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Cinéma africain : affronter, vaille que vaille, le numérique !

Publié le vendredi 6 mars 2015 à 23h47min

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Cinéma africain : affronter, vaille que vaille, le numérique !

« Cinéma africain : production, diffusion à l’ère du numérique ». Tel était le thème général autour duquel les professionnels se sont penchés, les 4 et 5 mars, via plusieurs sous-thèmes. Ce colloque qui a été présidé par le premier responsable du Conseil national de la transition (CNT) et parrainé par le ministre de la culture et du tourisme a été sanctionné par des « actes forts » à savoir, des recommandations et résolution.

Selon les professionnels, le numérique s’est imposé dans tous les domaines. Et la question du numérique et ses enjeux pour le cinéma et l’audiovisuel africain ont été posés depuis l’année 1999 sous divers angles à l’occasion des colloques organisés aux différentes éditions du FESPACO. Ainsi, la 16ème édition tenue en 1999 avait pour thème « Cinéma et circuits de diffusion en Afrique », tandis que l’édition 2001 traitait du thème « Cinéma et nouvelles technologies ». En 2011, le FESPACO a jeté le regard sur le « Cinéma africain et marchés ». Selon les professionnels, depuis les années 2000, la technologie numérique a incontestablement bouleversé la pratique cinématographique et audiovisuelle en Afrique.

« Le numérique est un atout certain mais aussi faut-il le connaître, le maîtrise et l’utiliser à bon escient », a campé à la cérémonie d’ouverture du colloque, le secrétaire général de la fédération panafricaine des cinéastes (FEPACI), Cheik Omar Sissoko.

Il en veut pour preuve, les manipulations faites des technologies nouvelles par les jeunes. « Regardez même au niveau de la jeunesse qui utilise le numérique, sans avoir fait une seconde d’apprentissage, de renforcement des capacités. Nous avons des difficultés pour parler de l’Afrique… L’Afrique a besoin d’images », a-t-il situé. Pour le secrétaire général de la FEPACI, l’Afrique ne doit pas être absente de la grande conversation que les humains ont engagée entre eux. L’image est, convainc-t-il, capitale pour pouvoir emmener l’Afrique à être présente dans le concert des nations.

A en croire M. Sissoko, plusieurs avantages sont liés au « basculement » dans le numérique dont le coût accessible et la possibilité désormais de pouvoir réaliser un film sans recours à l’extérieur.
La FEPACI, annonce-t-il, travaille donc pour la création d’une école de haut niveau du numérique dans toutes les régions de l’Afrique. « Il faut absolument former les jeunes ; c’est notre grande préoccupation. Il faut ensuite avoir une structure de post-production pour le filmage, l’étalonnage, le montage, les effets spéciaux… dans une région, et par région. Avec le numérique, on peut le faire », a-t-il développé avant d’ajouter que cela va aussi créer de l’emploi et développer des infrastructures commerciales de cinéma avec le numérique. « Le cinéma africain a vécu avec le guichet de financement extérieur », a rappelé le cinéaste, laissant entendre qu’il n’y a plus de fonds et qu’il faut, par conséquence, réfléchir pour faire face à la situation.
Aller au numérique est, relève-t-il, d’autant nécessaire, qu’à partir de juin 2015, les télévisions vont passer à cette technologie.
Pour le directeur général du FESPACO, Ardiouma Soma, le colloque est devenu un évènement majeur, voire incontournable de ce rendez-vous biennal. Abordant la question du numérique, il a relevé que dans sa dynamique évolutive, le FESPACO ne pouvait que s’inscrire dans l’ère du temps.

Le numérique n’est plus une option, c’est une nécessité !

Le directeur du cabinet du ministre de la culture et du tourisme, Mathias Zantéa, représentant son ministre à l’ouverture du colloque a, pour sa part, et avant d’entrer dans le vif de son sujet à proprement dit, rendu un vibrant hommage aux invités et « illustres » professionnels du septième art africain. Pour M. Zantéa, franchir le pas du numérique est un impératif pour les cinéastes africains, s’ils veulent toujours exister.

A l’en croire, les technologies de l’information et de la communication constituent le fondement de la société moderne du savoir. La production numérique doit donner plus d’opportunités de conquérir encore plus de marché du cinéma. « Pour être désormais compétitives, les œuvres des créateurs doivent désormais s’inscrire dans l’ère du numérique », commente le directeur de cabinet. Soulignant qu’il appartient aux Etats, conformément à l’esprit des conventions internationales y relatives, de créer les conditions idoines à l’épanouissement du septième art.
Pour le président du CNT, la révolution numérique se vit aujourd’hui dans tous les domaines, y compris le cinéma et l’Afrique ne doit pas la rater. « On a raté certaines révolutions mais celle-là, si nous la ratons, aussi bien sur le plan culturel que celui de la gouvernance, nous serons totalement anéanti s », a affirmé le président du CNT, Moumina Chérif Sy. Aujourd’hui, poursuit-il, le cinéma africain n’a pas d’autres choix que de s’inscrire dans la dynamique. M. Sy se réjouit donc que certains pays aient déjà pris le pas en la matière, à l’image du Nigeria et même au Burkina où il y a des cinéastes qui, depuis un certain nombre d’années, se sont engagés à travailler dans le numérique. Il pense qu’avec l’engagement des acteurs, y compris la FEPACI, cela va aller très vite.

