotidien dakarois : « le président a violé son engagement et sa parole donnée. Il n’avait pas le choix ! Mais n’aurait-il pas dû avoir le choix ? ». Avant de soupirer, « le débat est là ! Il avait répété à l’envie qu’il allait réduire son mandat de sept à cinq ans. Était-il certain qu’il n’en avait pas les possibilités ? (…) Macky Sall n’a donc pas pu respecter son engagement. Il ne pourra pas être l’exception espérée dans ’le marigot africain aux caïmans affamés de pouvoir ».

« Macky justifie son quinquennat », titre Sud Quotidien, dans lequel journal, le président Sall promet : « j’entends me conformer à la décision du Conseil constitutionnel ».

A la vitesse avec laquelle les choses se passent, le parti présidentiel semble être son prochain adversaire qui risque de saper la dynamique et l’élan de la réélection du candidat Macky Sall aux prochaines joutes électorales, résume La Tribune.

Réactions politiques et civiles

Joint au téléphone par RFI, Fadel Barro, l’un des leaders du mouvement « Y’en a marre », affichait un profond désarroi. « C’est une immense déception. Le pays stagne une fois de plus dans la politique politicienne. Macky Sall avait une occasion unique de tourner le page. C’est un gâchis pour le pays » a-t-il déclaré.

Dans un premier communiqué, le PDS, le parti d’Abdoulaye Wade, a réagi de façon très laconique. Le PDS rappelle que « l’opposition, qui est un maillon essentiel de notre système politique, n’a pas été associée au processus de réformes engagées ».

Le Coordinateur du Forum civil, joint également au téléphone, Mouhamadou Mbodj a indiqué : « c’est une grande frustration pour la population. L’Histoire nous a assigné une responsabilité à l’échelle locale, à l’échelle de l’Afrique. Il fallait dépasser les questions de droit et afficher une volonté humaine ».

Un exemple pour le continent ?

A l’opposé de certains médias, la presse de la sous-région est beaucoup moins critique ; au contraire, elle dresse même des lauriers au président sénégalais… Pour le journal Le Pays, c’est une belle leçon de morale politique. « Macky Sall a d’autant plus de mérite que son action intervient à un moment où, toute honte bue, beaucoup de ses pairs africains se sont engagés dans les chemins boueux du tripatouillage constitutionnel dans le but de prolonger leur bail à la tête de l’Etat par des moyens aussi tordus que répressifs » a-t-il dit. Une fois de plus, le Sénégal donne l’exemple, s’exclame encore Le Pays, et confirme sa posture de phare de la démocratie sur le continent. « En tout état de cause, le quatrième président sénégalais aura joué sa partition et marqué l’esprit des démocrates du continent en s’affichant comme une exception démocratique dans un océan de dictatures. Honte donc à tous les fossoyeurs de la démocratie sur le continent, eux qui voient le pouvoir politique comme un marchepied exclusif vers les richesses et les honneurs de leurs familles et de leurs clans » a expliqué le journal.

Enfin, l’Observateur Paalga s’interroge sur les motivations profondes de Macky Sall : « le candidat Sall, au lieu de balancer ainsi à la cantonade au détour d’un meeting une telle chose, aurait pu prendre la peine de consulter ses experts en droit pour voir d’abord la faisabilité de l’opération. A moins, que ce ne fût tout bonnement pour se faire plus vertueux qu’il ne l’était, un exercice d’enfumage en toute connaissance de cause comme les politiciens savent si bien le faire ». Quoi qu’il en soit, conclut L’Observateur Paalga, il risque d’y laisser quelques plumes mais, en attendant, cette situation fait des heureux dans son camp « car, dans nos pays, où pouvoir rime toujours avec avoir, nombreux étaient ceux qui voyaient d’un très mauvais œil le raccourcissement du mandat qui aurait été aussi du même coup celui de leurs privilèges ».

Aïssata Laure G. Sidibé
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 18 février 2016 à 08:49, par OCy En réponse à : Réduction du mandat présidentiel au Sénégal : Le Conseil constitutionnel tranche le débat

    Par principe, je ne suis pas contre les septennats ou les mandats illimités. Si nous prenons le quinquennat pour quelqu’un qui vient de prendre le pouvoir. Combien de temps il prendra à la première année pour prendre véritablement ses marques. Et à sa dernière année de quinquennat, sa vraie préoccupation c’est comment faire pour être réélu avec surtout des stratégies de campagne. Les années pleines de travail sont en réalité les trois ans.
    Pour le nombre de mandats limité à deux, cela revient à dire qu’il y a possibilité d’avoir un ancien président tous les cinq ans ou tout au plus dix ans. Combien coute un ancien président ? J’ai eu la chance d’avoir une idée sur ce qui pourrait couter un ancien président en France (sur internet), et au Burkina, au Sénégal et en Afrique en général ? Nos élections coutent déjà trop chère (et la honte est qu’elle est financée en partie par l’extérieur) et il y a des vrais problèmes au niveau de l’alimentation en général (eau, nourriture), de la santé, de l’éducation et autres. Nous devons être capables d’inventer notre propre façon de nous diriger et de résoudre nos problèmes.
    A dire vrai, j’étais pour le départ de Blaise COMPAORE, pour l’insurrection parce sous Blaise COMPAORE il y a eu trop de sang coulé et autres souffrances mais pas contre les mandats illimités

  • Le 18 février 2016 à 10:55, par WAtt En réponse à : Réduction du mandat présidentiel au Sénégal : Le Conseil constitutionnel tranche le débat

    De toutes les façons si le souhait du peuple sénégalais est de voir le mandat présidentiel passé de 7ans à 5ans, il va l’obtenir. En Afrique francophone, en matière de maturité politique je pense que le peuple sénégalais est mieux placé. c’est ma façon d’apprécier.

  • Le 18 février 2016 à 11:56, par Tapsoba R(de H) En réponse à : Réduction du mandat présidentiel au Sénégal : Le Conseil constitutionnel tranche le débat

    @ Watt,sauf que ce n est pas le peuple qui l avait forcé à promettre la reduction de son mandat actuel de 7 à 5 ans.Le peuple qui l a élu savait que le mandat présidentiel était de 7 ans renouvelable (une fois ?).Il a battu campagne sur la base d un projet de société à mettre en oeuvre durant son mandat de 7 ans et il a été élu.Il a promis réduire les mandats présidentiels (promesse née au deuxième tour de la présidentielle,était-ce une stratégie pour bénéficier du soutien des perdants ???) il aurait pu demander l avis du CC de son pays si cette réduction pouvait être applicable sur son mandat en cours avant de s y engager.Le peuple s émeut plus par sa promesse sans précaution qui le discrédite maintenant que la durée du mandat elle même.Sinon ,il aurait pu exiger la reduction de la durée des mandats depuis 2011 lors de la derniére révision constitutionnelle.

  • Le 18 février 2016 à 14:23, par Le Saint En réponse à : Réduction du mandat présidentiel au Sénégal : Le Conseil constitutionnel tranche le débat

    Si cette réduction n’est pas une manière de faire un mandat de plus que prévu, c’est une bonne chose. Car nous avons vu certains Présidents Africains, faire modifier la durée du mandat présidentiel et dire que leur mandat en cours en est exclu. Ce qui s’ouvre généralement à une instabilité politique. J’espère que ce n’est pas l’intention de Macky SALL, mon Président.

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