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Africains-Américains : la lutte continue

Publié le mercredi 9 février 2005 à 07h55min

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Après avoir émerveillé le monde entier par ses talents de danseur et de chanteur, Michael Jackson répond actuellement devant la justice américaine pour agression sexuelle sur mineur. Il risque vingt ans de prison s’il est reconnu coupable des chefs d’inculpation retenus contre lui.

Ce procès remet au tapis le sort presque invariable des vedettes africaines-américaines. Mike Tyson, O.J. Simpson, Puff Daddy, James Brown, etc, font partie de ceux qui ont fait à un moment ou à un autre, la "Une" de l’actualité judiciaire.

Les vedettes noires sont-elles particulièrement indisciplinées ou sont-elles victimes d’un système ?
A la vérité, les artistes et sportifs qui ont inscrit leur nom dans la rubrique "faits divers" des journaux et télévisions ne sont que la face visible de l’iceberg. Leur célébrité a contribué à la médiatisation de leur procès. Derrière les barreaux du Texas, de New York, de Géorgie, etc, la majorité de la population carcérale est noire.

Pays de tous les contrastes, visiblement l’Amérique l’est. Chacun peut y réaliser son rêve, mais c’est encore plus facile de le faire quand on est Blanc plutôt que Noir. Pour beaucoup d’Africains-Américains, le rêve américain c’est comme le gros lot au PMU’B, une cagnotte à laquelle ils rêvent, mais qu’ils ont rarement la chance de toucher, même dans le désordre.

Il a fallu attendre plus de deux siècles d’indépendance pour qu’un Noir se hisse dans les hautes sphères de décision en Amérique. Et c’est sous George W. Bush, l’homme des WASP (White anglo saxon protestants), mélange d’intégristes protestants et de défenseurs d’une Amérique blanche, que cela s’est passé.

D’abord avec Collin Powel comme Secrétaire d’Etat (3e personnage de l’Etat américain) et maintenant avec son successeur, la toute-puissante Condoleeza Rice. Mais les rares réussites individuelles n’ont pas encore rejailli sur l’ensemble de la communauté. Pire, certains de ceux qui ont réussi socialement ou matériellement s’en éloignent physiquement ou moralement. Les Noirs n’ont toujours pas un lobby puissant, à l’image des Juifs. La sollicitude à leur égard ne se manifeste qu’à l’approche des échéances électorales.

Au quotidien, beaucoup d’Africains-Américains souffrent de l’injustice du fait de leur couleur. L’exemple le plus emblématique et le plus connu aussi est celui d’Abu Jamal, qui croupit en prison depuis de longues années, accusé d’un meurtre dont les indices et les alibis plaident cependant en sa faveur. Pourtant, trop de crimes contre des Noirs restent impunis ou n’ont pas été sanctionnés à la hauteur de leur gravité. On se rappelle le cas de Rodney King, passé à tabac comme une bête par des policiers new-yorkais, sous l’objectif d’une caméra amateur.

Le jeune ressortissant guinéen, Boubacar Diallo, criblé de 48 balles parce que des policiers homicides ont interprété l’action de faire sortir un papier d’identité, comme une intention de dégainer. La procédure pour juger le meurtre dans des circonstances troubles, du Burkinabè Ousmane Zongo traîne toujours devant les tribunaux. On passe ces crimes par pertes et profits. Le Ku Klux Klan n’agit plus à visage découvert, mais une forme insidieuse de racisme anti-Noirs taraude l’Amérique.

Il est même à se demander si l’anti-négritude n’a pas toujours existé dans la culture occidentale. Leurs symboles bienheureux sont blancs, les symboles malheureux sont noirs. Le diable avec ses cornes est toujours représenté sous teinte noire et cette couleur symbolise le deuil. L’expansion de cette culture a contribué à fixer dans les esprits cette dichotomie : le blanc symbolise le bien, le noir est annonciateur de malheur. Mais les Blacks ne sont-ils pas pour quelque chose dans leur diabolisation ? L’image qu’offre l’Afrique, terre d’origine de tous les Noirs, n’est pas pour arranger les choses. L’Afrique des calamités et de la mendicité ne peut espérer pour sa diaspora, la dignité qu’elle ne peut accorder à ses résidents.

Un Américain blanc peut-il accorder du respect à son compatriote noir, quand il suit sur CNN le spectacle de guignol que le Togo est en train d’offrir gratuitement au monde ? On n’a plus besoin de payer un droit d’entrée au théâtre pour rire, le Togo est présentement un vaste théâtre gratis. Quelle fierté peut ressentir la diaspora noire à la vue d’un tel spectacle ? Même Rocambole serait jaloux du scénario mis en place pour la succession de Gnassingbé Eyadéma.

Il est regrettable que près de 40 ans après l’assassinat de Martin Luther King, le plus emblématique défenseur des droits de la communauté noire, son rêve de voir une égalité entre Noirs et Blancs d’Amérique ne soit pas encore réalisé. Une introspection chez les Africains-Américains s’impose, en vue de créer les conditions nécessaires pour se faire valoir. L’une des grandes leçons que l’Amérique a toujours donnée au monde est qu’on n’a jamais rien sans rien et que la lutte paie toujours.

Le Pays

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