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Transparence dans les industries extractives : Le contenu du 4e rapport du Burkina présenté aux populations de Batié

Publié le mardi 14 avril 2015 à 23h00min

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Transparence dans les industries extractives : Le contenu du 4e rapport du Burkina présenté aux populations de Batié

Depuis son adhésion au processus ITIE (Initiative pour la transparence dans les industries extractives), le Burkina produit chaque année un rapport de conciliation. Afin de permettre aux acteurs intéressés par la gestion du secteur minier d’être informés sur le contenu de ce document et de se l’approprier, des ateliers de dissémination sont organisés après la publication de chaque rapport. Ce 8 avril 2015, l’équipe chargée de la dissémination du 4e rapport était dans la commune de Batié. Responsables de l’administration déconcentrée et décentralisée, représentants des organisations de la société civile ont pu s’imprégner du contenu dudit document. On retiendra qu’environ 186 milliards sont entrés dans les caisses de l’Etat.

L’équipe chargée de la dissémination est composée de cadres du secrétariat permanent de l’ITIE-BF, de représentants de la société civile membres du comité de pilotage, d’un représentant du ministère de l’environnement et d’un représentant du ministère en charge des mines. A Batié, la question semble intéresser les différents acteurs. Une quarantaine de participants issus d’OSC (associations de femmes, de jeunes, de chasseurs…), de structures déconcentrées (force de défense et de sécurité, direction des impôts, de l’éducation, douane…) et décentralisées (membres de la délégation spéciale). Tous étaient aussi intéressés les uns que les autres, au regard du nombre et de la nature des questions.
De la présentation des membres de l’équipe de dissémination, l’on retiendra que l’ITIE qui est une norme qui veut s’assurer du respect des flux de paiement des sociétés minières. Depuis son adhésion au processus de l’ITIE en 2009, le Burkina a produit quatre rapports dont celui (rapport 2012) présenté à Batié dans la province du Noumbiel.

Informer les acteurs locaux sur les recettes issues de l’activité minière

Faut-il le rappeler, l’ITIE repose sur deux principaux mécanismes :
- la publication régulière de données crédibles de paiements versés au gouvernement par les entreprises extractives et les recettes de ces gouvernements avec en prime un rapprochement effectué par des sources indépendantes ;
- le développement d’un mécanisme de surveillance multi-acteurs qui assure la mise en œuvre efficace du processus dans les délais impartis, et favorise et encourage les débats publics sur les dépenses à partir des recettes issues des industries extractives.
L’atelier de Batié avait donc pour objectifs d’informer les acteurs locaux sur les paiements et recettes de l’industrie extractive, les transferts internationaux et les déclarations unilatérales des sociétés minières contenues dans le rapport ITIE 2012 ; familiariser les communautés à la recherche d’informations sur la gestion du secteur extractif ; partager les informations sur l’exploitation minières au Burkina et les expériences de la coalition internationale Publiez ce que vous payez.

Plus de 190 milliards payés par les sociétés minières

Le rapport 2012 du Burkina a été adopté le 22 décembre 2014 par le comité de pilotage et publié le 29 décembre de la même année. Il a été élaboré par un cabinet privé d’Angleterre dénommé Moores Stephens sur la base de la norme ITIE. Il a pris en compte 26 sociétés minières dont les paiements représentent 98,75% de toute la contribution du secteur minier au budget de l’Etat. En plus de ces sociétés, 256 autres exercent dans le secteur dans notre pays dont l’ensemble des paiements ne représentent que 1,25% de la contribution totale des sociétés minières au budget de l’Etat.
Ainsi, on note que pour l’exercice 2012, les montants payés par les sociétés minières à l’Etat burkinabè s’élèvent à 190 757 765 392 francs CFA. Sur ce montant, 186 844 875 890 francs sont effectivement entrés dans les caisses du gouvernement, 2 725 204 741 FCFA ont été payés par les sociétés minières au compte des paiements sociaux et 1 187 684 761 FCFA ont été déposés par les sociétés minières dans les banques du Burkina au titre du Fonds de réhabilitation de l’environnement.

494 millions aux collectivités locales

Au titre de la taxe superficiaire, les communes impactées par l’activité minière ont perçu 494 031 000 FCFA pour l’année 2012 contre 86 488 000 en 2011.
La région du Sud-ouest a reçu 5, 7 millions de francs CFA.

Les questions et commentaires des participants ont porté essentiellement sur : le contrôle de la production minière, la « générosité » du code minier burkinabè, les écarts dans les déclarations de paiements et de recettes, les conditions d’adhésion à l’ITIE, la taxe superficiaire et sa clé de répartition, la réhabilitation des sites en fin d’exercice… A toutes ces préoccupations, les animateurs ont apporté des éléments de réponse qui ont plus ou moins convaincu les auteurs des questions.

