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BOBO DIOULASSO : Que reste-t-il de la rencontre Compaoré-Gbagbo ?

Publié le jeudi 4 décembre 2003 à 11h26min

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Le président ivoirien Koudou Laurent Gbagbo a effectué le 26
novembre dernier, une visite dite d’amitié et de travail au Burkina Faso. C’est à Bobo, capitale économique du Pays des hommes intègres, que le chef de l’Etat burkinabè est venu accueillir son homologue ivoirien.

Au pied-à-terre du président du Faso à
Lafiabougou, les deux hommes d’Etat ont passé au crible la
situation qui prévaut en Côte d’Ivoire.
Une semaine après, que pensent les Bobolais de ce passage
du président ivoirien au Faso ? Nous avons donné la parole à
l’homme de la rue à Bobo Dioulasso. Si certains apprécient ce
périple de l’homme fort d’Abidjan, d’autres se disent déçus. Ils le
disent sans gêne et ne croient pas du tout à un lendemain
meilleur des Burkinabè en Côte-d’Ivoire sous le régime actuel
ivoirien. Malgré la rencontre Compaoré-Gbagbo de la semaine
dernière.

Charles Ardiouma Ky : "Gbagbo est un mercenaire"

Ce voyage de Gbagbo au Burkina, particulièrement à Bobo,
n’était pas le bienvenu parce que le président ivoirien reste et
demeure pour l’instant, un mercenaire pour les populations
étrangères de Côte d’Ivoire. Et normalement, tant qu’il ne se
montrera pas plus humain, nous ne devrions pas le recevoir
chez nous. Avec le président Blaise Compaoré , il a été surtout
question de paix au bord de la Lagune Ebrié. Mais, je suis
d’avis que cette rencontre ne changera rien à la situation
actuelle du pays de Gbagbo.

Fatié Traoré : "Aux Burkinabè c’est une insulte"

La présence de Gbagbo à Bobo Dioulasso la semaine dernière
est une sorte d’insulte de plus de ce président à l’égard du chef
de l’Etat burkinabè et de son peuple. Personne ne devait
accueillir ce criminel sur le sol burkinabè tant que nos
compatriotes continueront à vivre en insécurité en Côte d’Ivoire.
Je suis très dépassé par cet événement parce que ce n’est pas
évident que présentement, Blaise puisse aller en Côte d’Ivoire
sans qu’il ne se tienne des manifestations hostiles à cela.
Gbagbo n’a jamais pensé du bien des Burkinabè et des
Africains. Jusqu’à la fin du soit disant mandat de Laurent
Gbagbo, les Burkinabè vivant en Côte d’Ivoire n’auront jamais la
paix. Et comme Guéï l’a très bien dit, c’est un vrai boulanger ; il
mène toujours les gens dans le même bateau.

Adama Damo : "Pas de paix tant que Gbagbo sera au pouvoir"

En tant que citoyen burkinabè, on ne devait pas du tout recevoir
l’actuel président ivoirien à Bobo. Parce que, à peine était-il-chez
nous, que les excitations continuaient de plus belle dans son
pays. Et, avec sa venue, nos autorités nous avaient refusé le
passage pour aller à Lafiabougou. Cela n’est pas normal pour
un chef d’Etat comme Gbagbo qu’on ne veut pas sur notre sol.
Avec cette rencontre Compaoré-Gbagbo, il ne faut pas se
leurrer, il n’y aura pas la paix en Côte d’Ivoire. Demain n’est pas
la veille. On veut que la Côte d’Ivoire retrouve sa sérénité d’antan.
Mais pour qu’elle en arrive là, il faut que Laurent Gbagbo s’en
aille, qu’il quitte le pouvoir. Qu’il quitte le pouvoir et que nos
compatriotes vivent dans la quiétude là bas. Un point c’est tout.

Amadou Diop : "Il faut rester prudent"

La Côte d’Ivoire et le Burkina sont liés. Et Blaise Compaoré a
été sage en rencontrant le président ivoirien pour échanger sur
le problème ivoirien. Mais, tout le monde sait que si Gbagbo dit
une chose aujourd’hui, demain il dit le contraire. Même si son
arrivée au Burkina est à saluer, il faut toujours rester prudent et
l’avoir à l’oeil, car il y aura toujours la casse en Côte d’Ivoire. On
ne peut donc pas s’amuser à penser que sa rencontre avec
Compaoré va changer quelque chose. Le cas de Gagnoa est
très révélateur. Ce serait impossible que la paix revienne en
Côte d’Ivoire sous le régime Gbagbo. Le problème foncier ne
pourra pas finir dans ce pays. Avec ce voyage, les citriques de
Gbagbo à l’encontre du président du Faso peuvent diminuer
mais le problème clé de la Côte d’Ivoire restera idem tant que
Gbagbo sera au pouvoir.

Karim Ouattara : "Gbagbo peut revenir à de meilleurs
sentiments"

La rencontre Compaoré-Gbagbo de la semaine dernière à
Bobo est une très bonne chose parce que tout le monde
attendait un tel moment car la Côte d’Ivoire et le Burkina sont liés
par l’histoire. Et il fallait impérativement ça pour que les choses
redeviennent normales. Pour le moment, on ne peut pas
s’aventurer à dire que les relations seront réchauffées de prime
abord, mais, cela peut -être un début de solutionnement.
Lentement mais sûrement, Laurent Gbagbo va peut-être revenir
à de meilleurs sentiments pour que les Forces nouvelles
réintègrent le gouvernement. Il a intérêt à faire cela, vu l’intérêt de
tout le monde.

