Suspension des poulets importés des Etats-Unis d’Amérique au Ghana : une décision d’anticipation salutaire !
Le Ghana a décidé de suspendre l’importation des poulets surgelés en provenance des Etats-Unis d’Amérique. Cette suspension fait suite à un communiqué de la Food and Drug Authority (FDA), l’organisme américain chargé de la régulation et du contrôle alimentaire, ayant annoncé qu’une certaine quantité de poulets en exportation vers des pays de l’Afrique de l’Ouest contient des traces d’arsenic. Les autorités ghanéennes précisent toutefois que les doses d’arsenic contenues dans les poulets sont largement insuffisantes pour causer des dommages à la vie humaine. Cependant, ces autorités soulignent qu’il aurait été opportun d’étendre la mesure d’interdiction aux produits issus de ces poulets.
L’arsenic est un produit très toxique que l’on retrouve dans les eaux souterraines et les aliments de certains pays (l’Argentine, le Bangladesh, le Chili, la Chine, les États-Unis d’Amérique, l’Inde et le Mexique). Selon l’OMS, les personnes exposées sur une longue durée (cinq ans en moyenne) peuvent souffrir de cancers et des lésions cutanées. Les sources d’exposition sont l’eau de boisson, les cultures irriguées par de l’eau contaminée et les aliments préparés avec ces eaux. Dans l’alimentation, ce produit peut se retrouver dans des poissons, crustacés et coquillages, de la volaille, des produits laitiers et des céréales ; mais l’exposition est alors en général plus faible qu’avec les eaux souterraines contaminées.
L’arsenic est ajouté au poulet américain surgelé en raison de ses vertus esthétiques. En effet, l’arsenic donne au poulet son air de bonne santé (rose vif) et dodue.
Cette annonce est quasiment passé inaperçu aux yeux de l’opinion publique burkinabè. Elle a retenu notre attention et nous souhaitons prolonger légèrement la réflexion sur ce « fait divers ». Notre réflexion s’orientera sur l’opportunité de cette décision et les moyens de prévention des aliments dangereux ou douteux pour la santé.
L’opportunité de la décision ghanéenne
La décision des autorités du Ghana s’inscrit dans ce qu’il est convenu de nommer en termes très précis la mi- anticipation d’un risque sanitaire. La mi- anticipation est un modèle qui repose sur la certitude scientifique. L’on est en face d’une situation de mi- anticipation dans l’hypothèse où l’Etat ou un autre sujet a une connaissance certaine « d’évènements futurs ou à la connaissance des effets susceptibles d’être engendrés par des évènements en cours ou des activités à risques en cours ». Le principe de prévention sert de pilier normatif de la mi- anticipation sanitaire.
Dans le cas d’espèce, il est connu avec certitude que la consommation d’un produit contenant de l’arsenic est extrêmement dangereuse pour la santé. Sauf qu’ici, les quantités d’arsenic sont largement en deçà des quantités susceptibles d’être nocives pour la santé. Pourtant, autant il est bon de savoir que la consommation importante de poulets contenant de l’arsenic peut provoquer des dommages à la santé :
« (…) the government agency finally admitted that chicken meat that is sold to American consumers contains arsenic, a cancer causing chemical that can kill people when consumed in high doses”
Les autorités ghanéennes ont pris conscience que la situation qu’elles ont à gérer est fondée sur des certitudes scientifiques quant aux risques pour la santé. On est en pareille hypothèse devant une situation d’anticipation du risque sanitaire homogène. La « mi- anticipation homogène », selon M.M. MBENGUE, « s’appuie sur l’homogénéité de la connaissance par rapport à un risque. Les preuves scientifiques quant à la réalité du risque environnemental ou sanitaire sont disponibles ». La conséquence normale serait la prise de mesure sous forme d’interdiction et de manière permanente. Il suffirait pour cela de lire l’article 5 :7 de l’accord Sanitaire et Phytosanitaire de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) a contrario :
« Dans les cas où les preuves scientifiques pertinentes sont insuffisantes, un Membre (en l’occurrence ici le Ghana) pourra provisoirement (c’est nous qui soulignons) adopter des mesures sanitaires et phytosanitaire sur la base des renseignements pertinents disponibles (…) ».
Dans le cas-ci, les preuves scientifiques sur la dangerosité de l’arsenic contenu dans le poulet sont bien établies suivant les travaux synthétisés au sein de l’OMS. Le Ghana aurait dû prendre une décision ferme d’interdiction du poulet surgelé américain. Cette décision de suspension, qui est par nature provisoire, ne s’explique que sous l’angle de l’opportunité. On imagine bien qu’en interdisant le poulet de l’oncle SAM, ce pays risquerait d’être confronté à des difficultés dans ses relations avec ce géant du monde des affaires. En pesant le pour et le contre, les autorités ghanéennes prennent une décision politiquement correcte et économiquement avantageuse. La part de marché de poulets importés étant fermé pour un temps, les producteurs ghanéens doivent en profiter au maximum.
Il reste que cette décision laisse voir des incohérences dans le processus de décision au niveau Ouest Africain, notamment sur des questions portant sur la sécurité alimentaire.