Plus de 200 millions non conciliés

Le rapport précise que les sociétés minières ont effectivement payé 184 204 265 374 de francs CFA, mais l’Etat burkinabè a perçu 184 426 333 588 de francs CFA. Soit un écart de 222 068 214 francs. « Cet écart s’explique par l’absence de quittances de vérification de certains montants et deux sociétés minières qui n’ont pas soumis de détail de leur paiement », a expliqué Sidiki Guiré, le chargé du rapport.
Quant à la question du contrôle de la production, Marc Dabiré, représentant du ministère des mines, a précisé que des équipes du ministère sont toujours présentes au moment de la coulée. Sans oublier la brigade anti-fraude de l’or qui fait son travail.

Moussa Diallo
Lefaso.net

Propos de quelques participants

Yelkabo Somé, Ampella mining : « J’invite les populations riveraines à aller à l’information »
Apparemment les populations ne savaient même pas que la société paie des taxes dont une partie revient à la commune. Il faut des rencontres comme ça pour permettre aux populations de savoir que nous payons des taxes. Lors de nos rencontres, les maires nous disent que les sociétés minières ne font rien pour eux, alors que les sociétés sont bien à jour de leur cahier de charges. A partir de cette rencontre, les populations vont comprendre que les sociétés font beaucoup pour les communautés. J’invite donc les populations riveraines à mieux s’organiser et aller à l’information.
Il faudrait que les autorités municipales disent aux populations que les sociétés minières sont à jour de leur cahier de charges et que c’est de leur rôle aussi d’accompagner ces mines-là qui constituent des sources d’emplois et permettent de booster le développement de leur commune, plutôt que de cacher l’information et mettre la population sur le dos des mines. Ça permettra de réduire les conflits entre les populations et les sociétés minières comme on en voit ces derniers temps.

Kambiré Da Pauline, coordinatrice des femmes de Batié : « Il y a beaucoup de choses qu’on ignorait »
Il y a beaucoup de choses qu’on ignorait. Ampella mining nous disait qu’elle contribuait pour la commune, mais on ne croyait pas. Maintenant, on a su et on va prendre acte et chercher à savoir où rentre cet argent et qu’est-ce qu’on fait avec. Cette rencontre est donc la bienvenue.
On se plaignait que Ampella ne fait rien pour nous, on disait que la mine vient extraire notre or et elle ne nous aide pas à avoir le courant, à aménager nos voies… Maintenant, on a compris que ce n’est pas leur travail. On sait qu’il contribue au budget communal, c’est déjà une grande chose pour nous. Mais, nous voudrions demander à la mine de penser aux femmes de la localité pour ce qui concerne les emplois parce qu’il n’y a plus d’emplois pour femmes et d’emplois pour hommes. Nous les femmes aussi, nous pouvons travailler à Ampella mining.

Issa Djiguemdé, directeur provincial des impôts du Noumbiel : « Ce qui reversé aux communes est insuffisant »
Il faut saluer cette mission de l’ITIE. A travers leur rapport, on a constaté qu’un travail est fait au niveau des entreprises minières. A travers ce rapport, on constate qu’il y a des informations qui sont données aux différentes populations et ça permet d’avoir une idée sur le fonctionnement des entreprises minières et en particulier sur les activités de Ampella mining qui opère dans notre province.
Aussi, en termes d’impôts et taxes, il faut dire que beaucoup est fait au niveau du budget national et au niveau du budget des collectivités locales. Pour les collectivités locales, je veux parler de la taxe superficiaire qui est versée au niveau du ministère des mines et une partie est reversée au niveau des collectivités locales en tenant compte des différentes communes impactées par l’activité minière de la société.
Cette taxe est effectivement reversée au niveau des communes chaque année. Mais, les maires ne vont pas très souvent à l’information. Au niveau déconcentré, c’est la direction du budget qui fait la répartition au niveau de chaque commune. D’ailleurs, le rapport de l’ITIE fait ressortir que dans la région du Sud-Ouest, toutes les communes concernées ont reçu la taxe superficiaire depuis que l’entreprise minière est là. Les populations culpabilisent les entreprises minières pourtant, elles sont dans leur droit, elles reversent leurs taxes normalement. Aujourd’hui, c’était l’occasion pour les populations de savoir que toutes les taxes sont reversées conformément à la législation burkinabè.

Mais, je pense que ce qui reversé aux communes est insuffisant. Il faut permettre aux communes d’engranger plus. Il faut peut-être demander au ministère des mines d’augmenter les taux alloués aux collectivités locales. Au lieu de 20%, il faut passer à 50% pour permettre aux collectivités de bénéficier plus. Ça va alimenter les budgets des collectivités et ces ressources sont utilisées pour les investissements dans ces communes.
Je remercie la mission de l’ITIE d’être venue nous informer et je souhaite que ce cadre de concertation continue. Le communicateur a parlé de mini-ITIE dans les communes, j’espère que ça va voir le jour, elles seront des relais au niveau local.

Propos recueillis par Moussa Diallo
Lefaso.net

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