Seydou Ouédraogo : "J’accuse les autorités"

La présence de Gbagbo au Burkina la semaine dernière, est
une preuve de maturité politique. En politique, il n’y a pas d’amis,
il n’y a que des intérêts. A ce sujet, c’est parce que Compaoré et
Gbagbo avaient quelque chose à se dire qu’ils se sont
rencontrés. Depuis la Haute Volta, le lien entre nous et la Côte
d’Ivoire a toujours existé et existera toujours même si les
dirigeants ne le veulent pas. Les populations ivoiriennes et
burkinabè veulent la paix. La guerre est une émanation de la
politique et j’estine que nous devons faire aujourd’hui le pardon
et repartir sur de nouvelles bases pour reconstruire les deux
pays qui ont un destin commun. Quand deux personnes qui ne
voulaient pas se voir décident de se rencontrer, c’est qu’il y a un
pas que les deux veulent franchir. 90% des conflits résultent
d’un manque de communication. Les massacres de Burkinabè
en Côte d’Ivoire existent depuis 1982, mais se sont exacerbés
ces dernières années. Et j’accuse les autorités burkinabè de ne
pas prendre la sécurité des Burkinabè à bras le corps. Qui sait
combien de Burkinabè sont morts en Côte d’Ivoire ? Les
dirigeants burkinabè, s’ils sont compétents, doivent prendre
des décisions dans l’intérêt des populations. Le Burkina devrait
s’ingérer en Côte d’Ivoire. Il y a là-bas plus de 2 millions de
Burkinabè. C’est de bonne guerre.

Alain Coulibaly : "Gbagbo est venu se racheter"

Gbagbo et Compaoré ont eu un nouveau tête-à tête à Bobo la
semaine passée. On ne peut que s’en réjouir. Après Accra, il n’y
avait rien eu de concret et il a fallu que le chef de l’Etat ivoirien
vienne au Burkina pour que chacun ait la paix. Par cette visite,
Gbagbo est venu se racheter parce qu’il a toujours accusé le
président Compaoré d’être de concert avec les Forces
nouvelles. Quelque part, il reconnaît que ce qu’il disait n’est pas
vrai. A partir du moment où Compaoré et Gbagbo peuvent se
rencontrer, c’est déjà bien. Mais le fait que rien de concret n’a été
décidé après cette visite est aussi bizarre. Peut-être que chacun
garde sa position. Et le problème ivoirien n’est pas prêt d’être
réglé.

Docteur Sou (Hôpital Sanou Souro) : "La xénophobie ne peut
pas finir du jour au lendemain"

La présence de Gbagbo au Burkina peut s’expliquer par le fait
que le président ivoirien veut réchauffer les liens entre son pays
et le Burkina. Si cela se passe dans la franchise, les objectifs
recherchés peuvent être atteints. En Côte d’Ivoire, Laurent
Gbagbo ne maîtrise pas la situation et beaucoup de choses se
passent à son insu. La vraie question, c’est de savoir si la
sincérité existe entre Compaoré et Gbagbo. Est-ce que ce ne
sont pas des mots diplomatiques qu’on vient chaque fois servir
aux gens. Le problème de la xénophobie est très sérieux et ne
peut pas finir du jour au lendemain même si Gbagbo est venu
au Burkina.

Valentin Koudougou : "C’est une rencontre de plus"

Le voyage du président ivoirien au Burkina est appréciable
mais les mots doivent être accompagnés d’actes concrets. Nos
compatriotes en Côte d’Ivoire continuent de souffrir et beaucoup
reste à faire. Rien n’est fait et cette rencontre est une de plus et
ne peut véritablement éclaircir le ciel entre Ouagadougou et
Abidjan. Ce voyage de Gbagbo est une façon de venir s’excuser
auprès des autorités burkinabè qu’il a de tout temps accusées
de soutenir la rébellion ivoirienne. De la manière dont nous
sommes restés calmes lors de cette visite démontre notre
pacifisme. Ce n’est pas évident que Compaoré puisse
bénéficier d’une telle attitude de la part des Ivoiriens s’il se rend
en Côte d’Ivoire actuellement. Nous n’avons pas les mêmes
mentalités.

Idrissa Sawadogo : "Rien ne changera"

J’ai fait 20 ans en Côte d’Ivoire et je ne suis pas content de la
venue de Gbagbo au Burkina. Les Ivoiriens nous maltraitaient et
j’étais obligé de rentrer. Tout ce que le président ivoirien est
venu dire ici, une fois de retour chez lui, il fera le contraire et
même pire.
Rien ne changera. Actuellement, on continue de chasser les
Burkinabè. Et la vérité est bonne à dire. Je ne suis pas content et
je sais que si Blaise se rend aujourd’hui en Côte d’Ivoire, les
gens risquent de le guetter pour crier sur lui. S’il ne tenait qu’à
moi, et si ce n’était pas à cause du respect pour le président du
Faso, nous allions nous mobiliser pour aller lapider Laurent
Gbagbo. C’est un assassin et je suis et demeure indigné par
rapport à cette visite.

Propos recueillis par Ousmane Pié Ouattara
Le Pays

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