Une décision révélatrice de l’attentisme des organes communautaires
Les autorités américaines ont révélé que les poulets surgelés contenant des traces d’arsenic sont commercialisés en Afrique de l’Ouest. Il aurait été souhaitable que la décision à adopter soit prise par les organes communautaires en l’occurrence la CEDEAO.
LA CEDEAO, en adoptant, le règlement C/REG.21/11/10 portant harmonisation du cadre structurel et des règles opérationnelles en matière de sécurité sanitaire des végétaux, des animaux et des aliments a pour objectif, entre autre, « la protection sanitaire des produits alimentaires, y compris les produits issus des biotechnologies modernes » (article 2). Pour ce faire, la CEDEAO définit les règles d’harmonisation des politiques et mécanismes de protection sanitaire des produits alimentaires. Elle met en place un comité régional de sécurité sanitaire des végétaux, des animaux et des aliments ayant des représentations au sein de chaque Etat (article 13 et ss) et un mécanisme d’expertise et de coopération qui s’appuie sur les réseaux et les observatoires nationaux (article 17 et ss).
Cette architecture institutionnelle et normative devait être le cadre des décisions les plus importantes en ce qui concerne la protection sanitaire des produits alimentaires. La cohérence entre le niveau d’information nationale et l’opérationnalité communautaire aurait pu servir de meilleure protection et mettrait à l’abri les Etats membres face à des décisions désavantageuses de certains organisations ou Etats comme la Chine, l’Inde, l’Europe, les USA ou encore le Brésil. Il est urgent, à partir du scandale des boissons périmées au Burkina Faso et du « poulet à l’arsenic » au Ghana, d’opérationnaliser les mécanismes d’alerte et les mécanismes d’évaluation des risques sanitaires en vue de garantir aux populations le droit à une alimentation saine.
Mais en attendant que la CEDEAO sorte de sa léthargie, chaque Etat Ouest africain doit prendre des dispositifs sécuritaires adéquats en ce qui concerne la production, la commercialisation des aliments importés. Le contrôle ne devra pas non plus manquer de rigueur pour les aliments produits sur place. Les procédures et mécanismes de traçabilité des produits doivent être mis à jour.
Le Burkina Faso doit impérativement se saisir de ces faits pour opérer une meilleure protection de ses consommateurs face aux produits alimentaires douteux ou de mauvaise qualité. La récente affaire en cours révèle les incohérences et insuffisances de la législation en la matière. La déclaration de l’ABCE (l’Association Burkinabè des Consommateurs des services de communication Electronique, http://www.lefaso.net/spip.php?article63472) et les nombreux articles sur le sujet des boissons périmées révèlent une nécessité de révision des textes portant protection des consommateurs.
Enfin, il convient d’insister aussi sur la responsabilité de chaque citoyen sur les produits alimentaires que nous choisissons de consommer. La pauvreté ne doit pas être une excuse pour toute sorte de choix préjudiciables à notre santé. A défaut de pouvoir se doter de tous les moyens efficaces pour contrôler tous les produits alimentaires importés d’origine, il appartient aux gouvernants de stimuler la consommation des produits locaux, qui sont plus aisés à contrôler et offrent des gages de développement local.
Yda Alexis NAGALO
cajeburkina@yahoo.fr
Cadre d’Action des Juristes de l’Environnement / Burkina Faso
Vos commentaires
1. Le 4 mars 2015 à 00:07, par Armand En réponse à : Suspension des poulets importés des Etats-Unique d’Amérique au Ghana : une décision d’anticipation salutaire !
Avec le succulent flambé de Ouaga, qui va aller acheter des poulets surgelés sans goût ?
Je zappe...
2. Le 4 mars 2015 à 07:41, par TIEBANA En réponse à : Suspension des poulets importés des Etats-Unis d’Amérique au Ghana : une décision d’anticipation salutaire !
Merci à Mr NAGALO d’attirer à traves cet article notre attention sur certains produits que nous importons et qui s’avèrent impropres à toute consommation humaine, l’Afrique étant devenue "une poubelle" pour des individus peu scrupuleux ne jurant que sur le fric.
Gouverner, c’est prévoir dit-on. Les autorités et la population du Burkina Faso gagneraient à être très regardant sur ces viandes extra africaines notamment les poulets de chair importés du Brésil, des pays de l’Est ou des Etats Unis qui nous empoisonnent.
En matière d’élevage en général et de l’aviculture en particulier, le Burkina Faso dispose d’un potentiel insoupçonné qu’il faut juste encadrer et qui pourra engendrer du travail pour une tranche non négligeable pour notre jeunesse confrontée de plein fouet par le problème de chômage.
Grace à des décisions politiques responsables, des pays comme Cameroun et le Bénin ont réussi à mettre en place de véritables usines avicoles pourvoyeuses d’emplois qui les met aujourd’hui à l’abris de ces importations de poulets de chairs aux hormones, véritables poisons.
3. Le 4 mars 2015 à 07:54, par future maman En réponse à : Suspension des poulets importés des Etats-Unis d’Amérique au Ghana : une décision d’anticipation salutaire !
