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Commémoration des journées des 30 et 31 octobre : Dans l’inconfort psychologique de la reforme constitutionnelle en attente

Publié le vendredi 30 octobre 2015 à 16h13min

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Commémoration des journées des 30 et 31 octobre : Dans l’inconfort psychologique de la reforme constitutionnelle en attente

Les autorités de la transition ont initié, depuis le 27 octobre, des activités pour commémorer le soulèvement populaire des 30 et 31 octobre 2014. Entre recueillement, prières, dépôt de gerbes de fleurs, inauguration de stèle, le symbolisme de la commémoration est omniprésent. Symbolisme mais pas de miracle, car un an après le départ de Blaise Compaoré, les problèmes sociaux des Burkinabè demeurent nombreux. Que dire de la reforme constitutionnelle en attente ? C’est l’un des importants chantiers que la transition va laisser au nouveau pouvoir issu des élections à venir.

Le discours du président Michel Kafando devant les députés du Conseil national de transition ce 27 octobre avait les allures d’un adieu. C’est en tout cas, entre autre sens, celui que certains observateurs donnent à cette visite au parlement. Un adieu non sans une portée de gratitude envers ces parlementaires spéciaux dont la représentativité a souvent été mise en cause tant il est vrai qu’ils n’ont pas été élus. Qu’importe ! Pour Michel Kafando, le CNT a été avec le gouvernement de grands acteurs de la légitimité de la transition car pour lui, « la légitimité est, avant tout, la claire conscience que l’on a de servir son pays à l’appel du peuple ». Soit ! Mais comment mesurer cet appel du peuple sans l’aune des urnes ? Car même les dictateurs les plus abjects, disent inscrire leurs actions, leur emprise sur les leviers de l’Etat à l’appel du peuple. Suivez notre regard vers la Corée du Nord, vers la Syrie ou le Congo Brazzaville.

Mais on comprend l’hommage du président de la transition à l’endroit des députés du CNT. Beaucoup de Burkinabè avaient douté de la capacité de cette chambre à remplir son rôle de parlement. A l’arrivée, il y a plus de peur que de mal même si une grosse tâche noire, l’article 135 du nouveau code électoral, restera à jamais dans les mémoires. Cet article est la preuve que les lois votées par le parlement de la transition restent perfectibles et n’ont pas toujours servi la cause nationale mais plutôt la politique des vainqueurs contre les vaincus de l’insurrection populaire.

Au demeurant, Michel Kafando a implicitement reconnu dans son discours devant les parlementaires que la transition n’a pas réglé tous les problèmes des Burkinabè. A ce propos, sur le plan institutionnel, son plus grand regret, c’est que les autorités de la transition n’aient pas pu conduire le Burkina à une cinquième république. La vérité est qu’elles n’avaient pas le temps matériel pour conduire cette reforme majeure encore que, au sommet de l’Etat, elles n’ont pas toujours parlé le même langage à ce propos.

En effet, si on a pu noter chez le président du CNT, une franche volonté d’aller à cette reforme, au contraire, le président Kafando freinait quelque peu ses ardeurs sur la question. On se rappelle que c’est depuis son séjour à Paris, qu’il avait émis des réserves voir un refus net à l’idée des députés du CNT d’aller rapidement à un changement de république. C’est sans même attendre de revenir au bercail pour voir la teneur des débats, les arguments des pro et anti passage à une cinquième république que Michel Kafando avait tranché d’autorité dans le vif, depuis les bords de la Seine, comme aiguillonné par le Coq gaulois. Dès lors, les regrets exprimés aujourd’hui résonnent comme un mea culpa tardif du président Kafando. La transition n’a plus le temps matériel de traiter cette grande question et le conseil des ministres de mercredi dernier a définitivement clos la question, aidé en cela par l’accueil plus que mitigé que les partis de l’ancienne opposition ont réservé à ce projet.

Pourtant la reforme constitutionnelle est l’une des recommandations de la Commission de réconciliation nationale et des reformes car il faut faire remarquer que les dispositions de l’article 37 et sur le sénat demeurent en l’état dans notre loi fondamentale. Quand on sait qu’elles ont constitué le casus belli qui a conduit à l’insurrection populaire, on se demande pourquoi le CNT a trainé les pieds à verrouiller l’un, l’article 37, et à supprimer l’autre, celui portant création du sénat. Cette attitude des parlementaires de la transition, est comparable à celui d’un malade qui refuse de prendre le remède pour lequel il s’est endetté à la pharmacie.

Supposons un instant que le prochain président se donne d’autres priorités que celle de convoquer rapidement une constituante afin que le référendum constitutionnel puisse être couplé aux élections municipales dès le 31 janvier 2016 ? Le scénario est dans le domaine du possible tant il est vrai que beaucoup d’observateurs parient que les élections couplées des municipales et du référendum constitutionnel n’auront pas lieu à la date indiquée par le chronogramme actuel. Par l’absurde, s’il venait à turlupiner dans la tête du prochain président de ne pas verrouiller l’article 37 ni même supprimer le sénat, le Burkina sera dans de beaux draps. Les draps de la case départ d’une insurrection qui n’aura pas réglé les problèmes fondamentaux qui ont entrainé son éclosion.