La nécessité d’œuvrer au suivi des décisions et engagements

Clément Désiré Conombo, chargé de missions du ministre de la culture et du tourisme, a affirmé que le rapport final témoigne de la qualité du travail abattu par les professionnels. Il s’est montré reconnaissant aux « éminents experts » qui ont traité les différents sous-thèmes. Pour M. Conombo, des initiatives doivent être prises en termes de politiques et de financement par les pouvoirs publics et soutenues par le secteur privé intervenants dans le domaine.
C’est pourquoi a-t-il interpellé les professionnels à songer à « réveiller » les consciences des politiques sur les recommandations, en les bousculant. Et ce, dans un dispositif global de suivi des différents actes et des engagements qui sont pris.
Au terme du diagnostic des six sous-thèmes, les participants ont pris des actes forts (voir encadré) avant de se donner rendez-vous pour la 25ème édition.

Oumar L. OUEDRAOGO
Lefaso.net

Les Recommandations et Résolution du Colloque :

-  Recommandation générale
Les professionnels du cinéma et de l’audiovisuel à l’issue du colloque international sur le thème du « Cinéma africain : production et diffusion à l’ère du numérique » tenu les 4 et 5 mars 2015 dans le cadre de la 24e édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO)

-  Considérant que le colloque international constitue un cadre idéal d’échange et de partage d’expérience sur les préoccupations des professionnels des métiers du cinéma ;
-  Considérant que les communications et les échanges constituent une source de documentation utile ;
-  Considérant la volonté affichée des acteurs de renforcer les actions communes en faveur de la promotion du secteur du cinéma et de l’audiovisuel.

Recommandent :

1. de mettre en place un comité scientifique pour le choix du thème, l’animation du colloque, la mutualisation des réflexions et la publication des actes du colloque ;
2. de faire un état des lieux sur le cinéma africain, actualisé à chaque édition du FESPACO, afin de constituer une banque de données fiables ;
3. de mettre en place un mécanisme de suivi des résolutions et des recommandations adoptées à l’unanimité par les participants au colloque.

Ouagadougou, le 5 mars 2015

- Recommandation à la FEPACI

Considérant la décision ex/cl/déc.69 (iii) du Conseil exécutif de l’Union Africaine adoptée à Maputo le 8 juillet 2003 sur la création d’une commission africaine de l’audiovisuel et du cinéma et d’un fonds de promotion de l’industrie du cinéma et des programmes de télévision en Afrique ;
Considérant la Déclaration de la Fédération panafricaine des cinéastes (FEPACI) relative à la mise en place du Fonds panafricain du cinéma et de l’audiovisuel.
Les professionnels du cinéma et de l’audiovisuel à l’issue du colloque international sur le thème du « Cinéma africain : production et diffusion à l’ère du numérique » tenu les 4 et 5 mars 2015 dans le cadre de la 24e édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO)
Recommandent à la Fédération panafricaine des cinéastes (FEPACI) :
1.de poursuivre le plaidoyer et le lobbying auprès des Etats pour la mise en place effective du Fonds de promotion de l’industrie du cinéma et des programmes de télévision en Afrique ;
2.d’amener les Etats à œuvrer concrètement pour la numérisation des salles de cinéma et la sauvegarde du patrimoine cinématographique et audiovisuel africain.

Ouagadougou, le 5 mars 2015

- Résolution sur la capitalisation des actes du Colloque international sur la production et la diffusion du cinéma africain à l’ère du numérique.

Les professionnels du métier à l’issue du colloque international de la 24e édition du Fespaco :
-  Conscients du rôle prépondérant de la production numérique dans la Société mondiale de l’information et des savoirs ;
-  Prenant acte des recommandations formulées par les instances dirigeantes du FESPACO et de la FEPACI pour une meilleure appropriation de l’outil numérique afin de booster le secteur de l’audiovisuel ;
-  Réaffirmant la nécessité d’adoption de politiques nationales incitatives en matière de développement du secteur du cinéma ;
-  Déplorant l’étroitesse du marché local due aux facteurs socioculturels et économiques ;
-  Souhaitant vivement une action commune des Etats africains pour un dispositif harmonisé en matière de circulation des biens et services culturels au sein des espaces communautaires en vue de la distribution et de la diffusion des œuvres audiovisuelles ;
-  Exhortant à la stricte application des instruments internationaux ratifiés par les Etats africains en matière de promotion des expressions culturelles ;
Les professionnels du cinéma et de l’audiovisuel à l’issue du colloque international sur le thème du « Cinéma africain : production et diffusion à l’ère du numérique » tenu les 4 et 5 mars 2015 dans le cadre de la 24e édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO) Ont adopté la résolution suivante :
-  Contribuer à une véritable culture du numérique pour garantir la qualité des œuvres audiovisuelles et inscrire résolument les productions africaines en la matière dans les circuits de diffusion au niveau régional, continental et international ;
-  Œuvrer au renforcement du rôle et de la place des productions numériques dans la Société mondiale de l’information et des savoirs ;
-  Accompagner les initiatives des pouvoirs publics et des organismes privés dans le développement des productions numériques ;
-  Veiller, outre la numérisation, à la conservation des productions en argentique afin de sauvegarder les archives et soutenir par ailleurs la recherche en la matière ;
-  Créer des synergies en mutualisant les expériences en vue d’un partenariat fructueux pour la co-production afin d’aller à la conquête des marchés ;
-  Exhorter les Etats à mettre en place des mesures incitatives pour la production, la distribution et la diffusion des œuvres cinématographiques ;
-  Veiller à la mise place par les Etats africains de législations spécifiques à l’industrie du cinéma et de l’audiovisuel ;
-  Appeler à la réhabilitation et à l’équipement des salles de cinéma, le cas échéant, construire des espaces de diffusion de films dans les centres urbains, et semi-urbain ;
-  Mettre en place un dispositif efficace de protection et de gestion du droit d’auteur.

Ouagadougou, le 5 mars 2015

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