Envoyez ça ici...nous consommons tous ce que les autres ne veulent pas ( boissons, poulets, matelas pourris, vêtements et couverts de table douteux). Tant que c’est "France aurevoir"...c’est de très bonne qualité et nos chèrs Bissa et autres Obouf vont déverser cette poubelle dans notre Faso.
4. Le 4 mars 2015 à 09:17, par justice En réponse à : Suspension des poulets importés des Etats-Unis d’Amérique au Ghana : une décision d’anticipation salutaire !
Et le poisson qu’on mange est -il de la bonne qualité ? Surtout que cela provient de la Chine et ya jamais eu de rupture et ca vient toujour bien congeler. Suis septique quant a la qualité
5. Le 4 mars 2015 à 11:01, par JAMES KENNY En réponse à : Suspension des poulets importés des Etats-Unis d’Amérique au Ghana : une décision d’anticipation salutaire !
Merci,nous serons ravi le jour ou nos autorités vont prendre de telles mesures. Pour ceux qui s’inquiète de la qualité du poisson gélé, posez vous la question, est il toujours gelé depuis le port jusqu’a Ouaga ? ensuite de Ouaga vers nos provinces dans quel condition est il transporté ?
J’AI vu du poisson congelé transporté dans la soute d’un car en direction de KOUDOUGOU. pour les autres villes je doute que ce soit différent.
6. Le 4 mars 2015 à 11:11 En réponse à : Suspension des poulets importés des Etats-Unis d’Amérique au Ghana : une décision d’anticipation salutaire !
Que dire des produits importés dans l’agroalimentaire que nous consommons et dont la mention produit fabriquée avec des ingrédients issus de culture OGM n’est pas mentionnée. La loi actuelle au Burkina Faso ne donne pas obligation de mettre sur l’étiquette que c’est avec OGM pour les produits dérivés. Donc, dans nos boutiques, on peut très bien trouver des gâteaux et autres produits provenant des 4 coins du monde avec des ingrédients issu d’OGM. Nous sommes devenus la poubelle du monde et, nous sommes les cobayes sans le savoir des OGM.
7. Le 4 mars 2015 à 11:27 En réponse à : Suspension des poulets importés des Etats-Unis d’Amérique au Ghana : une décision d’anticipation salutaire !
Au Forumiste N° 4
Le poisson élevé en chine( ou ailleurs c’est douteux aussi) n’est pas de bonne qualité.
Saviez vous que les tilapia sont nourris aux excréments humains !! oui oui le bon tilapia là que tu adores bien , qu’il soit rouge ou gris !! et ce n’est qu’un exemple. je ne parle même pas des autres ingrédients qu’on leur donne pour grandir . Toi Lagui qui ne mange pas le porc saches que ces poissons là en raffolent !!
Mon conseil : moins vous mangez plus vous êtes en bonne santé !!
Le bon vieux tô avec sauces gombo, feuilles de baobab, voaga ....
Vous mangerez des arachides comme les bissas pour un max de protéines, jetez vos huiles frelatées et ruez vous sur le beurre de karité ( source de vitamine A , E , anti oxydant) il vous guérira vos ulcères - haricot et pois de terre, sésame .soutoumou....Nous avons tout - Bannissez le sucre qui vous pourri les dents et les vaisseaux : diabète et tension garantis !!
Le pire c’est que tout ce que je raconte là, vous le saviez déjà !!
8. Le 4 mars 2015 à 11:55 En réponse à : Suspension des poulets importés des Etats-Unis d’Amérique au Ghana : une décision d’anticipation salutaire !
@ future maman Mdrrrr donc nous nos ventres là c’est ventre d’autruche et puis des dépotoirs en même temps quoi...je comprends pourquoi certaines femmes accouchent des spécimens (enfants mal formés) quand tu regardes le bébé il donne l’impression de sortir d’un film de Alfred Hitchcock
9. Le 4 mars 2015 à 14:43 En réponse à : Suspension des poulets importés des Etats-Unis d’Amérique au Ghana : une décision d’anticipation salutaire !
Pertinente analyse, bravo ! Il faut absoluement que la CEDEAO sorte de sa dormance
10. Le 4 mars 2015 à 17:06, par le nabiga En réponse à : Suspension des poulets importés des Etats-Unis d’Amérique au Ghana : une décision d’anticipation salutaire !
Cool ça ! Si notre justice pouvait interdire l’importation des canettes et obliger le groupe obouf à mettre brafaso sur les rails ! On aura on moins du frais !!!
11. Le 10 mars 2015 à 15:34 En réponse à : Suspension des poulets importés des Etats-Unis d’Amérique au Ghana : une décision d’anticipation salutaire !
Dites nous si les tilapias et les daurades sont les mêmes parce qu’on en raffolent ici..voulez là ne coupez pas l’appétit des gens hein c’est important de préciser les choses djaaa ventre de nègre c’est vrai poubelle quoi karissaaa Eéh Dieu ..je vous dis à tous végétarien est mieux hoo