A la vérité, les insurgés d’octobre 2014, célèbrent leurs martyrs dans un inconfort psychologique bien réel, celui de n’avoir pas supprimé les raisons qui ont vu naître le mécontentement contre l’ancien régime : la volonté de modifier la constitution. A défaut d’avoir pu réunir une bonne constituante, la transition aurait pu se contenter du minimum possible en la matière : verrouiller l’article 37 de la constitution, y supprimer les dispositions sur le sénat, par un vote des députés du CNT et cela en attendant un passage en bonne et due forme à une cinquième république. Il reste encore trois bonnes semaines pour éviter le ridicule. On attend de voir !

Derbié Terence Somé
Pour Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 30 octobre 2015 à 17:39 En réponse à : Commémoration des journées des 30 et 31 octobre : Dans l’inconfort psychologique de la reforme constitutionnelle en attente

    je ne vois aucun problème dans ça ! nous avons ainsi de bonnes raisons de ressortir encore ! et c’est tant mieux !

  • Le 30 octobre 2015 à 17:42, par le russe En réponse à : Commémoration des journées des 30 et 31 octobre : Dans l’inconfort psychologique de la reforme constitutionnelle en attente

    Les pays que tu traites de régime dictatorial ne le sont pas en réalité. C’est parce qu’ils ont réfusé la pensée unique de l’axe du mal et du chaos avec à sa tête les USA. Si ces pays se ralliaient à cet axe du mal, on les blanchira. Quand à la transition, elle a été jalonnée de déception, de tatonnement et de bricolage avec des arrivistes(car un cercle d’amis bien connu qui a confisqué notre insurrection). En plus, la transition s’est dit : on est là pour 12 mois, on ne peut tout regler ; on fait ce qu’on

  • Le 30 octobre 2015 à 19:14, par kiemde En réponse à : Commémoration des journées des 30 et 31 octobre : Dans l’inconfort psychologique de la reforme constitutionnelle en attente

    bonsoire juste felicites les autorites de la transition pour les visions noble en marquant un arret pour se souvenir de nos marthyrs je leurs tire mon chapeau que nos marthyrs repose en paix.ceux que le gouvernement dechu a fait en 27 ans la transition a fait la moitie en 1An.

  • Le 30 octobre 2015 à 19:30, par FGH En réponse à : Commémoration des journées des 30 et 31 octobre : Dans l’inconfort psychologique de la reforme constitutionnelle en attente

    Monsieur SOME, vos peurs peuvent se comprendre mais vous semblez tout de même en retard d’une guerre voire de trois, dans cette façon de seriner la question du passage à une Ve république et des suppositions que le prochain Président ne puisse pas en faire sa priotité. D’abord, toute la classe politique, l’ancienne opposition en tête, est tout à fait d’accord et l’a affirmé à plus d’une reprise, qu’il faut passer à une autre constitution... Ensuite, cette classe politique a bien apprécié le rapport de la commission de réconciliation et des réformes comme étant une bonne base pour aller vers cette réforme constitutionnelle voulue par tout le monde ; elle dit seulement (et ce n’est pas la faute à la classe politique ni aux autres composantes sociales du pays si cette commission a délivré son rapport à la veille des élections du 11 octobre 2015) qu’il ne suffit pas d’avoir réuni une commission et de soumettre ses travaux à l’ Assemblée de transition pour changer durablement un système qui nous a tenu 27 ans durant ! Tout le monde devra avoir droit à la parole avant qu’on soumette le produit à référendum, pas moins ! Enfin, si vous ne le savez pas, demandez et on vous communiquera les programmes de plusieurs candidats à la présidence du Faso (parmi lesquels les candidats les plus crédibles) dans lesquels ils délivrent même un agenda pour cette réforme constitutionnelle majeure ! C’est vrai que l’appétit vient en mangeant, mais ce n’était pas la mission du gouvernement de transition telle qu’elle a été définie par les signataires de la charte... Donc, avançons seulement et évitons de spéculer sur le sexe des anges ou de prêter des intentions aux autres, car le peuple Burkinabè est désormais mûr...

  • Le 30 octobre 2015 à 22:55, par OZ En réponse à : Commémoration des journées des 30 et 31 octobre : Dans l’inconfort psychologique de la reforme constitutionnelle en attente

    Faut-il vous rappeler que "la Commission des affaires générales, institutionnelles et des droits humains du CNT a saisi le Cadre de concertation des partis politiques par correspondance du 16 octobre dernier pour l’informer de son initiative visant à proposer la modification de la Constitution de juin 1991. Cette lettre invitait le CCPP à lui reverser ses amendements par écrit et à lui consacrer, dans cette dynamique, une séance de travail le jeudi 22 octobre." Le CCPP a proposé, face à la volonté du CNT de modifier 90 articles sur 172, une modification technique limitée au verrouillage de l’article 37 et à l’annulation du Sénat.
    Cette réforme est en cours. On peut se demander à quoi sert votre article, sinon à mettre le doute sur les intentions de la Transition.

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