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Football burkinabè : Les racines du mal

Publié le mardi 29 mars 2005 à 07h50min

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La défaite logique des Etalons samedi dernier au stade du 4-Août face à l’équipe nationale du Cap-Vert en même temps qu’elle hypothèque grandement leurs chances de qualification à la CAN 2006, replonge notre football dans la quadrature du cercle après l’éclaircie de 1998.

Un diagnostic sur les maux qui minent notre football s’impose donc, afin que le travail entrepris pour son développement ne soit un perpétuel recommencement.

En octobre 1995, après deux décennies de galère passées à contempler le gotha du football continental en découdre lors des phases finales de la CAN, le football burkinabè se qualifie enfin pour l’une de ses phases finales. Après Ghana 1978 où nous étions grâce à un concours de circonstances (les Etalons avaient remplacé au pied levé un pays disqualifié) la "guerre de libération nationale" décrétée par l’entraîneur d’alors, Traoré Drissa "Saboteur" portait ses fruits et le peuple burkinabè célébrait ses nouveaux héros. Malheureusement, cette guerre de libération, allait vite retransformer en guerre de tranchées entre protagonistes du football burkinabè, hypothéquant sérieusement les chances de plein épanouissement de celui-ci. A ce propos, l’ex capitaine des Etalons, Ousséni Diop aujourd’hui décédé, résumait assez bien la situation dans une interview accordée à Sidwaya Sport (n°101, P10).

Diop affirme que "quand on a commencé les éliminatoires de la CAN (celle de 96 en Afrique du Sud) personne ne croyait en nous. Or, dès que les Etalons ont commencé à évoluer, ça a commencé à marcher et les gens se sont mis à croire...Quand la qualification est arrivée, chacun voulait mettre son pied dedans. Je pense que c’est à partir de là que les problèmes ont commencé". Des propos qui situent de façon assez claire le début des bisbilles qui depuis, ont entouré la gestion des Etalons et qui sont allés crescendo au point qu’aujourd’hui, nous sommes entrain de perdre tous les acquis engrangés depuis 1996. C’est qu’à force de vivre des problèmes jamais solutionnés au nombre desquels, une navigation à vue, une gestion opaque dans laquelle le nom du président du Faso est le "sésame ouvre-toi", tout cela dans une absence des réglementations et une inapplication de celle existante. Notre football ne pouvait que foncer droit dans le mur, et cela malgré l’éclair dans la grisaille que constitue la CAN 98.

Négligence au quotidien

Le premier mal de notre football nonobstant l’absence de réglementation réside dans le manque d’amour et "l’incompréhension" de ce sport de la part de ses dirigeants.

Nous pesons bien nos mots, car, à l’exception de l’équipe Badini qui avait eu le courage historique et l’honnêteté intellectuelle de démissionner au vu des résultats catastrophiques, (curieusement nos Etalons produisaient à l’époque un des meilleurs football dans le droit fil de l’école est-européenne, tout en rigueur) aucune autre fédération n’a emprunté ce chemin. Or, mis à part la parenthèse de la CAN 98, fruit des moyens et de la mobilisation que l’on sait, le football burkinabè n’a cessé de végéter dans les profondeurs en Afrique. Plutôt que de battre leur coupe et de tirer les conséquences qui s’imposent, nos dirigeants préfèrent prendre les effets pour les causes en limogeant à tour de bras les entraîneurs. Cela pour les remplacer par des entraîneurs de seconde main et s’immiscer grossièrement dans le travail de ceux-ci, en leur réclamant par exemple le rajeunissement des cadres. Après le "limogeage-gag" du "docteur" Tealman avec une hémorragie financière à la clé, on a assisté à ceux des duettistes Sidiki Diarra et Sap Olympic, de Didier Notheaux, Jean-Paul Rabier, et tout dernièrement d’Ivica Todorov, alors que le Yougoslave avait presque fini son travail de "laboratoire". On saute donc les fusibles, là où on devrait soi-même sauter et cela dans le but inavoué de préserver un "gombo" frais et juteux. Le "gombo" justement semble être l’alpha et l’oméga de l’engagement de nos dirigeants qui n’hésitent pas à aller crier misère auprès du "premier capitaine des Etalons", alors que les sponsors, l’allocation annuelle de la FIFA et l’esprit d’initiative, devaient leur permettre de vivre décemment. Si l’on ajoute à cette option, l’inculture footballistique de nombre de nos dirigeants qui se traduit au quotidien par des "programmes de développement du football à la base" qui tardent à produire des effets, on mesure la profondeur du gouffre dans lequel notre football se trouve plongé.

"Pourri" par le politique

Le plus grand problème du football se trouve donc dans la carence et le flou artistique qui entourent sa gestion. C’est que du fait que jamais dans notre pays, le sport en général et le football en particulier, n’ont été soutenus par le politique, les dirigeants se couvrent du manteau de celui-ci pour faire taire, les critiques. La première conséquence de l’amour qu’a Blaise Compaoré pour le football est que les dirigeants polarisent toutes leurs énergies sur les Etalons. Le programme de la FBF, ses actions... tout tourne autour de l’équipe nationale parce qu’il faut plaire au PF. Les équipes de DI, le championnat national de D II, et autres activités sont fonction du vécu de cette équipe. Au point que la rumeur lui attribue certains changements d’entraîneurs. Il parait même que pour les maillots, c’est lui qui "casque" de même que pour les stages à l’extérieur et les primes. En fait, il y fait tout, sauf qu’il ne joue pas. Certains dirigeants ont donc pour arguments, "le président a dit".." ou encore "il faut aller voir le président", au point que l’irresponsabilité est devenue la chose la mieux partagée dans certains milieux dirigeants. Les structures sont inféodées aux arguments suscités et les hommes deviennent de simples faire-valoir.

Pendant ce temps, les clubs, viviers de l’équipe nationale sont devenus la cinquième roue du carrosse. Il y a urgence à laisser le football vivre les réalités du Faso et, a défaut de nous apporter la glaire dans l’immédiat, il mûrirait certainement. Manque de vision prospective, manque d’amour pour le football, culte de "l’argent-roi", vide juridique et donc organisationnel voilà les racines des maux qui minent notre football et le contraignent à faire du surplace.

Le Cap-Ver n’est qu’une "péripétie" dans cette descente aux enfers, et il importerait que l’on sache enfin qui fait quoi et surtout avec quels moyens si l’on veut sortir de ce cercle infernal et de ces querelles de préséance pour faire amorcer à notre football un réel décollage. La balle est dans le camp des décideurs et plus particulièrement du "premier capitaine des Etalons", Blaise Compaoré, considéré à tort ou à raison comme le "gourou" du Faso foot.

Boubakar SY
Sidwaya

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